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[PARTIE 1] Les mines englouties

[PARTIE 1] Les mines englouties Brandw10
Sam 6 Mai - 22:15

Il n'est pas très clair, le paysage à travers lequel vous progressez. Des heures et des heures de marche sur un terrain tantôt boueux, souvent glissant, où bourrasques et pluie diluvienne giflent vos visages et vous tétanisent de froid. Peut-être regrettez-vous d'avoir accepté cette mission : peut-être que contracter une pneumonie carabinée pour découvrir les tenants et aboutissants d'un mystère caverneux n'est pas un jeu qui en vaut la chandelle, et peut-être que tousser pour le restant de vos jours, voire même finir écrasés sous un éboulement ne sont pas des risques à prendre à la légère.

Toujours est-il que vous êtes là, tous les trois, à braver la tempête, trempés jusqu'aux os, sillonnant le sol perdant lentement mais sûrement de sa viscosité pour se changer, sous vos semelles imbibées, en roches tranchantes et hasardeuses. Loués soient les Esprits — ou votre guide, comme vous préférez ; vous arrivez au bout de vos peines !

Enfin, non. Ce n'est que le début. Après tout, votre trio est là pour inspecter cette mine, qui de prime abord semble laissée à l'abandon. Et à en juger par l'eau qui s'infiltre en début de ruisseau parmi les charriots, votre aventure s'annonce rafraichissante. Quelqu'un a pensé à prendre son maillot de bain ?
Lun 8 Mai - 21:38

Était-elle seulement une femme ? Au fond, son pouvoir ne reflétait que ce qu'elle pensait réellement être : un enfant pas tout à fait terminé dans le corps d'une adulte déterminée. Qui de Lillie ou du Général prenait le pas sur l'autre ? Elle arpentait les rues de la basse-ville de Xandrie, son corps frêle balloté par les flots déchaînés des âmes désoeuvrées. C'était un de ces jours de vide, qu'aucun avis de tempête n'avait su prévoir. Vagues à lames sur pensées submersibles. La Révolution n'avançait plus. Pire, les dissidents trépignaient de plus en plus. Elsbeth gardait son cap, mais la diplomatie ne suffisait pas à nourrir les esprits les plus affamés de vengeance. Que pouvait-elle y faire, elle, l'Opalienne exilée, la fille à papa apeurée, propulsée au rang d'espoir pour un peuple qui n'était pas le sien ?

Elle allait et venait, laissant traîner au bout de ses lignes auditives quelques hameçons, sans rien remonter que des racontars un peu fades. Elle interrogeait quelques passants au détour d'une ruelle mais n'apprenait rien de vraiment nouveau. Une mère, une de plus, pleurait le départ d'un fils pour une mine de myste. Un père, un de moins, n'était jamais revenu d'une expédition lointaine. Mais derrière chacune de ses histoires le joug d'Opale se dessinait en filigrane, appuyant sa perfide lame courte contre les gorges sanglotantes qui pleuraient ces récits. Lillie bouillonnait, sentait du fond de ses entrailles monter un cri gris qui s'évanouirait sous sa langue. Car au bout du poignard, c'était la main de son père qu'elle imaginait fermement resserrée.

La nuit était tombée. Les lanternes éparses projetaient sur la ville leur halo feutré, qui ne suffisait pas à contrer les ombres qui prenaient comme tous les soirs leurs quartiers à Xandrie. Les ruelles se parèrent de noir, se parfumèrent d'alcool bon marché et firent les yeux doux aux malfrats à peine déguisés. Plus d'un œil indiscret suivait maintenant les mouvements de la jeune fille aux cheveux roses. Lillie devrait bientôt choisir : regagner sa planque ou trouver un coin où reprendre son apparence d'adulte. Elle était sur le point de se dissimuler dans une impasse quand elle perçut les bribes d'une conversation qui la firent s'arrêter.

Devant la porte de service d'un débit de boissons, un homme et une femme parlaient à voix basse. Il était question d'une mine de myste, loin dans les Monts d'Argent, au-delà des frontières. Une mine que Lillie n'avait encore jamais visitée, mais de laquelle elle avait pu s'approcher en suivant un temps un groupe de mineurs réquisitionnés. Elle s'approcha lentement, feignant la tranquille déambulation d'une gamine des rues pour assouvir sa curiosité. La mine ne tournait plus. Éboulements. Inondations. Problèmes pour Opale. Opportunité pour Xandrie, pensa-t-elle immédiatement. Elle n'y accorda aucune pensée supplémentaire. Il était temps pour la Générale de la Révolution d'agir. Même si cela impliquait de partir un temps de la capitale.

- J'peux vous emmener, moi. Lança-t-elle en approchant. Il lui fallait un mensonge. Mon père a été réquisitionné là-bas, dans les Monts, et je l'avais suivi avant qu'on m'renvoie. Il paraît qu'il allait être bien payé, enfin, c'est ce que maman a dit. Mais on ne reçoit jamais les sous. Alors moi, j'veux aller le chercher. Si vous êtes jamais allés là-bas, c'est mieux que j'vienne parce que les routes moi j'les ai prises, et c'était pas super facile.

Elle ne savait pas si le mensonge de la gamine qu'elle avait prétendu être avait suffi à les convaincre, ou bien si ces aventuriers avaient décidé qu'un guide – peu importe ses raisons – leur serait de toute façon utile. Toujours était-il qu'elle avait quitté Xandrie en leur compagnie, chaudement équipée, et qu'elle avait maintenant toutes les peines du monde à progresser dans ces terres hostiles, dans ce cimetière d'espoirs. Elle avait filé son mensonge sur tout le trajet, évitant de s'étendre sur des détails qui la trahiraient. Mais les derniers jours avaient été bien trop compliqués pour son corps d'enfant.

Elle avait la mine en vue quand elle commença à sentir ses forces l'abandonner. Elle n'avait plus le choix. Il fallait qu'elle mène cette enquête à son terme. Elle ne prononça pas un mot. Elle ouvrit son sac, en sortit une tenue qui paraissait bien trop grande pour elle. Sans un regard vers ses compagnons, elle se déshabilla intégralement. Le froid lui mordait la peau. Un instant plus tard, sa silhouette nue était celle d'un escogriffe décharné, voûté. Ses vertèbres semblaient vouloir déchirer la peau de son dos. Elle se rhabilla et, la main au fond de son sac, elle attrapa son revolver qu'elle accrocha à sa ceinture.

- Désolée. J'ai menti. Dit-elle froidement à quelques pas de leur destination.
Mer 10 Mai - 12:28

Les mines englouties part. 1

Avec Elizawelle Flatterand et Lillie Moynihan



Une missive de la Guilde. C’était la première fois qu’il en recevait une. De ses fins doigts Lewën brisa le sceau ne montrant nulle impatience. Elizawelle lui avait expliqué comment cela fonctionnait : il suffisait de contacter la Guilde pour connaître les missions à pourvoir et s’y engager en s’y inscrivant en toute simplicité. Il ne pensait pas être contacté directement, lui qui n’avait aucune expérience dans cette organisation. Devait-il faire ses preuves ?
Il sortit le papier de l’enveloppe et parcourut les lignes griffonnées d’une petite écriture oblique.
Quêtes urgentes : de nombreuses demandes afflux à la Guilde, Urh a besoin de vous. Rendez-vous au Quartier Général pour prendre votre aventure !

Il avait l’impression d’être dans un de ces romans pour adolescents. “Partir à l’aventure”, de simples mots qui faisaient rêver. Sauf quand on en connaissait le vrai sens, l’aventure, synonyme d’insécurité, de crainte, de courbature … Même récupérer le chat de mamie coincé dans l’arbre fait d’aventure une rime de griffure.

Revenons-en à notre Guilde, si Lewën s’était présenté à eux, c’était bien pour cette “aventure” qui lui permettrait d’approcher Celle qui l’habitait. La Brume. Bien qu’Opale était devenue sa nouvelle demeure il n’aurait aucun mal à la quitter, des gens de confiance assureraient pendant son absence. Halie son apprentie, Izysidore le pharmacien aux décoctions de renoms. Il était temps de reprendre sa quête.

* * *

Xandrie la Juste, Xandrie la Pauvre. Le dépigmenté ne se faisait pas à la misère qui régnait dans les rues du continent. Tout y était entremêlé, insalubrité, sécurité, beauté, rires, aumône, technologie, croyances … Xandrie était le mélange de toutes les autres nations. Pour le meilleur et pour le pire. Claudiquant sur les pavés humides de la rue, Lewën respirait l’air chargé de la cité. Les lumières des enseignes se reflétaient dans les flaques, reflets troublés par le passage d’une voiture suivi d’une charrette tirée par des chevaux. Un anachronisme témoignant de la divergence de la cité.
Le médecin s’arrêta devant le bâtiment qui lui faisait face. La grandeur de la façade l’écrasait par sa magnificence, roches sculptées en colonnes abritant d’anciens bains toujours en fonction pour les membres du groupe. Il monta les quelques marches qui le séparaient de la lourde porte d’entrée, sa jambe de fer résonnant sur la pierre froide. Depuis sa dernière aventure dans le Bas Cendrais, le bois qui composait autrefois son membre perdu avait souffert du climat rustre de la région. Il s’était procuré cette nouvelle prothèse à Opale, il irait retrouver sa sœur à Epistoli pour une jambe plus résistante et fonctionnelle. Sa demie jambe actuelle ferait l’affaire en attendant.

A l’intérieur de l’édifice les voix résonnèrent, les hommes et les femmes vaquaient à leurs occupations, habitués des lieux. L’aventurier néophyte rejoignit le long comptoir de bois brute qui constituait l’accueil de l’organisation. Il se présenta, on lui accorda un sourire avenant avant de lui expliquer plus en détails le fonctionnement des missions. Le climat aussi bien politique que météorologique avait occasionné un afflux considérable de demandes aussi capitales les unes que les autres.

- Vous étiez dans l’armée Epistote, et vous avez même effectué des expéditions dans la Brume … Intéressant. lisait l’hôtesse derrière un vieil écran cathodique à l’image qui sautait.

Au lieu de lui présenter toutes les missions, on lui proposa de l’aiguiller là où son sang froid serait apprécié. Son acolyte serait quelqu’un de confiance, rendez-vous le lendemain pour que le duo s’enquiert des détails auprès de leur maître de mission. Ils ne seraient donc que deux, sûrement pas quelque chose de bien compliqué. Il le découvrirait en même temps que son partenaire, en attendant il avait sa soirée de libre, repas et logement au frais de la Guilde sous justificatifs “Dans la limite du raisonnable Monsieur Digo” précisa l’hôtesse souriante avec un clin d'œil. Il s’en fut, profitant des spectacles de rues qui se jouaient sous une pluie timide, annonciatrice du déluge qu’il connaîtrait.

* * *

Elizawelle ?!
Lewën retint son étonnement en découvrant sa partenaire. Au moins ils n’auraient pas à faire connaissance. La mission leur avait été présentée, et il comprit pourquoi le choix des aventuriers n’avait pas été fait sur le volontariat. Les mines de Xandrie, un sujet sensible pour l’ensemble de la population. Des exploitations minières et surtout humaines au profit d’une autre contrée. Opale. La controversée Opale d’où ils venaient tous deux. Il regarda sa partenaire de biais, songeait-elle à profiter de ce travail pour son intérêt personnel, encore une fois ?
Malgré les tensions qui les avaient confrontés lors de leur dernière expédition, la raison de Lewën le poussa à apprécier les qualités de la jeune femme. Il savait qu’il pourrait compter sur elle si les choses se gâtaient. Il pouvait se méfier de son honnêteté mais pas de sa loyauté, il en restait persuadé malgré leur expérience dupeuse.

- Je me suis renseigné, la route principale est bloquée à cause des intempéries pour se rendre aux mines du mont Argent.

Les deux camarades s’étaient donnés rendez-vous pour organiser leur voyage. Cette fois se fut Elizawelle qui l’invita autour d’un verre, non sans malice, en souvenir de leur précédente préparation. L’esprit déjà à leur quête, Lewën n’avait pu attendre d’atteindre leur but pour en parler. Devant son impatience, ils s’arrêtèrent devant un distributeur de boissons grésillant, discutant doucement des tenants et aboutissants de la mission. L’homme s’apprêtait à demander si sa partenaire comptait ramener du Myste pour Izydore, encore, avant d’être coupé dans son élan par une gamine qui proposait de les guider. Comment lui faire confiance ? Comment embarquer cette frêle gamine dans les tribulations d’un pays qui exploitait le sien ? La détermination débordait de ses yeux verts presque hypnotiques. Elle leur fit bien comprendre qu’elle avait besoin d’argent, pour sa mère, pour la famille. Elizawelle discuta avec elle, Lewën précisa non sans méfiance :

- Si vous nous menez aux mines sans escarmouche, nous vous allouerons une coquette somme qui cette fois arrivera à votre mère et vous. Je vous remettrai une déclaration sur l’honneur que vous pourrez apporté comme preuve à la Guilde si nous revenons indemnes.

* * *

La route était devenue impraticable pour quelconque véhicule. Ils avaient continué à pied, sous le déluge qu’offrait le mont. Il avait bien étudié la carte de Xandrie avant de se lancer dans le défi, la petite ne semblait pas les duper. Son imperméable n’était plus suffisant pour le protéger de toute cette eau, il sentait l'humidité s’infiltrer sous les couches inférieures. Ils auraient tous besoin d’un bon grog à leur retour, ça ne faisait aucun doute.

L’entrée des mines, là, à portée de vue. La gamine se détacha du groupe sous des regards interrogateurs. Lewën ne détourna pas le regard lorsqu’elle se déshabilla, non pas par un voyeurisme malsain, mais bien à cause de la défiance qu’il gardait en lui. Il posa son sac et porta sa dextre sous sa cape, agrippant fermement la poignée de son révolver. La fine silhouette grandit, s'arc bouta, son imaginaire lui fit presque entendre le craquement de chacun des os qui se voyait grandir avec force. Une femme aussi frêle que la gamine se présenta à eux, un défi rageux dans le regard.

L’homme sortit son arme, menaçant :

- Qui êtes-vous, "Lillie" ?

Le canon pointé vers l’inconnue, les mèches blanches collés sur son front, les gouttes coulant de chaque extrémité de leurs corps. Le temps se suspendit.
Ven 19 Mai - 11:48

[Partie I] Les mines englouties

Ft. Lewën Digo et Lillie Moynihan


Elizawelle avait l’impression d’être un nuage à la merci des vents. Elle dérivait là où celui-ci la poussait sans qu’elle ne sache quelle direction elle prenait. Elle s’occupait l’esprit, s’investissant ici et là sans vraiment savoir si elle avait trouvé sa voie. Un vide résonnait au fond de son estomac sans qu’elle ne puisse mettre le doigt sur ce qui devait le remplir. Les mois avaient passé depuis son retour de Dainsbourg, mais son père lui manquait encore chaque jour. Pourtant, elle avait repris sa vie, mais sans trouver de but à celle-ci. Durant son périple avec Lewën, elle avait cru que son avenir lui ouvrait les bras, mais elle avait sous-estimé la chute qui accompagnait le retour au calme.  

Trouver un but à sa vie ? Et puis quoi encore ? À quoi bon ? Être aventurière lui plaisait, elle gagnait bien sa vie et la guilde lui ouvrait les portes de toutes les factions. C’était suffisant, non ?  

Lorsqu’elle trouvait des compagnons de valeurs, tout cela lui semblait effectivement bien plus que suffisant. Elle ne trouvait rien de plus exaltant que d’affronter les difficultés aux côtés de personnes de confiance. Pourtant, il y avait l’inévitable retour à la réalité. Lorsqu’elle remettait les pieds à Opale, elle ne pouvait que se rappeler à quel point elle était seule, désormais. Malgré tous les amis qu’elle avait à travers Uhr et même au-delà, une solitude pesante alourdissait son pas. Elle n’était pas pour autant malheureuse, plutôt dans une espèce de bulle, prisonnière sans intention d’évasion.  

Rapidement, la réputation d’Elizawelle, le jaguar de la Brume, prenait forme. Même si pour l’instant, elle n’avait pas eu de soucis majeurs à Opale, elle se demandait toutefois si cela en causerait, à terme. Le fait que son nom et son statut de zoanthrope se soient répandus la gênait. Sa présence lors du combat contre le Reclus avait valu son à son nom de résonner aux côtés de ceux de Réno, Asgrevain, Artémis et Jessamy. Cela lui avait fait bizarre, lorsqu’elle avait remis les pieds au QG : plusieurs s’étaient retournés à son arrivée et des murmures avaient accompagné son passage.  

C’est ainsi que ses pas finirent par la mener directement dans le bureau du maître de la guilde. Pour une fois, ce dernier s’y trouvait. Il lui avait envoyé une missive courte, mais expéditive et surtout, accompagnée d’une autre lettre contenant un appel aux aventuriers pour une mission risquée. Flattée que l’homme ait pensé directement à elle et partante pour partir à nouveau à l’aventure, elle quitta aussitôt Opale pour Xandrie, profitant d’un dirigeable commandité par les investisseurs opalins à l’origine de la mission.

L’échange avec Réno fut bref, mais cordial. Il lui indiqua qu’un aventurier expérimenté avait été repêché le matin même et qu’elle pourrait le rencontrer le lendemain. Après avoir profité des bains, elle s’allongea donc avec le soleil. Ce fut ses rayons qui la réveillèrent, plusieurs heures plus tard, les volets étant demeurés ouverts. Elle s’assura d’avoir tout le matériel qu’il lui fallait, mais il n’y avait pas d’inquiétude à avoir : son sac pourvu d’un Nascent de spatiokinésie contenait plus de matériel que nécessaire. Elle rejoignit alors le bureau du maître de guilde et s’enthousiasma en découvrant Lewën sur le pas de la porte. Réno, lui-même visiblement sur le point de partir en mission, leur délivra les détails de la délicate mission qui les attendait.  

Elle avait cru être discrète en discutant avec Lewën dans la rue, mais il semblerait que les mots employés n’avaient pas été suffisants pour échapper aux oreilles d’une jeune fille au regard profond. Elle les aborda avec confiance, mais gravité et son histoire reflétait la dure réalité de la misère xandrienne. Malgré la sensation que quelque chose clochait, la zoan se fia à son instinct. Il semblerait que cette Lillie soit capable de les guider là, ce qui leur ferait gagner un temps précieux. Elle consulta Lewën du regard et acquiesça alors qu’il lui donnait son accord.  

Elizawelle garda un œil sur elle tout au long de leur voyage dans le dur pays de Xandrie. La Grand Voie était plutôt bien entretenue, mais il avait alors fallu la quitter et continuer le voyage à pied. Si l’ombre des monts d’Argent, immanquables à l’horizon, faisait office de guide immuable pour le petit groupe, la présence de Lillie fut précieuse pour éviter les obstacles, naturels ou non, qui se dressèrent sur leur chemin. Cependant, le malaise de la zoan avait grandi. Après quelques jours à ses côtés, elle fut certaine que la jeune adolescente était bien plus ce qu’elle laissait paraître.  

Comme Lewën, elle ne détourna pas le regard lorsque, arrivée devant la mine recherchée, Lillie retira ses vêtements. Pas du tout gênée par la nudité de la jeune fille, elle observa avec fascination celle-ci vieillir soudainement sous ses yeux. Était-ce aussi douloureux que lorsqu’elle-même prenait sa forme animale ? Lewën étant sur le qui-vive, Elizawelle posa la main sur son arme, sans la sortir toutefois. Elle ferma les yeux un instant, et une ombre sombre prit forme à ses côtés. À peine apparu, le jaguar de l’ombre partie comme une flèche, faisant office d’éclaireur.

– Pourquoi as-tu menti ? demanda la zoanthrope, sur ses gardes. Que nous as-tu caché d'autre ?

Le jaguar ne détectait aucune présence inhabituelle dans les environs et les dernières traces de passage remontaient à plusieurs semaines. Cependant, la pluie ne facilitait pas le pistage et l’aventurière ne pouvait pas être certaine qu’ils n’étaient pas bêtement tombés dans un guet-apens. Pourquoi cette femme avait-elle caché sa véritable identité ? Quel but l’avait amené à les aider à traverser le pays jusqu’à cet endroit isolé et dangereux ? Le jaguar était revenu à proximité, tapi hors de vue, prêt à bondir. Cependant, si elle était seule, alors sans doute ne leur voulait-elle aucun mal. Après tout, elle était loin de se trouver en position de force.  
Ven 19 Mai - 15:41

Elle ne montra pas le moindre signe d'hostilité, finissant simplement de se rhabiller. L'arme pointée sur elle ne pouvait l'empêcher de bouger. Elle fit un pas de plus vers ses compagnons avant de s'immobiliser. La chaleur revenait peu à peu au bout de ses doigts. Elle secoua la tête, levant devant elle ses deux mains ouvertes en signe d'apaisement. Elle pensait ne rien risquer, maintenant qu'ils étaient tous les trois ici. Elle avait eu le temps, durant le trajet, de laisse traîner ses oreilles indiscrètes pour en apprendre plus sur le couple qu'elle guidait à travers les monts d'Argent. Il était surtout question pour Lillie de s'assurer que ceux-ci n’œuvraient pas directement pour Opale ou pour le Roi Dynaste. Elle regarda fureter le jaguar du coin de l’œil, essayant de ne rien trahir de sa surprise : elle n'avait encore jamais rencontré de zoanthrope.

- Vous pouvez baisser votre arme... Et rappeler votre... Animal ? Hésita-t-elle un moment. Nous ne sommes pas suivis. Croyez-moi, si j'avais voulu vous nuire, je l'aurais fait dès la sortie de Xandrie, sans risquer de venir me peler les miches ici. Peut-on faire les présentations à l'abri ?

Elle pointa du doigt l'entrée de la mine, où un chariot gisait froidement à quelques centimètres de rails gelés. Sans vraiment attendre de réponse, elle recula sans tourner le dos à ses compagnons. Une fois entre les parois luisantes de la mine, ses muscles se relâchèrent un à un. Après des jours de harcèlement, le vent avait décidé de ne pas s’engouffrer avec eux dans les entrailles de la montagne.  Le froid mordant avait fait place à l'humidité latente d'un lieu que n'importe quel être raisonnable aurait fui sitôt sa découverte. Une main toujours tendue devant elle, elle se baissa pour poser son arme au sol.

- Je n'ai pas tant menti, tout compte fait. Je m'appelle véritablement Lillie. Je vous ai effectivement guidés jusqu'ici. Mais je ne suis venu chercher personne. Considérez-moi comme... Une aventurière, moi aussi. Mais à mon compte. Cette mine peut renfermer des informations essentielles pour... Le bien du plus grand nombre.

Elle se contenta de sourire. Il aurait été imprudent qu'elle en dévoile trop dès la première interrogation. Ses vis à vis avaient beau être des aventuriers, rien ne les empêcheraient de la trahir dès leur retour à Xandrie. Elle se permit enfin de se retourner. L'étroit tunnel d'entrée de la mine débouchait sur une première salle plus vaste, antichambre des salles aux trésors de la montagne. L'eau s'infiltrait par toutes les fissures, ruisselaient dans une mélopée triste, larmes d'un géant de pierre qui aurait sans doute préféré reposer loin des affaires des Hommes.

Et maintenant, la question à cent mille astras :comment allumer un feu dans une flaque d'eau... ?