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Quand le destin vous joue un tour

Quand le destin vous joue un tour Brandw10
Mer 20 Déc - 17:58
Quand le destin vous joue un tour


Le bazar, une foule aussi dense de jour comme de nuit qui s'agitait toujours en encore. Des petits et des grands étals à perte de vue. Des vendeurs de fripes, d'armes, de nourriture, d'animaux, rien ne manquait. Ça beuglait en tous sens, les vendeurs ventant leurs produits comme étant les meilleurs.
Akhesh s'engageait dans les allées, ne sachant pas trop où chercher afin de trouver un vendeur bien spécifique dont il avait entendu parler la veille. D'après ce qu'il avait pu comprendre, ce dernier avait un cheval ailé à vendre. Les Pégases étaient réputés pour être facilement domesticables, mais celui-ci avait, selon les dires, une robe bien particulière. Aussi sa curiosité le poussait-elle à vouloir voir l'animal. Et puis voici bien longtemps qu'il voulait acquérir une telle monture. Seulement Xandrie ne se prêtant pas à ce genre de spécimen, il avait renoncé à ce projet. Mais maintenant, avec sa nouvelle vie et ici, c'était tout autre. Avec les étendues sauvages à perte de vue, la place était suffisante pour faciliter son envol ou son atterrissage. Le Strigoi déambulait au gré de ses pas et s'arrêtait parfois devant l'une d'entre elles, afin de glaner quelques informations ou tout simplement pour jeter un coup d'œil sur quelques articles.

Depuis quelques minutes, il sentait une présence dans son dos et cela lui déplaisait fortement. Le suivait-on ? L'avait-on reconnu ? C'était peu probable, mais pas impossible. Une envie de faire face à cette éventuelle menace et d'en finir une bonne fois pour toutes lui passait par l'esprit. Il la refoulait. Il se faisait des idées, à n'en pas douter. À rester toujours sur ses gardes, il en devenait paranoïaque. Mais qui ne l'aurait pas été après tout ? Avoir une prime sur sa tête et deux factions à vos trousses ne laisserait personne indifférent. Et puis ici, en plein milieu du bazar, il ne serait pas du meilleur goût d'éviscérer ou d'égorger quiconque.Avant même que la femme ne s'approchait de lui, il l'avait vu arriver, grâce à son champ de vision panoramique. Elle ondulait des hanches, vraisemblablement à la recherche d'un client.

"Alors mon mignon, on cherche de la compagnie ? Zoolye est prête à satisfaire toutes tes envies pour quelques astras."

Ici comme ailleurs, certaines femmes vendaient leurs charmes, comme les marchands vendaient leurs marchandises. Elle osait quelques caresses sur Akhesh qui la repoussait gentiment.

" Je ne suis pas intéressé. ! "

Piquée au vif, par le rejet du black, elle venait à éructer un peu fort.

" Ouais, c'est ça!  Va donc rejoindre ta morue, espèce de...."

Il lui jetait un regard sombre si bien qu'elle ne terminait pas sa phrase et partait à la recherche d'un autre client. Mais voici qu'une autre prostituée venait à se moquer de la première.

"Zoolye change de métier, tu rapportes rien !"

" Ah toi, je t'ai rien demandé ! Retourne donc à tes passes et mêle-toi de ce qui te regarde, sale putain ! "

Furieuse de se voir ainsi rembarrer, la seconde prostituée lui répondait du tac au tac.

" Quoi ! Tu oses me traiter de putain! Espèce de truie ! Non, mais tu t'es vu, avec ta gueule de poisson mort! Pas étonnant que ton homme soit parti ! Parce qu'avoir une tête de thon comme la tienne devant lui tous les jours, ça devait lui rappeler son ancien métier!"

Le ton montait entre les deux femmes si bien qu'elles en oubliaient Akhesh qui n'était plus de la partie. Il décidait de s'éloigner des deux femmes alors qu'elles en venaient aux mains et se crêpaient le chignon, créant un attroupement et une bousculade.

"Espèce de guenon!"

""Sorcière!"

Tout autour d'elles se formait un attroupement qui encourageait tantôt l'une, tantôt l'autre, tandis qu'elles se battaient comme des chiffonnières. Akhesh était pris au milieu de tout ça, alors qu'il n'avait pour objectif de trouver ce foutu marchand. Une bousculade, puis une seconde, pour savoir qui serait le mieux placé et voici qu'une personne lui rentrait dedans ou inversement. Allez donc savoir.
Il pivotait et se retrouvait face à un visage qui ne lui était pas inconnu. Lui !!! Comment était-ce possible ? Quelle chance pouvait-il y avoir qu'ils se trouvent précisément là, en même temps ? Car oui, c'était bien Keshâ qui se trouvait face à lui. Il n'avait pas spécialement changé, toujours ce ravissant minois et ce beau regard améthyste. Akhesh le dévisageait quelques instants de son regard azur avant se frayer un passage dans la foule et de passer son chemin. S'éloigner et vite avant que son nom ne s'élève.
L'avait-il reconnu ? Sans, aucun doute. Aussi se devait-il de mettre de la distance entre eux. S'étant éloigné, deux possibilités s'offraient au Strigoi, traverser la petite place devant lui ou bien s'engouffrer dans une espèce de ruelle composée d'étals encore fermés qui se trouvait à sa droite. Il optait pour la droite...


Codage par Libella sur Graphiorum
Mer 27 Déc - 16:18



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza


C’est avec l’innocence de la jeunesse que Keshâ déambulait entre les tentures colorées et les vapeurs parfumées des étals d’étoffes et de friture du marché de Qadsak. Une gaîté insouciante l’habitait. Après avoir aligné trente gardes sacrés d’un sommeil de plomb et fuit la capitale avec des notes dérobées aux archives du Concile, il sentait la pression s’alléger. Le frisson du méfait accomplit se fondait dans l’émerveillement des paysage ensablés de l’erg de Saleek.  Le long voyage dans  et l'anticipation des difficultés passées, c’était la première fois qu’il vivait le voyage au présent en profitant de chaque curiosité, de chaque rencontre.

Maëlstrom avait réussi à accrocher son attention en lui parlant de son totem d’invocation de Félinimbus, à la rouerie incomparable. Il expliquait l'avoir déniché au marché noir chez un commerçant un peu louche. Keshâ espérait à son tour pouvoir en trouver un à bon prix et déserta ainsi la caravane de marchands pour se fondre dans les ruelles. Protégé des flèches brûlantes du soleil par les tentures miteuses tendues au-dessus des passants, le jeune homme rabattit le turban indigo sur ses épaules, ne se faisant plus que clarté entre son ample habit de lin blanc.

Maëlstrom lui fit découvrir une ou deux spécialités culinaires et le fit approcher d’un charmeur de serpents, avant de le mener vers son trophée d’invocation. Le vendeur lui donna l’impression que son âme allait être aspiré par le Félinimbus s’il n’y faisait pas attention et lui donna un petit rouleau de prière adressée à Nagidir, sur un minuscule parchemin. Il en eut froid dans le dos.

Il allait avec Maëlstrom, puisque Seraphah ne leur avait concédé qu’une heure de halte avant de repartir au plus vite en direction des pyramides. Mais leurs chemins se séparèrent par accident. Un regard à gauche, un pas de côté et ils s’étaient perdus de vus. Il commença à errer comme un électron libre, tentant à demi de retrouver son ami et à demi de ne rien manquer des babioles exotiques qui lui attiraient le regard. Certaines femmes plus ou moins jeunes ne manquaient pas de lui sourire de toutes leurs dents, fascinées par la couleur de ses yeux.

Un attroupement bloquait le chemin un peu plus loin et des cris s’en élevaient. Ca bardait aussi à Aramila ! Keshâ se retrouvait à converger vers l’épicentre, plus attiré par la foule que par véritable volonté d’assister à la bagarre.

Tout à coup, son front heurta un mur de muscles. Il recula. La chaîne d'argent pendant à son oreille droite s'agita avec son pendant de pierre violette taillé en pointe. Figé comme la pierre, ses yeux d’améthyste se fondirent dans le bleu de celui qu’il venait de bousculer. Son esprit avait du mal à faire le rapprochement, mais son regard intense exprimait une telle incrédulité en retour que le doute n’était plus permis. C’était Ekiel.

Il était tellement différent, pourtant. Ses cheveux étaient longs et tressés, sa barbe sauvage et racée et tant de bijoux paraient son cou et ses oreilles. Quant à son corps dénudé… il eut fallu le percuter de plein fouet et entrer en contact avec son regard pour faire directement le rapprochement.

Comme un fantôme, Ekiel se détourna et fendit sans mal la foule de ses larges épaules. La marée humaine se referma sur lui, le laissant aucun espace pour le suivre. Passée la stupeur, Keshâ lui emboîta le pas, tentant de percevoir son crâne entre les têtes qui étaient parfois assez grandes pour lui masquer la vue. Pareille à une anguille, il joua des coudes, pivotant ses hanches pour se faufiler.

Keshâ pensait apercevoir le strigoi de l’autre côté d’une place. Ce jeu ressemblait étrangement à leur première rencontre. A présent qu’il était un fugitif recherché, il était peut-être plus dangereux. Aussi devrait-il se montrer plus prudent. Mais il était moins fragile qu’à l’époque. Et cela, Ekiel, si c’était vraiment lui, ne pouvait pas le savoir.

Au lieu de le suivre directement dans la ruelle où il l’avait vu s’engouffrer, Keshâ sauta sur un tonneau et d’un bond s’agrippa au rebord d’une fenêtre, avant de se hisser le plus discrètement possible jusqu’au toit. Le rebord friable de terre séché ne pardonnait pas l’approximation. Heureusement, l’escalade urbaine était son péché mignon depuis toujours pour prendre de la hauteur et fuir les ennuis. Contournant des fils à linges chargés de draps, il sauta l’infime espace entre deux bâtisses et vint se pencher en contrebas pour observer la position de sa proie.

Ekiel semblait toujours là, vérifiant derrière lui s’il était suivi. Keshâ se renfonça derrière l’angle du toit et devança quelque peu la progression du strigoi dans la ruelle. Il employa une ruse pour distraire Ekiel.

~ ° Par ici… ° ~ souffla un murmure dans son esprit sur sa gauche, légèrement en retrait derrière son épaule. Keshâ profita de la surprise pour marcher sur une poutre de bois allongée au-dessus de la ruelle, qui servait à accueillir les tentures lorsque les étals étaient occupés. S’y accrochant, il se laissa glisser souplement au sol. Il lui était bien entendu impossible de savoir que toute surprise était vaine si tant est qu’Ekiel aie activé son cristal de vision augmentée.
-« C’était donc vraiment toi. » déclara-t-il alors qu’ils se faisaient face.

La vérité est qu’il n’avait pas vraiment réfléchi à la suite. Sous l’impulsion du moment, il avait suivi Ekiel, animé par l’envie d’en avoir le cœur net. Et après ? S’il décidait de le supprimer, puisqu’il ne faisait aucun doute qu’il l’avait identifié ? Eh bien, tant pis pour lui.



Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Ven 5 Jan - 0:39, édité 1 fois
Lun 1 Jan - 13:52
Quand le destin vous joue un tour


Pourquoi avait-il fallu qu'ils se croisent ici et maintenant ? Tout avait été trop simple jusqu'à présent, beaucoup trop simple. Aussi fallait-il que le destin en décide autrement. Combien de possibilités y avait-il pour qu'ils se croisent de nouveau ? Une sur cent mille, un million ? Quoi qu'il en soit, il fallait qu'Akhesh s'éloigne de lui et vite. Il était recherché et le revoir c'était prendre le risque de se faire repérer, poursuivre et arrêter.
Alors oui, le Strigoi pressait le pas, se retournant de temps à autre pour s'assurer qu'il n'était pas suivi par Keshâ. Il semblait que non, mais son instinct lui soufflait que le jeune homme ne renoncerait pas, qu'il chercherait à s'assurer que c'était bien lui et pas le fruit de son imagination.
Tous les sens de l'ancien ministre étaient en éveil et son pouvoir de vision panoramique activé par mesure de sécurité. À vrai dire, il était presque toujours actif depuis sa fuite de Xandrie.
Dès lors, il avait mis tout en œuvre pour que l'on ne puisse pas lui tomber dessus et jusqu'à présent cela avait fonctionné à merveille. Aussi ne pouvait-il se permettre de tout compromettre alors qu'il avait refait sa vie ailleurs.

Sa vie était différente, loin du pouvoir et cela lui convenait parfaitement. Keshâ pouvait être celui par qui tout pouvait basculer et il ne le voulait pas. Si le jeune homme devait être un danger, si minime soit-il, Akhesh devrait l'éliminer comme il en avait éliminé tant d'autres depuis sa fuite. Il allongeait le pas, avançant rapidement dans la ruelle déserte, bifurquant à gauche, puis à droite entre les tentes et autres baraques. Seulement Keshâ avait emprunté un autre chemin. Un chemin plus aérien. Aussi, lorsqu'il atterrissait devant le Strigoi ce dernier le saisissait à la gorge de son bras gauche, prêt à en finir avec cet importun qui lui broyant la nuque.
Mais voilà, c'était Keshâ et l'homme en cavale ne lui avait pas jadis donné une chance de s'en sortir pour lui ôter la vie maintenant. Aussi relâchait-il le cou de l'Epistopolien où la marque de ses doigts restait imprimée. Il avait serré un peu trop fort. Et voici que la question franchissait les lèvres de Keshâ, demandant si c'était bien lui. Comme s'il ne l'avait pas déjà deviné. Comme s'il n'avait pas reconnu ce regard azuré et ce corps musclé qui l'avait percuté. Voulait-il sans convaincre en entendant la voix du Strigoi ? Akhesh reculait d'un pas, sur ces gardes, tous les muscles de son corps tendu. Il restait silencieux quelques secondes , une éternité.

"C'est moi. Mais, si tu es là pour la prime, tu sais où cela va nous mener, Keshâ."

Il venait de prononcer son nom, de son timbre de voix si particulier. Quiconque le connaissait bien pouvait aisément affirmer, les yeux fermés, qu'il s'agissait bien de l'ancien noble. Akhesh n'avait nullement envie de devoir en découdre avec son ancien protégé, mais si cela devait advenir, il le ferait sans état d'âme. On sentait que le Strigoi ne reculerait pas, le cas échéant. Il l'observait, se rendant compte que le miséreux d'autrefois avait fait du chemin. Tous deux avaient changé, mais jusqu'à quel point ?

" Passe ton chemin Keshâ. Oublie m'avoir croisé et même connu, c'est préférable."

Il passait près de Keshâ, le frôlant, ne souhaitant visiblement pas prolonger cet intermède. Plus pour le protéger lui que se protéger lui-même. Il ne savait que trop comment toute personne aidant ou même côtoyant un fuyard serait traitée par la suite et il ne  voulait pas ça pour Keshâ.


Codage par Libella sur Graphiorum
Ven 5 Jan - 2:58



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza


La chance était parfois farceuse. Même si plusieurs de ses rencontres fulminaient contre elle en la prétendant excuse des faibles, Keshâ trouvait qu’elle l’accompagnait bien souvent de façon avantageuse. Ekiel l’avait quitté d’une manière subite, laissant beaucoup de questions sans réponse et un sentiment d’inaccompli. Une telle projection dans sa nouvelle vie ne pouvait être qu’une opportunité. De quoi, on ne sait pas.

Car à sa surprise, la poigne coriace du strigoi se referma sur lui. Malgré le jour, il conservait encore une force prodigieuse. Sa pression intracrânienne augmenta drastiquement dans ses globes oculaires alors que l’air ne circulait plus dans sa gorge. Passé le choc, il se demanda s’il devait essayer d’atteindre la ceinture sur son torse à travers les replis de vêtements pour en tirer une potion de robustesse.

Mais Ekiel relâcha sa prise et battit en retraite. A son tour, il recula d’un pas en titubant, pris de toux, ses mains portées à la gorge. Un regard plein de rancœur frappait Ekiel alors qu’il reprenait haleine. Ses cheveux noirs dont il avait dû rafraîchir le henné pour continuer à faire illusion durant leur voyage en caravane tombaient sur son front en bataille.
-« Ocyän… » dit-il d’une voix sèche, la gorge encore endolorie.
« Je suis Ocyän. »
Son agacement était perceptible. Il jeta un regard derrière son épaule pour voir si ce n’était pas Ekiel, au contraire de lui-même, qui réduirait à néant la couverture aramilane de l’autre.

-« Si je voulais une prime, tu ne m’aurais plus revu après tout à l’heure, avant de te réveiller en prison. »

Il était un peu tard pour prétendre ne pas s’être reconnus. L’incohérence n’avait pas l’air d’effleurer Ekiel qui ne fit pas demi-tour, mais le contourna simplement comme un obstacle sur sa route.

-« N’es-tu pas curieux de savoir comment je t’ai retrouvé ? Il pourrait y avoir d’autres mercenaires à ta recherche au marché… » Ses yeux se levèrent vers les fils à linge entre les maisons comme si d’invisibles funambules les parcouraient.
« Peut-être même sommes-nous observés en ce moment même. » sous-entendit-il, un mince sourire étirant ses lèvres, indéchiffrable. Et si, depuis le début, Keshâ, le vagabond Epistote, n'était qu'un avatar d'Ocyän? Et si Ocyän était lui même un avatar caravanier?

Il ne savait pas ce qui le conduisait toujours à improviser des histoires à dormir debout dans les situations impossibles. Mais une fois lancé, il interrompait rarement sa comédie. Ekiel semblait s’être arrêté. Très bien, avait-il capté son attention.
-« Tu ne crois pas que je mérite des excuses ? Je sais que tu sais être rude, mais quand même, est-ce ainsi que l’on salue un vieil ami ? » Un œil appréciateur continuait d’analyser les improbables transformations dans la chevelure et la barbe d’Ekiel, qui passait sans aucun problème pour un combattant des dunes, rehaussé de quelques élégantes breloques.

C’était à se demander s’il s’agissait de Keshâ, à la personnalité plus effacée. Les mois avaient passés et ce qu’il avait dû faire pour arriver là où il était l’avait certainement changé en partie. A quel point ? Au moins à celui d’être capable de se couler quelques instants dans un personnage de composition.

-« J’ai une proposition… N’ait pas l’air si en colère, voyons. Tu pourrais me raconter un peu de tes nouvelles, entre fugitifs. En échange, je ne dirai rien à personne, jamais. »

Il était de fait lui aussi en cavale, à Aramila. Et ce, bien que personne ne connaisse sa véritable identité, sa nation ou même les motifs de l’effraction aux archives du Concile. La rumeur des meurtres de quatre gardes sacrés et l’effondrement dans un profond sommeil de trente autre n’était pas encore parvenue à Qadsak. Mais cela ne saurait tarder. Keshâ avait entendu des marchands de sa caravanes inventer des poèmes sur la voix démoniaque, emprisonnant les hommes dans un sommeil sans fin, car l’Église n’avait pas encore été en mesure de réveiller certains des gardes le lendemain des faits, au moment où le convoi de dromadaires et tamanains quittait la sainte cité pour l’erg de Saleek.

Ven 5 Jan - 13:56
Quand le destin vous joue un tour.



En saisissant Keshâ à la gorge, Akhesh avait ressenti l'envie primale de serrer encore et encore, jusqu'à sentir la dernière étincelle de vie quitter ce corps. Tuer pour survivre était devenu monnaie courante pour le Strigoi. Il n'avait plus aucun scrupule à laisser sa nature de tueur prendre le dessus. Seulement voilà, il ne pouvait se résoudre à le faire, pas à lui, pas comme ça dans une ruelle sordide. Une fois sa prise relâchée, son ancien amant portait les mains à son cou, pris d'une quinte de toux, le regard plein de reproches, titubant légèrement. L'ancien ministre le détaillait plus avant, insensible à ce qui se passait. L'individu avait teinté ses cheveux et le Strigoi s'en demandait la raison. Était-ce une fantaisie  ? Un moyen de passer inaperçu sur ces terres désertiques où sa blondeur cendrée aurait trop attiré l'attention ? À moins qu'il ne soit lui recherché pour quelques méfaits. Et voici qu'il affirmait s'appeler Ocyän, le répétant par deux fois, ce qui attirait un léger haussement de sourcil chez Akhesh. Un changement de nom, un regard derrière lui, cela ne trompait pas. Lui aussi devait avoir du monde à ses trousses.  Il s'interrogeait sur la raison avant de fusiller l'ancien blondinet du regard lorsqu'il lançait qu'il ne l'aurait jamais revu avant de se réveiller en prison. Il serrait les dents et balançait abruptement.

" Encore faudrait-il qu'ils aient le temps de s'emparer de moi sans crever avant!"  

Il était sûr de lui, comme persuadé que rien ne pouvait l'arrêter. Comme convaincu. Qui ne le serait pas après avoir été équipé d'une prothèse qui vous donne une force surhumaine, sans compter tout ce dont il disposait pour se tirer de n'importe quel mauvais pas. C'était comme cette chaleur qui semblait ne pas avoir d'emprise sur lui. Par quel miracle était-ce possible? Les Strigois étaient pourtant sensibles au soleil, non ?
Ils s'étaient reconnus, ni l'un ni l'autre ne pouvaient le nier, et cela, malgré leurs aspects physiques différents. Comme si cela ne suffisait pas, la tension montait d'un cran quand Ocyän en rajoutait, provoquant délibérément Akhesh alors qu'il était désireux d'en rester là. Il s'arrêtait alors que son amant laissait sous-entendre que des mercenaires étaient sans doute à sa recherche. Il ricanait alors et le fixait, un rien amusé.

"Si tel était le cas, tu serais toi aussi en péril, Ocyän."  

Il se rapprochait dangereusement, se penchait et murmurait d'une voix suave et chaude, tandis que sa main droite effleurait le visage angélique.

"L'idée de me retrouver seul avec toi dans un lieu exigu ne serait pas pour me déplaire."  

Son ancien amant jouait les provocateurs et bien le Strigoi faisait de même.

"Si nous étions suivis comme tu sembles l'affirmer, ils nous seraient déjà tombés dessus. Quant à savoir comment tu m'as trouvé, je dirais le hasard. Tu as été tout aussi surpris que moi lorsque nous nous sommes percutés. Cela ne trompe pas."  

Il laissait son souffle courir sur la peau d'Ocyän avant de s'écarter de lui, s'amusant une fois encore des paroles prononcées.

" Des excuses?! Un ancien ami?!"  

Il se frottait le menton en souriant.

"Je n'ai pas d' explication à te fournir. Tu sais certainement ce qu'il en est, à mon propos, puisque Xandrie et Epistopoli sont à ma recherche. La roue a tourné et je suis passé à autre chose. Quant à être ami..."  
Son regard courait sur Ocyän, laissant suggérer qu'il pensait à autre chose.

"Ami... J'avais une autre perception. Je me rappelle une nuit torride avec une personne désireuse d'en vouloir plus. M'avouant n'avoir jamais connu ça et avoir passé la plus belle baise de sa vie. Quant à être rude, cela semblait te plaire."  

Il jouait avec les mots, retournant la situation comme bon lui semblait, provoquant son amant qui semblait avoir pris de l'assurance depuis leur dernière rencontre. Cea lui plaisait d'avoir en face de lui une personne avec du répondant.  Jadis, Keshâ n'aurait jamais osé lui parler de la sorte. Son ancien amant lui proposait de passer un peu de temps ensemble afin de discuter et le Strigoi acquiesçait tout en retrouvant son sérieux. Il en avait fini de badiner pour le moment.

"Je ne suis pas en colère, juste méfiant. Cela n'est pas tourné contre toi. Suis-moi."  

Il l'invitait donc à lui emboîter le pas sans détours. Ils cheminaient dans le dédale des allées, tantôt tournant à gauche, à droite, s'enfonçant de plus en plus dans le bazar. Il était évident que le Strigoi connaissait bien les lieux, suffisamment pour ne pas s'y perdre.

"Tu as changé. Tes leçons ont-elles porté leurs fruits ? Sais-tu lire et écrire à présent ?"  

Même en cavale, le Strigoi avait fait en sorte de faire parvenir les fonds nécessaires à l'apprentissage de son protégé. Après tout, ils avaient passé un accord et l'ancien ministre tenait toujours ses engagements. Ils parvenaient devant une petite maison sans prétention, faite en torchis, dont Akhesh poussait la porte.

"Entre."  

Un dernier coup d'œil panoramique avant de pénétrer dans l'habitation à la suite d' Ocyän. A l'intérieur, tout le confort nécessaire. Des gros coussins moelleux au sol, un coin cuisine fonctionnel, un espace nuit et bain. Personne ne s'attendrait à trouver tout cela derrière les murs modestes de cette bâtisse. Même en cavale, le Strigoi gardait un certain mode de vie.

" C'est une de mes planques, compromise à présent. Installe-toi et mets-toi à l'aise. Tu veux boire quelque chose ? J'ai du thé, du whisky et une boisson locale pas mauvaise du tout qui enivre rapidement.  

Le Strigoi paraissait plus détendu.

"Tu m'expliques ça? "

Il désignait les cheveux teintés du jeune homme.


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Dernière édition par Akhesh Ménuza le Ven 1 Mar - 22:21, édité 1 fois
Lun 22 Jan - 18:59



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza


Ils n’étaient que deux pièces sur l’échiquier d’Urh balayé par les vents du Mandebrume. Le poids de leurs actions et la portée de leurs désirs étaient moindres. Pourtant, ils s’étaient retrouvés. Était-ce un hasard, ou une toile savamment tissée de coïncidences apparentes.

Face à sa mort imminente et la sensation de perte de ses sens, il ne lui restait plus que le bluff. Il cracha piteusement à plusieurs reprises quand le point d’Ekiel se relâcha.

-« Présomptueux. »

Loin d’être sûr de ses facultés, Keshâ se prenait néanmoins un peu moins pour une serpillère que lors de leur dernière rencontre. Il avait déjà relevé l’imprudence de son protecteur. L’avertissement s’était avéré prémonitoire, précédent sa chute de quelques semaines à peine. Toujours splendide, Keshâ constatait que Reyes-Ekiel était toujours aussi confiant en lui-même malgré sa condition de fugitif. Sa morgue était intacte.

-« La force ne fait pas tout. » ajouta-t-il sombrement, sans vouloir ouvrir un débat.

Aussi ne répondit-t-il rien quand Ekiel lui annonça qu’il serait aussi dans de beaux draps s’ils étaient poursuivis ; ce sans considérer la possibilité qu’ils pourraient œuvrer de concert avec les traqueurs, pourquoi pas en tant qu’aspirant caravanier ?

Son corps entier se raidit quand le strigoi approcha, redoutant une nouvelle attaque. Mais sa caresse le fit tressaillir tout aussi sûrement. Sa plus grande faiblesse serait de ne pas vouloir lui résister.
-« Tu marques un point. »

Sans le savoir, il profitait de derniers moments d’insouciance avant que l’échiquier ne se renverse et que le destin du continent ne s’accélère. Lui qui n’avait jamais vraiment eu d’adolescence se prenait au jeu de « faire le mur » en faussant compagnie à ses compagnons pour trainer avec de la mauvaise graine. La perspective qu’il évoquait de sa voix rauque lui faisait perdre toute mesure et il ne pensait plus qu’à se retrouver seul enfermé avec lui.

Un certain sens du danger l’aiguillonnait lorsque ce dieu du désert l’invita à lui emboîter le pas à travers les ruelles abandonnées. Ils gagnaient en effet à ne pas relater leur passé à voix haute au milieu d’un repère d’espions et de marchands mêlés au tout venant des vagabonds de Contade et d’Aramila. Cette procession silencieuse rendait sa promenade beaucoup plus intéressante, même s’il se demandait encore si Ekiel ne l’attirait pas simplement dans un endroit résolument plus écarté des foules pour lui régler son compte sans être dérangé.

Il était assez impressionnant pour Keshâ de constater à quel point le strigoi était à son aise dans le fourmillement d’impasses et de ruelles, se coulant entre les tentures et poutrelles basses comme s’il en était né. Alors que quelques mois plus tôt, il lui ouvrait les portes secrètes de la basse-ville d’Epistopoli. Curieux personnage que ce ministre métamorphe sinuant dans les quartiers malfamés.

-« J’ai beaucoup travaillé avec mestre Garibaldi. Il serait exagéré de prétendre que je suis aussi efficace qu’un lecteur natif. Cela me demande encore beaucoup d’effort et je fais preuve de lenteur. Mais je suis devenu autonome, oui… d’ailleurs, il n’a eu de cesse de m’inculquer en vain les bases des sciences physiques. Déformation professionnelle j’imagine. »
Il revoyait encore les tableaux de conversion du souffre et les écrits des premiers alchimistes tirés des archives de l’université, datant de l’époque de Sancta où les expérimentations étaient proscrites et ramenaient les savants au rang de clandestins.

Quand il entra dans la masure, Keshâ fut surpris d’y trouver un nid douillet, voire des plus confortables selon les standarts Aramilan. Bien qu’il soit désormais habitués aux prouesses d’élégance du Marquis, après un mois de déambulation sous un soleil brûlant, ce raffinement exotique était un délice pour les sens du voyageur.

Emerveillé, il répondit :
-« Oh mais je ne dirai rien. » fit-il mine de s’offusquer. « Croix de bois, croix d’airain, si je mens, je vais dans les Limbes… et puis, qu’est-ce que je gagnerai à te dénoncer ?... je veux dire : à part l’argent. Les gens comptent plus pour moi que la monnaie. Et je n’en manque plus autant qu’avant, d’ailleurs. »

Le jeune homme repéra un étalage de coussins colorés aux motifs attrayant pour s’accouder au sol. L’alcool n’attirait pas sa préférence. Il était néanmoins trop curieux pour laisser passer sa chance de faire couleur locale en découvrant quelques us et coutumes.

-« Je vais essayer cette drôle de boisson locale. Ça a quel goût ? C’est à base de fruits ? »
Ekiel paraissait plus relâché à présent qu’ils se trouvaient dans son domaine réservé. Il le trouvait plus beau ainsi. De fait, il n’avait pas l’air de vouloir mettre fin à ses jours. Le poison ne semblait pas être sa tasse de thé.

-« Oh… mes cheveux ?! Eh bien. Il y a moins de gens à Aramila qu’à Epistopoli. Entre les yeux lavandes, les cheveux cendrés, la peau blanche et un accent distinct, cela commence à faire beaucoup d’éléments pour attirer l’attention. J’ai voulu me fondre un peu plus dans le paysage, des fois qu’on recherche quelqu’un qui réponde à ma description. Et puis, je rêvais de savoir l'air que j'aurais eu si rien n'avait changé.»

Pas besoin de se ruer vers les détails. Il les lui demanderait sans doute assez tôt. Il devrait en éluder une partie. Cela faisait partie du jeu. Maintenant qu’il avait sa propre vie, des intérêts, il avait également des enjeux à protéger, des choses à perdre, des marchés à honorer.

-« Et… tout ça… » dit-il avec feu en effleurant les bouclette de sa barbe et en laissant ses doigts papillonner dans l’air en direction de ses tresses scandaleusement volumineuses et parées de bijoux dorés.

-« Qui se trouve aujourd’hui devant moi ? Un garde ? …. » Il ne lui laissa pas le temps de répondre, ses yeux se perdant dans la fiction qu’il bâtissait en goutant sa saveur. « Oh oui, j’aimerais bien me faire coincer par un garde tel que toi… mais ce serait dangereux de jouer à ce point de l’ignorance des autorités… un marchand peut-être ? Un marchands de pierres précieuses ? Qui s’appellerait…. »


Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Jeu 29 Fév - 15:10, édité 2 fois
Sam 27 Jan - 10:40
Quand le destin vous joue un tour.


Akhesh esquissait un mince sourire au mot présomptueux, comme si cette remarque lui passait au-dessus de la tête.

"Moi, présomptueux !  Allons, allons, c'est un bien grand mot, mon ami." 

Il accentuait volontairement sur le mot ami.

 "Je suis réaliste et quant à ma force et ce n'est qu'une infime partie de mes capacités. Je constate cependant que tu as pris de l'assurance depuis notre dernière rencontre. Tu t'affirmes. Je ne me suis donc pas trompé sur ta personne en te donnant une chance de t'en sortir. D'ailleurs, cela te réussit plutôt bien." 

Le suceur de sang sentait son amant se raidir, puis le léger tressaillement dont il était pris alors qu'il l'effleurait. Ainsi, il exerçait toujours les mêmes sentiments chez le jeune homme, la crainte et la fascination. En cela, rien ne semblait avoir changé, si ce n'est la condition de l'ancien chez d'État.
Contre toute attente, Keshâ s'était laissé guider au travers du bazar sans penser qu'il s'agissait peut-être d'un piège. Voilà qui était bien imprudent, mais en son for intérieur, Akhesh était certain que son protégé était à même de se défendre. Alors pourquoi aurait-il craint pour sa vie, en le suivant ? Lui, qui lui avait apporté le savoir et de l'argent.
Très vite, Akhesh apprenait que son amant s'était investi avec ténacité dans son apprentissage de la lecture et de l'écriture et cela tintait agréablement à ses oreilles, bien que ce dernier avouait être lent, mais qu'il se débrouillait bien.

"Je suis heureux d'apprendre que tes leçons de Garibaldi portent leurs fruits. Néanmoins le laisse pas t,embringuer dans les sciences, sauf si tu y trouves un quelconque intérêt .Garibaldi peut se monter pugnace de ce côté, mais c'est un excellent précepteur."

Ce qui était certain, c'est que Keshâ ne s'attendait pas à trouver un tel confort en entrant dans l'habitation. Il prenait pourtant vite ses aises, s'installant confortablement sur les coussins moelleux, comme s'il n'avait pas connu couche plus douce depuis plusieurs semaines.

" Si tu venais à parler, tu sais parfaitement ce qu'il t'en coûterait. De toute façon, si l'envie m'avait pris de me débarrasser de toi, je l'aurais dehors, pas ici. Les limbes attendront encore, je ne serais pas l'instrument de ton trépas. "

Akhesh ne relevait pas le fait que les gens comptaient plus que l'argent, mais notait que le jeune homme n'en manquait plus autant d'avant. Ainsi, il avait trouvé d'autres mécènes, rien d'étonnant à ça avec sa mignonne petite gueule. Contre toute attente, il annonçait vouloir goûter l'alcool local et Akhesh haussait le sourcil.

"Fort bien, je nous sers ça. Si tu as une gueule de bois demain, ne va pas te plaindre, tu es prévenu. C'est une liqueur faite à base de figue de barbarie. D'après ce que j'ai pu apprendre, les figues sont plongées dans un alcool de qualité afin que leurs arômes naturels soient préservés. Puis, l'ensemble est écrasé pour ensuite être filtré et mélangé avec un peu d'eau et du sucre."

Tout à son explication, Akhesh disposait deux verres et la bouteille sur un plateau et venait s'installer à son tour sur les coussins, posant le plateau entre eux. Venait la raison concernant la couleur de cheveux que Keshâ et cela tenait la route. Mais c'est une autre remarque qui retenait l'attention du Strigoi. Comment ça, il se pouvait qu'on recherche une personne qui puisse lui ressembler ? Dans quel merdier était-il donc allé se fourrer ? Et surtout, pour quel crime serait-il recherché ? Voilà bien des questions qui brûlaient les lèvres de l'ancien ministre et pourtant il se gardait de les poser, pour le moment.
Akhesh remplissait les deux verres tout en écoutant lorsqu'une main venait effleurer sa barde puis montait en direction de sa chevelure, retournant la question concernant la transformation physique. Il rebouchait la bouteille, laissant Keshâ jouer quelques minutes avec les dreadlocks avant de lui saisir le poignet et de l'écarter avec douceur.

"Ça et bien c'est le résultat de quelques mois de cavale. Et puis, on recherche un homme aux cheveux courts, sans barde, élégant et sobre, tout le contraire de ce que j'arbore présentement. Bon, je te l'accorde, j'ai un peu poussé sur les accessoires et autres bijoux, mais le résultat est plutôt pas mal et je me fonds parfaitement dans le décor. Je fais très couleur local. À croire que j'ai toujours vécu ici."

Il se penchait au-dessus du plateau, rapprochant son visage de celui de son amant et soufflait d'un ton suave.

"Quant à savoir qui se trouve devant toi... Que cela soit un garde, un caravanier, un marchand ou je n'ai quoi d'autre, cela importe peu. Je constate simplement qu'il semble te plaire énormément, n'ai-je pas raison ?  Tout ce que tu as à savoir, Ocyän, c'est qu'il s'appelle Akhesh et qu'il escompte bien profiter du moment."

Voici qu'une fois encore, il jouait de séduction, attisant le désir du jeune homme. L'attirant comme un papillon de nuit le serait par la lumière d'une chandelle. Mais, oserait-il une fois encore s'encanailler entre les bras du Strigoi. Comme pour le pousser à prendre une décision, le Strigoi passait une main langoureuse derrière la nuque de son amant et l'attirait à lui . Leurs visages ne se tenaient qu'à quelques centimètres l'un de l'autre.

" Alors, tentez ou nous en restons à une discussion plus terre à terre ?"



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Dernière édition par Akhesh Ménuza le Ven 1 Mar - 22:21, édité 1 fois
Jeu 29 Fév - 15:47



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza


L’intimité indéniable qu’offrait la maison de torchis les isolait du reste de Qadsak. Elle formait une bulle de silence, un monde reclus, où l’on oubliait la barrière si mince que représentait le bois de la porte d’entrée. Sans se montrer déloyal à sa mission ou ses amitiés, Keshâ se sentait dériver sur des rives oniriques, au point que les visages de Seraphah, Violette et Maëlstrom pâlissaient dans sa mémoire. La hâte de rejoindre la grande pyramide de Rhilek se faisait priorité distante.

Il avait le temps. Le temps d’agir, le temps de rêver et le temps d’être. Bien que tout ceci ne soit pas bien raisonnable. Après tout, combien de temps s’était-il écoulé depuis le début de son exploration du marché et sa recherche du totem d’invocation ? Depuis combien de minutes avait-il perdu Maëlstrom de vue ? Et combien de temps pouvait-il possiblement rester de l’heure de liberté allouée avant leur départ pour la partie la plus aride du désert. Bien difficile à dire. Sans doute très peu. Elles devaient se compter sur les doigts d’une main. Pourtant, Keshâ ne voulait rien presser de ce jeu de séduction qui chargeait l’air autour d’eux d’une polarité électrique.

-« Qui sait, peut-être un jour que ses leçons me serviront d’une manière tout à fait insoupçonnée. »

Mais ce n’était pas du vieux précepteur qu’ils avaient le plus envie de converser. Ses doigts redessinaient avec douceur les courbes des arabesques sur le tissus bariolé d’un coussin gonflé, comme une danse sensuelle distraite à laquelle il ne prêtait pas attention. C’était en effet plus confortable que la plupart des couches qu’il avait pu s’offrir depuis un long, long moment. Bien que… bien que certaines nuits en plein désert primordial aient été douces et chaudes.

En effet Keshâ n’était pas idiot. S’il avait dû jeter Ekiel ou qui ce soit en pâture aux autorités, il ne serait sans doute pas resté pour montrer sa face et s’attirer vengeance et perdition.

-« Je vais essayer de savourer sans trop en abuser. Je n’avais jamais entendu parler d’un tel mélange, ni d’un tel fruit. Tu es ici depuis longtemps pour connaître toutes les spécialités ? »

Il était assez plaisant de voir Ekiel disposer les éléments de service et verser l’alcool. Chacun des éléments dans sa matière et dans sa fabrication avait quelques choses d’exquis et d’exotique, dans le tintement des verres de petite tailleset moulés de formes originales sur le plateau d’argent ciselé, dans la dégringolade de la boisson liquoreuse où l’on devinait la dispersion de motifs épais. Cela changeait des repas de lézards grillés et de la quête d’efficacité et de discrétion permanente en présence d’une maraudeuse peu fréquentable.

-« C’est sûr qu’il y a plus de peaux mates dans cette région du continent et qu’on n’imaginerait jamais un nordique au goût si épuré dans une telle ambiance… c’est très réussi. »

Lorsque le visage du dénommé Akesh s’approcha de lui, il s’immobilisa. Le temps était toujours suspendu à leurs sous-entendus évidents. En effet, Akesh avait tout pour lui plaire et alimenter de nouvelles sortes de fantasmes.

-« Akesh me plaît. » Peu de mots pour beaucoup d’impression dans leurs yeux qui se frôlaient.
Dans les recoins ouatés de son esprit, le télépathe prétendait encore pour lui-même peser le pour et le contre, afin de se donner un semblant de scrupule sur l’opportunité de faire quelque chose de « mal ». Mais au fond, c’était tout décidé, il allait sauter à pieds joints dans les filets d’Akesh.

-« Nous aurons toujours une chance de parler après… »

Sur quoi sa main se plaça derrière la nuque d’Akesh et ses tresses volumineuses tandis que son corps approchait lentement pour combler l’espace qui les séparait. Dans ces actes non raisonnables et peut-être même dangereux vibraient une urgence de vivre abyssale qui voulait s’emparer de toutes ces années volées par la misère et la douleur. Pourquoi continuer de vivre un seul instant si ce n’était pas pleinement ?

Sa bouche rencontra les lèvres charnue du fugitif dans une union sensuelle et épicée, oubliant presque la dégustation promise de l’alcoolature aux figues de barbaries, pressées et distillées avec tant d’amour par les femmes Aramilanes. Rien ne vint contrarier ce rapprochement, si bien que son torse se pressa bientôt contre lui, sa respiration devenant soudain plus complète et profonde. Il y avait de l’excitation, mais aussi quelque chose de familier et de réconfortant dans la figure tentatrice et dangereuse qu’incarnait pourtant Ekiel… ou devrait-on dire, à présent, Akesh.
Ven 1 Mar - 18:00
Quand le destin vous joue un tour + 18


Ils étaient installés confortablement, face à face, si près l'un de l'autre que la peau noire sentait le souffle de Keshâ lui caresser la peau. Cet homme lui plaisait depuis leur première rencontre. Il avait ce petit quelque chose que d'autre n'avait pas. Son côté fragile, sa timidité déguisée, son magnifique regard, le goût de son sang, tout n'était que tentation pour le Strigoi. Il fallait bien se l'avouer, il avait un faible pour lui, mais ça, le blondinet n'en saura rien. Cette faiblesse pouvait être une arme qui servirait à exercer une pression contre l'ancien ministre et il ne souhaitait en aucun cas que cela arrive. Il ne voulait pas mettre la vie de Keshâ en danger. Côtoyer un fugitif était déjà un danger en soi. En cas d'arrestation, il pourrait être inculpé pour avoir dissimulé le fait de savoir où se trouver le fuyard. Le Strigoi ferait tout pour que cela ne se produise pas.

Akhesh n'était pas très concentré sur les réponses que lui donnait Keshâ, amusé de le voir dessiner du bout des doigts des arabesques sur un coussin. Le mouvement était d'une telle sensualité que cela ne faisait qu'attiser le désir d'Akhesh et le manque ressentit ces dernières semaines.
Il ne notait que le « Akhesh me plaît » et cela eut le mérite de flatter son égo. Ils jouaient au jeu de la séduction et cela marchait si bien, que bientôt Keshâ se décidait à laisser libre cours à ses envies. Il passait une main derrière la nuque du Strigoi et l'attirait à lui en venant quérir un baiser sur les lèvres de son amant à la peau d'ébène. Bien vite, le baiser se faisait plus passionné, comme si le jeune homme voulait combler un manque. En moins de temps qu'il ne faut pour le dire, il se pressait contre le torse d'Akhesh dans un abandon total. Leurs respirations et leurs langues se mêlaient et bientôt cela ne leur suffit plus. L'air était chargé de tension, une tension qui ne demandait qu'à être relâchée, alors pourquoi s'en priver ? Comme venait de dire Keshâ, ils parleraient plus tard.





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Lun 4 Mar - 5:06



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza



On ne pourrait pas l’accuser d’avoir cherché à provoquer cette rencontre, dans ce contexte totalement improbable. Seulement de ne pas avoir tenté de s’y dérober. Il plaisait à Keshâ’rem de se sentir beau dans les yeux de quelqu’un. Encore plus s’il s’agissait de ceux d’Akesh, qui fleurait bon le danger. Il lui permettait de vivre sa fragilité, de se sentir protégé, tout en explorant de nouvelles strates d’animalité. Dans son idéal de pureté, ses déviances étaient réfrénées. Se formait ici un tandem parfait pour vivre la provocation et la tendresse sous une même bannière d’abandon.

Quand Keshâ exposa toute sa nudité, Akesh put voir la peau qu’il était parvenu à conserver blanche, malgré les rayons dardant du désert aramilan. Celle de son cou avait eu le temps de cicatriser. Mais elle portait encore la signature possessive des crocs d’Ekiel, écrite en rose vif comme toute cicatrice fraîche.




Mer 6 Mar - 19:31
Quand le destin vous joue un tour + 18



Sans doute qu'Akhesh n'aurait pas dû conduire Ocyän jusqu'à sa planque. Regardez, où ils en étaient à présent à baguenauder de la sorte, laissant libre cours à leurs envies les plus folles. Seulement voilà, au lieu de garder la tête froide, ils avaient craqué et le moins que l'on puisse dire, c'est que la situation était troublante et pas commune. Le Strigoi vivait au présent et Ocyän était trop désirable pour passer à côté de l'occasion. Il savait que son amant aimait jouer, mais là, cela dépassait l'entendement et  toutes ses espérances. Le raisonnable n'était plus d'actualité, la luxure prenait place dans toute sa splendeur pour leur plus grand désir et plaisir.



Voici que soudain, des pas rapides se rapprochaient, que la porte s'ouvrait à toute volée sur une gamine au teint sombre. Elle ressemblait à une poupée, tellement elle était mignonne.

"Papa... papa...!"  

Elle n'avait de cesse de regarder derrière elle, comme pour s'assurer que personne ne la suivait avant de refermer la porte sur elle. Son regard se fixait médusé sur les deux hommes délicieusement alanguis sur les coussins. Elle les observait longuement, tour à tour, avant qu'un sourire carnassier n'apparaisse sur son visage d'ange.

"Ô tu as ramené le dîner à la maison, chouette! Mais tu aurais pu m'attendre avant de commencer."  

Elle tapait du pied et on sentait une pointe d'agacement dans sa voix. Akhesh secouait la tête, dépité.

"Ocyän n'est pas le repas. Alors montres-toi un peu plus avenante.  

Une moue contrariée et un regard sur l'amant de son père.

"C'est trop nul. Parce qu'il a l'air vraiment bon."  

Une lueur espiègle dans les yeux avant de se passer la langue sur les lèvres.

"Einéris! J'ai dis, non!"  

Il connaissait l'appétit démesuré de la petite et plus encore ce dont elle était capable quand elle avait faim.

"Mais papa...!"  

"C'est NON!"  

"Bon d'accord, mais c'est pas marrant.

Elle pouffait, comme résignée. Puis comme si de rien était, venait s'installer entre eux, les forçant à l'éloigner l'un de l'autre. Elle se blottissait contre Akhesh, comme pour signifier qu'il était à elle et à personne d'autre.

" Dis. Tu le connais depuis longtemps, mon papa ?

Elle tendait le cou en direction d'Ocyän.

" Waouhhh....  tes yeux, ils sont trop beaux. J'aimerais bien avoir les mêmes."  

Elle affichait un sourire enjôleur comme si elle était désireuse de le séduire. Si petite et déjà la digne héritière d'Akhesh.  Mais depuis quand Akhesh avait une fille ????


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Lun 18 Mar - 6:42



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza


Ça pour ne pas oublier, il n’oublierait pas cette expérience mordante. Enfiévré de plaisir, aveuglé et attaché à la merci du ligotage, Öcyan avait subi les assauts du strigoi. La folie du moment portait à tout accepter, sans bien se rendre compte. Les cris de souffrance se mêlaient en un seul son à ceux du plaisir. Et sa tolérance à un seuil élevé de douleur ne l’avertit que trop tard que son amant perdait le contrôle et s’apprêtaient à le drainer de toute trace d’hémoglobine tout en le déchiquetant gaiment.

Akesh l’avait déjà hardiment mordu au cou, à droite, juste sous sa cicatrice récente, et à l’intérieur de la cuisse gauche, quand il entreprit de s’en prendre à son poignet gauche et que le jeune homme commença à protester plus franchement. La blessure s’en trouva donc moins profonde et l’hémorragie s’arrêta là.
Une moue courroucée plissait les lèvres de l’Epistote.

-« Non ça ne va pas ! … malotrus… »
Il était confondu. En même temps, il était clair qu’Akesh avait fait griller quelques ampoules dans le siège de sa raison en l’accablant de tels niveaux d'électricité extatiques. Ce à quoi il s’était soumis, ce qu’Akesh lui avait fait, dépassait ce qu’il pouvait imaginer de ses expériences précédentes avec les hommes. On aurait pu dire qu’il connaissait les risques. Quelques bleus, être malmené. Mais, avec ces dents, il fallait faire attention. Au fond de lui, le jeune homme s’en voulait d’avoir pris les règles de prudence par-dessus la jambe et espérait que ces vilaines blessures ne poseraient pas de problème pour la suite de sa mission. Ou qu’au moins elles ne s’infecteraient pas. Si Akesh lui avait fait ça sur la fesse, Keshâ'rem ne l'aurait jamais pardonné. Déjà, il rougissait, non de colère, mais de honte, en s'imaginant expliquer son retard à Maëlstrom tout en étant porteur de tels stigmates.

Il était occupé à faire un bandage de fortune avec des étoffes basiques quand il se rapprocha à nouveau de son amant, mi-énervé, mi-chaviré.

-« T'es un animal, Akesh! Tu as failli me saigner à blanc. Heureusement que tu es un dieu dans ton genre. Parce que je ne peux pas me permettre trop souvent pareilles retrouvailles. »
Une part de lui n’assumait pas ces nouvelles cicatrices, véritables scarifications sur sa chair. Passerait-il de dire qu’un zoanthrope fou furieux les lui avaient faites avant qu’il ne l’achève ? Son corps finit par se couler à nouveau contre celui, musculeux, du strigoi, débordant de contentement. Son sursaut de fureur ne le laissait pas moins pulsant de satisfaction, étourdi de langueur amoureuse.

L’irruption d’une silhouette le fit tressaillir, aussi sûrement que si la garde sacrée criait l’avait encerclé et le sommait de se rendre sur-le-champ. L’incrédulité succéda à la stupeur lorsqu’il décrivit les traits de la ravissante poupée brune. Elle appelait Akesh… papa ?! Comment était-ce possible, qu’après , seulement quelques mois…

Ses yeux d’améthyste voguèrent d’incertitude entre Akesh et la nouvelle venue.

-« Le dîner ? » interrogea-t-il, outré. En même temps, ce n’était pas tout à fait faux. Hein, glouton ! Pour un peu, il lui aurait dit qu’elle arrivait trop tard et qu’il ne restait plus rien à becqueter au buffet. L’absurde de la situation finit par prendre en épaisseur. En plus d’être une petite fille diabolique prête à le partager avec son « papa », cette bouille d’amour était en train de les dévisager dans leur plus simple appareil, dans une complicité assez choquante… mais personne n’avait l’air de s’en formaliser. Sauf Öcyan bien sûr. Sa gêne allait croissant tandis que la main d’Akesh posait un geste possessif sur son giron, dissimulant heureusement par là-même son sexe à la vue de la petite fille.

Mais son sort aurait dû le préoccuper davantage car une négociation surréaliste se jouait entre la fille et la figure paternelle pour savoir si elle avait le droit de le dévorer. Qu’elle essaye, la morveuse ! Un coup de talon dans la mâchoire pour lui apprendre les bonnes manières… fulminait-il mentalement, alors que la scène suivait son cours rapide. Seuls ses yeux, un brin méchant lui adressaient des signaux noirs et menaçants.

Abasourdi, les endomorphines l’empêchaient de se lever d’un bond et de jeter à la rue cette visiteuse indécente, envers laquelle Akesh se comportait effectivement comme un père. Version strigoi. De l’enfer.

Pas le temps de s’indigner proprement. La petite Einéris leur marcha dessus et se tortilla de manière inconvenante entre leurs nudités pour se frayer un chemin sur le poitrail de son père, dans une ostensible démarche d’appropriation. Öcyan ne put que reculer de son mieux pour mettre de la distance entre son corps et le sien. Il jeta sa main à la recherche d’un pantalon échoué sur le sol brut par-delà la mer de coussins.

-« Assez longtemps pour ne pas être complètement paralysé par la situation… pas assez longtemps pour la trouver normale. » répliqua-t-il à la fillette.

-« Et moi, j’aimerais rester jeune à jamais. Chacun ses dons. »
Il s’était relevé de guingois. La douleur de la morsure à la cuisse se faisait cuisante, à présent que l’excitation était retombée. De dos, il enfila au plus vite ses vêtements.

-« As-tu l’intention de t’expliquer… Akesh ? » asséna-t-il en se retournant vers l’intéressé, tout en ajustant les plis de sa tunique au niveau des manches, de manière à masquer au mieux son bandage empourpré.
« Rendu là, je crois que le nid de guépard qu’est cette cachette n’est pas le clou du spectacle. Comment as-tu fait ton compte ? … »

Encore en train de recouvrer ses esprits, il brisa là, attendant que vienne une réponse plus complète d’Akesh avant de s’enferrer. Il n’y connaissait rien dans le fait d’élever un enfant. Et on ne lui demandait pas son avis. D’ailleurs, mieux valait un parent boiteux que pas de parents du tout. Il était bien placé pour en savoir quelque chose. Mais ce qu’il voyait là semblait être un modèle d’éducation désastreux.

-« Einéris ? … tu veux bien… nous laisser parler « papa » et moi ? »
« Mais où veux-tu que j’aille, beau nigaud ? » répliqua-t-elle d'une voix rieuse qui traduisait combien elle s'amusait follement.

-« Hmm, tu dois bien avoir des jouets quelque part. Va dans la cuisine ou la salle de bain, s’il te plaît… »
Il dit cela car c’étaient les seules pièces fermées de la cahute bohème.

Mer 20 Mar - 17:48
Quand le destin vous joue un tour



Il est vrai qu'Akhesh n'y était pas allé de main morte. Il en avait conscience, mais le sang de son amant avait un goût si particulier qu'il était bien difficile de résister. Il était si bon... Alors oui, il s'était rendu compte qu'il était allé trop loin, qu'il n'aurait pas dû le mordre autant de fois, mais cela avait été plus fort que lui. Il n'avait pu réfréner sa soif de sang. Enfin si, puisqu'il s'était arrêté à temps afin de ne pas lui ôter la vie . Chose dont il ne se souciait plus depuis sa fuite de Xandrie. Il ne comptait plus le nombre de cadavres laissé derrière lui et c'était pire maintenant que Eineris vivait avec lui

Il n'aurait jamais pensé que Keshâ puisse avoir un seuil de douleur si élevé, c'était curieux pour un humain. Il le savait spécial sur les bords dans certaines pratiques d'ordre sexuel, mais de là à imaginer qu'il aimerait conjuguer douleur et plaisir, c'était tout autre. Ce n'est pas notre Strigoi qui allait s'en plaindre, loin de là. Cependant, bien que le moment fut un pur délice, pour ne pas dire une apothéose, il notait la moue contrariée de son amant. Et ce qu'il redoutait ne tardait pas à lui parvenir aux oreilles. Des reproches dans un semblant de colère mêlée. «Malotrus », le mot était fort et empreint de vérité. Il est vrai qu' Akhesh avait manqué de délicatesse lors des morsures alors que d'ordinaire, il faisait cela avec plus de douceur. Cela l'atteignait bien plus qu'il ne le pensait. Il prit cela comme une sorte de rejet de la part d'Ocyän, mais restait impassible. À peine une légère tension dans la mâchoire l'espace de quelques secondes.

Sitôt que son amant venait se lover contre lui, tout cela disparaissait comme si c'était déjà oublié. Le risque était présent et cela Ocyän ne l'avait réalisé que trop tard et quelque part Akhesh s'en voulait de n'avoir pu se retenir et de n'en rester qu'à une seule morsure, voir à pas de morsure du tout. Oui, il regrettait et pas qu'un peu. Mais voilà, l'odeur de sa peau, sentir palpiter les veines dans lesquelles le sang affluait, le goût de son sang resté en mémoire, tout cela n'avait contribuer qu'à lui faire perdre sa maîtrise de lui-même et il s'en voulait suffisamment sans qu'il soit utile d'en rajouter.
Akhesh regardait Ocyän confectionner un bandage de fortune autour de son poignet ensanglanté et son regard changeait d'expression. Instinctivement, ses canines sortaient avant qu'il ne les rétracte aussitôt. Non, il devait se maîtriser, contrôler ses pulsions primaires, pour ne pas dire animal, comme il le faisait jadis. Seulement , depuis que la petite Eineris était entrée dans sa vie, cela lui était plus difficile, car il devait se charger de son éducation et tout lui apprendre, même à se nourrir correctement. Et là, c'était une autre histoire.
Alors que son amant était collé à lui, encore sous les effets de leur cinq à sept torride et pour le moins particulier, il prenait une autre réflexion qui cette fois ne l'atteignait pas autant que la première. Sans doute parce qu'Ocyän avait ajouté une petite phrase qui venait flatter l'égo du Strigoi.

" Un animal, rien que ça! Tu y vas fort, Ocyän . Mais je te l'accorde, je n'ai pas su être doux. J'ai comme qui dirait laisser mes pulsions animales l'emporter sur la raison. Ce qui me conforte, c'est que tu me compares à un dieu dans ce domaine, c'est déjà un bon point." 

Il déposait un baiser sur les lèvres de son amant.

"Promis, la prochaine fois, je ferais en sorte de me contenir. Ça te va comme deal ? Ça va laisser de vilaines marques, surtout ces deux là. "

Il désignait celle du cou et celle de la cuisse.

"Je dois avoir quelques onguents qui pourraient arranger ça." 

A peine venait-il de prononcer ces mots que Eineris faisait irruption et qu'un échange se faisait. Un échange pour le moins étrange. Akhesh la savait bornée, mais là, c'était au-delà du réel. Voici qu'elle entamait la discussion avec Ocyän, comme si de rien était. Comme si elle n'avait pas proposé de le dévorer, il y avait quelques secondes à peine. Et cette manie qu'elle avait d'écarter toutes les personnes qui s'approchaient du Strigoi, comme s'il n'était qu'à elle, devenait agaçante. Akhesh allait devoir lui parler sérieusement et lui apprendre une ou deux petites choses sur les relations.

"Ne t'inquiète pas Ocyän. Je veille au grain. Elle ne tentera rien. "

Puis à la filette qui s'était blottie contre lui.

"N'est-ce pas que tu sauras te montrer gentille et courtoise avec mon invité, Eineris."

Il y eut un flottement qui semblait infiniment long avant qu'elle ne fixe Akhesh dans les yeux et ne lui répondre.

 "Je te le promets. Il ne lui arrivera rien parce qu'il est ton ami. Donc pas association, il est aussi le mien." 

Un magnifique sourire. La conversation entre Ocyân et Eineris se poursuivait de plus belle, chacun y allant de ses questions et de ses réponses. Akhesk laissait faire jusqu'à ce que la petite ne dépasse les bornes niveau langage en traitant le jeune homme de beau nigaud.

" Eineris ! Ce ne sont pas des manières. Excuse-toi."  

Elle se renfrognait et émettait un grognement de contrariété, mais s'exécutait.

"J'ai été impolie. Désolée."  

Lorsque Ocyân demandait à Akhesh de s'expliquer, elle eut une petite moue avant de se lever afin de les jauger tous les deux du haut de ses six ans, mains sur les hanches. Et lorsque Ocyän lui demandait d'aller ailleurs, elle pestait.

" Oh ca va, j'ai compris. Tu veux que je disparaisse pour rester tout seul avec MON papa."  

Akhesh se devait d'intervenir une fois de plus.

"Eineris,J'aimerais que tu nous laisses un moment, s'il te plait. Nous devons nous entretenir de certaines choses en privé. Tu comprends, n'est-ce pas ? Va faire quelques emplettes, il y a de l'argent sur l'étagère de la cuisine.

" Je comprends surtout que vous voulez vous débarrasser de moi. "

Elle tapait du pied,énervée .A peine venait-elle de dire cela que le Strigoi l'attrapait sans ménagement par le poignet et l'attirait à lui. Son timbre de voix était ferme et on sentait de la colère. La coupe semblait être pleine.

" Je n'ai que faire que tu sois d'accord ou non. Je t'ai demandé quelque chose, alors fait-le. Et crois-moi qu'à ton retour, on aura une sérieuse discussion, jeune fille." 

Elle sortait les crocs de colère et se détachait de l'emprise d'Akhesh d'une geste brusque avant de rafler l'argent et de sortir en claquant la porte. Akhesh se laissait tomber en arrière sur les coussins, poussant un profond soupir.

" Cette gamine est impossible."  

Il prenait quelques secondes avant de répondre à l'interrogation d Ocyan.

" Les choses ont bien changé depuis ma fuite de Xandrie. Je ne suis plus aussi mesuré que je l'étais jadis, mais ça tu t'en es rendu compte. Quant à elle, cela fait quelques semaines qu'elle vit avec moi et c'est très compliqué.
Je suis tombé sur elle alors que je chassais. Elle était dans un tel état de misère et de crasse que sur le moment, je me suis demandé si c'était un être humain. Et puis quand son regard à croiser le mien, j'ai compris que j'étais le premier qu'elle rencontrait. Qu'elle n'avait jamais vu une personne comme elle avant . Son regard s'était illuminé comme si elle venait de trouver un rocher auquel s'accrocher en plein naufrage.
Sur le moment, j'ai d'abord pensé l'éliminer vu sa condition et son petit âge et puis je ne suis revu quelques décennies plus tôt alors que mon père adoptif me donnait une chance de m'en sortir, d'avoir une autre vie que celle que j'avais eu jusqu'à lors. J'ai pensé qu'avec elle, il serait plus aisé de lui apprendre, vu qu'elle était encore une enfant, mais je ne m'attendais pas à ce que cela soit aussi difficile. Elle n'a aucune retenue et ne connait rien des Strigois, ni des relations avec autrui. Elle
est comme un ouvrage vierge où tout est à écrire. Elle a fait beaucoup de progrès en peu de temps, je dois l'avouer, mais elle reste encore très bestiale. Etre son tuteur s'avère plus difficile que ce que je pensais. Je me demande comment Vladimir a pu me supporter alors que j'étais un adolescent rebelle à l'époque. S'il était encore de ce monde, je lui tirais mon chapeau."


Il fermait les yeux quelques secondes avant de se redresser et de se lever, à la recherche de ses vêtements. Et tandis qu'il s'habillait, il poursuivait.

" Elle s'est prise d'affection pour moi et j'ai beaucoup de mal avec ça. Et plus encore, depuis qu'elle m'appelle papa. Cependant, je n'ai pas le cœur de lui dire afin de ne pas la peiner. Elle a été suffisamment éprouvée par la vie pour que je vienne en rajouter.
Je n'ai appris que peu de chose à son sujet, si ce n'est son nom et qu'elle était venue au bazar avec sa famille. Elle dit s'être perdue, mais je penche plutôt pour un abandon quand ils ont découvert sa vraie nature. D'après les quelques informations que j'ai pu glaner, elle vivait dans les rues depuis une bonne année. Je me demande d'ailleurs comment elle a pu survivre jusque-là. J'ignore si je parviendrai à lui inculquer la modération et à lui donner suffisamment de base pour s'en sortir dans la vie, mais je ferais de mon mieux. Elle peut se montrer adorable en bien des circonstances, mais elle est aussi une redoutable tueuse. Je l'ai vu à l'œuvre et crois-moi, ce n'est pas beau à voir.  Si je ne parviens pas à lui enseigner l'art de se maitriser, elle ne vivra pas longtemps. C'est pourquoi je veille sur elle et elle sur moi, à sa façon. Tout à l'heure quand elle s'est immiscée entre nous. Cela n'avait rien de personnel contre toi, c'est juste qu'elle est très possessive envers moi et je crains que ça empire avec le temps. Je n'y connais rien en gamin alors éduquer Eineris est un vrai challenge. Elle est comme moi,  Strigoi et je ne peux la laisser livrer à son sort, plus maintenant. "



On sentait qu'il s'était attaché à la gamine, mais qu'il était désemparé face à tout ça. C'était nouveau pour lui et il ne savait pas encore comment l'appréhender.


Codage par Libella sur Graphiorum
Mer 3 Avr - 19:12



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza

Le mal était fait. Quelque part, c’était bien de sa faute. Rendu là, inutile de s’alarme davantage. Il n’avait pas l’impression de faire d’hémorragie, mais c’était la dernière fois qu’on l’y prendrait. L’orphelin se sentait à la fois remonté envers le strigoi et transi de l’intensité qu’il lui avait fait ressentir.

Akesh déposa un baiser au goût métallique de son propre sang sur ses lèvres. La remarques sur ses cicatrices à venir était douloureuse, car c’était bien la conséquence la plus durable de ce fantasme réalisé. Et son corps était bien le capital qu’il avait possédé en plus grande quantité durant longtemps pour perdurer dans l’existence. Sans compter que sa beauté était ce sur quoi il fondait le de confiance qu’il avait en lui.

Heureusement, Akesh parlait d’onguet pour limiter la catastrophe. Mais la petite peste s’était greffé à leur échange. Il n’était pas d’accord pour être son ami. Comme cela semblait le protéger de sa folie carnassière, il préféra laisser couler.
-« Excuses acceptées. »

La scène d’autorité paternelle lui paraissait ubuesque. Confronté à l’aspect cocasse du rôle paternel d’Akesh, il se remettait de l’archétype du sauvage aux canines ensanglanté qui lui grimpait dessus quelques minutes auparavant.
-« Tu es fûtée, Eineris ! » ne put-il réprimer en étouffant un rire naissant alors qu’elle donnait dans la représentation dramatique.

Toute la dérision qu’il pensait tirer de sa provocation s’évanouit au moment où Akesh haussa le ton. Une part de lui était soudain effrayé qu’il se mette à la frapper et à lui crier dessus, comme si des souvenirs trop vivaces refaisaient violemment surface sans ses tripes.

-« Elle en tient une couche dans le domaine de l’insupportable. En même temps, elle ne doute de rien ! Comment t’es-tu retrouvé avec elle ? »

Il ne s’était pas attendu à ce qu’Akesh s’épanche autant. Le strigoi avait toujours était peu loquace. C’était à présent un livre ouvert qui révélait son périple et son intériorité. Keshâ se radoucit et s’assit sur un maroquin pour l’écouter en comprimant ses plaies. C’était un peu gâcher, mais l’alcool de figue de barbarie servi fit office de premier désinfectant. Son visage se plissa de douleur. Au moins, la figue de barbarie avait aussi des vertus cicatrisantes, à défaut de recevoir les onguents promis dans l’immédiat.

Tandis qu’il écoutait le récit de la rencontre avec la jeune orpheline, son regard se voilà. Il prit l’autre verre de figue de barbarie pour tremper cette fois ses lèvres dans le liquide brûlant. Des sentiments aussi contradictoires que les arômes présents dans son palais se développaient en lui. Keshâ’rem aurait pu rebondir sur plusieurs morceaux de cette histoire, mais il pressentait que son amant n’attendait pas forcément de commentaire, comme s’il avait besoin de temps pour décanter sans être interrompu avant de reprendre.

La pensée de tous les crimes commis par la strigoi l’accablait. Peut-être en effet aurait-il mieux fait de mettre un terme à ses jours. Pensée cruelle, mais salutaire pour la communauté. En même temps, Eineris était une victime, tout comme il l’avait été. Elle avait juste plus de combativité.

L’orphelin prit Akesh par les épaules avec douceur.
-« C’est bien que tu aies pu me parler de ce que tu avais sur le cœur. Tu ne dois pas avoir beaucoup de personne avec qui partager ce que tu traverses. »

Keshâ approfondit son étreinte en plaçant son front sur le torse d’Akesh, dont la chaleur le rassurait, même dans la fournaise aramilane. Il leva ses yeux de lilas vers l’océan bleuté du strigoi.

-« L’un dans l’autre, vous avez chacun trouvé une famille… si je comprends bien. C’est sûr que c’est pas banal. Mais vous vous comprenez et vous vous aimez… »


Il ne savait pas comment continuer sa phrase sans se montrer maladroit. Ses yeux s’embuèrent. Sans savoir pourquoi, il était tout à coup ému. Peut-être passait-il en revue sa longue errance sans personne à aimer. Il savait que les couteaux de la solitude étaient plus aiguisés que ceux des bandits. Puis il se rappela la chaleur du foyer qui l’attendait auprès de Maëlstrom et Seraphah… lesquels devaient d’ailleurs être sacrément en pétard de sa présente désertion.
Au final, il avait du mal à détester la petite pimbêche à dents longue.

-« La situation a l’air compliquée pour vous deux. Surtout, ne vous faites pas attraper. Mais je comprends combien c’est important pour toi de t’aider. Vous êtes de la même espèce. Et tu as aussi été orphelin… Quelque part, ce grand défi te donne un but à travers cette nouvelle vie... peut-être de vous réparer tous les deux, ensemble. »

Avec tout son amour, il déposa un baiser sur les lèvres d’Akesh. Pas au nom de la relation érotique qu’ils entretenaient. Pas au nom de quelque déclaration romantique. Juste comme un don, pour cette âme tourmentée qui s’était ouverte à lui.
-« Tu parlais de chasse… promet-moi que vous ne faites pas de mal à des innocents. » demanda-t-il, soucieux.
-« Akesh… promet-moi que tu lui apprendras la bonté et que tu las garderas aussi comme ligne de conduite. »


Lun 8 Avr - 15:25
Quand le destin vous joue un tour.



Akhesh avait un rire nerveux au mot insupportable, concernant la petite.

 " Tu ne crois pas si bien dire. Eineris est impulsive, sans gêne, jalouse et capricieuse, comme tu as pu tant rendre compte. Elle m'insupporte par bien des côtés. La vie n'a pas été tendre avec elle. Je ne lui cherche pas des excuses, loin de là. Mais c'est aussi une petite fille courageuse, combative, attachante et créative. L'autre jour, elle m'a sorti tout sourire que lorsqu'elle sera grande, elle se marierait avec moi. Je n'ai pas su quoi lui répondre, tant cela m'a surpris. "  

Le Strigoi avait ensuite expliqué à Keshâ comment ils s'étaient rencontrés et toutes les difficultés qu'il rencontrait depuis lors avec la gamine et ce n'était pas rien vu la façon dont il s'était étendu sur le sujet. Ce n'était pas dans ses habitudes de parler autant et encore moins de soucis qu'il pouvait traverser. Peut-être qu'il en avait besoin tout simplement. Et puis les mots étaient venus si naturellement qu'il n'avait pu endiguer ce flot de paroles. Il avait parlé longuement et tout n'était qu'en rapport avec Eineris. Il n'avait parlé de lui que très peu, en mentionnant sa fuite de Xandrie et affirmant qu'il n'était plus le même, c'est tout. Aussi, lorsque son amant assurait qu'il avait bien fait de parler et qu'il ne devait pas avoir beaucoup de personne avec qui partager, le Strigoi haussait les épaules.

" Parler ? Avec qui ? La seule personne avec qui je parlais était mon père adoptif et depuis sa mort en 1730, je ne me suis plus jamais ouvert à personne. Être strigoi à certains avantages, je ne le nie pas, mais cette vie a aussi un inconvénient majeur. On voit toutes les personnes à qui on tient mourir. Alors autant te dire que cette existence est celle d'un solitaire sans attaches. J'ai construit un mur infranchissable autour de moi et peu sont ceux qui ont pu en traverser les défenses. Cette gamine est une des rares qui y être parvenue. Elle a su faire vibrer quelque chose en moi. Alors, je ne sais pas si on a trouvé chacun une famille, mais oui, je tiens à elle. Quant à la comprendre, ce n'est pas encore ça, mais ça viendra avec le temps, je l'espère. "  

Le Strigoi remarquait les yeux pleins de larmes et Keshâ et venait les chasser d'un geste tendre.

" Hé, ne pleure pas. Ce n'est pas parce qu'elle est entrée dans ma vie que tu n'y as plus ta place. On passe de bons moments ensemble et cela perdura jusqu'à ce que l'un de nous se lasse. Et puis, tu dois avoir un autre protecteur à présent, voire plusieurs depuis ma destitution. Si ça se trouve, tu loges peut-être même chez l'un d'eux. Je ne t'en veux pas pour autant. C'est l'ordre naturel des choses."  

Il ne lui en voulait pas, non, mais avait senti poindre en lui, une once de jalousie en prononçant ces mots. Une jalousie qu'il ne s'expliquait pas. Était-ce l'idée même de savoir Keshâ dans les bras d'un autre qui le faisait penser de la sorte ? Ou bien le fait qu'il puisse un jour le remplacer par un autre ?
Il chassait cela de son esprit rapidement, ne souhaitant pas ajouter davantage à ses tourments.
Lorsque Kesha venait rependre de l'alcool sur ses blessures, Akhesh grognait de désapprobation.

" Arrête ça. J'ai ce qu'il faut. "  

Il allait chercher l'onguent promis un peu plus tôt, ouvrait le couvercle de la décoction, attrapait le poignet de Keshâ appliquait la mixture sur les plaies avant de lui confectionner un bandage digne de ce nom.

" Applique ça, deux fois par jour.  Dans quatre jours, elles auront entièrement cicatrisé et cela aura considérablement réduit les marques.  C'est un remède de mon cru, alors conserve le, il peut encore servir. "  

Un petit sourire  avant de répondre aux théories de son amant.

" La situation a toujours été compliquée, mais elle l'est un peu plus depuis Eineris est à mes côtés. Quant à ne pas se faire prendre, c'est tout un art et nous semblons exceller en la matière. Ne t'inquiète pas, ça ira. Je te remercie de te soucier de notre sort, c'est noble de ta part. "

Lorsque Keshâ venait déposer un baiser sur les lèvres d'Akhesh ce baiser n'avait rien à voir avec les autres baisers qu'il avait pu recevoir de la part de son amant jusqu'à présent. Non, il avait une tout autre saveur. Une saveur si différente des autres que cela lui plus.
À l'évocation de la chasse et le fait de ne pas faire de mal à des innocents, faisait que tous les muscles du Strigoi se tendaient comme des arcs. Akhesh prenait alors les mains de Keshâ dans les siennes et le fixait longuement avant de lui répondre.

"Je ne puis te garantir cela. Mais je ferais mon possible pour qu'elle acquière de bons principes et deviennent une meilleure Strigoi. Qu'elle apprenne à épargner des vies, comme j'ai pu le faire mainte fois. Néanmoins, ne te berce pas d'illusion Ocïan, depuis mon départ de Xandrie, tout à changer. Je ne vais pas te mentir, j'ai dû tuer pour survivre, mais j'évite autant que possible. Je suis un pur Strigoi. Alors oui, je ressemble à un humain et oui, j'évolue parmi vous sans que vous sachiez réellement ce que je suis. Mais, je suis un des prédateurs les plus dangereux qui soit et tu le sais pour m'avoir vu chasser. Tu sais aussi que je sais épargner les vies, mais ce n'est pas toujours possible. C'est pourquoi je ne peux te faire pareille promesse, j'en suis désolé. "  

Akhesh attirait doucement Keshâ contre lui, soupirant, conscient qu'il venait sans doute de le décevoir, mais ce n'était que la vérité et si dure soit-elle à entendre et à admettre. Il fallait que son amant sache à quoi s'en tenir. Après quelques minutes, il se séparait de lui et récupérait son pantalon jeté au sol un peu plus loin et l'enfilait.

" Eineris, ne va pas tarder à revenir. La connaissant, elle aura acheté de quoi te faire à dîner.  Alors si tu veux rester, reste. Ce n'est pas tous les jours qu'on reçoit de la visite, vu la situation."  


Codage par Libella sur Graphiorum
Mer 10 Avr - 23:07



Quand le destin vous joue un tour

Ft. Akesh Ménuza



-« Laisse-là rêver. Au fond, cela montre que c’est encore une enfant et que tu es une personne rassurante pour elle. »

Le temps passait. Akesh lui narrait sa rencontre avec sa fille adoptive. Et à chaque passage, Keshâ riait avec Akesh, était parfois surpris ou choqué. Si le strigoi livrait beaucoup de lui à travers la durée étendue de leur entretien au sujet de sa « paternité », tous deux n’eurent finalement pas réellement l’occasion de parler de là où ils en étaient dans leur vie.

Le jeune homme écoutait ce que disait le strigoi sur la douleur de voir défiler et flétrir les êtres chers, sans parvenir à être vraiment en accord avec lui.
-« Je sais que tu vas dire que je suis jeune et que je ne sais rien. Mais dans ton discours… je ne dirais pas que c’est une excuse… mais un choix, que de rester seul et sans attache. »

Il vit Akesh, tel un bélier, prêt à surenchérir, mais lui fit sentir  sur le ton de l’humour que c’était aussi son tour de développer son propos.
-« De mon point de vue, je peux mourir à chaque instant. Cela est le lot de tous les humains. Mais… en particulier, tout a toujours été si volatile autour de moi… mes parents, ma ville de naissance, ceux que je croyais pouvoir devenir des amis… et puis, je ne suis pas une personne influente capable de contrôler moindrement mon environnement…

A ma modeste échelle, j’ai aussi plus perdu que gagné. Du temps. De l’argent. Des personnes… pourtant, même si on ne devait plus jamais se revoir, personne ne pourra m’enlever notre rencontre. Pas même toi, si tu le désirais. »

C’était là chose téméraire que de dire cela, pour quelqu’un dont les souvenirs avaient en partie été dérobés.

-« Ce que je veux dire, c’est qu’on devient qui on est à travers une succession de rencontres et de moments vécus. S’ils sont éphémères ou que l’on souffre de s’éloigner des personnes avec qui on les a vécu, cela fait tout de même partie de nous et de notre voyage… je trouve que ça apporte de la chaleur à l’intérieur. Je préfère regarder ce que j’ai plutôt que la sensation de manque. »

Il ne savait pas trop s’il divaguait à l’alcool de figues ou si son cheminement paraissait clair à Akesh. En tout cas il évapora son doute de la main en reprenant.
-« Et ne me fait pas croire qu’il est inscrit dans la chair de tous les strigois à la naissance qu’ils doivent être seuls et malheureux. Il y a des pages d’histoire très sombre. Mais aujourd’hui, les choses changent. Certaines sociétés sont plus tolérantes. Nous avons de grands artistes qui sont ouvertement strigoi à Opale. »

Une part de lui était encore assez juvénile pour croire pouvoir changer le narratif que burinait le strigoi dans son crâne depuis vingt décennies. Les croyances ont la vie dure, c’est le moins que l’on puisse dire. Quoiqu’il en soit, il falait reconnaître à Eineris l’exploit d’avoir su attendrir l’homme de plomb.

Il se fâcha un peu quand Akesh crut qu’il avait les yeux humides parce qu’il perdait sa place au profit d’Eineris. Il était assez possessif et émotif mais avait présentement des préoccupations un peu plus élevées en s’harmonisant avec la douleur de l’orpheline. Cela lui faisait drôle d’entendre Akesh nommait ce qui était, qu’il était correct qu’il avance et passe à autre chose. Une part de lui se croyait traîtresse de pouvoir tourner la page. Lui qui s’était toujours senti abandonné ne voulait pas être celui qui abandonne.

Enfin ! Il reçut l’onguent promis. C’était bien pour ne pas gâcher l’alcoolature hors de prix. Il remercia pour l’onguent cicatrisant.  Akesh recueillit ses mains dans les siennes dans une inhabituelles gravité.

Quelle incongruité, s’il disait vrai, de s’identifier comme vertueux et de se faire par sa fréquentation de l’ennemi du peuple traître à sa race. Mais Akesh le lui rappelait, le monde était peint en nuances de gris.

Il ne savait pas, ou peut-être ne voulait-il pas savoir, les méfaits d’Ekiel. Il savait au fond de lui qu’il commettait certains actes de barbarie. Lui-même ne se cachait pas trop de se livrer sous son nouvel avatar d’Akesh à des actes sauvages qu’il n’avait pas envie de réfréner.

Aussi aurait-il pu lui en faire reproche. Mais les grains dans le sablier de temps qui leur était accordé s’égrainaient. Et il ne voulait pas que leur rencontre se passe comme ça. Achever sur des pics et une levée de bouclier n’était pas ce qu’il voulait.

Qui était-il après tout ? Leur rencontre avait tout de fortuite. Les deux hommes avaient d’ailleurs peu de choses en commun, si ce n’est un parcours de vie tourmenté. Ils s’étaient cependant trouvés. Dans ce joyeux charriot cahotant de leur relation au fil des saisons où nul ne savait s’il y aurait de prochaine fois, ils avaient été là l’un pour l’autre d’une certaine manière.
Dans son rôle d’ami ou d’amant, Keshâ préférait ici avoir le privilège d’être l’oreille et de recueillir ce qu’Akesh avait à lui confier.

Dans l’étreinte, Keshâ se laissa aller, avec l’étrange et rare impression d’être parfaitement présent à ce qu’il vivait. Ce moment éphémère, déjà presque terminé. C’était réel. Il n’y avait plus de place pour ses idéologies, ses espoirs ou ses déceptions. Il prenait simplement ce qui était là.

-« Je n’ai pas envie de te juger pour cela. » souffla-t-il simplement, pris dans son paradoxe entre œuvre pour le bien et protéger un prédateur instable.

Un doux sourire se posa sur son visage. L’invitation était sincère et promettait un moment insolite. Il sentait néanmoins l’appel du désert, réclamant le dernier grain de sable du sablier.
-« Ca me fait très plaisir que tu me le proposes… mais, je crois que je vais y aller. C’est mieux comme ça. Il est temps. »
Sans avoir encore entrouvert la porte, il se figurait déjà Seraphah en train de faire les cent pas en rouspetant devant les dromadaires, Maëlstrom la mâchoire carrée et Violette en train de lever les yeux au ciel d’ennui.

-« Vers où irez-vous ? Si jamais on devait se revoir… »
« Oh tu sais, nous nous déplaçons régulièrement pour ne pas attirer l’attention, de planque en planque, c’est la vie de nomade. »
-« Je vois. Alors, Akesh, je te dis adieu. Peut-être nous reverrons-nous un jour. »

Conclue-t-il en se dirigeant lentement vers la porte comme le dernier soupir franchissant les lèvres du dormeur à la fin d’un rêve. Cela sonnait peut-être dramatique, mais ce n’était pas comme s’il existait de boîtes postales pour tueur en fuite ou de téléphone dans le désert.