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Liberté dégivrée

Liberté dégivrée Brandw10
Sam 8 Juin - 12:01



Au sud d’Oman / Territoire Xandrie

Raphalos 1901


L’hiver. Un ennemi que Duscisio a longuement évité pendant des années.
Cela ne fait qu’un mois qu’il a quitté la capitale Xandrie, immense ville, centre du territoire du même nom. Cela fait également un mois que sa première aventure depuis fort longtemps s’est terminée. Le voyage vers les Monts d’Argent lui a rendu le goût du voyage, ce qui l’amène donc à parcourir ses terres seul, à pied, sans craindre le danger environnant. Seul le froid peut ici le gêner. Et pourtant, pour un élémentaire craignant le froid, il a l’air de bien se porter. Les conseils d’Ellendrine pour lutter contre les températures glaciales de l’hiver sont bien appliqués. Les vêtements qu’il porte l’isolent suffisamment bien de l’extérieur pour ne pas endormir la moindre ronce qui constitue son corps. On notera encore une fois l’absence de fleurs dans ses cheveux. Raison de plus, puisque l’on ne voit pas non plus sa chevelure d’argent, celle-ci est couverte par une épaisse capuche. Le gros manteau qu’il porte cache très bien sa nature élémentaire au point de le confondre avec un humain.

Une question rhétorique maintenant : que fait-il ici ?
L’igloo grossier que l’on voit à quelques mètres de lui près du lac est l’habitation qu’il s’est amusé à faire pour passer la nuit. Il ne tient pas à grand-chose. Avoir quelques briques déjà tombées donne l’idée qu’il était maintenu d’une façon ou d’une autre de l’intérieur pour ne pas se retrouver sous une masse de neige qui aurait pu l’ensevelir. Cela aurait été dramatique. La couche de neige, bien qu’isolante, l’aurait privé de lumière et d’air. Un gaspillage d’énergie qu’il aurait utilisé pour avancer aujourd’hui encore dans les bois au nord du Lac Oman pour retourner au village du même nom.
Notons l’originalité des humains à donner un nom à leur ville. Ajouter une ou deux syllabes de plus n’aurait pas été désagréable. Retournons à nos bois, là où Duscisio commence la journée en regardant l’igloo s’effondrer maintenant que l’armature de ronces gelée n’est plus là pour le maintenir. Le gel sur les tiges a fini par casser et emporter la structure éphémère dès qu’il s’en est séparé. L’élémentaire n’a pas dormi depuis des jours. Entre la nécessité et l’idée qu’il ne puisse se réveiller malgré toutes les précautions prises, les seuls moments où il peut se « reposer » n’ont lieu qu’en ville. Après Xandrie, il eut la merveilleuse idée d’aller vers le nord en passant par Logdar Rim où il put entrevoir la Brume qui le fascine tant, sans pourtant l’approcher. On l’y en empêche à plusieurs reprises. Cependant, entraîné vers elle, le rosier blanc doit se retenir pour longer le Fienk vers le bois de Fienk au pied des Polaires. Heureusement, par nature et par prudence, l’idée ne lui a traversé l’esprit qu’un instant. La saison n’étant pas propice à ce genre d’aventure, le chemin vers la ville fut plus facile. En attendant une meilleure occasion – en passant par la ville engloutie de Dainsbourg par exemple – l’apothicaire se contentera de prendre la route vers l’Est. Il fait un tour par le Guet de Fienk sans y pénétrer avant de prendre la route d’Oman comme prochaine escale.

Dans l’une des villes les plus anciennes d’Uhr, il y séjourna quelques jours pour acquérir un nouveau cristal de pouvoir après un peu plus d’une semaine. Période qui a permis d’abaisser le prix de l’objet en échange d’un service. Ce cristal d’absorption lui sera d’une grande utilité à l’avenir, il en est persuadé. S’il en croit les exercices pratiqués pour apprendre à utiliser le premier de sa collection – un cristal de barrière d’énergie – pouvoir récupérer lui augmentera sa survivabilité si jamais il devait faire de mauvaises rencontres. Et il en a eu. Ils sont rares. Les chemins qu’ils parcourent ne sont pas réputés pour être très fréquentés et l’homme est la seule créature capable de s’attaquer à quelqu’un qui leur ressemble pour des broutilles. Ce qu’il s’est passé pour le dernier groupe qui s’est montré hostile ? Vous ne voulez pas le savoir. Au mont d’Argent il a montré ce dont il est capable quand on porte atteinte à sa vie. Il est donc capable de recommencer et c’est ce qu’il s’est passé. Dans ce monde, la loi du plus fort s’applique n’importe où. Non soumis à la loi lors de son voyage, personne ne se posera la question des corps gisant dans la neige sur le bord d’une route. Cet épisode l’a même rendu infréquentable quelques jours où il s’est isolé dans les bois tout en cherchant quelques plantes, autres que les perce-gels, pour se changer les idées.

Revenons au présent.
Quelques heures après, Duscisio décide de retourner à Oman. Ce n’est pas par plaisir. La ville bien trop moderne à son goût est une étape nécessaire avant de se décider à retourner à Doucerive d’une seule traite et ainsi retrouver sa maison pour un temps. Il pourrait prendre l’un des moyens de transport à sa disposition. La grande voie lui offre ce service, mais rien ne l’y pousse encore une fois. La technophobie ne lui permet pas d’utiliser ce genre de confort et il s’en porte très bien. Grand voix qu’il rejoint au pont qui traverse La Sinue au sud de la ville. On lui proposera de monter dans l’une de ses machines et il refusera systématiquement tant l’approche de ses véhicules le rend très nerveux, voire colérique. Malgré cela, ses refus sont très polis et il se retient de hausser la voix à chaque proposition.
Même si la ville se rapproche toujours plus, le fait d’accepter une invitation à monter lui donnerait l’occasion de passer une nuit de moins à l’extérieur, mais il s’y refuse.
Sur le chemin, comme n’importe quel voyageur, il marche vers le nord. Croise ceux qui vont vers le sud. Aide ceux qui le demandent pour de petits soins ou de petits remèdes faciles à préparer avec les moyens du bord pour se faire quelques pièces. Mais le seul trait d’un élémentaire peu aimable à cause de la proximité électrique ou technologique ne rend pas très agréable sa rencontre…

Sam 8 Juin - 20:24
Elle voyagea sans encombre en charrette depuis Xandrie jusqu'au Passage du Mesnon. Arrivée au bout du passage, au croisement de Doucerive et d'Oman, se situait un lieu de repos pour les voyageurs. Une auberge de route, comme on en voyait sur les routes les plus pratiquées, pour permettre aux voyageurs de prendre un bon repas et de se reposer en sécurité. Il y avait donc cette auberge dans laquelle Nidaëlle avait décidé de s'arrêter. Elle était vêtue d'habits pour le voyage. Par-dessus sa tenue, elle portait un long manteau noir assez chaud pour la couvrir du froid de la Xandrie. Sans capuches ni gants pour se couvrir, les bouts de ses oreilles et de ses doigts viraient rouge à cause des intempéries. Elle ne s'en plaignait pas. Elle avait toujours préféré la neige au soleil, le froid mordant à la chaleur fondante. Sur son dos, elle portait un sac à dos sur lequel était attaché un sac de couchage. Son épée lourde, elle la portait accrochée à sa hanche. Ses cheveux blonds dépassaient de son manteau et ses yeux vairons rendaient son regard tout bonnement original. Elle ne possédait ni voiture ni arme à feu. Elle ne comptait pas s'attarder très longtemps en Xandrie, pas plus de quelques mois, elle n'avait donc pas investi. Elle qui avait vécu toute sa vie à Aramila, même si elle avait déjà tiré à l'arme à feu, n'y était pas habituée. Dépourvue d'arme à feu, elle demeurait une cible de choix pour les bandits de Xandrie, elle faisait donc attention à ne pas voyager toute seule. En règle général, elle profitait de son statut de maraudeuse pour se trouver une place dans un convoi marchand.

Le soleil s'observait encore au bout de l'horizon, derrière elle, l'astre se couchait peu à peu pour laisser la place à sa sœur, la lune. Tandis que quelque voyageurs s'étaient arrêtés pour observer le couché du soleil, Nidaëlle n'y prêtait pas attention. Elle était plutôt tracassée par l'heure. En rentrant dans l'auberge, elle s'attarda sur l'horloge attachée au mur.

- Mh, dix-huit heures. Presque dix-neuf, elle hésita. Reprendre la route maintenant serait inconsidéré, marmonna t'elle, la bouche cachée derrière le col de son manteau.

La salle comportait six tables en bois et une trentaine de chaises de la même matière. Ici, on se réchauffait au feu de bois, à l'ancienne. L'endroit lui faisait penser à Aramila. Finalement, elle n'était jamais vraiment loin de chez elle. Nidaëlle ne prit pas le temps de s'asseoir. Les tables étaient presque toutes prises, quelques personnes traînaient dehors et elle craignait qu'à cause de ça, plus aucune chambre ne soit disponible. Elle mourrait d'envie d'un bon bain chaud et d'un lit. Dormir à la belle étoile était hors de question. Tout de même, la salle était illuminée par des lampadaires et des lustres électriques. En bas, dans la cave, on entendait un vieux générateur à Myst vrombir. L'auberge fonctionnait assez bien pour que les propriétaires aient pu s'offrir du matériel électrique.

Le tenancier était dans la fleur de l'âge, la quarantaine passée, une pilosité faciale rasée de près et des cheveux élégants, coiffés vers l'arrière. Il portait un pantalon de costume noir, une chemise blanche et un gilet rouge. Le premier étage ressemblait à une taverne, il était relié à la cuisine par une porte un peu cachée au fond de la salle. Des escaliers menaient au deuxième et au troisième étage pour les chambres.

- Bonsoir. J'aimerais un bain et une chambre pour la nuit. Je compte partir le matin.

- Bienvenue à l'Auberge du Mesnon, il vérifia la disponibilité des chambres dans un carnet. Hé bien, il me reste tout juste une chambre. Vous faudra t'il un repas avec ça ?

Elle hocha la tête. - S'il-vous-plaît.

- Le menu de ce soir est bouillon de volaille, fromage, pain maison et légumes du jardin. C'est une soupe très grasse, bourrée d'énergie pour vous tenir chaud pendant la nuit et remplir votre ventre après une dure journée de marche. C'est huit sous la nuit pour la chambre, un sou pour le bain et deux sous pour la soupe. La chope de bière coûte un sou. On ne fait pas de remboursement.

Nidaëlle paya la somme demandée par l'aubergiste. Ses missions reportaient assez pour se permettre le luxe d'une nuit à l'auberge, d'un repas et d'un bain. - Voici.

- Merci. Nous servons le repas à dix-neuf heures trente précise.
Dim 9 Juin - 11:52



Auberge / Passage du Mesnon

Raphalos 1901


L’après-midi continue avec une aide bienvenue pour un petit humain blessé. Trois fois rien, une petite pommade avant de lui indiquer un endroit pour s’y reposer. L’auberge de route n’était pas là, la dernière fois qu’il est passé par ici, il y a quelques années… Lustres… Décennie. Peu importe la direction finalement, passer la nuit à l’établissement le plus proche pour trouver un coin chaud peut bien faire attendre son passage à Oman. Il n’y arrivera pas avant le début de la soirée, mais qu’importe. La seule différence ici est que le moyen de transport ici n’est pas une machine, une voiture ou d'autres technologies avancées qui le rendent désagréable. Le chariot semblable à celui qu’il a laissé à Doucerive le protégera du froid tout en laissant ses pieds au sec pendant les quelques heures qu’il y a jusqu’à cette auberge de route.
Suffisamment fréquenté pour y laisser quelques personnes autour de l’établissement, que ce soit par choix de rester avec leur bien ou par un potentiel manque de place sur l’auberge qui possède tout de même deux étages bien illuminés.
Le premier problème vient de ce qu’il sent ce qui cloque pour avoir autant de lumière dans un endroit comme celui-ci : le mystère, les machines et l’électricité. Leur présence n'est pas très importante, ils peuvent prendre un peu sur lui. Comme s’il séjournait à Oman pour une nuit, alors que celle-ci est envahie par la technologie électrique à tous les coins de rue.

La famille n’entrera pas. Le monde présent les dissuade de quitter leur chariot et tout ce qui s’y trouve, contrairement à Duscisio qui va tenter sa chance en les remerciant pour le trajet. Son regard change une fois qu’il leur tourne le dos. S’il s’est revenu de paraître désagréable face à ses bienfaiteurs, l’installation de l'auberge ne le laisse pas indifférent. Qu’importe. Il pense toujours qu’il doit prendre sur lui, il va tenir parole. Aucune entrée spectaculaire, si ce n’est celle d’un grand homme qui se découvre d’une capuche qui le protégeait du froid. Une grande sacoche pour entreposer petits remèdes, une partie de sa collection de graines et ses outils d’herboristerie. Sa grande chevelure argent attire quelques regards aussi bien d’hommes que de femmes se questionnant sur son âge malgré ses traits de trentenaire. Son charme naturel émane de quelques sourires échangés avec la gent féminine. Le regard de l’albinos reste tout de même assez appuyé sur celle qui, assise en mangeant tranquillement à sa table, soit trop contente de son repas pour lui prêter attention. Il passe pour se rendre directement au comptoir. Le premier détail observé est l’horloge mécanique indiquant bientôt les vingt heures à quelques dizaines de minutes près et le manque de place sur le grand panneau dénué de clef.
Le maître des lieux se présente à lui, un costume assez élégant et un ton de voix brut.

— Je peux vous aider ?
— Il n’y a vraiment plus aucune chambre. Dit-il en regardant attentivement le panneau pour être sûr.
— Non. La dernière a été prise par la jeune femme ici présente.

Duscisio se retourne, non pour attirer son attention, mais pour bien la regarder. Elle est plutôt jolie, mais cela n’arrangera pas ses affaires. Ses yeux vairons lui donnent un certain aspect unique qui lui plaît bien. En se retournant, l’aubergiste pouvait à son tour remarquer que l’homme n’était pas humain. D’un coup d’œil furtif, il peut observer les quelques ronces et les bourgeons qui s'entremêlent dans la chevelure argentée.

— Je vous sers quelque chose ?
— Oui… s’il vous plait. Réagit l’élémentaire en se retournant brusquement. De l’eau chaude peu salée dans une cruche me suffira.

Malgré la demande presque gratuite, Duscisio sort une pièce de son énorme sacoche pour le service rendu. Pour ce qui est de la chambre inexistante, il va soit devoir utiliser un peu de ruse ou de charmes, ou bien oublier l’idée de dormir au chaud avant de repartir à l’aube pour Oman. Qui ne tente rien n’a rien. L’aubergiste lui tend la cruche attendue. L’eau a été utilisée pour préparer le repas, un gain de temps et de saveur de légume poussé dans la terre qui comble ses attentes.

— J’en ai toute une marmite, si vous en voulez encore. Précise l’homme non content de pouvoir satisfaire une eau qui allait être jetée à la fin du service.

Si Duscisio le remercie en prenant la cruche, très satisfait, il marche doucement vers la jeune blonde aux yeux rouge et vert. Chance que la table en elle-même soit libre d’une place à côté.

— Je peux ? Dit-il en tirant la chaise sans attendre de réponse.

Il n’attend pas longtemps pour saisir une gorgée qui passe à travers les entrailles, nourrissant ses jeunes racines présentes à ses pieds et réchauffant chaque tige qui constitue son corps. Il ne prononce pas un mot. Par contre, il ne peut pas s’empêcher d’observer ses yeux entre deux gorgées pendant qu’elle mange. Cela l’intrigue. S’agit-il d’une anomalie, d’une transformation ou d’une particularité génétique ?
Plus les secondes passent, plus les gorgées d’eau chaude sont écoulées, plus cela pourrait en devenir insistant, si ce n’est dérangeant. Il ne se demande pas comment le prend la jeune femme, mais il y a quelque chose dans son échange lorsqu’ils croisent leur regard d’attirant. Cela ne marchera peut-être pas, mais s’il advient que cela la dérange, il ira s’excuser simplement tout en la questionnant peut-être un peu sur cette curiosité de la nature.

Dim 9 Juin - 15:01
Elle avait eu le temps de déposer son épée et son sac à dos dans sa chambre. Elle fit le tour de la petite salle et se coucha cinq minutes dans son lit pour tester le matelas. La chambre était de qualité : propre, bien aménagée. Le lit n'était pas neuf. Il grinçait légèrement à chacun de ses mouvements. Un défaut désagréable, surtout pour ceux ne sachant pas s'endormir sans bruits. De plus, on pouvait entendre dans la chambre, en bruit de fond, le moteur du sous-sol vrombir. Sans parler des gens qui parlaient et qui riaient en bas. Mal isolée, dans la chambre, les bruits du dehors filtraient sans plus de soucis. Gagner le sommeil promettait d'être compliqué. Après ces quelques désagréables découvertes, elle descendit manger sa soupe. Qui était au moins très bonne. Ensuite, elle prit un long bain, mousseux, pendant dix minutes. Le service était d'une qualité bien supérieure aux vieilles infrastructures de l'auberge. En sortant, elle sentait la lunalys, une algue à l'odeur spécifique qui se trouvait le long des rivières, commune, facile à trouver, elle pouvait faire office de savon. Nid appréciait beaucoup l'odeur de la lunalys et s'en servait souvent.

La première chose qu'elle fit au lieu de remonter dans sa chambre était de signaler à l'aubergiste les quelques problèmes qui accommodaient son séjour.

- Vous devriez faire quelques rénovations. Les chambres sont mal isolées, les sommiers des lits sont à changer et le moteur fait un boucan vraiment désagréable.

L'homme se trouvait être bien embêté par les signalements de Nidaëlle. Il affichait une moue désolée.

- Mademoiselle, j'en suis navré, mais la politique de la maison ne nous permet pas de faire des rénovations. Ma femme et moi avons décidé, malgré les problèmes actuels, de ne pas augmenter le prix de nos chambres. Cela pour laisser un maximum de monde capable de se reposer. En privilégiant des forfaits aussi avantageux pour nos nombreux clients, nous ne pouvons pas nous permettre des rénovations.

Nidaëlle n'avait que faire des jérémiades de l'aubergiste. Elle ne le plaignait pas et ne se sentait pas désolée pour lui. Elle faisait une moue compatissante, mais ne ressentait aucune empathie pour l'homme qui lui faisait face. Elle était aussi froide que le sommet du Mesnon. En parlant du Mont du même nom que le passage, est-ce que ce dernier connaissait de nombreux alpinistes ? Elle n'en savait rien. Juste après sa réflexion, elle se secoua les puces. Trop souvent, des questions inutiles parasitaient son esprit.

- Très bien. Mais que comptez-vous faire pour régler mes soucis ?!

Nidaëlle était désagréable et méprisante. L'once d'empathie qu'elle affichait était du cinéma. Elle aurait pu prendre des pincettes et un gant de velours pour s'adresser à lui. Se montrer compréhensive, compatissante et reconnaissante de l'honnêteté de l'aubergiste. Mais elle n'en voyait pas l'intérêt. Pour être douce et gentille, elle devait y trouver un intérêt.

- La maison pourrait vous offrir une bière. Un peu d'alcool saura certainement vous faire oublier le bruit du moteur.

- Va pour une bière, acquiesça t'elle.

La chope en main, elle marcha entre les tables à la recherche d'une où s'asseoir pour la déguster en paix. Malheureusement, toutes les tables étaient prises. Elle alla s'asseoir à la table de trois voyageurs qui jouaient aux dés.

- B'soir. Y'a plus de tables libres, je m'incruste pour regarder votre partie.

Les hommes n'y trouvèrent rien à redire, au contraire, ils étaient plutôt contents de recevoir une nouvelle personne à table. Très vite, on lui proposa de jouer aux dés. Elle accepta. Pour accompagner les jeux, elle commanda une deuxième bière, puis une troisième... Jusqu'à ce qu'une quatrième personne vienne s'asseoir à côté d'elle.

Un garçon ayant à peine la vingtaine répondit à Duscisio : "Bien sûr, c'est libre. Nous jouons aux dés. Installez-vous, prenez une bière et que la chance vous sourit. Pas besoin de miser de l'argent pour jouer, nous faisons ça pour l'amusement." Un homme plus âgé commenta : "Vous ne trouvez pas qu'il manque un peu de musique ?" Le troisième répondit : "J'aimerais bien entendre une reprise d'Halymène, c'est une musicienne assez connue de la ville. Sa voix est divine. Elle avait chanté pour les morts après l'attentat d'Opale. Elle avait réussi à me faire pleurer."

Si seulement ils savaient qui elle était, pensa t'elle. Ils tireraient la tête la plus drôle d'Uhr. Une surprise mémorable déformerait leurs visages rouges d'alcool. Elle crevait d'envie de leur expliquer pourquoi ces morts étaient nécessaires pour eux et en quoi ils devraient remercier le Cercle pour ce qu'ils faisaient. De leur expliquer quel rôle allait jouer ces morts dans les plans du Mandebrume. Quand bien même elle-même ne le savait pas, elle avait des hypothèses à partager. Yodicaëlle avait joué un bon coup ce jour-là.

Les poils de son corps se hérissèrent. Elle se sentait observée. Elle jeta un regard soupçonneux à l'homme aux cheveux blancs. Soudain, les théories fusèrent dans sa tête. Était-il là pour elle ? Sa couverture était-elle tombée ? Qui était-il ? Et si c'était un caravanier qui traquait les membres du Culte ? Quel impudent ! Elle se retenait de trembler de rage. Elle pensa alors qu'elle devait l'attirer dehors et lui tirer les vers du nez.

- B'soir. Vous allez bien ? Vous ne buvez que de l'eau ? J'ai un peu chaud ici, je comptais sortir prendre l'eau... Heu, lapsus. Je voulais dire que je comptais sortir prendre l'air. Voudriez-vous m'accompagner ? Je n'aime pas être seule dehors.

Elle allait l'amener quelque part à l'abris des regards et lui sauter à la gorge. Elle était certaine qu'il était là pour elle. Elle lui jetait un regard à la fois farouche et déterminé, presque accusateur.

[Hrp : résultat des dés, il y a deux lits dans la chambre.]
Dim 9 Juin - 21:20



Auberge / Passage du Mesnon

Raphalos 1901


L’invitation ne vient pas de la jeune femme, mais des trois personnes présentes autour en train de jouer au dé. Le plus jeune propose de s’installer, de prendre une bière et un soupçon de chance.

— Je ne mise jamais sur la chance. Fait-il avec un large sourire. Mais si vous faites le nombre plus grand que le mien, je vous donne ma bière…

Comble de l’ironie pour quelqu’un qui ne possède qu’une cruche d’eau chaude dans la main. Grand bien lui fasse, Duscisio ne boit pas d’alcool. Impossible donc de le saouler, dans tous les sens du terme.
Chacun à son tour, l’envie d’une petite bière gratuite leur offre l’occasion de boire un petit peu plus pour le grand bonheur du gagnant. Le plus jeune se voit chanceux et lance le premier. Un 3, un 5 et un 4. Des valeurs plutôt moyennes, mais il ne perd pas espoir alors que le sujet de discussion se lance sur un manque de musique, énonçant quelques personnalités dont Duscisio ignore totalement l’existence. Loin de tout, il n’a eu que pour musique le doux chant des oiseaux du printemps à l’automne quand l’occasion s’y présentait. C’est en silence qu’il partage le moment. L’herboriste garde un œil sur les deux yeux vairons de la jeune femme en train de manger et de boire.
Le deuxième lancé est une série, 4, 3 et 5. Il continue sur l’attentat d’Opale, dont Duscisio ignore aussi l’existence. Afin de ne rien montrer, il ne prononce toujours pas un mot. Attendant chaque résultat du tintement des dés pour y jeter un coup d’œil, vérifiant qu’il n’y a aucune triche non plus. Le troisième se suit très vite, un 6 et deux 4. C’est le score le plus haut pour le moment. Quand vient celui de l’élémentaire, tout le monde a les yeux rivés sur sa main qui tape faiblement sur la table pour cacher son jet, puis la déception se lit sur les trois visages en voyant le résultat. Il faut croire que cela soit bien la chance qui est de son côté. Le triple cinq qui émerveille la table lui donne un préjudice au vu qu’aucun ne le dépasse. Il se retrouve un peu coincé dans le sens où il a parié le score le plus élevé au sien… et c’est l’élémentaire qui a le plus haut. Manque de bol, il réfléchit quelques secondes avant d’annoncer simplement.

— Bon… Je vous en offre une chacun pour la peine…

Duscisio est bon joueur et appelle l’aubergiste pour prendre commande de trois bières. À défaut de vouloir rejouer, il s’abstient tout de même de faire un autre pari et ne lance que quelques dés avant de ne plus quitter du regard la jeune femme. À défaut de ses yeux rouge rubis, la seule différence se présente par le vert de l’œil droit de Nidaëlle. Bien que le rouge du second soit très clair, presque brillant ou lumineux. Bien trop insistant, il semblerait qu’elle n’apprécie pas d’être dévisagée à ce point. Si elle ne jetait pas un tel regard, il aurait pu prendre cela pour une réponse pour faire plus ample connaissance. Mais ce n’est ni joie ni malice qui ressort dans le ton de sa voix et de ses yeux. Trait de caractère qu’il ne reconnaît que trop bien si on se rappelle la mauvaise rencontre au nord d’Oman avant de quitter la grande voix. Si, si, le groupe qui a mis de mauvaise humeur Duscisio après avoir été transformé en engrais. Cette fois, il se rend bien compte que son échange a été bien trop insistant, en plus de ne pas l’avoir très bien pris. En conséquence, l’élémentaire va rectifier le tir et dissoudre le malentendu à sa manière.

— Je crains que je ne puisse voir mieux vos yeux dans la pénombre extérieure. Dit-il en souriant légèrement. Désolé, j’étais en train de me demander comment une jolie femme comme vous pouvait avoir des yeux de deux couleurs différentes.

Allait-elle le croire ? Sa curiosité pas encore satisfaite et un incertain plan de séduction qui n’a finalement point réussi le pousse à préciser sa question.

— Je cherche à comprendre. C’est une anomalie génétique ?

Il ne changera pas de sujet. Pas même pour lui demander des précisions sur la chambre, bien trop concentrée sur cette différence qui l’intrigue.

Lun 10 Juin - 16:09
[hrp : Jet de résistance à l'alcool (2) difficulté 12, échec.]
D'ordinaire, Nidaëlle était plutôt résistante à l'alcool. Au bout du troisième verre, elle se sentait encore bien. Certes un peu plus éméchée, mais rien dans son état actuel ne l'alarmait de ce qui allait se passer. L'homme qui la fixait avec insistance paria mal sur les résultats des dés. Il accepta d'offrir une tournée à la table après sa défaite. Bien sûr, une bière gratuite ne se refusait pas. Un autre inconnu, qui était alors au bar pour prendre sa commande, accepta de prendre les bières de Duscisio pour rendre service au tenancier. Lui sur les nerfs, tandis que la serveuse était débordée. Le client du bar, un jeune homme aux cheveux noirs coupé très court et imberbe du visage, en profita pour discrètement déposer une drogue au fond du verre de Nidaëlle, avant de distribuer les bières à la table des parieurs, vaillant à ce que la bière empoisonnée revienne à sa victime. Il fit un sourire aux joueurs et s'en alla plus loin. [Hrp, tu peux faire un jet de dé de perception si tu es joueur ou décider par toi-même de ce que Duscisio voit ou pas. J'ai improvisé ça par rapport au jet désastreux que j'ai fais.]

Pas facile de se détendre et de boire sa binouze en se sentant épiée, observée, stalkée par son voisin de table. Réagir en l'ignorant ? Elle ne le pouvait pas et ne le voulait pas. En découdre discrètement avec lui en lui proposant d'aller dehors ? Impossible. Il n'avait même pas réagi à sa demande. Elle se sentait dérangée par l'insistance de l'homme. Elle commença à se demander s'il ne s'agissait pas d'un pervers et s'il ne possédait pas à tout hasard un étrange pouvoir permettant de voir sous les vêtements. Elle se sentait déshabillée du regard. Elle regardait vers le stalker pour voir s'il continuait à la fixer, la seconde d'après elle détournait son regard pour faire semblant de ne pas s'inquiéter de lui. Puis il prit la parole. Nidaëlle n'avait toujours pas touché à sa quatrième chope. Elle profita de cette prise de parole pour le fixer à son tour et le détailler du regard sans que cela ne paraisse louche. Elle s'attarda d'abord sur les traits de son visage, qui faisaient des lignes longues et fines, et une mâchoire proéminente. Ses lèvres fines, ses joues lisses, toutes imberbes et son nez aquilin terminaient de forger l'avis de Nidaëlle sur le physique de l'homme : plutôt élégant, mais un peu trop efféminé à son goût. Elle aimait bien ses longs cheveux blancs, comme un rideau de neige ou un nuage cotonneux, ça donnait envie d'y plonger les doigts si seulement il n'avait pas l'air d'un pervers à ses yeux. Il avait l'air noble, elle n'aimait pas beaucoup ça non plus. Ces derniers, les nobles, avaient tendance à se croire tout permit et au-dessus des autres. Ça l'agaçait vivement.

- Ecoutez... Si vous arrêter de me fixer avec autant d'insistance... J'accepte de vous montrer mes yeux et de répondre à vos questions. Mais avant ça, vous pourriez au moins vous présenter n'est-ce pas ?

Ses joues s'empourpraient à cause de l'alcool. Son haleine goûtait le malt et le houblon. Elle parlait avec un peu plus de difficultés, elle mâchait certains de ses mots... Elle n'était pas ivre, mais n'en était plus très loin. Elle s'apprêtait à boire dans sa quatrième chope.

- J'crois bien que c'est génétique, ouai.

Elle restait toujours méfiante à l'égard de Duscisio, mais à l'inverse, elle ne se méfiait pas une seule seconde de sa chope. Peut-être n'était-ce même pas la première chope que l'inconnu droguait ? Cela expliquerait son état malgré le peu d'alcool qu'elle avait ingéré.
Lun 10 Juin - 18:52



Auberge / Passage du Mesnon

Raphalos 1901


L’ambiance est agréable et Duscisio oublie vite la présence d’électricité. Les lumières le gardent éveillé et c’est aussi une bonne chose. Si dans le froid, il ne se serait jamais permis de prendre un repos par simple peur de ne plus se réveiller avant le printemps prochain, ce n’était pas la même chose dans un bâtiment humain. De plus, l’apothicaire est en présence d’une jolie jeune femme dont les yeux vairons continuent d’attiser sa curiosité malgré le fait d’avoir gagné au lancer de dé. Il est le seul à ne pas boire d’alcool. Sa chope reste donc la seule libre de liquide euphorisant, dont les humains sont friands pour se détendre. La demoiselle en avait déjà bu quelques-unes et montrait déjà des signes d’ébriété. C’était peut-être ça qui la rendait peu agréable. Au moment de la commande, l’aubergiste et sa serveuse sont trop débordés pour les servir correctement. C’est donc une tierce personne qui s’en occupe pour se trouver serviable. Le jeune homme qui leur sert les verres a mis quelque chose dans celle qu’il tend à la jeune femme, trop occupé à regarder Duscisio qui l’avait vraisemblablement agacé. Il laisse faire, mais la poudre versée l’intrigue. Son regard passe brièvement sur la chope, puis sur l'homme avant de retourner prendre la parole. En réponse, elle accepte de montrer ses yeux s’il se présente.


– Duscisio, apothicaire.

Une fois présenté, la prochaine question se pose. Et enfin, la chope de bière se lève en même temps que l’herboriste qui l’empêche de boire après avoir détourné le regard un instant vers l’homme qui les avait servis.

— Permettez.

Il s’approche d’elle, donnant l’impression de regarder ses yeux de son profil gauche, bloquant son poignet et lui susurre à l’oreille.

— Un homme a mis quelque chose dans votre chope…

En plus d’être plus méfiante, sa voix soudainement plus grave, l'argenté détourne son regard vers l’homme en question avant de la forcer à poser sa boisson. Ce qu’il a vu ? Le dealer est passé devant une autre cliente pour y verser cette poudre. Maintenant certains qu’il ne faisait pas partie du service, il compte recommencer avec une autre, augmentant donc le nombre de ses potentielles victimes. Duscisio se lève brusquement, attirant quelques regards, dont les joueurs de dés qui voient un élémentaire remonter. Le malfrat va passer un sale quart d’heure, car non seulement il coupe l’élan de Duscisio a parlé avec une jolie jeune femme et a oublié que l’électricité envahissait la pièce.
Alors qu’il comptait verser la drogue dans un autre verre, l’élémentaire lui bloque le poignet d’une force insoupçonnée. Surpris, le jeune aux cheveux noirs regarde l’argenté et prend aussitôt peur avant de se retrouver le bras en l’air, lâchant le sachet déjà ouvert. L’apothicaire rattrape le contenant.

— Retenez-vous de boire votre chope, mes demoiselles… Ce jeune homme a peut-être versé quelque chose de dedans.

De cet avertissement, tout le monde prend au mot l’attention qui lui est destinée pour avoir empêché un mauvais bougre de faire plus de victimes. Duscisio, visiblement toujours plus aigri, lui tord le bras derrière son dos. Ne pouvant que hurler de douleur.

— Lâche-moi, connard ! Se débat-il, tournant les talons pour lui faire face tout en se libérant.

Duscisio l’a bien lâché, mais à la place du jeune homme, il se serait tiré en vitesse. Avant ça, l’élémentaire inspecte la drogue et s'élance pour le plaquer contre le mur derrière lui avant de prendre une voix particulièrement énervée.

— J’ignore qui tu comptais soumettre avec ça… dit-il en connaissant parfaitement la substance nocive. Ta soirée s’arrête là.

La main sur sa gorge devient un amas de ronces avant de le soulever d’un mètre. Il irait jusqu’à le tuer si un client plus raisonnable et autoritaire se chargeait d’arrêter le voyou.

— Lâchez-le. Je m’en occupe. Dit le client en détachant une corde de sa ceinture, visiblement du métier qui cherche à faire respecter la loi. Pour toi, mon p’tit gars, c’est dans la prison d’Oman que tu vas séjourner…

Duscisio recule, lâche sa victime et s’occupe de ceux et de celles qui peuvent avoir certains troubles étranges.
Il passe en premier vers la victime qu’il a vue avant de l’arrêter et retourne auprès de la jeune femme aux yeux vairons. Toujours énervé, Duscisio s’assoit en regardant la chope de bière qui inespérément n’a pas été consommée. Il venait peut-être de sauver la nuit ou la vie de plusieurs personnes. La bonne action ne lui suffira pas à avoir bonne conscience. Comment connaissait-il la substance ? Avez-vous oublié son métier ? L’élémentaire s’est présenté à la demoiselle comme étant apothicaire. La drogue qu’il versait servait à soumettre et à rendre inopérante la victime. À partir de là, on peut imaginer toute sorte de méfaits. Vol, meurtre, viol ou les trois combinés.
Il ne prononcera pas un mot de plus. Manque de bol, le tenancier ne lui annonce pas non plus qu’une chambre se libère, ce qui accentue sa mauvaise humeur.

— Génétique donc… dit-il toujours aigri, désireux de passer à autre chose. Ça n’entraîne aucune gêne ?

Il reprend là où ils se sont arrêtés. L’ambiance n’est pas la même, mais la curiosité est toujours là.