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Un rêve bleu

Un rêve bleu Brandw10
Mar 12 Sep - 5:34



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



Après s’être méticuleusement frictionné dans la baignoire de ses appartements du Marquis, Keshâ avait fini endormi dans l’eau, dont la surface ne se ridait d’aucune onde autre que celle produite par son souffle délicat.

Il finit par se réveiller, car l’eau avait tiédie. Toute tension semblait avoir quitté son corps et il peinait même à tenir debout. Il s’effondra plus ou moins au milieu de son lit et se roula dans la couette aussi moelleuse que de la crème chantilly. Il cessa alors d’exister.

8h, bonheur. 9h, extase. 10h, miracle. 11h, chrysalide.
Il n’avait pas bougé un ongle. Sa joue profondément enfoncée dans un oreiller marquait un pli sur son visage ébouriffé du sommeil du juste, au point qu’il fut pénible et difficile d’émerger à la conscience. Une main survivante agrippa le rebord de l’édredon comme un mort-vivant s’agrippe au rebord du cercueil et tira sur la couette pour faire entrer le jour.

Sa vision n’eut pas le temps de faire le point dans la lumière crue frappant la baie vitrée devant son lit qu’une silhouette en tablier se mit à crier. Elle barbouilla quelques rapides excuses avant de battre en retraite hors des appartements. Qui pouvait bien-être cette banshee de la tour ?

Ambiance

-« Eh bien, on terrorise déjà les femmes de ménage. Ce n’est pas bien, Simone est une travailleuse exemplaire. »
La silhouette de Maëlstrom se découpait dans l’encadrement de l’entrée des appartements, d’une porte qu’il avait saisi au vol à la sortie précipitée de la visiteuse précédente.

Il s’accouda laborieusement, ne dépassant que d’une épaule de sous les couvertures.

« Mais qu’est-ce qu’elle me voulait ? » bougonna-t-il face à l’injustice de la situation. A-t-on idée de débarquer sans prévenir devant le lit de quelqu’un ? Il n'avait pas l'air de s'étonner plus que cela de la présence de Maëlstrom devant son lit, comme s'il s'agissait d'un nouveau convive s'invitant dans son univers onirique.

« Bah, elle n’a pas dû voir que j’étais là, j’étais comme une pierre sous la couette. Je crois n’avoir jamais aussi bien dormi de ma vie. » poursuivit-il, échevelé.

Tout ce stress, toute cette vigilance accumulée au fil des années à raser les murs, à avoir les yeux derrière son dos, à ne dormir que d’une oreille et à courir après de furieux impératifs de survie lui avait fait oublier combien son capital santé était élimé sous le masque de sa jeunesse insolente. Son système parasympathique s’était fait roi, s’emparant d’une opportunité mirobolante de détente. Enfin, cela risquait de ne plus se reproduire s’il redoutait une visite surprise de n’importe qui dans son sommeil. Il était à présent complètement dans le coltar. De ce plaisir indécent de vivre le premier jour de congés depuis très longtemps, lors qu'il aurait du être sur les étals des marchés à aider au déchargement à l'aurore en guise de second petit boulot pour joindre les deux bouts.

Son regard inquiet vogua soudain vers le carrelage de la salle de bain restée entrouverte, à l’endroit où il avait abandonné ses vêtements. Plus rien n’était là. La femme de ménage semblait avoir tout emporté. Ce qui voulait dire qu’il était nu comme un ver dans ce lit. Dire qu’il avait laissé le peignoir sur une patère dans la salle de bain.

Keshâ finit par s’asseoir contre ses coussins.

« Mais quelle heure il est ? Pour que vous soyez tous déjà habillés et tout frais. »
Le soleil vitreux éclairait de sa teinte mélasse la fourmilière furieusement agitée des rues d’Epistopoli, dont il apercevait le Pôle face à sa fenêtre et le luxe inouïe de quelque jardin à ses pieds.

Mer 13 Sep - 22:48



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto



Seraphah l’avait briefé. Au pied de son lit. Il avait pris cette habitude de débarquer dans les appartements de Maelström sans crier garde, comme si ce dernier était un prolongement de sa psyché. Le porte-brume savait que l’élémentaire ne dormait pas. Si bien que 4h du matin, ressemblait à 6h à s’y méprendre. Il lui expliqua quelles seraient les prochaines opérations et surtout qu’il lui fallait s’occuper de Keshä toute la sainte journée vu qu’il allait être – comme toujours – fort occupé. Cette soirée avait été volé. Dernièrement ces moments de rêveries se faisaient rares avec Seraphah qui comme à son habitude s’était mis sur plusieurs projets, au point qu’il lui était difficile de le suivre. Il comprenait en tout cas que tu étais là pour durer. Tant que tu en aurais envie. Même si le diplomate donnait l’impression de vite s’attacher, il n’en était rien. Il fallait bien plus qu’une soirée et un beau chant pour le voir te pleurer si tu venais à t’en aller. Du moins c’est ce qu’il croyait. Après tout, peut-être était-ce une façon que ceux dont la vie paraissait sans fin avait pour se protéger d’un chagrin qui serait alors lui aussi éternel.

Disparition. Encore dans son lit, il se frotta les yeux, avant d’abandonner et se réveiller à une heure plus décente. 7H du matin paraissait convenable vu la masse de choses à vérifier qu’il avait, sans compter son entraînement journalier. Il avait suffisamment d’espace dans ses appartements pour entamer sa danse martial où il était amené à jouer avec ses dagues ou avec son sabre. C’était toujours un moment de pure méditation, son regard se mettant à fixer un point hors de ces murs et son corps reproduisant à la perfection ce qui avait été appris jadis chez les Sentinelles. Désormais, il avait même pris le luxe d’esquisser de nouveaux pas de danse en fonction des élans de son corps.

C’était la bonne partie de sa matinée. Bien vite il se mit à son bureau et commença à écrire plusieurs missives pour trouver des hommes pour une future expéditions non loin de Xandrie. Une autre à l’attention d’un informateur au coeur d’Epistopoli, une autre encore pour le commerce d’art archéologique. Il était sur tous les fronts, jouant autant à la secrétaire qu’au contact de confiance. Il demanda à ce qu’on le prévienne si jamais tu sortais de tes appartements avant qu’il n’y débarque, mais la matinée avait beau défilé, rien de tout cela n’arriva. Ainsi, après avoir étudié des plans pour un futur voyage à Aramila, il se décida à aller te réveiller.

Quelle ne fut pas sa surprise quand il s’apprêta à ouvrir ta porte et qu’il ne put que l’attraper au vol, tellement Simone était partie comme une furie. La porte de ta chambre était grande ouverte, ce qui permit à vos regards de se capter immédiatement : « Eh bien, on terrorise déjà les femmes de ménage. Ce n’est pas bien, Simone est une travailleuse exemplaire. » Il semblait que tu avais bien dormi jusqu’à recevoir cette rencontre impromptue et improbable. Maelström sourit à ta première question. Semble-t-il que tu étais dans ton monde ouateux. Tu lui donnas confirmation quant à ton sommeil, et cela lui suffit pour aller se saisir de ton peignoir dans la salle de bain. Il vint le déposer sur le lit, découvrant davantage ton visage du matin. Il ne se permit pas de s’installer sur le lit, gardant une distance polie, tandis qu’il prit la parole : « Il est un peu plus de midi. Je ne savais pas que j’avais à faire à une marmotte. » Clin d’oeil. Vous vous étiez couchés particulièrement tard et il aurait bien fait la même chose que toi s’il avait pu. Mais tailler sa barbe et prendre soin de lui était un luxe qu’il aimait aussi s’offrir. Pour l’occasion il était habillé simplement d’une chemise d’un bordeaux mate, accompagné d’une veste dont le cuir sentait aussi bon que son parfum mélange de myrrhe et de bleuet. Un col mao lui donnait un air presque trop humble, tandis qu’une unique boucle d’oreille trônait au bout de son oreille droite.

« Si tu veux bien mettre ce peignoir...Je vais t’amener dans mes appartements pour que tu choisisses parmi mes habits, le temps qu’on te trouve les tiens propres. Je pense qu’on doit faire plus ou moins la même taille. » Tu étais plus fin que lui, surtout au niveau des bras, bien que la musculature du Porte-brume restait plutôt fine, mais cela lui donnait une carrure sensiblement plus imposante. « Nous avons une grande journée qui nous attend, surtout si tu as envie de manger un bout en passant. » À peine a-t-il prononcé ces paroles qu’il esquissait quelques pas vers la sortie de ton appartement, assuré que tu le suivrais. Il tourna son visage vers toi soudainement, en ajoutant : « Je me rends compte que je suis un peu directif...mais j’espère que tu te plairas par ici. » Réminiscence. De la situation telle qu’elle était. Tu pouvais te sentir seul ici. Aussi seul qu’il s’était senti au tout début...à la différence que Seraphah n’avait pu lui consacrer autant de temps que lui pourra t’accorder. Simplement car il avait du garder le lit un bon moment avant d’arpenter Epistopoli et bien d’autres choses encore.

Jeu 14 Sep - 4:31



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



La gueule enfarinée, Keshâ ne soupçonnait pas que les gens de l’hôtel et au-delà avait eu le temps de vivre leur vie avant qu’il daigne émerger des lacunes temporelles où il s’était échoué.

-« Une marmotte ? Oula, c’est vrai qu’il est super tard… » se morigéna-t-il, non par repentance, mais à l’idée d’avoir peut-être perdu la chance de goûter au petit-déjeuner fastueux que devait offrir pareil lieu.

Le petit loir roula sur son séant pour se saisir du peignoir qu’on lui avait apporté. Il en était sûr à présent. Il était en plein rêve ! Avec des serviteurs, une vie royale et tout le tutti ! Plus sérieusement, il était grisé par cette incroyable extraction de la basse-ville à laquelle il ne pouvait en aucun cas s’attribuer le mérite, n’ayant pas levé le petit doigt. Il ne savait combien de temps cela durerait vraiment – car toutes les bonnes choses ont une fin, et nous nagions en pleine élucubration farfadesque. Il profitait néanmoins de ce semblant d’insouciance adolescente qu’il n’avait jamais pu côtoyer.

Alors que Maëlstrom parlait d’un repas en se dirigeant vers la porte, il ralluma un espoir opalin dans ses yeux soudain vivifiés, il bondit hors du lit et s’enroula dans le peignoir d’un geste. La couette gisait telle un fourreau éventré. Habitué aux douches collectives et à la promiscuité forcée, on ne pouvait pas dire qu’il prenait garde ou non de qui pourrait passer devant la porte ou même de surveiller Maëlstrom.
-« Dans tes appartements ? C’est une proposition qui pourrait être interprétée de bien des manières… Je vais obtempérer, rassure-toi… je dois déjà pas mal perturber ton emploi du temps. Je vais faire en sorte d’être de bonne compagnie. »

Accessoirement, il n’a toujours idée de ce que l’on attend vraiment de lui, de quand il recevra des explications plus complètes. Pourquoi ne pas profiter de cette bulle d’innocence rarissime avant de se retrouver prisonnier de tâches ardues et de compromis boiteux. Son regard balaya le sol virginal de toute possession personnelle. Quand même, ce qui l’ennuyait le plus n’était pas qu’une femme étrangère ait volé ses vêtements de manière non sollicitée, mais qu’il n’ait plus ses chaussures avec sa talonnette sur mesure.

-« Ah oui, s’il y a à manger quelque part, on doit s’arrêter… » trépigna-t-il tout en essayant d’ajuster correctement les pans de son peignoir et de serrer sa ceinture pour remettre ce qui dépassait.

Une impression d’être un insolent, ingrat, chanceux le traversa. Il n’était sans doute ni le plus talentueux, ni le plus intelligent, ni même le plus beau des vagabonds de la basse-ville. Il n’était pas même le dernier fils survivant d’Hani Evangelisto. Mais parce que Seraphah l’avait trouvé et qu’il savait chanter, il recevait plus de soulagement en une journée qu’en une année de labeur.

Étranglant ce sentiment d’imposture pendant qu’il resserrait la ceinture du peignoir, il suivit Maëlstrom en laissant la porte de ses appartements grande ouverte, car la fermer n'empêchait apparemment pas les allers et venues. Clopinant pieds-nus sur les tapis molletonnés du couloir de l’hôtel, il répondit à Maëlstrom :
-« Je crois que je n’ai pas envie de me plaindre de toutes tes initiatives, si directives soient-elles. » glissa Keshâ dans une œillade à Maëlstrom. S’il n’était pas sûr de réellement se plaire ici au sens vrai du terme ; ce genre de subtilité était tamisée par la tiédeur, le confort, les matériaux nobles artistement assortis selon les textures et les couleurs et ce secrétaire d’un genre particulier qui lui plaisait un peu trop, il se sentait notablement choyé.

« Quand tu dis grande journée, tu penses à quoi ? Je veux dire, personne ne m’a rien dit de ce que je devrais faire. »
En tout cas, ainsi accompagné, il ne pouvait que se sentir entouré. Personne ne l’attendait réellement nulle part. Combien de temps faudrait-il pour le remplacer à son atelier si d’aventure il venait à ne pas se présenter lundi ? Une heure, peut-être deux. Quatre au maximum. Reyes se trouverait un autre croupion pour tremper dans de basses besognes et ses petits arrangements frauduleux avec les gens du quartier seraient repris par d’autres. La roue continuerait de tourner.

La pensée de porter des vêtements appartenant personnellement à Maëlstrom lui semblait bizarre. Non parce qu’il trouvait cela sale, mais parce que porter les vêtements de quelqu’un qu’il connaissait lui paraissait particulièrement intime, quand il aurait été si simple de lui prêter l’uniforme d’un employé. Du moins, c’est ce qu’il se disait. Que ce soient les consignes de Seraphah ou non de se montrer très hospitalier, il trouvait Maëlstrom on ne peut plus prévenant, pensant à tous ses désirs ou ses besoins, voire les devançant, que ce soit par le bain, la nourriture, son habillement ou ses lectures. Si tout cela ne relevait pas du traquenard, il était bien parti pour se plaire, estimant toutefois qu’il serait naïf de se croire totalement à l’abri pour l’instant.

Ils remontaient maintenant l'escalier en marbre rose qui spiralait vers la lumière ultime du dernier étage. Les tours de la haute-ville s'offraient à eux à travers une baie vitrée indécente. Keshâ s'avoua à lui même qu'il était excité d'entrer dans les appartements de Maëlstrom pour découvrir leur aspects et participer à une improbable séance d'essayage. Avec l'impunité acquise de ne pas être vu, il se permit d'épier outrageusement les fessiers de son guide qui le surmontaient d'une ou deux marches et roulaient avec perfection sous l'étoffe de son pantalon. Cela ne pouvait faire de mal à personne.

Jeu 14 Sep - 16:26



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto



Maelström ne releva pas tes premiers mots concernant son invitation à venir dans ses appartements. De son côté il était des plus réveillé malgré sa courte nuit, et il avait une liste de choses à faire pour cette journée des plus chargées. Dès que Seraphah disparaissait, c’était à lui qu’on venait remettre des missives ou poser des questions. C’était un flux continuel qui ne s’arrêtait que lorsque le grand roux revenait à l’hôtel. Ou presque. Au moins n’avais-tu pas traîner au lit et déjà vous étiez dans le couloir direction l’étage du dessus. « Pour le repas ce ne sera pas pour de suite, mais tu ne partiras pas de cet hôtel sans un petit quelque chose à grignoter, rassure toi. » Il avait déjà remarqué ta légère claudication. Légère car tes muscles des jambes devaient se traîner pas mal de tension vu le soin que tu prenais de garder une allure noble. Quand tu fus plus ou moins à son niveau et que tu lui glissas ne pas te plaindre de ses directives, il eu un léger sourire répondant ainsi à ton œillade avant de continuer à te devancer. Après tout, il était ton humble serviteur jusqu’à ce que tu puisses voler par tes propres ailes.

« En même temps, les choses ont été tellement vite que c’est normal que tu ne saches pas ce qu’on attend de toi. À te dire vrai, il n’y a que Seraphah qui pourra te répondre par rapport à ça. Pour aujourd’hui je dois te montrer certains endroits essentiels de l’hôtel, et ensuite tu dois m’accompagner dans mes différentes tâches du jour. » Rien de secret pour aujourd’hui et l’élémentaire le savait très bien. Même si c’était eux qui étaient venus à toi, la méfiance était de mise pour les affaires plus importantes qu’aller récupérer un colis ou rencontrer de potentiels clients pour la vente d’objets d’art.

Maelström arriva enfin devant la porte de ses appartements et il se tourna vers toi pour « après vous» quelque peu théâtral. L’appartement possédait des hautes baies vitrées, marque de fabrique de l’hôtel, mais ici il y avait un côté plus moderne et une forme de simplicité en comparaison aux appartements de Seraphah. Aussi en terme de taille, étaient apparentes trois portes, donnant respectivement sur une salle de bain, une cuisine et la chambre du porte-brume. D’ailleurs c’est vers cette dernière que ce dernier alla après avoir fermé la porte d’entrée. « Toi qui te demandait comment était ma chambre, tu vas pouvoir le constater. » À dire vrai, la chambre était assez petite et le lit similaire à celui que tu avais dans la tienne. La différence ici résidait sur une porte qui menait sur un immense walk in. Tu pouvais rapidement constater que les habits étaient classé par type mais aussi par couleur. « Si cela peut te rassurer, sache qu’il y a plus d’habits que je n’en porte. Tout ce qui est plus à droite est neuf. Seraphah a tendance à essayer de me faire porter des habits qui sont plus son genre que le mien. »

Si tu avances parmi tous ces habits, tu peux en effet remarquer que les étoffes du côté droit, sont différents de ceux du côté gauche. On voit là la patte de l’élémentaire avec des textures satinées ou encore de velours. Il aimait le précieux et cela se voyait. « Hésite pas à ouvrir les tiroirs les plus à droite, les sous-vêtements n’ont pas été porté. » Il te montra un tiroir en particulier. À ce niveau-ci, il y en aurait moins d’une dizaine, tu trouverais sans doute de quoi faire ton affaire. « La première fois ça m’a fait drôle de voir toute cette place uniquement pour des affaires...perso je vivais très bien avec cinq paires des mêmes vêtements...faut dire que du temps des sentinelles, il y avait beaucoup moins d’occasions qui demandaient à se faire beau, si tu vois ce que je veux dire. » Il te suivait des yeux tandis que tu découvrais l’ensemble et que tu cherchais ce qui pourrait te correspondre. « Je ne suis pas aussi bon conseiller que Seraphah, mais si t’as besoin d’un avis extérieur sur ce que tu as envie de porter, je peux faire un effort. » Là où il n’en avait aucun à faire par contre, c’était pour t’imaginer te dessiner. À dire vrai, quand il aurait un peu de temps, ce serait facile que de le faire de tête.  
Jeu 14 Sep - 18:42



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



La parenthèse risquait d’être courte. Comme trait d’union unissant la basse-ville et la haute-ville épistopolitaine, on retrouvait le fait de rester très occupé. De faire, pour aller vers quoi ? Nul ne le savait, mais c’était le sens du progrès. Produire. Agir. Inventer. Il allait devoir faire preuve de patience pour contenter son estomac, qui ne régissait heureusement pas ses humeurs.

Le but de sa nouvelle existence lui serait révélé comme bouquet final de ce qui ressemblait à un stage auprès de Maëlstrom dans les méandres des couloirs du Marquis. Il apprécia la révérence avec laquelle il fut invité à entrer dans les appartements, en dépit du décalage entre son vécu et toute forme d’étiquette. Cette mise en scène installait un peu de légèreté dans des relations et un environnement où il craignait toujours d’être sèchement recadré pour avoir trop pris ses aises.
-« C’est particulier chez toi. Assez élégant ! » commenta-t-il, fasciné par l’insolite choix de couleur largement dominé par le noir et les matériaux épurés du dernier chic, tout en évoquant la discrétion du propriétaire des lieux. Peu de gens devaient oser ce choix obscur, mais il donnait définitivement une allure racée aux appartements.

La petite chambre de 25 mètres carrés débouchait sur une garde-robe en enfilade avec des portants immenses qui montaient jusqu’au plafond. Maëlstrom tempéra le choc en précisant ne pas être responsable de la démesure de son attirail vestimentaire.

Un peu hésitant à l’idée de pénétrer dans une pièce aussi personnelle, Keshâ finit par s’approcher des tringles où étaient suspendues les soieries offertes par Seraphah. Il les dérangea d’une main en laissant courir ses doigts sur les cintres en bois, dans un son précieux de carillon. Chaque ensemble avait l’air extravaguant et magnifique à la fois, pour lui qui ne s’achetait des vêtements que de manière très exceptionnelle, et toujours dans des tons de noir et blanc.

-« Je vois bien que Seraphah n’a pas l’air prêt de ses sous. Mais je me sens un peu comme un pilleur à toucher à tes affaires… » esquissa-t-il en posant ses yeux sur l’autre côté de la galerie et les tiroirs que lui désignait Maëlstrom. « En plus, je n’ai pas l’habitude d’avoir autant de choix et ne suis pas très regardant. Tu pourrais peut-être choisir pour moi ce qui serait convenable pour aujourd’hui ? »

Cette opulence n’était pas sans raviver le sentiment de privation dans sa chair, pour n’avoir jamais eu de réelle occasion de sortir, de voir des gens, de se montrer indolent ou de célébrer avec qui que ce soit depuis des années. Le pantalon qu’il portait hier encore était rapiécé, passé progressivement d’un noir d’encre à un gris anthracite au fil des années, après avoir été reprisé en trois ou quatre endroits avec minutie par Keshâ. Sa chemise blanche était maintenue plausiblement propre au prix de grands efforts, mais elle ne donnait jamais l’impression d’être « nickel ». Toujours froissée, les fibres du coton affinées par endroit, parsemé de zone légèrement plus grises, de tâches qui avaient refusé de s’évanouir malgré de multiples tentatives de détachage.

Toute sa coquetterie passait dans les onguents parfumés et les deux anneaux en argent oxydé qu’il portait à l’oreille, ainsi que dans les breloques pendant à son cou, parmi lesquelles une clef d’argent.

-« Ça te manque parfois ? … ce temps-là où tu étais une Sentinelle ? » dit-il en ne rebondissant finalement que sur le détail personnel qu’avait évoqué Maelstrom.

Devant les incitations de Maëlstrom, il finit par toucher quelques piles de vêtements, sans savoir vraiment que choisir. Il n’allait pas en faire toute une affaire d’état. Ce n’était pas qu’il était dépourvu de goût, mais plutôt qu’il n’avait aucune idée réelle de son style et que selon ce qu’il avait compris, ils n’avaient pas une demi-journée à passer dans ce somptueux placard.

Il se saisit donc d’un caleçon court de couleur blanche, d’un pantalon brun en lin, une paire de chaussettes assortie et s’empara presque sans réfléchir de trois chemises entre lesquelles il ne parvenait pas à trancher.

-« Bon, si ça va, je vais prendre ça. Par contre, je n’ai pas l’habitude de porter de la couleur. Laquelle m’irait bien selon toi ? »
Ses vêtements entassés sur un avant-bras, il présentait l’éventail des trois chemises sous son visage pour recueillir l’opinion de Maëlstrom, entre une grise claire, une bleue pastel et une violine. Toutes étaient de col Mao, comme cela semblait être un choix prédominant dans les tenues de Maëlstrom.

Posant en tas ses trouvailles par-dessus une pile de vêtements dans une niche rétroéclairée, il défit sa ceinture et lança son peignoir sans autre forme de procès sur un valet en bois d’ébène qui oscilla dangereusement d’avant en arrière à l’atterrissage. Puis, il passa le caleçon blanc, le pantalon, s’assit sur une banquette de velours noir capitonné pour passer les chaussettes, avant de commencer à déboutonner la chemise que Maëlstrom lui avait conseillé.

-« Dis-moi, quelles sont les prochaines étapes de notre journée ? Je vais voir du monde ? Est-ce que je dois les saluer comme des nobles ? »

Il enfilait maintenant ses mains dans les manches, qu’il tentait de boutonner d’une seule main sans grand succès, avant de se rabattre sur les boutonnières du liseré central, dont il remarqua un léger détail de broderie sous le col qui donnait quelque chose de plus à sa tenue. Se dressant fièrement, il demanda :
« Alors, tu me trouves comment ? … aussi, j’ai du mal avec les manches, tu voudrais bien m’aider ? ... je sais que ça risque de te sonner bêta, mais on n'a pas souvent l'occasion de dire des choses agréables à entendre dans cette vie : J'apprécie vraiment ton accueil, même si tu vas dire que c'est ton travail. Je te trouve vraiment gentil... c'est le plus beau cadeau d'anniversaire que je pouvais avoir.»


C'est en le disant qu'il venait de se rendre compte qu'il fêtait ses 22 ans aujourd'hui. Il avait failli oublié, comme toujours, les jours se ressemblant tous dans le désespoir. Mais ce 8 du mois d'Urh était à marquer d'une pierre blanche.


Jeu 14 Sep - 23:43



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto



Rareté. Que de recevoir dans ses appartements. Il fallait dire que Seraphah le maintenait bien occupé, et que les personnes étant venus en ces lieux n’étaient pas du genre à observer la décoration. Cette dernière était des plus sombre ce qui révélait l’humilité du propriétaire des lieux mais aussi ce que tu nommas, à savoir son élégance. « J’aime que tu saches apprécier. » Même s’il ne savait pas où allait ta préférence, il savait d’oreilles sûres, que beaucoup préféraient le faste des appartements de l’élémentaire. Celui que beaucoup considérait comme un sbire n’était point susceptible. Il n’appartenait pas à ce monde, même s’il était totalement adapté, et avait déjà de la reconnaissance d’avoir pu choisir jusqu’aux différents tapis qui trônaient à certains endroit de l’appartement.

Hésitation. Que tu vins rapidement clarifier en expliquant tes sensations face à tous ces vêtements qui t’étaient proposés. « Tu devrais te sentir comme un invité...vu qu’à date, c’est ce que tu es. » Et quelque chose lui disait que ça ne durerait pas. Toi aussi tu allais revêtir une fonction afin d’être utile à la société. Du moins à la société qu’a créé Seraphah autour de sa personne, ou devrait-on dire autour de ce qu’il juge important. Il acquiesça concernant l’aide que tu pourrais lui demander pour ton choix. Pour le reste, il notait que tu avais gardé tes bijoux en dormant, sans aucun doute que tu t’étais très rapidement endormi, sans se douter que le bain avait eu raison de toi. « Aller, permets toi d’y toucher à ces habits... » Légèreté dans la voix. Il sentait bien que tu peinais à oser. Il s’installa de son côté sur un siège de cuir, avant de te répondre : « Pour certains aspects ça me manque oui...on peut dire ça. Mais à dire vrai, je ne m’ennuie jamais auprès de Seraphah. Mon travail consiste en tellement de choses différentes qu’avant je n’aurai tellement pas pu les imaginer. » C’était beaucoup plus simple auparavant. Il aurait pu évoluer en grade, c’est certain, mais le tout consistait à obéir aux ordres, à s’entraîner une bonne partie du temps quand ils n’étaient pas en expédition...Une vie simple, avec des plaisirs simples. « Après Epistopoli est une ville qui offre plusieurs plaisirs différents...mais rien qui n’est à l’image de la générosité et simplicité du peuple d’Aramila...Bon après je ne regrette pas d’être ici, je considère que ce qui est le plus important n’est pas tant où tu vis, mais avec qui tu vis. »

Donner ses opinions étaient chose aisée. Il ne comprenait pas ceux qui rendaient secret ce qui était de l’ordre de chichis. Il ne se rendrait jamais plus important qu’il ne l’était. Il ne voyait aucun intérêt là-dedans. Il se redressa et vint jusqu’à toi afin de toucher le tissu des chemises choisies. Il se saisit de la violine pour la remplacer par une autre à la couleur plus métallique, comme si elle renvoyait la couleur tel du satin. « Ce sera beaucoup mieux que le mate que t’avais pris. » Il recula de quelques pas tandis que tu jetais sans vergogne ton peignoir. À nouveau, les marques sur ton corps le saisir un bref instant. Il avait entraperçu ce qui touchait à ton épaule, se permettant alors : « Tes marques semblent récentes. Il t’est arrivé quoi? » Rapidement, tu enfilas ta nouvelle tenue. Cela laissa suffisamment de temps à Maelström pour se saisir d’une ceinture de cuir assez large.

« Rassure toi, je n’ai aucun rendez-vous professionnel aujourd’hui. Si jamais on rencontre une personne dirigeante, il te suffira de répéter les mêmes mots que je prononcerai pour ne pas entacher l’étiquette. » Il s’approcha de toi, son regard venant agripper tes prunelles dont l’éclat était rehaussé par la couleur de la chemine. Il y avait presque un air de défi dans ses yeux et soudainement, tu pus sentir la ceinture te cercler, t’amenant à te rapprocher de Ström tandis qu’il venait fermer et serrer la ceinture suffisamment. « Je te trouve à mon goût. » Il mordilla lentement, sans vraiment s’en apercevoir sa lèvre inférieure tout en souriant. Le reste de tes paroles lui fit lever un sourcil, tandis qu’il tira légèrement sur la chemise avant de s’attaquer à tes manches. « Je suis heureux de l’apprendre. Que c’est ton anniversaire et que je te fais là un beau cadeau. » Sa voix était posée, son ton toujours aussi avenant. Il semblait habitué à boutonner des manchettes vu que cela ne lui prit pas plus d’une à deux minutes.

« Et voilà! Tu vas pouvoir t’admirer dans le miroir. » Il recula afin de te donner l’accès à l’immense miroir qui se trouvait là. « Sache en tout cas que Seraphah sera heureux d’apprendre que c’est ton anniversaire...Sans doute pourra-t-il te faire un beau cadeau pour cette occasion. Il adore les anniversaire, ne me demande pas pourquoi. »

Même s’il se montrait séduisant sur bien des plans, il n’en restait pas moins que cette tenue t’allait très bien. Tandis que tu continuais à te mirer, il se pencha pour venir se saisir d’une paire de chaussure qu’il t’apporta dans la foulée. « Ces chaussures devraient être adaptées et confortables. » Le premier mot n’était pas anodin. Ce qui le surprenait était la rapidité avec laquelle elles avaient été préparées. Pas de talonnette à ajouter, c’était le talon et la semelle de la chaussure qui avaient été ajusté à partir de ce que tu portais. « Sache qu’on peut faire des modifications si cela n’était pas parfait. »

Pendant que tu essayais tes nouvelles chaussures, il revint sur la journée qui vous attendait : « Tu prendras quelque chose à manger sur le pouce. L’occasion pour moi de te présenter à l’équipe de l’hôtel, histoire que tout le monde sache qui tu es. Pour le reste, je dois voir avec toi tes capacités au combat...si tu en as bien sûr. Et puis nous aurons une course à faire, peut-être deux, j’attends des directives. »
Ven 15 Sep - 4:19



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



Être un invité dans un monde où rien n’est gratuit n’est pas chose facile. Le réflexe de se demander dans quoi on s’engage n’est jamais loin. Plus il cherche de complications, moins il en trouve, ce qui le perturbe davantage.
-« Je vais essayer. » promit-t-il.

« L’essentiel c’est que tu sois satisfait de te trouver là où tu es maintenant. Ce doit être cela la vraie richesse. »
En ce qui le concernait, il avait lutté pendant des années, s’était ensuite laissé couler, pour constater qu’il ne touchait pas le fond mais dérivait. Il se demandait à présent s’il pourrait rattraper un jour toutes ces années perdues hors de sa voie, à se sentir seul et à s’en rendre fou. Mais pour la première fois, tout semblait incertain. Tout était possible. Le talent de Seraphah tenait sans doute en cela qu’il avait le pouvoir de transformer leurs vies, tel un magicien sorti des ombres théâtrales pour les conduire aux portes du prochain acte. Sans en livrer les ressors narratifs.

« Avant je ne pensais qu’à l’argent et à avoir un toit. C’est sûr que c’est plus facile d’avoir des considérations philosophiques maintenant que le vent m’est plus favorable. Mais je commence à penser que tu as raison. »

Parler avec Maëlstrom, c’était comme susurrer auprès d’une boîte à vœux. Jusqu’à maintenant, aucun sujet ne semblait l’incommoder et il répondait avec entrain à ses questions. Évidemment, la main de Maëlstrom se portait vers la chemise violine, la plus voyante. Il soupirait déjà, se disant que c’était un choix facile en raccord à la couleur insolite de ses yeux. Mais que c’était un grand écart vestimentaire de passer de la neutralité à attirer tous les regards. L’étonnement ne fit que grandir quand le portebrume la lui enleva des mains pour l’échanger avec un des cadeaux de Seraphah.l Son tissu semblait couler comme de l’eau scintillante entre ses doigts.

-« Tu es sûr ? » renvoya-t-il, dubitatif.« Je suis surpris de te voir des qualités d’expert en mode. Bon, j’ai voulu ton avis, ça me donne au moins la chance de faire un choix osé que je n’aurais pas su prendre. » Il s’habillait sous la caresse du tissus précieux en se sentant déjà… différent. C’est fou comme l’habit peut parfois faire le moine. Depuis l’âge d’homme, il n’avait jamais porté de pantalon aussi bien ajusté. La chemise était un peu trop grande aux épaules et au niveau des poignets. Pour le peu qu’il savait de la mode, cet aspect bouffant et l’originalité de la coupe et de la couleur faisaient un bouquet tout à fait acceptable.

-« Un coup de couteau. » conclut-t-il sommairement. Il avait dû se recoudre seul. Vu l’emplacement, cela n’avait pas été aussi net que possible et il en garderait sans doute une trace assez importante à vie. D'ailleurs, on devinait encore l'emplacement des points de suture. Avec son léger relief, le tissu cicatriciel frais manquait encore d’élasticité et tirait à chaque fois qu’il amorçait un mouvement de grande ampleur.

Le rapprochement inattendu de Maëlstrom le prit de court. Envahi par son parfum boisé, il dut lever les yeux pour soutenir son regard, toujours fasciné particulière de son cou, non loin de la pomme d'adam, où il pouvait compter les poils de sa barbe finement taillée. Il se sentait capturé, impression que vint matérialiser la ceinture autour de ses hanches traversant comme par magie les passants.
« Je te trouve à mon goût. »

Il aurait aimé être cette lèvre qu’il mordait et se fondre dans se sourire. Impossible de cacher son transport, on aurait pu croire que Keshâ allait l’embrasser d’un instant à l’autre. Il s’avouait à lui-même que Maëlstrom était lui-aussi grandement à son goût et qu’il en faudrait bien peu pour que son comportement se fasse plus scabreux. Un simple geste aurait suffi à l’embraser, car déjà sa présence immédiate et son toucher l’envahissaient. Avec tous les signaux qu’ils s’envoyaient depuis hier, on aurait pu lancer un feu d’artifice.

Maëlstrom le laissa étourdi de sa reculade. Comme tout mobilier présent dans cette tour, le miroir ne faisait pas exception ni par sa taille géante ni par son style épuré. Il sembla imprimer en lui le reflet de Keshâ, qui se voyait de pied en cape pour la première fois et peina donc à se reconnaître.

-« On dirait tout simplement une autre personne. » lança-t-il en touchant son visage du bout des doigts comme pour confirmer qu’il s’agissait bien de lui, avant de tourner de profil pour mieux voir le pantalon mettre en valeur ses formes au lieu de les cacher.

« C’est une forme d’obsession qu’on ne peut regretter. Je crois. » ajouta-t-il.

Après la ceinture, Maëlstrom lui apportait les chaussures. Eblouis par tout ce qu’il voyait, il n’aurait même pas penser à piocher ce genre d’article dans la garde-robe. La ceinture changeait tout à la tenue. Quant aux chaussures, elles valurent un long silence éradiquant toutes pensées.

Magnifiques, elles tenaient plus du bijou que du vêtement destiné à être en contact avec le sol ingrat d’Epistopoli. Saurait-il seulement marcher avec d’aussi beaux ornements ? Les chaussures avec lesquelles il avait arpenté les couloirs la veille faisaient figure de savates éculées en comparaison. Le pire, non, le mieux… était qu’en effet, les chaussures étaient… « adaptées » à sa voûte plantaire et à son problème de longueur de jambe.

-« Mais, comment ? »
La question flotta sans qu’il puisse envisager de réponse rationnelle. Il s’était endormi il y a quelques heures, seul. Son expression était à la fois choquée et touchée.

-« C’est parfait. » En fait, c’était mieux que parfait. Mieux que ce qu’il n’avait jamais bidouillé. Car en plus de compenser les centimètres manquant à sa jambe, la semelle était invisible de l’extérieur et avait une texture souple et non dure comme du bois.

« Attend, Maëlstrom. Tu es venu dans la chambre ? Comment « ont-ils » su ? Ils ont travaillé la nuit ?! » Le lapin blanc  et Hulule pouvaient débarquer. Il était fin prêt.

Cette conversation devenait de plus en plus loufoque, alors que Maëlstrom parlait d’évaluer ses capacités au combat. Un rire léger comme un bruit de verre brisé s’échappa de ses lèvres. « Mes capacités au combat ? … bon eh bien. Un pied devant l’autre. Pour l’instant, tout est bien. Je te suis, chef ! »



Ven 15 Sep - 23:00



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto



« Et toi? As-tu déjà ressenti cette richesse là? D’être bien là où tu es? » Une façon de venir sonder tes souvenirs en ta compagnie. Ta réponse était assez pragmatique. Tu n’avais pas eu cet espace-là. C’était une chose qui n’existait pas jusqu’à peut-être aujourd’hui. « J’avoue avoir du mal à imaginer ce que tu as du vivre en étant parachuté dans une ville comme Epistopoli...Mais au début ton frère était avec toi à ce que j’ai compris? Il n’a pas su t’aider? » Il te faisait confiance pour esquiver la question si c’était trop personnel. Vous ne vous connaissiez depuis même pas une journée. Sans doute le lieu, sans doute la promiscuité qui était vôtre vu que vous étiez rendus à ne pas vous quitter, accélérait le processus de connaissance de l’un envers l’autre. Malgré ce qu’il pouvait paraître, c’était rare que Maelström puisse ainsi s’étendre sur sa vie. En règle générale, toute personne qu’il rencontrait ayant des fonctions, ne lui parlait pas à lui comme vous le faisiez. Ils étaient tous intéressés à Seraphah, le prenant en considération pour mieux l’atteindre. Avec ces personnes là il était une tombe. Une seule personne avait essayé de faire courir des rumeurs sur lui, afin que Seraphah s’en méfie ou se sente obligé de se débarrasser de lui. Au lieu de ça, par un tour qu’il n’avait pas compris, l’élémentaire avait réussi à débusquer le menteur et à le faire quitter ses fonctions. Un noble qui avait prétendu plus qu’il ne le pouvait. Epistopoli était un vrai nid de crabes.

Il pouvait comprendre le doute qui t’assaillait à la vue de la chemise. D’autant plus qu’il ne portait pas ce genre d’habit. Mais il avait l’oeil. Celui de l’artiste. Et même si tu te sentais dans un premier temps timide face à l’éclat de ce tissu, il espérait que cela te permettrait d’oser montrer la facette plus rayonnante de ton être. Seraphah disait souvent que les habits pouvaient agir comme des révélateurs. Il y croyait de son côté. « Je comprends ton hésitation, mais je suis là pour ça. Que tu oses. Ce serait dommage en tout cas, de ne pas essayer un nouveau style. » Tu ne t’étalas pas concernant ta blessure et il respecta cette discrétion. Après tout, les choses désagréables n’avaient pas à être énoncées derechef.

Est-ce qu’il jouait avec toi? Il jouait plutôt de son charme. Il n’avait jamais été très discret sur ses attirances, sauf quand la personne était haut gradée, qu’elle n’était pas à sa portée ou que cela pourrait aboutir à des difficultés. Avec toi il se sentait à l’aise et il avait l’impression qu’il te plaisait aussi. Alors oui, il soufflait le chaud, uniquement ce dernier point, même si les choses pouvaient aussi vite changer. Là il avait du temps à te consacrer et l’inverse était aussi vrai. Il en sera peut-être différemment dans quelque temps. Il t’observait te contempler dans le miroir et énoncer tes premières impressions. « Les habits ne font pas le moine...mais y contribuent grandement. Quand tu dis que ce n’est pas toi...alors qui est-ce? Quelle vie imagines-tu à ce Kesha du miroir? » Il inclina la tête avec un sourire ravit. Il aimait bien venir tirer sur l’imagination de son interlocuteur...quand ce dernier pouvait jouer le jeu bien sûr.

Pour la suite, il s’y attendait quelque peu. Comment en aussi peu de temps, avait-on pu lui créer des chaussures adaptées. « Alors non, je ne suis pas venu dans ta chambre en pleine nuit...Je n’ai pas tous les détails mais sans doute que Seraphah a envoyé quelqu’un...et à l’aide de la machine adaptée, la création a pu être des plus rapides. » Oui, cela semblait exagéré, mais quand tu vivais avec un être qui n’avait pas la même définition et perception du temps...les choses pouvaient être au ralenti ou en accéléré…

« Allons y sans plus tarder alors...et rassure toi, je n’ai pas pour ordre de te tuer si ça peut te rassurer. » Encore une fois il te devança, sa tenue paraissant tellement plus sobre que la tienne en cet instant. Il vint se poster devant les portes en ferrailles gravées de l’ascenseur. « On va commencer par le sous-sol...les cuisines. » Avec un tintement, l’ascenseur vous engloutit. Ce dernier était plus grand que celui de la nuit dernière. Six personnes pouvaient s’y trouver sans se toucher. Maelström s’était mis à ton opposé, totalement droit, l’air beaucoup plus fermé que précédemment. Un masque automatique en vue des personnes que vous pouviez désormais croisées à n’importe quel moment. « À part l’usine, tu as d’autres boulot? D’après ce que j’en sais, c’est un vrai désastre ce genre d’endroit...en règle générale, tout le monde cherche de meilleures combines. T’en as trouvé? » La particularité de ses yeux, étaient qu’ils se montraient aussi opaque que le vert d’un lac. Cela pouvait décontenancé quand il oubliait de sourire comme c’était le cas à l’instant.

Les portes de l’ascenseur s’ouvrirent, et après un coude de couloir, il ouvrit une double porte battante qui donnait dans les cuisines où une vingtaine de personnes s’affairaient. Presque immédiatement, les trois chefs cuistot et la cheffe des serveurs de l’hôtel se dirigèrent vers vous. La présence de Maelström avait été l’unique déclencheur. Chacun le saluèrent et ils hochèrent la tête à ton attention. L’un des cuistot était particulièrement baraqué, le crâne rasé, un autre avait de l’embonpoint tandis que le troisième avait plus de 50 ans mais avec une présence forte. « Manuel, Xavier, Luc et Geneviève, je voulais vous présenter Keshä. Ce dernier est un invité de moi-même et de Seraphah au sein de l’hôtel. Il sera peut-être amené à vous donner des indications ou à vous apporter de l’information...vous pouvez avoir toute confiance en lui. »Ils semblaient tous en accord sans poser plus de questions. Là n’était pas leur rôle
« Ah oui, et par conséquent il peut prendre ce qu’il veut en cuisine...et à ce sujet, est-ce qu’il y a quelque chose qu’il peut embarquer à manger sur le pouce? » Geneviève, femme svelte avec des yeux d’un bleu intense, disparue un bref instant, durant lequel Maelström s’enquit du bien être des cuistots, avant de revenir avec un pain au levain, rond, garni d’après ses dires, de jambon, olive, feuillages, fromage et ce qu’il fallait de gras. « Ça devrait vous tenir au corps. » te lança-t-elle en te le tendant.

À peine as-tu le temps de mordre dans le sandwich, qu’un des cuistots te tend une serviette, et que Maelström tourne les talons. Encore un petit tour dans l’ascenseur en direction du 10eme étage. « Mange pas trop, je te veux en forme pour l’entrainement. » Un sourire en coin, tandis que l’ascenseur continue son ascension avec vue sur le hall de l’hôtel.
Sam 16 Sep - 5:19



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



Une vague de tristesse le traversa comme un blizzard.
-« Non. Pas depuis l’enfance en tout cas. »

A présent que le spectre de la misère la plus noire s’éloignait de lui et qu’il reprenait une goulée d’oxygène, la réflexion apportait l’implacable perspective d’une solitude étendue à l’infini. Le sablier de la vie s’égrènerait de façon interminable, seconde après seconde. Et avec qui partagerait-il son temps ? Il n’était jamais parvenu à se faire d’amis à Epistopoli.

« Maleek ? Oui, il était avec moi. Il a fait pas mal d’argent. J’imagine que c’est plus facile de mendier avec un enfant, à l’époque du moins. Maintenant, il y en a trop dans les rues. Puis, quand j’ai grandi, il m’a trouvé un autre usage pour gagner encore plus… il a tout bonnement vendu mon cul... au plus offrant qui payait comptant. Il me laissait juste de quoi manger. Un jour, je me suis réveillé. Et il n’était simplement plus là. »

L’amertume et la honte le consumaient, mais il s’en était fatigué depuis longtemps. Il ne s'était jamais révolté, jamais plaint. tout ce qu'il voulait c'est être aimé de son frère, sa seule famille restante. Son histoire n’était pas si originale dans le registre du sordide à Epistopoli. Il aurait pu le cacher, à quoi bon. Personne ne s’intéressait jamais à lui, pour une fois qu’on avait l’air de l’écouter, il n’allait pas se priver. Le cadre feutré du dressing se voulait propice aux confidences. Le départ soudain de Maleek, jamais élucidé, il l’avait vécu comme une trahison doublée d’un désaveu. Il n’était même pas assez bon pour ça. Peut-être avait-il tord de se montrer aussi transparent. Mais il avait pas mal confiance en Maëlstrom. Il voulait avoir confiance en lui. C'était le cadre le plus accueillant qu'il avait connu depuis une décennie.

On croyait voir le nacré de la chemise se refléter dans ses yeux. Et ce n’était pas tant dû qu’au textile qu'au plaisir de porter ce vêtement choisi pour lui.

-« Le Keshâ du miroir est sans doute un prince du désert, qui domine les mirages et les quêtes impossibles. Il vit le danger, mais sans le redouter, car il est serein parmi les siens. Peut-être aussi se prélasse-t-il un peu trop le matin, car c’est souvent jour de fête. Et sa voix est reconnue entre toutes pour l'émotion qu'elle transmet.» s’amusa-t-il à imaginer sans réfléchir devant sa projection.

L’histoire de la création des chaussures était à la fois effrayante et impressionnante. Peu de choses devaient faire obstacle à la volonté d'airain de Seraphah. Le résultat était là sous ses yeux, au-delà de toute espérance pour un simple vagabond.

L’entracte était terminé. Maëlstrom l’entraînait vers la suite du programme de la journée, à commencer par la visite de l’hôtel. La métamorphose de la figure de Maëlstrom le marqua, enterrant son air rieur sous un masque froid et une raideur de revolver.« Juste l’atelier de réparation de prothèses, et encore moins payant, des boulots de livreurs-coureur à la pièce ou l’aide à des marchands que j’ai appris à me mettre dans la poche dans certains marchés primeurs ou de vendeurs d’épices. »

Le monde merveilleux des cuisines s’ouvrit à eux à travers ses portes à hublots, dans un balai parfaitement orchestré de couvercles de casseroles et de sauts dans des poêles à frire, les chefs vinrent se poster devant eux. Il ne put s’empêcher de les trouver sympathiques et se réjouit d’avoir l’autorisation de puiser dans la corne d’abondance à loisir. Geneviève en particulier sut conquérir son cœur par sa bonté et la gourmandise qu’elle transmettait par les mots et l’amour de son travail. Ses papilles frissonnaient déjà devant le sandwich d’une salubrité exceptionnelle.

-« Merci Geneviève. Je suis plus que ravi. »

Ne pouvant retenir un coup de crocs plus longtemps, il récolta à peine la serviette offerte par le cuistot que Maëlstrom fuyait déjà vers l’ascenseur à grandes enjambées. Keshâ le suivit en esquivant un violent retour de portes battantes en arrière et en s’infiltrant dans leur prochain rebond vers l’avant.

-« Che sais être raisonnable. » mâchonna-t-il, décidant de se garder une bonne moitié du sandwich pour plus tard.

Lui qui pensait avoir tout vu se retrouva époustouflé en apercevant la véritable salle à haut plafond qui faisait office de réception. L’entrée empruntée la veille n’était qu’une veule porte dérobée et peu décorée comparé à ce déversement d’espace cristallin et de pourpre envelouré. Dans leur cage transparente, ils s’élevèrent tout deux comme des anges dans ce qui était désormais un tube transparent au milieu du balai dolent de quelques clients de l’hôtel défilant dans leurs robes encombrantes pourvus de cannes dandy. Ils finirent par crever la voûte pour disparaître dans les étages, jusqu’à parvenir au 10ème, qui s’annonça dans un ding caractéristique.

Dim 17 Sep - 1:01



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto

Ambiance


Il fallait continuer. Il fallait que cette journée se poursuive. Sa mission était claire : voir tes capacités afin de pouvoir en faire un rapport à Seraphah. Alors pourquoi tant de discussions? Pourquoi tant de partage alors que vous n’étiez qu’inconnus l’un envers l’autre? Bien sûr il y avait ce quelque chose, cette douceur rappelant les friandises enfantines. Mais recevoir tes confidences sur ce qui était bien plus que de la maltraitance. Césure. Quelque part en lui, quelque chose se déroba et il ne le retint pas. Mieux valait se concentrer sur ce qu’il y avait à faire, plutôt que de s’épancher. Il n’avait pas le temps pour ça. Les émotions étaient bonnes pour les arts, pas pour les armes et les missions. Sans doute que tu devrais raconter tout ça à l’élémentaire plutôt qu’à lui.

Alors vous avez continué. Vous êtes arrivés dans les cuisines où l’accueil fut des plus agréables. Le Keshä du désert n’était plus très loin dans ces instants fugaces. C’était ta journée de fête, et d’ailleurs il eu l’occasion d’écrire un mot et de le glisser à Geneviève. Elle savait quoi en faire, avant que ce ne soit d’autres sommets qui vous appelaient. Après avoir parcouru un bout de couloir, Maelström sortit son trousseau de clef et utilisa la plus conséquente d’entre elles pour ouvrir la double porte menant dans une pièce immense et très verdoyante. C’était un immense rectangle avec tout autour et suspendues au plafond des plantes de différentes formes. Cela donnait beaucoup de vie à l’endroit qui était somme toute basique, si on excluait encore une superbe vue sur la ville.

« On va commencer simplement si tu veux bien. » À peine ces mots prononcés qu’il revint avec deux bâtons. Il t’en lança un, et une fois que tu l’eus bien en main. « Tu vas simplement esquiver ou arrêter mes coups d’accord? Je vais y aller doucement. » Il se mit en garde, semblant attendre que tu l’imites. Une fois cela fait, il vint jusqu’à toi et se mit à t’assener des coups que tu paras dans un premier temps vu la lenteur avec laquelle il les amenait. Puis soudainement, il commença à accélérer son rythme, pour ne pas dire qu’il prenait une vitesse normale et tandis que tu reculais de plus en plus, les bâtons claquant, il arriva un moment où le bâton vint s’arrêter pile au niveau de ta nuque. Il aurait pu te frapper et te faire mal un minimum, mais il avait arrêté son geste. « Tu te sens comment? Essoufflé ou ça va encore? » Bien sûr qu’il pouvait arriver à ses conclusions par lui-même juste en te regardant, mais il aimait que tu mettes tes limites au besoin.

Ce petit entraînement n’avait pas duré plus de dix minutes. Il déposa le bâton à ses pieds, et commença à déboutonner sa chemise. « Tu devrais faire de même...quelque chose me dit qu’on risquerait de les abîmer. » Il arriva bien vite à la fin de ses boutons et retira prestement sa chemise qu’il alla déposer sur un banc. Il révéla ainsi un corps musclé par la pratique et marqué par la vie. On pouvait noter une cicatrice au niveau du ventre, tandis qu’il portait un immense tatoo au niveau de l’épaule et du haut du bras. De loin, cela ressemblait à une volute de fumée, mais des inscriptions semblaient perdues dans cette brume. Son regard n’exprima rien de particulier quand à la découverte de ton propre torse – si tu avais suivi le mouvement – mais il fallait avouer qu’il semblait s’être fermé depuis votre excursion dans les cuisines. Tu pouvais sentir qu’il était devenu avant tout l’entraineur, comme s’il pouvait jongler aisément entre qui il était, et les fonctions qui étaient siennes.

« On continue avec le bâton, ou tu veux qu’on passe aux dagues ou au sabre? » Il était totalement sérieux, même s’il restait ouvert à toute contestation de ta part.
Dim 17 Sep - 3:57



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



Il n’y avait plus de place pour les échanges de mots ou les attentions. Maëlstrom avait son programme et Keshâ’rem le suivait. Quand ils arrivèrent dans cette serre tropicale qui faisait figure de dojo, il n’eut pas l’air étonné. Après toutes les salles traversées dans ce donjon urbain aux excentricités multiples, tout devenait possible.

Cela n’enlevait rien au fait qu’il ne voyait pas ce qu’il faisait là. Quel était l’intérêt d’évaluer un niveau inexistant. Ce n’était clairement pour ses facultés martiales qu’on s’était intéressé à lui. Le bâton fondit sur lui, il le rattrapa de justesse en accusant le choc dans ses poignets. Son nez était sauf.
-« D’accord. » obtempéra-t-il.

Il ne pouvait rien refuser après l’hospitalité qui lui avait été offerte. Mais devait-il livrer combat harnaché des plus beaux habits jamais portés ? Keshâ ne fit que singer la posture et les appuis de Maëlstrom, sans se sentir confiant ni dans ses appuis ni dans sa prise sur l’arme. Maëlstrom commença à porter des attaques évidentes au ralenti, ce qui n’ôtait rien au sentiment d’absurdité qu’il ressentait. Son bâton toucha le sien, une deuxième fois. Il n’avait pourtant pas l’impression de s’y prendre avec agilité. Ses mouvements manquaient de souplesse et d’assurance, alors qu’il percevait bien la retenue complète de son instructeur.

Soudain, le rythme accéléra, ce qui était prévisible. Evidemment, il ne parvenait plus à réagir à temps pour parer autrement que par accident ou manœuvre désespérée. Rien que cet enchaînement saccadé lui rudoyait les genoux et les coudes à chaque enjambée ou impact. Par réflexe, il bondit en arrière pour se mettre hors de portée. Mais Maëlstrom le collait et réduisit aussitôt la distance.

Aucune échappatoire, à part se laisser couler au sol et rouler plusieurs fois sur lui-même pour quitter l’arène un moment. Maëlstrom pouvait être fier de lui. Ce serait un miracle si sa tenue restait indemne. L’impact du bois contre le bois manqua de le faire trébucher lorsqu’il se releva. Une feinte éclair et d’un revers le bâton siffla derrière ses oreilles pour s’arrêter à ses cheveux.
« Tu te sens comment? Essoufflé ou ça va encore? »
-« C’est de l’humour ? Est-ce que j’ai l’air d’aller bien ? »

Son cœur s’emballait fortement dans sa poitrine et son front commençait à suer à grosses gouttes. Il déboutonna sa chemise à la hâte avec mécontentement. A quoi rimait cette mise en scène humiliante. L’habiller comme un prince pour ensuite tout gâcher, alors qu’il aurait pu lui donner un kimono à la place. Lui aussi déposa sa chemise et retira par la même ses chaussures, bien trop vernies et endimanchées pour le combat. Il préférait encore sentir le sol que de bénéficier de sa semelle.

En temps normal, il aurait admiré le torse de Maëlstrom et son tatouage galbé. Sans doute aurait-il  aussi eu de la sollicitude pour cette cicatrice au ventre et toutes les traces laissées par la vie.

« On continue avec le bâton, ou tu veux qu’on passe aux dagues ou au sabre? »


OK. Donc il avait décidé de le tuer. Une part de Keshâ commençait à le haïr.

« Je crois que tu pourrais me tuer avec une ombrelle, évitons ce qui est tranchant. »
Le niveau était déjà bien assez élevé pour lui qui n’avait jamais reçu le moindre entraînement, à part pour fuir ou escalader. Esquiver est tout ce qu’il savait faire.

Dim 17 Sep - 14:36



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto

Ambiance


Maelström partit à rire. Franchement, venant détendre l’atmosphère d’une façon inédite. À dire vrai, il ne s’était pas rendu compte immédiatement de la tendance de « professeur » qu’il avait et par conséquent de ce côté directif qui n’avait pas sa place avec toi qui était – disons le – tout sauf un combattant. En tout cas à l’heure actuelle. « Tu as raison...je crois qu’on devrait commencer...par les bases. » Il déposa alors son propre bâton et s’approcha de toi pour venir placer tes mains aux endroits adéquats sur la dite arme. Il te reprit sur ta posture, posant à chaque fois ses mains sur ton corps afin que tu te redresses, qu’au contraire tu détendes tel muscle etc.

Si Seraphah avait mandaté le porte-brume pour t’apporter une éducation physique, ce n’était pas car c’était la personne la plus proche de lui. Mais bel et bien car il était un entraineur exemplaire. Tu pouvais ainsi – après les premières frayeurs passées – remarquer comme il se montrait patient, comme il répondait à tes éventuelles questions, comme il avait l’art et la manière de te faire te sentir dans ton corps, et que le bâton devenait petit à petit le prolongement de ton bras. Il n’arrêtait pas de répéter cela, comme s’il s’agissait d’une formule magique. « Le bâton doit devenir le prolongement de ton corps. » Par moment, il venait te faire un compliment, ta posture s’améliorant au fur et à mesure des trois heures qui s’écoulèrent à une certaine vitesse, étant donné qu’au-delà de te travailler dans ton corps, Maelström te racontait, alors que vous buviez de l’eau fraiche, d’où provenait tel ou tel type de combat. Pour le reste, tu savais désormais te mettre en garde et mieux te déplacer et être en contrôle de ton bâton.

« On va arrêter là pour aujourd’hui...je pense que c’est déjà pas mal. » Il alla vous resservir de l’eau à une fontaine, et tout en te tendant ton verre : « Qu’as-tu envie de faire désormais? Te rafraîchir? Te retrouver un peu seul avant de pouvoir rencontrer Seraphah? » De son côté, il savait que sa journée n’était pas terminé. Il avait voulu à la base te prendre avec lui pour se rendre à la banque, mais au final, ce n’était pas une nécessité que tu l’accompagnes. Mieux valait que tu te reposes, à moins que tu n’avais tout bonnement faim. Il eu un regard vers le sandwich laissé sur un banc. « Si t’as besoin d’autre chose que ce pain, hésite pas, tu sais où sont les cuisines maintenant. Bien qu’au milieu de la nuit, il n’y aura personne pour te servir. »

Maintenant que l’entrainement était terminé, il s’assit à même le sol, son visage beaucoup plus serein, moins concentré. Son regard sembla découvrir ton corps qu’il avait pourtant touché, son côté artiste revenant d’entre les morts. « On t’a déjà dit que tu étais beau? » Son regard vint chercher le tien et loin d’y trouver du désir, tu y trouvas une grande sincérité. « Je veux dire, d’un point de vue artistique, te l’a-t-on déjà dit? » Il ne doutait pas que beaucoup t’ont trouvé à leur goût au fil de tes pérégrinations, ne serait-ce que ton regard qui devait en faire chavirer plus d’un ou d’une. « J’aimerai beaucoup pouvoir te peindre quand on en aura l’occasion...Si c’est quelque chose qui ne te gêne pas bien sûr. » Était-ce la proximité de Seraphah qui l’avait rendu si entreprenant? En grande partie. Il trouvait inspirant la façon dont avait ce dernier d’oser dire ce qu’il pensait quand il s’agissait de jolies choses...Comme de moins jolies à dire vrai.

« J’espère que ton passé en compagnie de ton frère ne t’a pas brisé plus que de raison Keshä’rem. » C’était la première fois qu’il prononçait ton prénom dans son entièreté. Et il y avait quelque chose de très honorifique là-dedans. Comme s’il te voyait au-delà de ta tristesse, de tes rêves, des masques que tu pouvais revêtir pour te protéger de ce monde. Nonchalamment, avec un léger soupir, il s’allongea sur le sol de profil, prenant appui sur un coude, les jambes en tailleur légèrement arquées.
Mer 20 Sep - 5:40



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



Keshâ ne put que relâcher sa grimace pour la fendre d’un sourire avant de rire à son tour. Il ne parvenait pas à rester fâché contre Mäelstrom.

-« Comme quand on construit une maison. Par les fondations… »

En même temps, il se demandait toujours pourquoi il devait suivre un entraînement au bâton. Il se rendit alors compte qu’il ne fallait tenir le bâton ni par le milieu ni par l’extrémité et que ses mains devaient s’aligner d’une certaine façon pour protéger ses poignets propager la force de ses épaules.

Ce qui apparaissait d’un naturel déconcertant chez Maëlstrom ne l’était pas du tout quand il s’agissait de l’imiter. Il l’observait attentivement, pourtant. Tout semblait clair dans sa tête. Puis, au moment de s’exécuter, il s’emmêlait les pinceaux, comme si la route de ses neurones à ses nerfs n’était pas très praticable et donnait un résultat peu coordonné. Il fallait bien le contact de la main de Maëlstrom pour amener à sa conscience l’inutile élévation de son épaule ou venir corriger son schéma corporel.

Il faudrait sans doute beaucoup plus d’une leçon à Keshâ pour le bâton ne devienne éventuellement le « prolongement de son bras ». Mais il se sentait plus rassuré face aux exercices proposés, quand bien même ses jambes étaient flageolantes.

Oh, il était coutumier de la course à pied, instrument indispensable pour sauver sa peau. Il avait aussi de la force derrière ses muscles longilignes pour gravir les façades verticales des entrepôts et y abriter ses secrets. Cependant, il n’était pas préparé à l’explosivité ou l’atroce lenteur des manœuvres, le conduisant parfois à rester une minute immobile en position de cavalier.

L’entraînement se passa plutôt bien au final, excepté que trois heures était une durée assez ambitieuse pour un galop d’essai. Mais aussi bien accompagné, il réussit à conserver une concentration exemplaire… Les anecdotes sur l’histoire étaient de loin ce qui le captiva le plus dans la pratique.

« Ce serait bien que je change de pantalon et de sous-vêtements, je crois. » dit-il à regret.
« Un brin de toilette aussi ne serait pas de trop. Mais avant ça, je vais faire mes Mouvements. » reprit-il en mimant ses courbatures dans les poignets et le bassin, que n’arrangeaient pas ses problèmes préexistants aux lombaires.

« Merci, c’est vrai, j’oubliais les cuisines. Je vais demander si Xavier veut bien me montrer le fonctionnement des fourneaux et l’emplacement des réfrigérateurs pour me préparer quelque chose. »

Sa poitrine se soulevait toujours plus rapidement que la normale et ses cheveux cendrés, poisseux de sueur, laissaient perler une goute le long de son ventre. Keshâ eut l’air déconcerté face au nouveau virage dans les signaux sur le visage de son entraîneur.

-« Non, jamais de cette façon. » On l’avait déjà aguiché ou séduit, versant un compliment facile, mais jamais dans cette direction purement platonique. Il ne vit pas venir la suite de la proposition et en resta un peu bouche bée.

« Oui, bien sûr. Quand tu voudras. » affirma-t-il sans y toucher, bien que cette idée  d'être peint éveille une forme d’impatience chez lui. A dire vrai, il était bien plus déstabilisé par ces mots que lorsque Maëlstrom essayait ouvertement de le draguer.

Alors que Maëlstrom s’allongeait, ses deltoïdes saillants tout d’encre et de sueur, la conversation devint d’autant plus personnelle, sans qu’il sache trop quoi répondre. Il lui paraissait évident que son frère avait détruit ce qui pouvait rester de lui à l’époque. Qui serait-il à présent ?

-« Je ne sais pas Maëlstrom. Tu me le diras. Enfin, pas plus qu’Aramila ne t’a brisé, j’imagine. »

D’un air soudain très analytique, il scruta le torse de Maëlstrom sans ciller.
« J’avais remarqué quand tu étais debout. Il semble que l’une de tes épaules soit plus haute que l’autre. As-tu déjà été blessé à droite ? »

Il s’accroupit pour constater au toucher la rigidité chronique des tissus à la base de sa nuque. Ses doigts glissaient lentement depuis un point situé quelque part derrière son oreille, jusqu’à sa clavicule. Et puis à nouveau au-dessus de l’épine de sa scapula. Ainsi penché sur lui, Keshâ semblait faire fi d’être en train de manipuler le corps d’un être vivant - tout en étant à demi-nu.


-« Je peux faire quelque chose pour te soulager, si tu permets. Il me faut juste un petit peu de temps, attends-moi ici, je vais aux cuisines le plus rapidement possible. »


Et il le planta là, d’autorité, sans vraiment demander son reste. Il découvrit finalement sur un crochet au milieu de l’abondante végétation murale un crochet sur lequel pendait un haori xandrien bleu sombre tissé de motifs de grue blanche. Il s'en revêtit.  Pieds nus, il pénétra dans l’ascenseur et arriva tout droit aux cuisines où il osa finalement déranger Xavier pour lui demander une visite plus qu’express pour apprendre le fonctionnement des fours et l’emplacement des victuailles, avant de le missionner pour lui dégoter des baguettes en bois, de la pâte à brûler, de l’alcool – un whisky aux qualités fantastiques semblait-il, et une douzaine de verrines. Pourquoi ? Keshâ ne prit pas le temps de l’expliquer.

Maëlstrom avait l’air d’insister pour partir travailler. Et il espérait le remercier à sa façon avant son départ. Il reparut avec tout ses artefacts hétéroclites bien rangés sur un plateau de bois, en train de mâcher quelques biscuits attrapés au vol. De retour auprès de l’entraîneur, il s’agenouilla :

« Sais-tu que les contractures peuvent bloquer la circulation de l’énergie dans ton corps ? C’est très nocif pour ta vigueur. La vieille Mao m’a appris l’importance de soigner nos humeurs et les chemins de l’énergie et à garantir le bon fonctionnement des chaînes myofasciales. C’est une marchande d’épices assez unique. C'est aussi elle qui m'a appris les Mouvements. Ne t’inquiète pas, cela ne te fera pas mal... »

Allumant les baguettes sur lesquelles étaient piquées les pâtes à brûler imbibés d’alcool, il les inséra dans une verrine avant de la déposer sur l’épaule de Maëlstrom, où s’engouffra bien vite sa peau et les tissus sous-jacents, aspirés par la pression négative.

« On va bien s’amuser ! » Cela sonnait peut-être comme une vengeance ? Assurément, ce n’était pas le cas.

Mer 20 Sep - 23:08



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto




Les journées étaient toutes longues, mais avaient une saveur différente. Celle que vous veniez de passer ensemble, de par ta présence, lui avait offert une touche de fraîcheur inattendue. Cela l’avait fatigué, autant que fait du bien, simplement car s’occuper de quelqu’un n’était pas dans ses attributions premières. Vu que tu n’étais pas un combattant, tu ne pourrais à terme le seconder comme il l’aurait espéré au début. Il était certain que Seraphah avait d’autres volontés pour toi. À voir si cela te plairait, surtout si l’élémentaire venait à te dire la réelle raison qui l’avait fait venir jusqu’à toi. Et le concernant, c’était sans aucun doute son plan. Il ne pouvait mentir à ceux qu’il mettait aussi proche de lui. Comme s’il était le coeur et toi comme Maelström se retrouvait être un organe des plans qui pouvaient naître en lui.

Même si la durée de l’entraînement pouvait paraître exagérée, tu avais su tenir la cadence, et en terme d’endurance il trouvait cela appréciable. Pour le reste, il n’en fut pas étonné, mais cela lui permit de savoir que tu n’avais pas croisé d’artiste peintre, ou alors ils avaient été discrets. Quand tu acceptas sa requête il ne pipa mot, son regard te délaissant tandis que tu opérais tes étirements. Il nota que tu avais une certaine conscience de ton corps avant d’entendre la réponse à sa question. Il ne réagit pas plus que ça, d’autant plus que tu vins à lui tout en lui parlant de son épaule. « J’ai eu un épisode il y a environ une semaine qui est venu l’impacter oui. Tu as l’oeil. » À peine ces quelques mots prononcés, que tu semblas mû par une force invisible qui te fit disparaître des plus soudainement. Le regard de Maelström s’écarquilla un instant, avant de se relever et commencer à faire ses propres étirements.

Même si tu lui avais dis que tu allais revenir, il espérait que ce ne serait pas non plus dans une heure. Il avait le goût d’aller se glisser dans sa propre baignoire avant de reprendre certaines affaires laissées de côté afin de s’occuper de toi. Après s’être étiré les quadriceps ainsi que le haut du corps, il s’apprêtait à revêtir sa chemise quand tu réapparus dans la salle. Afin d’être à une hauteur acceptable, même s’il n’avait aucune idée de ce que tu t’apprêtais à faire, il s’installa sur un banc et te laissa porter la verrine sur sa peau. Le porte-brume n’eut aucune réaction face à la chaleur qu’il ressentit et la pression que tout cela exerçait. Maîtriser ses humeurs, il savait bien faire. « Je te remercie de t’inquiéter autant de ma vigueur. » Aucune allusion ici, il s’amusait simplement de découvrir cette façon de soigner. « Sans vouloir paraître non reconnaissant, penses-tu que nous en ayons pour longtemps? » Le travail avant tout? Comme mentionné précédemment il avait juste besoin d’un moment où il serait seul et tranquille avec lui-même.

C’est ainsi qu’il te laissa jouer avec tout ton attirail, appréciant à chaque retrait le relâchement que cela exerçait sur son corps. Au bout d’une vingtaine de minutes, il fut décidé qu’il était temps de cesser. Tout en enfilant sa chemises, il te remercia en ces termes : « Comment appelles-tu ça? Ce que tu viens de me faire vivre? En tout cas, je dois bien avouer que mon épaule est beaucoup plus relâchée. Je t’en remercie. » Il la fit d’ailleurs roulé comme pour montrer que les choses s’étaient replacées.

Tandis qu’il boutonnait sa chemise, il enchaîna : « Je te propose que chacun retourne à ses appartements...j’ai besoin de temps seul avant de me remettre au travail. Je présume que Seraphah te convoquera d’une façon ou d’une autre...à moins qu’il ne vienne directement à ta porte. » Après tout, cela était totalement son genre.

XXX

Alors qu’as-tu fait de ta soirée? Sur les alentours de 21h, on vint frapper à ta porte. Ce n’était ni Maelström, ni Seraphah, mais un employé de l’hôtel qui fit une légère révérence quand tu ouvris la porte : « Veuillez me suivre, Seraphah Von Arendt vous demande. » Le jeune homme ne devait pas être de beaucoup plus âgé que toi. Tu pouvais admirer sa tenue faite de soie d’un vert foncé, rehaussé d’un col mao. À dire vrai, tous ceux qui travaillaient dans les couloirs de l’hôtel portaient un tel uniforme.

Contrairement à ce que tu aurais pu imaginer, vous empruntâtes l’ascenseur pour vous rendre à deux étages en-dessous du tien, et non celui du dessus où se trouvaient les appartements du diplomate. Le jeune homme ne te regardait à aucun moment. Juste droit devant lui. Une fois à l’étage convoité il t’amena devant une double porte. Frappa à cette dernière par deux fois, avant d’ouvrir, te laisser entrer et refermer.

Ambiance

Tu te retrouvas dans une ambiance très tamisée, presque sombre. Tu étais face à un couloir fait de pièces en enfilade, toutes de velours, de rideaux, de plantes, de livres, de bois, de miroir...De là où tu étais, tu ne pouvais dire où se trouvait Seraphah. Et combien de pièce te faudra-t-il parcourir pour le rencontrer. Plus tu allais avancer, plus tu auras l’impression d’être dans une taverne privée, à l’air très intimiste. D’ailleurs, à un moment il y aura une pièce plus grande avec un bar et une panoplie de bouteilles d’alcool. Au final, tu pus voir sa silhouette...ou du moins ses bras et sa tête reposant sur le dossier d’un canapé en demi-cercle. Sa chevelure s’offrait à ta vue, tandis que ses yeux étaient fermés. Il portait un kimono avec de nombreux motifs en filigrane dans les teintes qui semblaient le plus lui seoir, à savoir le vert d’eau et le rouge poison.
Jeu 21 Sep - 1:33



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



-« Un petit quart d’heure ». fit-il écho, un pli minutieux ridant son front juvénile.

Il ne pouvait pas réellement déplacer les coupes à la surface de la peau, à défaut d’émollient et de l’inflexibilité du verre. Cependant, il se plaisait à exercer une légère traction ou rotation sur place pour décoller les adhérences et améliorer la décompression myofasciale. De petits mouvements avant et arrière sans glisser sur la peau venaient ponctuer son jeu.
Au bout de vingt minutes, il les détacha, sans oser dire à Maëlstrom qu’il ressemblait désormais à une panthère tachetée.

-« Les cornes de feu. Les gens du monde agraire se servaient de récipients naturels comme les cornes de bovins évidées. Mais je dois dire que l’avantage du verre est que l’on peut constater l’état des tissus à travers le matériau de la coupe." La chemise de Maëlstrom maquilla le crime de son dos de coccinelle.

-« Ca me va. C’était chouette ce programme. Je ne sais pas si on est censés recommencer. En tout cas, j’espère qu’on se reverra bientôt. »
renvoya-t-il dans un sourire lumineux. Il commençait seulement à se remettre de l’entraînement.

Il déposa sa chemise aux reflets métalliques en bandoulière sur son épaule et quitta la salle d’entraînement végétale pour rejoindre l’étage de ses appartements. Keshâ était le premier surpris de mémoriser assez bien la configuration des lieux, même s’il ne se sentait toujours pas à sa place au Marquis.

Devant sa porte, il constata qu’il avait oublié ses chaussures et rebroussa donc longuement chemin dans les couloirs et l’ascenseur. La salle d’entraînement était vide de présence. Quand il se retrouva à nouveau face à sa porte, la paroi lisse le laissa pantois. Il l’avait pourtant laissée grande ouverte. En l’absence de poignée et avec un unique trou de serrure, il avait beau pousser le panneau, celui-ci refusait de pivoter sur lui-même pour lui ouvrir le passage. Personne n’avait pensé à lui donner de clef !

Aucune Simone à l’horizon pour le secourir face à cette porte de l’espace, tout aussi inutilement compliquée que la robinetterie de sa baignoire. Le petit vagabond faisait tâche dans ce palace technophile. Il tenta d’interpeler l’ombre fugitive d’un invité, puis un valet très occupé à tenir en laisse quatre chiens d’allure simiesque, avant de retourner dans l’immense réception, assez grande pour héberger un Zeppelin, afin de chercher main secourable.

Une fois dans ses appartements, la fatigue le rattrapa. Il demanda lâchement à ce que les cuisines lui apportent un plateau, comme le lui suggérait de manière au combien tentatrice la gouvernante. Après quoi, il s’effondra dans son canapé face à la baie vitrée avec au creux des bras le livre de Mielo Lewis, "Cœur de Brume". Il lui fallut bien deux heures pour se remettre de tant d’émotions et d’activité physique. Il n’avait pas réussi à trouver de dictionnaire pour traduire la citation au début de l’ouvrage.

Alors, il partit faire un brin de toilette dans la salle de bain, ému qu’autant de propreté et de matériaux nobles lui soient dévolus. Et il découvrit en revenant dans la chambre une grande boîte entouré d’un ruban, dans laquelle se trouvait une tenue.

Pas question de remettre sa chemise de satin métallisée. On lui présentait un empiècement de tissus qu’il avait du mal à comprendre de prime abord. Cela ressemblait à un tissu encore plus chatoyant, qui passait du gris perlé au lavande suivant le jeu de lumière entre les ondulations du tissu. La partie supérieure de la tunique ressemblait à un kimono sans manche pourvu d’épaulette pointues dépassant son acromion et dont le tombant lui arrivait à mi-cuisse. La partie du kimono passant sur son torse ressemblait à un assemblage de plis plats dont il ne comprenait pas l'intrication. Il finit par comprendre que les pans tenaient à l’aide d’un bouton de bois cousu à l’intérieur et qu’il devait enfiler un haut au col échancré de couleur bleu nuit, dont les manches amples tombaient largement à la moitié de ses avant-bras. Une ceinture large de la même teinte ceignait sa taille et il forma une boucle tombant sur l’une de ses hanches.

Estomaqué par tant de complexité, il vit qu’au fond de la boîte se trouvait également des chaussons feutrés tout aussi habillés. Il en était à se demander si sa tenue tenait plus du pyjama à l’exubérance folle ou de la tenue de soirée diplomatique Xandrienne quand il entendit frapper. Il aurait voulu pouvoir ajouter une touche de maquillage. C’était l’occasion où jamais ! Mais il n’avait de toute façon rien amené de la basse-ville.

L’employé était magnifique et tiré à quatre épingles, parfaitement assorti au décor. Un souffle presque déçu de ne pas voir Seraphah se découper dans l’encadrement de la porte. Keshâ essaya de lui sourire, mais l’employé resta de marbre comme un automate. Il le suivit vers une aile inconnue de l’hôtel à l’ambiance totalement fantasmée, entre la musique et ce décor livresque. Le jeune homme évoluait entre les objets précieux, les canapés et les livres, captant sa réflexion dans des miroirs d’encre. Il ne put s’empêcher d’apprécier son reflet. Avant de parvenir jusqu’au tableau dans lequel se voulait négligemment abandonné Seraphah, ses cheveux ouverts en couronne sur le dossier du canapé.

-« Vous m’avez fait mander, Seraphah. » osa-t-il s’annoncer à haute voix, car l’employé l’avait abandonné quelques part au début de ces galeries sibyllines. Sous le couvert d’une moquette épaisse, il n’avait pas entendu l’automate battre en retraite.

Jeu 21 Sep - 3:22



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto




Les langues se déliaient dès qu’on savait quelle langage leur parler. Certains avaient besoin d’hommes pour des expéditions, d’autres de connaissances ou encore de prothèses. Chaque être vivant avait son prix, au même titre qu’il avait le sien. L’élémentaire occupa sa nuit à étudier les dernières trouvailles de la Brume, se tenant prêt pour ses prochaines expéditions. Ensuite il se rendit à l’hôpital où on le manda pour une opération que ses mains expertes purent mener avec finesse. Il était habitué à ce rythme depuis longtemps désormais. Passer d’un décors à un autre lui donnait la sensation d’être une ombre dans ce tableau qu’est la vie. Beaucoup pensaient pourtant qu’ils voulaient se faire remarquer tant ses tenues relevaient de l’extravagance. Il n’en était pourtant rien. Il savait qu’il n’était qu’éphémère, ceux qui le croisaient mourront bien avant lui, à moins que le sort veuille à tout prix qu’il redevienne brume.

Le reste de la journée fut suivi d’une réunion du comité. Elias Van Beck prenait grand soin de souligner à quel point Epistopoli était sous la surveillance d’Opale en raison des dernières trouvailles concernant le Mandebrume. Cette histoire rendait Seraphah particulièrement curieux, ce qui lui valut de nombreuses heures à rassembler ses notes concernant ce dieu que beaucoup craignaient sans pour autant y croire. Là était l’un des grands paradoxes de l’homme. C’est ainsi que la journée se brûla sans qu’il ne pensa réellement à toi ou à Maelström. C’est au moment de se changer lui-même pour rejoindre son bureau du soir, qu’il pensa à te faire livrer une tenue qu’il jugeait adaptée à l’ambiance qu’il avait envie d’instaurer.

Il prit le temps de faire sa toilette, prenant un soin certain à lisser les plis de son kimono, appréciant la volupté qu’apportait ce genre de tissu. Comme à son accoutumée, il ajouta une fragrance à sa peau d’une chaleur toujours plus importante que la normale. Il ne prit pas la peine de souper, ce plaisir n’étant pas vital pour lui. Un ouvrage sur la botanique de la forêt de Jade sous le coude, il se fit accompagner d’une des jeunes femmes à son service qui alluma bien rapidement chacun des chandeliers qui se trouvaient dans la salle des invités très prisés. À savoir l’endroit où ses réceptions prenaient place avec des invités choisis avec minutie. Il était du genre à ne rien laisser au hasard, et c’est ainsi qu’il alla prendre place dans le salon d’absynthe. D’ailleurs c’est cet alcool qui fut placé au milieu de la table basse.

Il s’installa et commença sa lecture avant de juger qu’il serait temps de te faire appeler. Il pouvait vite perdre la notion du temps, et vu la force des flammes à travers le couloir, il ne pouvait qu’entendre que la nuit s’était bien installée. Délaissant son ouvrage, il s’installa plus confortablement, fermant les yeux pour apprécier le silence ambiant. Il aurait pu se trouver à même le sol en plein désert qu’il aurait ressenti le même bien être. Beaucoup le jugeaient superficiel, trop porté sur les apparences...c’était loin de connaître son vrai visage. Le feu pouvait tout dévorer, tout détruire – il l’avait déjà fait – et sa maîtrise relevait chez lui d’un véritable respect de la beauté et de la vie elle-même. Y a-t-il beaucoup de personnes ayant ce genre de considération? Il a conscience que beaucoup n’avaient de considérations que leur survie...mais qu’en était-il des autres?

Il était ainsi perdu dans ses sensations quand il entendit – pourtant douce – la porte se refermer et des pas approchés. La délicatesse précède tes pas. Quand ta voix se fit entendre, il garda les yeux fermés, un sourire venant simplement étirer ses lèvres. « Keshä’rem...entendre votre voix me fait plaisir. » Ses yeux s’ouvrirent tels deux ambres à la lumière éclatante, comme s’ils venaient se saisir de la moindre flamme de la pièce. Sa tête pivota vers la gauche, avant qu’il ne reprenne : « Approchez je vous en prie... » Il se redressa à peine, ses bras glissant sur le dossier du canapé. « Pouvez-vous me montrer vos mains je vous prie? » Le ton n’avait pas changé, son regard laissant transparaître une certaine douceur. Douceur qu’il déposa sur tes mains, venant s’en saisir, les caressant sans aucune gêne avant de se détourner et de demander : « Auriez-vous l’amabilité de me masser je vous prie? J’ai bien conscience que c’est beaucoup demandé mais... » Pourtant, il vint enlacer sa chevelure afin de la ramener vers l’avant, dénudant sa nuque. « Mes trapèzes auraient bien besoin d’attention. » Pour le moment, ses trapèzes se percevaient clairement à travers le tissu, mais il n'avait pas été jusqu'à les découvrir.

Une façon de te marquer ma confiance...que d’autres jugeraient pourtant déplacée. Que tu te mettes à le masser ou à refuser, il poursuivit : « Comment s’est déroulée votre journée? Maelström avait le devoir de bien prendre soin de vous...J’espère que cela a été le cas. » Ce dernier lui avait déjà fait un rapport, et Seraphah avait été heureux d’apprendre que tu avais à ta disposition des bottes secrètes. Peut-être que sa demande de massage avait donc été inspiré par tes prouesses. Il avait déjà été massé par des amants, mais rarement par des êtres qui avaient un réel don. Il espérait pouvoir en juger de lui-même.


Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Lun 6 Nov - 17:21, édité 1 fois
Jeu 21 Sep - 6:27



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



Être en présence de Seraphah lui donnait toujours le sentiment d’évoluer dans un conte pour enfants. Au milieu de la ferraille ou du velours, il semblait toujours dans un écrin, parfaitement arrangé ou ensauvagé, comme s’il captait l’essence des lieux à travers ses iris enflammés. Sous leur poids, les flammes médiévales vacillèrent. Si Keshâ n’avait encore jamais rencontré de strigoi, c’est l’idée qu’il aurait pu s’en faire. Mais rien ne pouvait expliquer le sens du détail et l’extravagance veloutée de son caractère sensible.

Il en savait finalement encore si peu sur ce personnage. Pourtant, il s’en était remis à lui et vivait entre ses griffes dans son domaine. L’idée ne lui avait pas traversée l’esprit de tester les limites de l’essaim d’employés très serviables si d’aventure il devait tenter de franchir les portes de l’hôtel sans y être autorisé. Qui pourrait défendre ses droits. Après tout, il n’existait pas. Il n’était même pas citoyen. Mais malgré sa lassitude, Keshâ était encore jeune et naïf et accordait un peu trop vite sa confiance à la chance et aux circonstances.

-« Je suis content de vous revoir, moi, aussi, Seraphah. Vous êtes très en beauté ce soir. »


Rien que pour cela, il pouvait être reconnaissant pour l’immersion. Même blindé de tunes, les voyous n’avaient aucune classe, aucune esthétique, aucune élégance. Keshâ obéit en silence, ses pas n’étant troublés que par le chuchotis des mèches des bougies crépitant dans l’air et par le froissement subtil de l’étoffe de son pantalon assombrie par la pénombre.

La demande formulée par son hôte le surprit. Pour quelle raison pourrait-il bien vouloir voir ses mains de près ? Cela dit, il avait renoncé à comprendre les règles de cet univers qui lui échappait. La haute-ville faisait éclater tous ses repères. Et, à l’intérieur, Le Marquis s’annonçait comme un microcosme déroutant entre tous. Cela ne pouvait faire de mal à personne que de plaire contre tous les cadeaux qu’il avait déjà reçu.

Il lui montra ses mains, les doigts étendus de dos, puis retourna ses paumes vers le ciel comme on présente à une matrone d’orphelinat ses minettes avant de passer à table. Keshâ regarda avec attention Seraphah toucher ses mains, comme s’il n’y croyait pas. Une personne aussi importante pouvait faire preuve de charité ou de gentillesse, comme il en avait fait montre depuis la veille. Elle pouvait aussi exprimer un désir de nature charnelle. Mais sans le connaître, il exprimait maintenant une forme de tendresse d’un genre tout à fait atypique, auquel il n’était pas préparé.

Si une poignée de main avait cela de formel, cette exploration sensorielle était d’autant plus intime qu’elle laissait le temps au jeune homme de se perdre dans les effluves de son parfum héspéridé et les reflets de sa chevelure volcanique. D’ailleurs, il se sentit tout de suite enveloppé par le toucher brûlant et l’énergie qui se dégageait de lui.
-« Comme il vous siéra, Seraphah. » s’entendit-il répondre.

Plus il était en sa présence, plus un vocabulaire pointu dont il ne se savait plus doté refaisait surface. Il dut se placer dans son dos, contemplant sa peau parfaitement unie et ses cheveux longs rassemblés sur son torse en cascade. S’il était doué pour les cornes de feu, il ne prétendait pas connaître l’art du massage. Mais il se disait que c’était avant tout un présent d’attention, quoiqu’une part de lui pense avoir enfin saisi la véritable raison pour laquelle on s’était en particulier intéressé à lui. Ce monsieur avait jute plus raffinement que les autres. Peu importe. Il avait l’air galant et bel homme. Ce ne serait pas désagréable. Au contraire.

Ses mains se posèrent avec précaution sur la soie du kimono rouge poison. Ses paumes englobèrent doucement la masse des muscles pour les décoller symétriquement vers le haut et en arrière en de légère rotations, étirant au mieux les fibres en plusieurs points.

-« Ma journée a été excellente. En grande partie grâce à la diligence de vos équipes. La première partie a été très reposante. La seconde, un peu plus transpirante. Mais Maëlstrom est un bon enseignant. Je ne comprends juste pas pourquoi vous teniez à me voir combattre. Je crois qu’il est clair qu’un chanteur n’est pas toujours le meilleur bretteur. En ce qui vous concerne, je ne peux que vous exprimer ma gratitude renouvelée pour cette tenue.»

Ses longs doigts prenaient soin de ne pas pincer la peau en leurs extrémité. La soie avait tendance à glisser, il faisait de son mieux, tentant d’élargir la prise pour venir attraper d’autres muscles un peu plus bas. Cet exercice était assez relaxant pour lui aussi. Même en plein rêve, il n’oserait pas réclamer à quiconque dans cette bâtisse un massage des jambes, trop heureux de toute la magie qui s’était liguée pour le faire évader.

-« Et la vôtre, en êtes vous content ? »



Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Lun 23 Oct - 15:59, édité 1 fois
Ven 22 Sep - 18:04



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto




Charmeur. Comme le feu qui attire la main de l’innocent jusqu’à s’en brûler. À l’intérieur de lui, c’était comme des images venues d’un autre temps qui relataient le temps après lequel les hommes courraient. Il reflétait ainsi leurs désirs, autant que leurs frustrations. Parce-que pendant longtemps il a été un confident secret, recevant les rumeurs, les contes et les larmes. Il fut aussi un compagnon joyeux, quand venait le temps de célébrer, les danses passant de joie à sensualité en quelques heures seulement. Il avait ainsi pu voir les hommes se voler, se trahir, autant que s’écouter ou s’aimer. Il s’était nourrit de tout cela tandis qu’on profitait de sa chaleur pour chauffer la volaille. Quand il fermait les yeux et qu’il ne dormait pas, il voyait toutes ces images comme s’il ce fut agit d’hier, sans parvenir à replacer tel rire à telle époque. À dire vrai, les flammes dévoraient ses souvenirs depuis bien longtemps.

Te demander de le masser était t’amener dans une intimité qui n’avait pas d’autres directions pour le moment, que de profiter de l’instant. Soit, il n’avait pas de tensions, mais il apprécia la poigne de tes mains, malgré la présence du tissu de soie. Il poussa un léger soupir, sa tête basculant toujours un peu plus face à la détente qui s’opérait dans son corps. Son esprit quant à lui, restait aussi vif que ses flammes, à écouter le résumé de ta journée. « Vous ne serez pas qu’un chanteur dans votre vie Keshâ’rem. Il vous faut savoir combattre pour les moments où vous n’aurez pas le choix de faire front. Je ne m’attends pas à ce que vous deveniez l’égal de Maelström, mais bien que vous puissiez compter sur votre corps si des situations périlleuses voyaient le jour. » Ton toucher était un délice...à moins que je n’adorais que trop les massages..

« Vous appréciez réellement? Cette tenue? Maelström trouve mes goûts trop extravagants...Je suis surpris que vous ne soyez pas de son avis. » Impression que la majorité de ceux n’étant pas nés nobles cherchaient l’ombre des tissus sombres, comme pour devenir ombre eux-même. Comme si vous cherchiez sans cesse à vous protéger, à être sur vos gardes.  « Ma journée fut satisfaisante. Nous devrions partir d’ici deux semaines maximum à Aramila pour une affaire privée. Pour le reste, rien d’inhabituel pour moi. Une opération, des recherches, des rencontres...Et notre rendez-vous. » Ses trapèzes t’échappèrent tandis qu’il se redressait et se tourna vers toi. C’était la première fois qu’il accordait de l’importance à ta tenue. Contemplation. « Ces couleurs te vont à merveilles. » Son regard semblait réellement en adoration face à ton apparence. Au point où le vouvoiement avait laissé place à un étrange rapprochement.

Cela ne dura pas. Son regard sembla devenir plus sérieux. « Venez donc vous asseoir. J’ai beaucoup à vous dire ce soir. » Tandis que tu contournais le fauteuil pour venir prendre place sur ce dernier, il prit une cuillère argentée qu’il positionna au-dessus d’un verre en cristal. Il y déposa du sucre avant de se saisir de la cuillère et d’une bougie afin de brûler ce dernier. Trop tôt. Il aurait pu utiliser sa propre essence, mais il s’en garda pour le moment. Il réitéra l’opération sur le second verre, avant de prendre la carafe au liquide d’un vert poison et de servir. Il se tourna vers toi en te tendant ton verre d’absinthe. « J’aimerai que vous travaillez pour moi. Que vous ayez votre place au sein de cet hôtel et peut-être même auprès de moi, dépendant de votre volonté et de votre attitude à mon égard...et à l’égard de mes fonctions. » Il était important qu’il soit avec des personnes de confiance. Les rumeurs vont tellement bon train, qu’il n’aimerait pas entacher d’une façon ou d’une autre Epistopoli.

Il amena le verre à ses lèvres avant de poursuivre : « Que vous sachiez auprès de qui vous êtes Keshâ’rem, car je doute que Maelström vous ait mis au parfum. Je suis diplomate d’Epistopoli autant que membre du comité. Vous savez en quoi consiste ce dernier? » Ce n’était pas pour te diminuer qu’il posait la question, mais pour discerner jusqu’où allaient tes connaissances de la Haute-Ville et des fonctions qu’on y trouvait. « Je mène également des expéditions dans la Brume parce que la connaissance est ce qu’il y a de plus précieux pour moi... Concevez-vous que certaines choses doivent rester secrètes, seulement révélées à des initiés? Est-ce que votre père vous a transmis cette valeur? » Son regard était captivant en ces instants. Tu pouvais sentir l’intensité de ses mots, comme s’il devenait une source de chaleur. « Enfin, vous savez que je suis médecin, alors oui, je m’occupe de quelques patients quand on m’en fait la demande, mais à l’heure actuelle je fais surtout de la recherche sur comment améliorer les problématiques respiratoires... » Ce n’était pas pour rien qu’il avait fait construire un jardin dans l’hôpital...Les plantes, l’oxygène qu’elles recelaient tout simplement, était la solution la plus adaptée. « Mais aussi sur celles et ceux ayant eu un choc, un traumatisme et comment s’en relever. » Cette branche de la médecine était toute récente, mais elle lui permettait de creuser dans la psyché comme jamais auparavant.

« Est-ce que vous aviez conscience, d’une façon ou d’une autre, peut-être car vous êtes observateur... » J’avais noté la précision dans tes propos durant la soirée d’hier. « que j’étais bien plus que le propriétaire de ce charmant hôtel? » Il avait ce talent de parler avec douceur de ce qui étaient des sujets importants. Et cette douceur n’enlevait rien à l’emprise qu’il semblait exercer, alors même que tu pouvais sentir que tu étais libre de t’éclipser. L’ambiance était toujours aussi sensuelle avec tous ces tissus, ce tamisé...et pourtant, le massage était bien loin.


Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Lun 6 Nov - 17:21, édité 1 fois
Sam 23 Sep - 5:38



Un rêve bleu

Ft. Séraphah Von Arendt



Il faut se méfier de l’eau qui dort. Ou plutôt, sous le charbon, les braises sont encore chaudes, est l’expression qui convenait mieux à la majesté de Seraphah. Sous des airs silencieux, il n’en était pas moins ardent du plus subtil soupir au plus petit mouvement. Son crâne s’alourdissait entre ses doigts alors qu’il effleurait sa nuque. En le regardant, on aurait dit une statue qui aurait pris vie.

-« Je ne sais pas encore si cette perspective me rassure ou m’inquiète. Il vaut toujours mieux être préparé. Dois-je comprendre que vous vous projetez loin en ma compagnie ? »

Il ne l’avait pas directement relevé, mais le propos de Seraphah soulignait qu’il serait amené à être chanteur, puisqu’il ne serait pas « que cela ». Or, il n’avait jamais imaginé porté ce titre jusqu’à présent.

La musculature de Seraphah était souple et déliée, d’une sorte qu’il avait rarement connue. Le dandy semblait néanmoins savourer chaque seconde de son massage comme on apprécie chaque bouffée d’air frais. C’était sans doute le privilège de l’élite intellectuelle de prendre à ce point soin de son corps et de ne pas le charger de sacs de ciment sur le débarcadère avant que ne vienne la rosée.

-« Absolument ! J’ai rarement aperçu une beauté pareille. Elle est d’une telle originalité que je me demande bien qui à pu la créer. Je suis d’allure modeste, mais si la matière se pliait aux caprices de mon esprit, il y en a plus l’un qui me trouverait décalé. Je trouve que vous avez énormément de goût. »

Keshâ était content que son hôte soit satisfait du déroulement de sa journée. Cela signifiait qu’il serait dans de bonnes dispositions pour recevoir toutes les questions qu’il avait à lui poser et qu’il avait tant patienté pour soulever jusqu’ici. Cependant, il devait être épuisé de toutes ses tâches et il ne voulait pas le froisser. Il retint surtout qu’il devait partir à Aramila. Une affaire qui ne le concernait pas mais qui éveillait sa curiosité. Sans doute serait-il libéré pour s’occuper davantage des missions de surveillance confiées par Reyes dans ce laps de temps. Si son accès à la haute ville se confirmait, cela ne pourrait que lui faciliter les choses.

-« Formidable. J’espère que votre séjour à Aramila se passera bien. C’est un pays très accueillant si l’on en croit Maëlstrom. »
Assez rapidement, Seraphah lui échappa et se retourna face à lui. Il se sentait intimidé dans l’atmosphère feutrée des bougies, de deviner ses traits ombrés auréolés par une corolle rougeoyante, car l’homme avait une stature plus importante que lui. Mais ce qu’il dit le troubla encore davantage.

« Merci. » renvoya-t-il seulement. Il ne pouvait être que subjugué par la fronde directe de son regard et ce ton soudain si familier. Le voici plongé dans un non-dit impénitent où son esprit ne parvenait pas à saisir tout ce qui se jouait.

Il répondit à l’invitation à se joindre dans cette débauche de velours confortable et observa Seraphah procéder à cette étonnante cérémonie de l’absinthe. La carafe et les verres en cristal étaient si miroitant que l’on aurait dit des bijoux sculptés.
On avait envie de les manipuler en les tournant entre ses mains pour capturer le reflets des flammes et y deviner des arcs-en-ciel.

-« Monsieur Seraphah…je suis vraiment flatté de l’intérêt que vous me portez. Sans me connaître, vous m’avez déjà si bien traité que je ne peux que croire que vous êtes un homme honorable. »

Il se demandait encore comment la roue de fortune avait pu tourner si fort qu’elle en serait sortie de son axe pour le faire passer de clochard amélioré à accointance d’un membre du Comité d’Espisopoli et ambassadeur.

-« Non, c’est vrai, Maëlstrom ne s’est pas étendu sur le sujet. »

Et il avait été d’une telle naïveté que sa curiosité n’avait pas vraiment porté sur ces questions.
« Je sais que le Comité dirige en grande partie la ville. »

Bien que la voix de Seraphah soit d’un calme parfait et que son articulation soit choisie, il déroulait ses idées de façon si structurée qu’il ne lui laissait pas réellement le temps de s’engouffrer pour lui répondre ou lui demander plus de détails. Aussi, attendit-il son tour pour un espace de résonance plus grand.

« Vous faites vraiment beaucoup de choses fabuleuses. Malgré toutes les personnes à votre service, vous ne devez pas avoir le temps de dormir. J’espère ne pas consommer trop de votre précieux temps par obligation envers mon père. »
Il se tenait face au futur sauveteur des maladies pulmonaires d’Espistopoli, à un philanthrope qui se souciait de réparer les âmes cabossées et au futur découvreur des mystère du monde. Et il partageait un verre d’une couleur marécageuse avec lui après avoir fait chauffer une substance interlope dans une cuillère.

-« Eh bien, j’ai cru comprendre que vous aviez parlé de plusieurs activités hier. Mais vous n’aviez pas été aussi spécifique sur vos fonctions. Je ne pensais pas avoir affaire à quelqu’un d’aussi important à tous les niveaux… à ce sujet, comment pensez-vous qu’un orphelin sans éducation tel que moi puisse vous être utile dans vos fonctions. Et dans cet hôtel ? »


Même le groom avait une assurance incomparablement supérieure à la sienne. Et si le service de chambre ou la préparation en cuisine lui semblaient des tâches accessibles avec une formation idoine, l’idée d’être logé dans une des luxueuse chambre des étages supérieurs et d’avoir la nécessité de se former au combat ne collait pas avec cette vision.

Le jeune homme n’était pas sûr d’avoir suivi une logique aussi implacable dans sa répartie, peut-être avait-il laissé une idée en chemin ou construit tout cela dans un joyeux désordre. Aussi ajouta-t-il à la fin, fasciné par ce regard perçant qui le quittait plus :
« Pour revenir sur ce que vous disiez. Je n’ai pas beaucoup de souvenirs de mon père. Et je ne crois pas avoir vraiment eu l’occasion de me poser ce genre de questions. Sur le secret. Qu'avez-vous en tête exactement? »

Et pour cause, aussi loin qu’il se souvienne ces dernières années, il avait vécu seul. Ce n’était pas l’identité de ses plans d’un soir qui allaient faire mystère. A part l’emplacement de ses planques et de sa tirelire, il était bien peu de choses dignes d’être dissimulées qu’il ait pu manier pour en faire un secret. A travers cette conversation, on s'éloignait terriblement du chant qui les avait réunis.



Dernière édition par Keshâ'rem Evangelisto le Lun 23 Oct - 16:00, édité 1 fois
Ven 6 Oct - 0:55



Un rêve bleu

Ft. Keshâ'rem Evangelisto




Tes première paroles étaient sages. Du moins, tu tenais à clarifier ce qu’il n’avait fait qu’effleurer. « Seulement si vous souhaitez être associé à ma personne. » D’où toute cette description sur ses différentes fonctions. Pas qu’il y aurait un mal à être associé à lui, mais bel et bien que tu te rendes compte que cela devait impliquer une certaine intégrité de ta part, sinon tes comportements pouvaient lui retomber dessus. Il n’y avait rien d’anodin dans le monde des hautes sphères.

Touché. Par cette volubilité dont tu fis preuve concernant ta tenue et si tu avais pu toi-même modeler tes tenues. « Aurions-nous là une passion commune? » Déjà son esprit s’imaginait te présenter une multitude de tissus...même si cela serait une futilité face à toutes les tâches importantes qui l’attendaient ces prochains jours. Dont ce voyage à Aramilla où il ne savait pas encore s’il serait de bon aloi qu’il te prenne avec eux...Mais cette question s’évapora vite, il avait envie de mettre les bases de votre relation et c’est ainsi qu’il accueillait tes réponses, avant de poursuivre comme une rivière dans son lit. « Ce n’est pas qu’en raison de votre père que je prends du temps avec vous. Vous m’avez donné l’impression d’une jeune homme intéressant. » Ta curiosité ne lui avait pas échappé.

« Votre question est légitime, et je vais lever le voile sur ce point précis. J’aimerai, comme vous l’avez entendu, que vous soyez chanteur, ici-même, au Marquis, quand j’y donne des réceptions. Je pourrais même me mettre au piano pour accompagner votre voix...il nous faudra juste nous entrainer un petit peu. » Il doutait que tu aies déjà été en duo, d’où sa proposition. Son regard ne lâchait plus l’unicité de tes prunelles, tandis qu’il poursuivait : « J’aimerai parfaire votre éducation. Vous êtes curieux...du monde. Si jamais vous devez nous accompagner en expédition, je veux que vous veniez en toutes connaissances de ce qui nous entoure. Vous me direz sur quoi vous souhaitez progresser ou découvrir et nous trouverons des arrangements. J’ai cru comprendre que vous souhaitiez sortir d’Epistopoli. Le tout est de le faire dans les meilleures conditions...votre père m’en tiendrait rigueur sans cela. »

Il amena l’absinthe à ses lèvres et sentit sa brûlure quand il en prit une gorgée. Son regard se posa à nouveau sur toi avec douceur afin de venir éclaircir le dernier point abordé. « Je pourrais vous parler de mes souvenirs de votre père si vous le désirez... » Après tout, peut-être étais-tu curieux de ce dernier, ce serait légitime.

Son regard se perdit ensuite dans son verre tandis qu’il semblait déçu que tu n’aies pas le sens du secret inscrit dans tes veines. « C’est embêtant que cela ne vous soit pas familier...Je crains que vous ne m’en vouliez... » Son expression était sincère, légèrement contrit, quand il leva à nouveau son regard sur toi. « Vous savez que ma venue hier au soir n’était pas du au hasard. Elle était dû à cette volonté à ce qu’aucun secret ne soit révélée à des êtres qui ne connaissaient pas l’importance du sacré. » Il aurait pu éviter ce sujet. Mais à tout moment tu pouvais tomber sur des personnes qui te cherchent, ou te mettre à chanter innocemment...Il aurait pu te mentir, ne pas mentionner toute la vérité. Mais c’est ce qu’il fit : « Votre chant était remonté à des oreilles indiscrètes. Des oreilles qui veulent tomber sur vous pour décrypter les paroles de votre chant. Ce sont des profanes. Il était hors de question que cela puisse arriver...Alors je vous ai fais chercher, et je suis venu à vous. » La suite, tu la connaissais. Toutefois, tu pouvais bien imaginer qu’elle aurait pu être toute autre. Ainsi il laissa le silence vous envelopper, tandis qu’il déposait son verre, et qu’il se mit à jouer avec l’une de ses bagues à la pierre chatoyante.

« Est-ce que je peux vous demander de ne chanter ces chants de votre enfance qu’en privé et avec des personnes de confiance Keshâ’rem? Est-ce que vous comprenez l’importance de préserver le sacré? » Il inclina légèrement la tête, une de ses mèches rousses profitant du mouvement pour se dérouler le long de son visage, accrochant la lueur des bougies du lieu.




Dernière édition par Seraphah Von Arendt le Lun 6 Nov - 17:22, édité 1 fois