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3. Contexte

3. Contexte Brandw10
Mer 4 Mai - 22:35

Contexte

Le commencement de toute chose


...alors une lueur éclatante jaillit d'entre les ténèbres et perça la Malice, qui en son cœur dévoila une terre riche et nue. À ce moment, l'espoir renaquit, là comme en chacun ; on le nomma Uhr. Et les Premiers Hommes y prospérèrent, sous la gouverne des dieux.
- « La Cabale » de Bellatoine

Jadis, ce monde était peuplé d'entités immortelles, des incarnations de la nature appelées « Esprits ». Dotés de pouvoirs dépassant l'imagination, ceux-là louaient le Soleil et la Lune, prenant seulement ce que la vie leur offrait. Des règles simples régissaient leur société, basée sur la confiance, le partage et l'altruisme.

Un jour, toutefois, un de ces êtres décida d'aller à l'encontre des lois et utilisa ses pouvoirs à des fins personnelles. De ses expériences, naquit une monstruosité : la Malice, une essence en opposition avec les principes de l'existence, dont la seule ambition était de répandre la mort et la désolation. Alors, une guerre aux proportions ineffables déchira le monde et, au prix de nombreuses vies, la Malice fût scellée dans la Brume. Folle de rage, celle-ci submergea les terres et les mers, repoussa les survivants dans leurs derniers retranchements, tenta de noyer leur ultime refuge... sans jamais y parvenir. Car Uhr était une terre bénie et lorsque la Malice tentait d'y pénétrer, elle se fractionnait et devenait insignifiante.

Ainsi, la menace désormais scellée, les Esprits s'en détournèrent et, pour éviter un nouveau désastre, mirent au monde une progéniture dénuée de pouvoirs, mais suffisamment ingénieuse pour inventer des outils, travailler la terre et bâtir des cités. Reconnaissants envers leurs créateurs, les Premiers Hommes les déifièrent autour d'une religion destinée à tous les louer dans la paix et dans l'harmonie.

Au fil des siècles, toutefois, les Esprits cessèrent de se mélanger aux hommes et la religion, appelée « panthéisme », perdit de son emprise. Cela permit notamment à une nouvelle doctrine d'émerger : la science. Grâce à elle, les phénomènes que l'Église préférait ignorer trouvèrent une explication et les interprétations religieuses furent progressivement contredites. Cela provoqua évidemment de nombreux tollés et conflits, le plus sanglant étant la révolution qui mit un terme au règne pontifical de la ville de Sancta, aujourd'hui connue sous le nom d'Epistopoli.

Déstabilisés par la perte de l'un de leurs grands temples, les panthéistes perdirent pied et le monde entier commença à questionner les dogmes religieux ainsi que certains aspects de l'Histoire. Naturellement, les interdits religieux furent les premiers à être bafoués ; avec eux, l'interdiction de franchir la Brume, antre de la Malice et ennemi du divin. Si quelques hommes avaient jadis bravé les dogmes en s'y rendant, peu en étaient revenus et rarement inchangés.

Enrichie par l'essor de la science, la haute cité d'Opale décida à son tour de s'émanciper de la croyance et finança la création d'un institut de recherches en occulte, le Magistère, dont le but secret était alors d'étudier la Brume, de la documenter et d'expérimenter pour mieux la domestiquer.

Notre objectif n'est pas de parvenir à égaler leurs pouvoirs. Non, cela va bien plus loin que cela. Car contrairement aux dieux, la science n'a pas pour limites la foi, mais l'étendue observable de notre univers. Et chaque jour, nous ne cessons de repousser ses frontières. D'ailleurs, si déjà nous créons de nouvelles formes de vie, que sommes-nous sinon des dieux ?
- « Du progrès technique » d'Anastov Eizurki

On ignore quel fut le déclencheur du drame. Toujours est-il qu'il y a trente années de cela, Dainsbourg sombra, engloutie par la Brume, ne laissant derrière elle qu'une inquiétude dévorante. Sous le choc, Uhr tout entier manifesta ses doutes, son incompréhension, avant de chercher à trouver un responsable.

Les plus religieux blâmèrent les hommes de s'être détourné du divin, considérèrent que la proximité avec la Malice était derrière tout cela. D'autres pensèrent qu'il s'agissait d'un comportement que l'on aurait pu prévoir si l'on ne s'était pas aussi longtemps reposé sur les textes religieux, plutôt que d'essayer de comprendre le phénomène de façon scientifique.

Voyant la situation s’envenimer, les chefs d’État se réunirent et décidèrent de conclure une Alliance pour œuvrer dans un bien commun. Le temps de mener l'enquête, tous s'accordèrent sur la nécessité de percer les secrets de la Brume et de grands moyens furent mis en œuvre pour l'explorer. Rapidement, on découvrit de nombreuses ruines, des témoignages de civilisations oubliées que les religieux affirmèrent être celles des dieux, et donc qu'y pénétrer en armes était un sacrilège.

Seulement, l'héritage des Esprits n'avait pas réponse à tout et notamment à ce qui avait provoqué la fin de la Sainte Cité. Avec le temps, l'effervescence des découvertes finit par occulter la menace d'un nouveau drame, de plus en plus diaphane. Au bout de plusieurs décennies, celle-ci finit par disparaître et les questions qui étaient jadis sur toutes les lèvres sombrèrent dans l'oubli... Aujourd'hui, ceux qui ont connu le drame cherchent à préserver la mémoire des disparus.

Mais la nouvelle génération n'a pas connu l'horreur ; elle a été bercée par la frénésie de l'exploration. Car le monde ne s'est pas arrêté : il a su tirer profit de cette nouvelle dynamique. Aujourd'hui, des centaines d'hommes explorent les ruines sous la Mer de Brume, non plus pour y trouver la vérité, mais essentiellement pour y dénicher de précieux artefacts. Et on y retrouve désormais moins d'aventuriers que de dangereux maraudeurs œuvrant pour leur propre intérêt. Et plus généralement pour celui de leurs clients.

Si jadis on pensait l'Alliance comme une initiative prometteuse, aujourd'hui elle n'est plus que l'ombre d'elle-même. Désertée, désuète, elle peine à rassembler et est souvent tournée en dérision pour son inaction. Petit à petit, les dirigeants des Hautes Cités ont fini par s'en détourner pour organiser leurs propres recherches. Pourtant, son utilité pourrait bien être prouvée à nouveau, depuis qu'une rumeur folle se propage, et ce, malgré les tentatives de certains gouvernements pour la faire taire. D'aucuns prétendent qu'une secte secrète longtemps opposée à l'Église, le Treizième Cercle, serait même à l'origine de ce mauvais augure.

Un sombre présage d'une nouvelle catastrophe, contrebalancé par la venue d'un homme, parfois mentionné comme un dieu, qui pourrait sauver le monde. Celui que l'on appelle le « Mandebrume ».
Mar 4 Juil - 0:26

Acte Premier

La Mer de Brume

1. Le Secret Originel

Printemps de l'année 1900. Les festivités de la Nouvelle Année sont passées et un calme relatif règne sur Uhr. Voilà plusieurs décennies que les expéditions envoyées dans les ruines de Dainsbourg sont de véritables échecs et le Maître de la Guilde affirme lui-même qu'il n'existe pas pire endroit sur terre. Pendant près de trente ans, les vestiges ont conservé leur secret face aux nombreuses tentatives pour tenter de démystifier leur sort et celui des Dainsbourgeois. Jusqu'à récemment.
Evenements du 10 Pthelior de l'année 1900
Il n'y a pas plus grand secret que le Divin ; car les Esprits sont tout-puissants, il est ainsi aisé de créer un saint déchu, un martyr de la religion, et de le louer dans les ténèbres. Mais seul le Cercle parvient aussi bien à créer une histoire fictive autour du Faux Dieu, de sorte à ce que ses membres se retrouvent pris dans l'engrenage de la poursuite d'une vérité cachée. Ces adeptes ont bien besoin du panthéisme, de la structure ecclésiastique, pour alimenter leurs thèses complotistes et exister dans l'opposition. Et c'est bien là qu'il faut les différencier des scientifiques, premiers martyres véritables de la religion.
- « Le Treizième Cercle : histoire d'un culte ésotérique » de Khamz

Le 10 Pthelior de l'année 1900, un tremblement de terre de forte magnitude frappe simultanément les villes d'Opale et de Xandrie, provoquant le chaos durant la nuit ainsi que l'effondrement de plusieurs infrastructures et des dizaines de victimes. La secousse est ressentie jusqu'à l'autre bout du continent, traversant Epistopoli et Aramila sans causer le moindre dégât. Affairées au secours des victimes et à la reconstruction, les Hautes Cités décident de s'en remettre à l'Alliance, révélant que l'épicentre du séisme se trouvait au Nord-Est du continent, plus précisément en plein centre de Dainsbourg.

Durant les jours qui suivent, des patrouilles traversent le périmètre établi par la Guilde des Aventuriers et rapportent un changement dans la zone sinistrée : à l'endroit où se trouvait jadis le Sacratum, siège dainsbourgeois de l'Église, baye à présent un gouffre profond. Pour l'Alliance, il ne fait aucun doute que l'une des réponses au mystère qui la hante depuis des décennies se trouve au fond de cet abîme. Une mission d'exploration est décidée, misant sur une réaction rapide et suffisante à court terme pour obtenir le maximum d'informations ; pour la première fois depuis trente ans, les quatre nations se coordonnent pour œuvrer dans un objectif commun, du moins c'est ce que le peuple d'Uhr imagine.
Dénouement du 21 Ioggmar de l'année 1900
...et seul parmi les Dieux, un inconscient au pouvoir de détruire le monde. Pour le bien de l'Histoire, son véritable nom fût oublié mais ses fidèles continuèrent à entretenir sa grandeur déchue, rappelant à ceux qui voulaient bien l'entendre le supplice d'Arkanis, le Martyr. Ceux-là furent châtiés par l’Église et ne prospérèrent plus que dans les ténèbres. On dit qu'ils se mirent à vouer un culte à la Malice et à pratiquer des orgies et sacrifices humains... Et tout ce qu'il y a à savoir à leur propos est consigné ici, dans les Archives. Mais sur le Faux Dieu, néant, car il fut condamné à la damnatio memoriae et son corps même fut scellé, ses pouvoirs retirés... une coquille sans âme dans un sarcophage de pierre.
- « Des fondements religieux du culte d'Arkanis » de Saint Pétroclin

Le 21 Ioggmar, le convoi quadripartite, réuni exceptionnellement à Oman et mené par le Maître de la Guilde, fait finalement route vers Dainsbourg. Affrontant les périls de la cité et pénétrant dans ses profondeurs à la recherche de réponses, les courageux aventuriers parviennent à triompher d'une menace double, terrassant à la fois un monstre « Reclus », errant dans les souterrains, et un traître épistopolitain du nom de Stolos. Alors qu'il agonise, le voltigeur se gausse en révélant son terrible présage : le Mandebrume est le Faux Dieu échappé de Dainsbourg il y a trente ans et est à l'origine de sa disparition. La récente secousse n'aura été causée que par la tentative vaine du Treizième Cercle de faire disparaître les preuves à tout jamais, après avoir provoqué une puissante déflagration soufflant l'intégralité des souterrains et brûlant la moitié des Archives. Malheureusement il aura fallu à Stolos et ses sbires revenir en même temps que l'Alliance pour terminer le travail.

Corroborant les révélations, une cellule de prison au fonctionnement ésotérique est découverte peu après, ainsi que des restes humains pétrifiés. Après une fouille minutieuse dans les Archives de Dainsbourg, en partie calcinées, une pièce secrète est à son tour percée à jour, dévoilant des textes interdits par l’Église depuis sa fondation, révélant la nature du monde et de ceux qui le peuplaient avant l'arrivée de la Brume... Uhr ne serait qu'un sous-continent attaché à une terre bien plus vaste du nom d'Yfe, où aurait jadis régné un puissant Empire dont la capitale, Zénobie, se trouve bien plus au Nord.

Mais les écrits parlent aussi des prémices d'un culte faisant de l'ombre au panthéisme depuis la nuit des temps : le Treizième Cercle. Et si au fil des révélation sa Vérité semble de plus en plus proche de la réalité, la secte n'en reste pas moins centrée autour d'un Faux Dieu ayant possédé les « plus puissants des dons divins » avant d'être emprisonné sous Dainsbourg. Et son nom fut Arkanis.

Désormais, il ne fait aucun doute pour l'Alliance qu'Arkanis « le Faux Dieu » et le Mandebrume sont la même entité. Et si sa dépouille a bien été retrouvée enchaînée sous Dainsbourg, cela ne fait pas sens avec les élucubrations de Stolos au moment de sa mort : « Epistopoli a eu l'honneur de devenir sa première conquête. » Lorsque ces mots ont fuité, Aramila a été la première à suspecter la connivence du régime totalitaire voisin qui a, en retour, nié les faits, évoquant être autant victime de la supercherie de Stolos que toutes les autres nations. Pour éviter un nouvel accident diplomatique, le Chancelier a alors convié en urgence tous les chefs d'états à un sommet de l'Alliance à Opale, censé se produire le 11 Uhr.

Tous les yeux sont aujourd'hui rivés vers le Régent, espérant que sa présence permettra de lever le voile sur le mystère, alors que des chercheurs tentent d'assembler les pièces du puzzle pour comprendre ce qu'il s'est réellement passé. Le Mandebrume est mort, mais le Mandebrume est revenu. Maintenant il est à Epistopoli et encore nombreux sont ceux à croire que grâce à lui, Uhr pourra enfin être sauvée...

2. La Tour des Ases

L'été s'est écoulé sur Uhr, soufflant un air chaud sur les braises encore vives des récentes découvertes. Durant ces quelques mois, l'Alliance comme les autres Hautes-Cités ont mis les bouchées doubles pour déchiffrer les informations classifiées du Saint-Siège de Dainsbourg. Là-bas, un campement a bien fleuri, permettant des allers et venues en relative sécurité. Toutefois les feux des projecteurs sont bien loin des Terres Mortes de Dain à présent, mais plus au Sud, alors que les derniers invités prestigieux arrivent à Opale, sur l'invitation du Chancelier.
Evenements du 11 Uhr de l'année 1900


Que cherchait le Treizième Cercle dans ces souterrains ? Quel secret si terrible convoitaient-ils pour tenter de tout brûler, de masquer leurs traces ? On sait bien peu de choses à propos de cette secte et peu sont les ressortissants pouvant nous en dire plus. Mais ces dernières décennies, leur objectif a changé. Longtemps, le serpent est resté sans tête et on sait aujourd'hui que celle-ci a retrouvé sa place avec le retour d'Arkanis, le déchu. Alors que veulent-ils ? Une réponse pourrait résider dans leur quête de la Vérité, car celle-ci est incomplète. Une croyance du Cercle est qu'il serait possible de changer la Vérité, ce qui reviendrait à changer l'histoire. Mais comment ? C'est là que le sentier de l'ignorance commence...
- « Traité sur la Vérité » de Milano Regiscar

Nous sommes le 11 Uhr, le jour de la tenue de la réunion au sommet qui doit statuer sur le sort d'Uhr, sur la menace qui pèse. Mais tous ne sont pas dupes et savent qu'il s'agit avant tout d'un moyen de faire sortir le Régent de sa tanière pour le pousser à se prononcer sur les agissements du Treizième Cercle et de son mystérieux leader dont l'anonymat est à présent percé : le dieu déchu et désavoué par l’Église, Arkanis.

Au sein de la Cité des Sciences, la période estivale n'a pas été de tout repos et celle-ci a dû se défendre des nombreux reproches qui lui sont faits, notamment car sa collaboration au cours du convoi a violemment tourné au vinaigre. Pour les dirigeants qui entendent les colifichets, la paranoïa s'est installée et, même au sein du Comité, les puissants se regardent à présent en chien de faïence. C'est donc dans l'espoir de résoudre cette situation et montrer qu'il est davantage favorable à une enquête interne que désireux de conserver cette opacité culpabilisante que le Grand Sapiarque a fait le déplacement à Opale, arrivant seulement la veille sans véritable annonce. Pour l'évènement, la Grande Place a été investie de nombreux bancs et un périmètre de sécurité établi autour d'une imposante table ronde censée réunir les diplomates de tout le continent.

Nous ne sommes que quelques heures avant la tenue du sommet et pourtant, ceux au courant de la présence d'Elias van Beck ont le droit de s'interroger : où est le Régent ? Par ailleurs, d'étranges rumeurs mentionnent la présence d'individus louches observés au quatre coins de la ville, laissant penser que seule la vigilance de la Garde pourrait ne pas suffire face à une organisation mal intentionnée souhaitant marquer un gros coup.

Pendant ce temps, à bien des centaines de kilomètres de l'évènement, une information capitale est arrivée à la table du Concile Œcuménique : le Régent a quitté Epistopoli, il y a plusieurs jours de cela. Mais plutôt que de rejoindre Opale par les airs, son zeppelin a été observé faisant route vers le Nord-Est, en direction de feu le Pays de Dain. Probablement sous-estimait-il l'ampleur de la collaboration internationale menée par l'Alliance, réunissant des éminences de Xandrie, Aramila et Opale... mais aussi le Grand Sapiarque en personne, bien décidé à élucider le mystère derrière les absences répétées de son souverain. Une opération spéciale a donc été menée pour filer le vaisseau jusqu'à sa destination... et tirer les choses au clair une fois pour toute en obligeant le haut responsable épistopolitain à dévoiler ses cartes.
Dénouement du 22 Uhr de l'année 1900
Opale en flammes, le sang recouvrant les pieds de la statue du père fondateur, les pavés immaculés rendus noirs de suie par les explosions. Mais rien ni personne n'aurait pu se douter que le véritable acte de terrorisme s'opérait six pieds sous terre. Seulement, à celui-ci, Opale a dit non ! Elle ne laissera pas l'ennemi s'estimer vainqueur. Voilà la Brume qui s'avance à présent et la Cité aux Mille Lumières rayonne comme jamais, relevant le défi auquel l'a mise le Faux Dieu.
- « Réconciliations » de Père Sélénin

Alors que les festivités devaient battre leur plein, le Sommet organisé à Opale est désormais synonyme de jour de deuil national pour Opale. Profitant de l'affluence, des scélérats du Treizième Cercle se sont mélangés à la foule pour tenter d’atteindre l'estrade où discutaient les hauts dirigeants des quatre nations. La vague de peur et de cruauté s'est soudainement libérée, frappant d'anathème le doyen du Conseil des Cinq et l'Archevêque d'Etyr ainsi que des centaines d'innocents. Grâce à la bravoure du Maître de la Guilde et de nombreux volontaires, le Cercle a pu être repoussé et la commandante de l'assaut faite prisonnière. Mais à quel prix ?

Au lendemain des méfaits, l'ultime acte de traitrise des assaillants est dévoilé lorsque des navigateurs reviennent des eaux orientales pour rapporter une terrible nouvelle : la Mer de Brume a bougé. Et elle continue de s'avancer en direction des terres, submergeant progressivement les îles et menaçant de faire connaître pareil sort à Opale qu'à Dainsbourg, sa voisine. Sensiblement au même moment, la Garde découvre qu'une incursion a eu lieu dans les souterrains du palais où d'étranges racines profondément enfouies, vraisemblablement celles de l'Arbre-Dieu s'étendant sous tout Uhr, ont été sectionnées. Bien que l'un des mystères du continent soit enfin révélé et permette ainsi à l'enquête de l'Alliance de faire un grand pas en avant, tout Uhr est mortifié de voir la catastrophe sur le point de se produire à nouveau.

Bien que discrète, la délégation partie sur les traces du Régent ramène avec elle de bien tristes nouvelles : non seulement ce dernier a disparu, mais il n'est pas l'homme qu'il prétend être ; il est devenu vestige du Mandebrume lorsque celui-ci s'est échappé de Dainsbourg. En plus de cela, l'Alliance doit compter la perte de l'un de ses principaux alliés : le Grand Mestre des Sentinelles de la Brume, tombé au combat. Pour le commun du mortel, les circonstances de sa mort restent toutefois nimbées de mystères tandis que, pour la première fois, le Chancelier demeure muré dans le silence face aux informations encore plus capitales lui étant parvenues.

Les informations qui suivent sont classées confidentielles. Jusqu'à il y a peu, Demephor, l'Esprit du Savoir, était encore contenu dans la Tour d'Yfe où l'expédition a eu lieu. Maintenu en vie dans des conditions lamentables pour permettre à l’Église d'utiliser son pouvoir divin, l'Hulule, dernier représentant d'une espèce endémique du sous-continent, est parvenu à répondre à de nombreuses questions avant de rendre son dernier soupir. Il a notamment révélé que la cause de l'apparition de la Brume, le Réplicateur, se trouvait dans l'ancienne capitale de l'Empire d'Yfe : Zénobie. Et que c'était la prochaine destination d'Arkanis. Grâce à ses réponses, l'Alliance peut désormais faire la lumière sur les évènements s'étant produits à Dainsbourg, une diversion vengeresse pour permettre au Faux Dieu de s'échapper impunément sous les traits du Régent. Et pour ne pas alerter l'ennemi sur la fuite de ses objectifs ainsi que provoquer une vague de chaos sans précédent au sein de l'Eglise, elle n'a d'autre choix que de garder le silence...

3. La Cité Tourmentée

Plusieurs mois se sont écoulés depuis l'acte de terrorisme ayant eu lieu à Opale. À présent que les cendres retombent, le Magistère achève de dresser ses premières défenses contre la Mer de Brume, prête à déferler sur la capitale. Malgré la confiance aveugle des scientifiques envers le dispositif, les opalins attendent et redoutent le Jour J, estimé au 25 Lugrilen 1901. Certains observent la foi revenir sur le devant de la scène dans la même première ville à l'avoir rejetée ; une opportunité que les Panthéistes tentent de saisir avant les Kobolistes, vantant le caractère interprétatif de l'Ahad et les leçons s'y trouvant, permettant de surmonter ce genre d'épreuves. Pendant ce temps, la coalition internationale, ragaillardie comme jamais, se prépare à la guerre qu'elle va devoir mener en territoire hostile contre le Mandebrume et ses disciples, aux abonnés absents depuis l'acte perfide de la Seconde du Cercle...

...moi je vous dis que ce pays est en train de changer ! Rien que ce matin, alors que je prenais mon café en terrasse en lisant mon « Entrepreneur », j'ai vu deux prêcheurs de rue se succéder, interpelant les badauds et claironnant la bonne parole. Pourtant leurs discours ne me semblaient pas si désagréables, apportant une sorte d'exotisme dans le froid pays. Un missionnaire du Sud et une jeune âme convertie au Kobolisme, se faisant concurrence. Arnaud du Mille Lumière me dit recevoir de plus en plus de témoignages religieux pour sa chronique et cela ne m'étonne pas. Les gens se raccrochent à ce qu'ils peuvent en espérant que le ciel ne va pas leur tomber sur la tête. Au lieu de cela, le voilà en train de pleuvoir par « mots » et « lettres » sur la cité aux étranges lumières.
- « La Matinale Opaline » de John Ferrer

À l'aube du 16 Lugrilen 1901, l'Île-aux-Dragons est intégralement avalée par la Mer de Brume ; seuls quelques aliénés continuent à braver la mort pour explorer ses mines de Myste, tandis que monstres comme pirates achèvent de s'emparer du territoire. Une date qui résonne sur tout le continent, à l'image du bruit tonitruant provoqué par la chute d'un rempart ; moins de dix jours avant que l'envahisseuse n'atteigne la côte et notamment la cité portuaire y fleurissant. Là, les opérations multiples s'accélèrent : entre la tentative de soigner les racines de l'Arbre-Dieu pour rétablir leur pouvoir protecteur et l'édification d'une « digue » reprenant le principe des balises électrogènes. La volonté du Conseil de faire de la ville une forteresse dans la Mer de Brume n'est à présent plus un secret pour personne et chacune des Sept Familles contribue à la tâche.

Même si les évènements tragiques de l'automne 1900 se sont essentiellement cantonnés à Opale, tout Uhr semble galvanisé par des objectifs communs. Un temps crucial a été perdu pour mettre les prestigieux membres de la Commission d'accord et ce n'est que récemment que le Treizième Cercle a enfin pu être considéré comme une organisation terroriste à Epistopoli. Malgré les arrestations s'enchaînant depuis, le Grand Sapiarque n'est pas dupe et sait les Hautes Sphères gangrenées, dont le Régent lui-même, toujours porté disparu depuis son déplacement dans les terres du Nord. S'il était relativement aisé de camoufler son acte de traitrise auprès de la plèbe les premiers mois, désormais même la Contade profonde a entendu des rumeurs sur sa véritable identité.

Le Régent serait nul autre que le Mandebrume.

De leur côté, ni l'Alliance ni le Concile Œcuménique n'ont encore réagi à tout cela. Une aubaine pour les kobolistes, de plus en plus nombreux, qui confrontent l’Église sur son étrange mutisme et la taxent de ne pas avoir perdu ses vieilles habitudes de mentir et dissimuler des secrets. Voilà plusieurs fois que l'Alliance est sommée de briser le silence par les citoyens les plus revendicateurs dont la voix est portée par le Roi de Xandrie, susceptible de ne pas être dans la confidence. Or si les évènements s'étant déroulés à la Tour d'Yfe venaient à s'ébruiter maintenant, les conséquences pourraient être catastrophiques. Dans les coulisses de l'enclave, une course contre la montre se joue pour retrouver Arkanis avant qu'il ne puisse atteindre ses objectifs ; l'option retenue est donc de déjouer les plans de l'ennemi en atteignant Zénobie avant lui. Un plan directement pensé par le Chancelier Panoptès, comptant sur la bataille à venir comme diversion suffisante pour mener une opération commando dans le Laboratoire Demephor de l'ancienne capitale.

Ainsi, depuis la fin du mois d'Uhr, le Projet Replicata est en marche ; sous le prétexte de découvertes menant à croire que des informations sur la Brume se cachent dans les grandes villes yféennes, des centaines d'explorateurs parcourent les anciennes routes pour les sécuriser à l'aide de balises électrogènes, traçant un chemin direct vers le Nord. Pour beaucoup de volontaires, la Mer de Brume paraît presque anecdotique grâce aux avancées communes du Magistère et de Crystech, tandis que des avant-postes sont dressés dans les vestiges. Toutefois les convois disparus et campements désertés et saccagés rappellent chaque mois que la Brume n'est pas toujours de nature docile. Et dans les rangs de l'armée de la coalition, dont les effectifs sont pratiquement au complet désormais, la peur s'instille un peu plus à mesure que l'échéance de l'affrontement final se rapproche...