Light
Dark
Bas/Haut

Avec élégance, tintent les astras.

Avec élégance, tintent les astras. Brandw10
Dim 29 Oct - 12:34



Avec élégance, tintent les astras.

En compagnie de Seraphah Von Arendt


Pour une nuit et pour quelques privilégiés, la Juste rivaliserait avec le faste de sa voisine opalienne. La guilde des Monétaristes ouvrait exceptionnellement les portes de son siège en Xandrie, un bâtiment d’une envergure impressionnante mais qui avait la sagesse de laisser au palais royal l’orgueil de rester le plus haut de la cité. Si son rez-de-chaussée était habituellement accessible au public, il n’en allait pas de même de ses étages et seuls quelques élus connaissaient ses sous-sols. Si ce n’était pas la première fois de son histoire que le siège des Monétaristes se livrait au jeu des mondanités dans ses propres locaux, ces moments restaient assez rares pour devenir exceptionnels et attirer l’attention de la population locale et internationale, pour les élites les mieux renseignées. La guilde n’avait cessé d'accroître sa renommée et son influence au fil des années, ce qui suscitait admiration ou jalousie, suivant les interlocuteurs questionnés.

Certains lui reprochaient ses accointances avec la royauté, d’autres suspectaient un apolitisme seulement motivé par l'appât du gain quand les plus optimistes priaient pour un soubresaut de rébellion, d’autres encore, plus nombreux chaque jour, comprenaient. Ils comprenaient que le monde évoluait plus rapidement que les pouvoirs en place et que le futur serait généreux avec les organisations monétaires. L’argent serait la seule valeur à laquelle tous seraient loyaux. Les plus pauvres comme les plus riches avaient déjà compris une réalité simple et implacable, les rois et les régents passaient et trépassaient, les astras eux, étaient éternels.

Ils tinteraient certainement ce soir, discrètement, élégamment, sans même être présents. Douce ironie, les plus fortunés avaient les poches vides. Cela faisait d’affreux plis, voyez-vous. Sur sa robe, fourreau d’obscurité, aucune couture disgracieuse, la nouvelle maîtresse des lieux ne commettrait pas cet impair. Ce n’était pourtant qu’une novice, un chaton qui entrait dans la cour des grands sous les regards scrutateurs des vieux lions. Si jeune, sans nom, sans lignage, pas même la bâtarde d’une noblesse de seconde classe, non, rien qu’un produit du peuple. Celui qu’ils méprisent, celui qu’ils saignent, celui qui gronde sourdement sous leurs bottes mais qu’ils ne veulent pas entendre. Fallait-il louer son ascension sociale ou mépriser ses origines ? Certains étaient encore indécis alors qu’ils l’observaient déambuler comme si elle avait toujours eu sa place parmi eux.

Drapée d’élégance, la jeune femme adressait un sourire fin à ceux qui croisaient le rubis flamboyant de son regard. Sur ses lèvres parées de carmin, glisse la respectueuse malice de celle qui sait parfaitement qu’ils la dévoreraient au moindre faux pas mais qui s’avance pourtant. Elle ne craint pas de marcher sur leurs plates bandes, en réalité, son menton haut, son dos droit, elle ne semble rien craindre de ces vieux lions. C’était par l’intelligence et la stratégie qu’elle était parvenue à prendre la tête de cette vieille organisation, elle avait déjà croisé ces regards sur le chemin de son ascension. Certains de ceux présents aujourd’hui avaient revu leur jugement, les astras sonnaient entre les mains de Chāyā Lelwani et cela suffisait à nombre d’investisseurs.

Ses talons hauts claquent sur le plancher, un rythme régulier, assuré, métronome des festivités de la soirée. Autour d’elle les invités affluent par petits groupes, ils entrent dans la majestueuse salle circulaire et pour les plus orgueilleux tentent de ne pas afficher trop ostensiblement leur curiosité. Leurs yeux les trahissent pourtant alors qu’ils jettent des regards furtifs vers les lanternes au-dessus d’eux, les étranges appentis de tuiles sur le côté de la salle ou encore ce majestueux chandelier de cristal au centre de la pièce. Pour rejoindre le centre de la pièce, nombreux étaient les invités à emprunter le petit pont surplombant ce qui semblait être un bassin artificiel agrémenté de nénuphars et lotus lumineux.

En réalité, il n’y avait pas d’eau dans ce bassin mais un savant jeu de lumière et de matière donnait cette poétique impression. Le rez-de-chaussé de la guilde des Monétaristes était un hymne à l’art xandrien, passé et présent, futur peut-être aussi. L’art était après tout, un angle d’investissement intéressant, quelle que soit l’époque et quelles que soient les crises.

Si l’eau du bassin était une illusion, celle qui tombait du ciel au-dehors était elle bien réelle. La météo avait été clémente jusqu’ici malgré les nuages lourds qui s’amoncelaient au-dessus de la cité mais les cieux avaient fini par céder. Évidemment, la situation avait été anticipée et des hommes en costumes noirs flanqués du symbole des Monétaristes descendaient et remontaient la volée de marches qui séparaient la rue de l’édifice, de grands parapluies dorés déployés pour sauver les invités des insidieuses gouttes de pluie qui pourraient gâcher leur apparat.
Lun 6 Nov - 23:59



Avec élégance teintent les astras

Ft. Chāyā Lelwani




Il y avait les regards. Il y avait les salutations. Il y avait les serrements de main. Beaucoup se demandaient s’il était présent pour les arts, pour affaire, pour une histoire d’état. Aucun ne le saurait. Il n’avait pas peur d’attirer le regard. Au contraire, cela devenait une arme bien malgré lui. Ils pensaient tout savoir de lui parce-qu’il offrait tout à l’oeil. Mais ses pensées restaient interdites à la majorité. Alors ses actions parlaient pour lui. On le disait partisan du peuple. Il avait toujours mis cela sur le dos de la médecine...Alors même que les scientifiques étaient les premiers à oser braver l’éthique si c’était – soit disant – pour le bien du plus grand nombre. Était-il de cette crampe? Les années filaient telles des fétus de pailles, tant et si bien qu’il n’arrivait pas à répondre à ce genre de questions. Bien trop éphémère à son regard ambré qui se portait sur la décoration qui ravissait ses sens. Contrairement à l’ostensible majorité il ne cachait nullement son admiration.

À ceux s’étant joint à lui, il s’exclamait : « Vous rendez-vous compte messieurs de la beauté de tout cela? » Il n’attendait pas de réponse, son regard semblant épris des merveilles comme l’aurait été un enfant. Tout cela avec une prestance qui amenait admiration. C’était son pouvoir naturel, ce charme doublé de sa chevelure qui attrapait la lumière des mille et une lanternes. L’un des hommes présents vint se présenter à lui. Un amateur d’art avec qui il avait déjà eu à faire. C’est ainsi que d’autres se rapprochèrent, créant à la sortie du pont un attroupement d’environ six personnes autour de l’élémentaire qui leur contait ses dernières trouvailles. C’est ainsi qu’il te tournait le dos. Remarquant dans un premier temps que l’attention de certains membres de son public déclinait, se portant sur autre chose…

Doucement, il se tourna afin de contempler le diamant que tu étais ainsi vêtue. Il n’était pas sans savoir qui tu étais...après tout, n’aviez-vous pas rendez-vous dès le lendemain? Les rumeurs avaient été bon train jusqu’à Epistopoli concernant celle qui était mal née et qui pourtant attirait les astras – et le pouvoir – à elle. De son côté aucun jugement, ni dans sa tête, ni dans le regard qu’il porta sur toi. Un sourire naquit simplement sur ses lèvres, tandis qu’il sentait certains plus grognons à ton approche, ce qui ne les empêcha pas de te saluer avant de filer. Peut-être était-ce car il se savait l’un des plus riches investisseurs de la Guilde des Monétaristes, peut-être simplement car Seraphah restera toujours Seraphah, mais il te salua dans les règles de l’art, inclinant sa tête quand tu fus à son niveau : « Madame Lelwani. » Son regard vint se saisir de tes rubis. « On m’avait vanté votre beauté, je dois bien admettre qu’il ne s’agissait pas que de rumeur. » Bien sûr que tu savais qu’il y en avait plein sur ton dos. Bien sûr qu’il se doutait qu’il y en aurait tout autant sur votre dos. N’étiez-vous pas bien assorti, lui de sa tenue de soie rouge et noire et toi de ses éclats de doré?

« Ce que j’apprécie avec les soirées de la Guilde c’est qu’elles rivalisent de beauté les unes avec les autres...Vous auriez adoré celle d’il y a une dizaine d’années maintenant. » Son regard arpenta à nouveau tout ce qui vous entourait, avant de revenir sur ta personne. « Profitons de la soirée voulez-vous? Nous aurons tôt fait de parler affaire lors de notre rendez-vous privé...J’espère qu’en ce soir vous m’offrirez le privilège de me parler un peu de vous. » Il commença à marcher doucement, saluant d’un regard qui de droit, le reste du temps semblant réellement sous le charme du décors qui est le vôtre. « J’appréciais énormément votre prédécesseur...J’espère que notre relation ira dans le même sens. »

Désormais vous étiez un peu moins central, ce qui l’amena à s’arrêter et se tourner vers toi : « Alors dîtes moi, madame Lelwani, au-delà des responsabilités qui sont les vôtres, qu’appréciez-vous le plus dans votre vie? » Sortir des cadres conventionnels. Une chose que peu savaient de lui, et pourtant c’était l’art qu’il appréciait sans doute le plus, non loin de la musique.


Mer 8 Nov - 22:13



Avec élégance, tintent les astras.

En compagnie de Seraphah Von Arendt


Dans le bleu et l’or, au milieu d’un océan chamarré, encerclée et couvée, la Flamme demeure remarquable. Elle brille, flamboie, dans ses étoffes de soie, elle se reflète dans les regards, danse sur toutes les bouches en rumeurs passionnées. Seraphah Von Arendt est une attraction à lui seul. Une oeuvre d’art à part entière que certains rêveront de posséder, que beaucoup se contenteront d’admirer, à une raisonnable distance. N’est-il pas envoutant de le regarder, ce feu qu’on veut docile, bien éduqué, domestiqué aux valeurs humaines ? Son visage n’est-il pas charmant ? Sa physionomie toute entière n’est-elle pas calculée pour séduire son audience ? Puisqu’après tout, ses traits avaient été dessinés, pensés, pas hérités. Quel beau tableau, de rubis et d’ambre, mais où se trouvait l’artiste ?

L’attention s’égare, parasitée par la présence d’une ombre projetée en pleine lumière. Sa peau paraît plus pâle ainsi drapée de contraste, l’ébène de sa robe tombe parfaitement sur ses courbes, le rouge sang de ses lèvres semble faire écho à la parure de la Flamme qui s’est tournée vers l’Ombre. L'alliage précieux qui constitue les seules décorations de sa tenue semble bien pâle face au faste de l’élémentaire mais peut-être est-ce dans ce contraste que se trouve l’harmonie. Ainsi l’un à côté de l’autre, ils forment un nouveau tableau et il devient évident, qu’innée ou non, la beauté est un art manipulable.

La maîtresse des lieux répond par un sourire modeste au compliment de l’élémentaire, le saluant avec l’élégance travaillée et policée d’un apprentissage rigoureux.

- Comme toujours, vous honorez notre humble établissement de votre radieuse présence, monsieur Von Arendt.

Il était doux, ce feu, presque mielleux, si on se laissait tromper. Pourtant, pourtant.. N’attaquait-il pas alors qu’il rappellait à tous la jeunesse de la nouvelle cheffe des Monétaristes, son absence à la dernière soirée de la guilde, son inexpérience ? Les regards et les oreilles se tournent vers la jeune femme et son sourire imperturbable. N’a-t-elle pas saisi le double sens ? Y avait-il vraiment un sous-entendu dans les mots innocents du diplomate ?

- Je suis enchantée de pouvoir perpétuer une si ravissante tradition.

Dans la continuité de ses prédécesseurs, perpétuer un lignage auquel elle s’affiliait habilement. Quant à la tradition, cela pouvait suivre l’idée d’une suite logique, d’un attachement rassurant au passé pour les investisseurs ou une petite pique subtile à l’âge, très certainement honorable, de l’élémentaire. Dans l’assemblée, on accorde une égalité aux deux protagonistes, sans trop savoir s’ils avaient réellement cherché à gentiment tester l’habileté langagière de l’autre. Lorsqu’ils s’éloignent, au pas lent d’une discussion plus privée, on ne retient qu’une chose, ils forment, effectivement, un beau couple.

Chaya laisse un sourire amusé glisser sur le rubis de ses lèvres lorsque l’homme évoque leur rendez-vous privé et l’opportunité d’en apprendre plus sur elle. Voulait-il si résolument faire courir des rumeurs à leur propos ? Elle laissait les murmures derrière eux, se contentant de répondre à son inquiétude.

- Monsieur Huang vous tient lui aussi en très haute estime, monsieur Von Arendt, soyez assuré que je serais pourchassée dans tout Uhr s’il devait apprendre que notre relation ne vous satisfaisait pas.

Délicates flatteries, humour et modestie, paillettes d’or sur les paupières de Chaya. Avait-elle vraiment des comptes à rendre à son prédécesseur ? Certainement pas mais, la jeune femme était trop maline pour laisser penser qu’elle n’était pas la digne héritière de ce cher monsieur Huang. Elle ne l’avait pas poussé à la porte, il n’était pas mort, pas même malade, seulement vieux et fatigué, il avait placé sa confiance et les rênes de l’empire monétaire à la nouvelle génération et à celle qui était jusqu'alors Trésorière. Une femme. Cela ne faisait pas l’unanimité en Xandrie et des langues venimeuses avaient laissé entendre qu’elle l’avait séduit, amadoué, empoisonné de ses charmes. Mais voilà que les années avaient passé et monsieur Huang n’avait jamais retiré son soutien. Le poison était-il si efficace qu’il ne s’estomperait jamais ? Puis les astras avaient coulé et les vipères s’étaient peu à peu tues, englouties, dépassées par l’indéniable vérité des chiffres.

Seraphah s’arrête, tourne à nouveau son attention sur la jeune femme qui ne frémit pas sous l’iris flamboyante. La caravanière a appris bien avant de faire des courbettes à cerner les gens, à connaître leurs envies même inavouées et inavouables, à anticiper leurs actions et à deviner les réponses désirées aux questions les plus ambiguës. Que désirait cet homme alors qu’il développait sa curiosité tout autour d’elle comme des pans de soie les isolant des regards indiscrets ?

-  Je trouve beaucoup de satisfaction au travers de mon travail, j’ai cette chance.

Puisque c’était loin d’être le cas de tous. Nombreux étaient à Xandrie les hommes et femmes qui ne concevaient leur travail que comme un moyen de subvenir à leurs besoins primaires. Combien étaient-ils en Epistopoli ? Alors que la science courrait vers un avenir qu’elle prétendait radieux, combien d’âmes en peine laissaient-elle dans son sillage ? Combien mourraient de faim aux pieds de leurs automates rutilants ? Combien seraient sacrifiés sur l’autel du progrès ? Combien d’autres, comme elle.

Un frisson gagne sa nuque qu’elle réprime dans un sourire parfait, elle se doute que cette réponse ne satisferait personne. Elle porte un index ingénu sur son menton, semble se prêter plus volontairement au jeu, réfléchit un instant avant que sa main ne s’abaisse et qu’une lueur nouvelle n’illumine la myriade de facettes de ses prunelles rubis. Elle fait un léger pas en avant et la soie murmure des secrets interdits contre sa peau, sa voix se fait plus basse et la malice s’amourache de ses lèvres.

- J’apprécie les étincelles, monsieur Von Arendt.

L’étincelle. N’était-ce pas un mot magnifique ? Une étincelle avait-elle donné naissance à l’élémentaire ? Au sein de ce feu si somptueusement dompté, si sagement contenu par les codes de cette haute société dans laquelle il s’épanouit, dans le cœur de cet homme, face aux yeux grenats de la curieuse, y avait-il encore cette étincelle ? Comme soucieuse de ne pas pénétrer trop longtemps l’espace vital de son interlocuteur, la malicieuse créature se détache, s’éloigne d’un pas sur le côté, déporte l’intensité de son regard sur un autre objet d’art.

- Les étincelles artistiques, par exemple, celles qui vacillent entre folie et génie. Les étincelles inspirées, passionnées, sincères. Il y a une promesse et une forme de danger dans toute étincelle, une incertitude qui éveille nos sens, aiguise nos perceptions.

Ils contournent lentement le majestueux chandelier de cristal, constitué d’une infinité de facettes cristallines cascadant du haut plafond jusqu’au sol. Une folie financière, une aberration sociale, un génie artistique. Les reflets capturés par le cristal se réverbéraient, formant un entrelacs de couleurs volées aux tenues chamarrées des convives qui se baladaient autour de l'œuvre. Quelque part dans cette fontaine extravagante, une touche de rouge et de noir complétaient, de manière éphémère, la création artistique.

- On m’a rapporté la multiplicité de vos occupations, commençait la demoiselle avant de se tourner vers son estimé invité, vous êtes un homme aux nombreuses facettes et votre vie semble très remplie, aussi, permettez-moi de vous retourner la question, parmi vos nombreuses activités, laquelle vous apporte le plus de plaisir ?

Véritables agates de feu, il semblait difficile d’échapper aux prunelles de Chaya, un regard félin, attentif, intense, inextricable.
Sam 25 Nov - 17:41



Avec élégance teintent les astras

Ft. Chāyā Lelwani


Ambiance

Une chorégraphie n’aurait pas pu être mieux orchestrée. Chaque mouvement paraissait calculé. Chaque respiration prise sur un silence tandis que les regards chuchotaient. Des messages si privés que chacun essayait d’en deviner les contours. Il y avait toujours une intensité perceptible à toute nouvelle rencontre. Surtout celle empreinte du pouvoir de l’amour ou de celui des affaires. C’était un battement d’ailes – de coeur – si fébrile, si possiblement meurtrier en fonction des intentions des protagonistes, que pour en ressentir la fraîcheur, il convenait de rester totalement immobile à l’intérieur de soi. C’était ce qu’il faisait. En tout temps ou presque. Parce-qu’il était un feu que l’on croyait sage, alors même qu’il restait sauvage. Loin des projections des hommes, loin de leurs bassesses ou de leur volonté malhabile. Il restait à part de ce monde qu’il avait apprivoisé grâce à beaucoup d’observation et de temps qui paraissait mort pour ceux qui n’étaient point sensible au miroir. À ces reflets quasi régulier qui se percevait dans les yeux de tout un chacun.

Quand tes rubis rencontrèrent ses ambres, il reconnut ta différence. Celle qui se cachait derrière ta conscience. Parce-que celle-ci restait sur ses gardes. Parce-que le félin que tu es se croyait dans une fosse...Étaient-ils réellement des prédateurs? Tous ces êtres qui avaient soif de connaître vos échanges. Tous ces hommes et femmes qui souriaient à vos propos, pensant tout comprendre, alors que tout leur échappait. Il ne leur accordait pas d’attention. Il n’en accordait qu’à toi. Le reste devenait brumeux parce que tu savais refléter la lumière autant qu’il l’attirait. Le lustré de ta robe dévoilait tout de ta superbe et rien de tes penchants. Il les imaginait alors sombres, capricieux et nuancés. Oui, parce-qu’il voulait croire à de la subtilité en toi, sans doute davantage qu’en ton prédécesseur. Malgré ses paroles auxquelles tu répondis avec un masque d’aplomb et de courtoisie propice à la situation, il adorait le changement. C’était ce qui venait faire vibrer son feu, ce qui venait lui rappeler sa nature qui provenait de la brume et y retournerait un jour.

« Vous faites bien plus que perpétuer une ravissante tradition m’est avis. » Sous-entendu mais qui ne semblait pas malin. Au contraire, il considérait que si ton prédécesseur t’avait choisi c’était qu’il voulait offrir un nouvel élan à la Guilde. Tu pris soin de ne pas le lui préciser tandis que tu venais citer, avec un brin d’humour poli, les conséquences qui te tomberaient dessus si jamais tu n’allais pas dans une certaine direction. Seraphah sourit mais se permit d’ajouter : «Libre à vous de me percevoir comme un conservateur...mais sachez que je considère le changement comme une denrée nécessaire pour toute évolution. » Il ne cherchait pas à te rassurer. Tu ne cherchais pas à être rassurée. La vérité était une potion dont il aimait s’abreuver pour toute relation qu’il escomptait de confiance.

« Je suis fort aise que vous aimez votre travail. Monsieur Huang m’avait parlé de vous à de nombreuses reprises. Votre travail précis, assuré et surtout avec une belle maîtrise des perspectives. À l’écouter, j’entendais que personne à part vous ne pouviez prétendre à reprendre sa position. » Même si son verbe était précieux, il n’était pas flatteur comme on pouvait le croire au prime abord. Il connaissait son importance au sein de la Guilde, il savait aussi le poids de cette dernière dans l’économie et ce qu’il pouvait réaliser avec elle. Mais il ne croyait pas qu’en étant simplement habile, les affaires roulaient. Il voulait davantage que du polissage. C’est ainsi qu’il avait amené sa question qui défiait les contingences habituelles.

Ton index se porta ensuite sur ton menton. Tu mimais une femme que tu n’étais pas. Il en était persuadé à cet instant précis, tandis qu’il restait pendu à tes lèvres dans une déférence que beaucoup convoitait. C’est en premier lieu l’intimité qui répondit. Ton parfum qui vola à ses narines, tes soieries qui chantaient une cantine, et ces quelques mots qui vinrent caresser son esprit, tandis que seul un sourire d’intérêt naissait sur ses lèvres. La malice. Elle t’imprégnait tandis que tu t’évadais déjà de son aura mais non point de son esprit. Aimes-tu souffler sur le feu au point de créer une fournaise?

Déjà ton regard se posait partout, ailleurs, loin de lui. Il ne se sentait pas pour autant moins visible – il l’a longtemps été, c’est ce qui lui valait de tant rayonner aujourd’hui – mais brûlant de la suite de cet échange. « L’étincelle est ce qui marque la vie elle-même...qu’elle soit folle ou sage, elle reste éphémère. Tôt ou tard, non pas elle s’éteint, mais elle devient flamme, elle prend forme et doit accepter de mourir pour étinceler à nouveau...Ainsi vous êtes amoureuse de la vie. » En tout cas de l’intensité de cette dernière. Derrière ton parage de soie, de doré et de vermeilles, derrière ce qui semblait tamisé, hurlait une passion qui pouvait- voulait? - tout dévorer?

Il accueillit ton attention quand elle se tourna à nouveau vers lui. Il ne se lassait pas de se laisser capturer par la mer de cerises noires de ton regard quand la lumière reflétée dans le chandelier de cristal ne venait plus s’y refléter avec tant d’hardiesse que lorsqu’ensemble vous le contempliez. « Mon plaisir est dans la diversité...Toutefois – pour vous – je vais en choisir un ce soir. » Sa voix était posée et quelque peu mélodieuse. C’était une voix grave de par son calme, mais avec une douceur qui était non feinte. « Êtes-vous musicienne? Si vous l’êtes, vous comprendrez sans problème le plaisir que j’ai à laisser courir mes doigts sur les touches d’un piano...Il n’y a rien d’autres, ou presque, qui ne parvient à m’extraire de ce monde pour, pourtant, en mettre en lumière toute la beauté. »

Cet amour était né quand il était encore entrain de courir dans les dunes à écouter les nomades s’installer autour du feu – autour de lui – et laisser les chants et les instruments les posséder.

Son regard s’était délié du tien. Il se portait désormais sur l’assemblée qui se mouvait dans ce décors enchanteur. « Ne trouvez-vous pas cela étrange? Tout ce faste tandis que le reste du monde ne peut en profiter? » Son attention ne revint pas sur toi. Ses yeux suivaient les défilés des nouveaux arrivés, les politesses, les sourires pincés. Il était bien difficile de savoir encore une fois s’il faisait preuve de sincérité, d’égarement ou d’artifices.


Mer 6 Déc - 20:27



Avec élégance, tintent les astras.

En compagnie de Seraphah Von Arendt


Le papillon de nuit se joue-t-il de la flamme alors qu'il déploie ses élytres de soie devant elle ? Danse-t-il pour elle ou la met-il au défis ? Odezia atrata fascinée par le feu ou danseuse téméraire, la jeune femme ne se départit pas de ce léger sourire, aimable et mystérieux. Autour de son cou gracile, nulle parure ni de diamant, ni d’or, nulle chaîne et pourtant, invisibles, les bras amoureux de sa mortelle amie enserrent avec tendresse son port altier. Elles sourient donc de concert lorsque le Flamboyant conclut de sa si douce voix : Ainsi vous êtes amoureuse de la vie.

Le sang ruisselle sur ses bras comme des gants de velours,
Ô tendre avatar des défunts.

Qui mieux que la Mort, saurait aimer la Vie ?

Silencieuse et attentive, la demoiselle accueille les réponses de son vis-à-vis avec bienveillance. Inclinant bien volontiers le menton alors qu'il lui offre le privilège de ne pas chercher à éviter la question par une réponse évasive. Pour elle, il ferait un choix. Le rubis se pose à nouveau sur le visage de l'homme, curieux et intéressé. La musique court sur ses lèves avec un amour sincère. Sous les soieries et les apparats, l'extravagance méticuleuse et soignée, se pourrait-il que cet homme soit de ces quelques uns à ne pas feindre le raffinement ?

- On tenta de m'apprendre le guzheng mais je crains ne pas avoir été assez assidue, répondait-elle, comme désolée de ne pouvoir prétendre savoir jouer d'un instrument aussi noble que l'était le piano, elle se penchait pourtant vers l'homme, plus malicieuse que sensuelle, glissant sa confession à ses seules oreilles, lorsque monsieur Huang a découvert que j'avais appris à jouer d'un instrument à cordes dans mes jeunes années, il a sauté de joie et m'a immédiatement mis devant un guzheng, je n'ai jamais osé le contrarier en lui apprenant que je jouais de l'erhu.

Caméléon, la caravanière avait du apprendre de nombreuses choses dans le seul but d'accomplir ses missions, elle taisait donc que la seule musique qui faisait vibrer son âme, se trouvait entre deux dunes, autour d'un feu crépitant, au rythme des tambours, de l'imzad et des voix profondes de ceux qui faisaient résonner le désert. Étonnant comme dans leurs silences se cachait un même souvenir. Peut-être avaient-ils déjà chanté ensemble, dans cette vie lointaine où il était feu et elle fantôme.

Il détourne les yeux, abandonne l’agate pour le reste de l'assemblée. Il trouve étrange ce faste dont seuls quelques élus peuvent profiter. La monétariste le contemple un long moment alors qu'il observe les autres, les autres qui comme lui, ont été choisi, invités, sélectionnés. Lui si plein de noblesse dans sa droite élégance, il avait participé à plus de ces soirées que la bien mal née demoiselle à ses côtés. Évoquer le reste du monde, exclu des festivités, à une roturière, n'était-ce pas ironique ?

Un nouveau sourire s'empare des lèvres charnues de la demoiselle, elle lie ses mains dans le bas de son dos alors qu'elle suit le regard de braise tendu vers les autres convives. Un sourire paisible, déterminé et assuré. Un sourire prêt à dévorer le monde.

- Puis-je vous contredire, monsieur Von Arendt ? L'audacieuse a beau être poli, elle n'attendra pas son accord pour poursuivre. Ce faste est précisément ici pour que le reste du monde puisse en profiter. Sur ses paupières, scintillent les paillettes d'or, entre ses doigts, naissent les opportunités. Voyez-vous cet homme en costume bleu nuit ?

De l'autre côté de l'extravagant chandelier, un homme de petite stature, lunettes rondes sur le nez, costume hors de prix sur les épaules, discutait avec un petit groupe de personnes. Parmi eux deux femmes parées de robes aux couleurs chaudes, la première laissait fièrement apparaitre ses branchies, décorées de tatouages dorés, la seconde était un bijou à elle seule, constituée d'un seul bloc de quartz, la golem était, à l'instar de l'élémentaire, une oeuvre d'art.

- Cet homme est le propriétaire de la plus grande imprimerie de Xandrie et la golem avec qui il discute représente la guilde des bâtisseurs.

Deux personnalités influentes certes mais qui n'avaient que peu de choses à se dire, pourtant, ils étaient lancé dans une discussion semble-t-il passionnante.

- Quant à la tritonne qui se tient entre eux, elle fait partie de la guilde des Monétaristes, plus précisément d'une branche dédiée à un investissement à long terme, sur lequel j'ai beaucoup d'espoir, l'éducation. Il y a quelques heures elle a obtenu leurs signatures pour la construction et l’approvisionnement de deux nouvelles écoles.

Les voyaient-ils à présent ? Tout autour d'eux ? Ces noms connus, ces représentants, ces chefs de guildes, ces hommes et femmes de pouvoir, discutant, échangeant, au coeur de la guilde des monétaristes. Le feu de soie pouvait-il voir ce que le rubis faisait flamboyer ? Les fils qui se tendaient, entre ces gens réunis ici pour festoyer, des fils d'or, certes, mais destinés à tisser une toile bien plus grande que la tapisserie d'une soirée mondaine. Les contrats qui seraient signés à l'issue de cette innocente et fastueuse exposition artistique, influenceraient la vie de ceux qui n'étaient pas là, de ceux qui travaillaient cette nuit, de ceux aussi, qui dormiraient sous la pluie.

Si les monétaristes faisaient dans le caritatif ? Certainement pas. Tout était question d'investissement. La jeune femme tendait galamment la main vers la suite du parcours dont elle prenait le contrôle, invitant son invité à l'accompagner.

- Je ne vous considère pas comme un conservateur. Si vous me permettez de revenir sur ces mots. J'espère bien au contraire, que vous soyez un homme tourné vers l'avenir.

Ils passaient lentement entre les sculptures et les dispositifs astucieux qui faisaient aussi partie de l'exposition. Ils croisaient des personnalités connues xandriennes comme opaliennes. La maîtresse des lieux les saluait d'un sourire, parfois d'un mot mais elle ne semblait pas décidé à abandonner son invité épistote.

- Vous investissez dans le futur, vous aussi, n'est-ce pas ? Dans l'espoir de sauver les poumons de vos concitoyens.

Et l'âme d'une cité qui suffoquait, peut-être aussi ? Ils arrivaient tranquillement de l'autre côté de la petite île au centre de laquelle trônait le fabuleux chandelier de cristal. Le petit pont qui enjambait la rivière pour leur permettre de quitter l'îlot artificiel était cependant bloqué par la présence de deux gnomes aussi trapus qu'absorbés par la contemplation des eaux miroitantes en dessous d'eux. Un imprévu. La jeune femme se tournait vers la rivière, en contrebas de quelques centimètres, elle lançait un regard à Seraphah avant de sauter. Un petit bond, gracieux et candide, qui formait une onde aquatique à l'impact de ses talons sur l'eau virtuelle. Visiblement le dispositif avait prévu une telle interaction, sous les pieds de l'aventurière, se dessinait une large feuille de nénuphar, un hologramme qui tournait lentement sur lui-même.

Les regards se tournaient vers la silhouette seule au milieu de la rivière, en voilà une qui ne respectait pas les règles. Un sourire amusé sur le carmin de ses lèvres, la cancre lève avec élégance son bras vers l'homme resté sur la rive, tendant ses doigts vers lui, invitation romanesque à se saisir de cette main tendue et à la rejoindre. Dans le rubis, un reflet ardent. 
Jeu 28 Déc - 23:30



Avec élégance teintent les astras

Ft. Chāyā Lelwani


Ambiance

La malice était propre au feu. À ces brasiers qui voulaient bien plus que le bois qu’on leur avait donné. Tu voulais bien plus que ce qu’on te donnait. Tu le faisais avec une fraîcheur qui pouvait paraître désarmante pour celui qui aurait oublié la voie de l’émerveillement. Ce n’était pas son cas. Derrière ses manières que beaucoup jugeaient désuètes, il y avait une espièglerie semblable à la tienne. Parce-que le feu avait beau crier à la vie, il se nourrissait de celles des autres. L’amour se voyait ainsi toujours paré d’une fusion incertaine quand à la survie de l’être désiré...faute d’avoir été aimé. Parce-qu’au final, il effleurait ce sentiment à plusieurs reprises, sans jamais tenter de l’emprisonner...Parce-qu’il n’appartenait qu’au présent. Au même titre que votre présence en ces lieux, que cette discussion qui ressemblait à des confidences tandis qu’il était bien loin d’imaginer que tes pas ont pu fouler le même sable que ses flammes.

L’erhu? Tu te fais captivante à ses yeux de par cet instrument qui dénotait une certaine prestance, et par ce tour de passe-passe à contenter ton ancien patron à jouer d’un instrument qui n’était pas celui de prédilection. Alors quelque part, tu pouvais comprendre ses paroles...ceux qui savaient s’adapter à ce qu’ils avaient entre les mains acceptaient de ne pas pouvoir tout contrôler.

L’ironie de la situation étant invisible à ses yeux, ton sourire déterminé ne l’était pas de son côté. Ni moins que tes paroles qui lui firent se départir de son air sérieux, parce que la fougue que tu lui montrais ne pouvait que l’animer. C’est ainsi qu’il suivit tes indications afin d’observer cet homme au costume de nuit. Il écouta ta maîtrise de ce qui se tramait sous tes toits. En tant que dirigeante de la Guilde, cet endroit t’appartenait et il entendait bien que rien ne t’échappait. Mais même s’il comprenait ce que tu disais là, il restait là-dessus beaucoup plus formel. « Je comprends vos dires et je ne doutais pas de l’alchimie qui s’opérait ici. N’en reste pas moins que cette beauté qui inonde nos regards reste interdite aux bélîtres. Sauf ceux qui parviennent à s’élever par un esprit affûté ou une chance inouïe. » Tu pouvais comprendre par ses mots qu’il avait en adoration l’art, ce qu’il jugeait comme beau. Le plaisir des yeux qui élevait l’âme, au même titre qu’un coucher de soleil captivait ses spectateurs.

Est-ce à dire qu’il investirait dans le caritatif? Ses actions peuvent le laisser penser, mais à chaque fois la science, la recherche, possède une place centrale.

Comme tu l’étais dans ce décors somptueux. Sans un mot de plus, ses pas marchèrent dans les tiens tandis que ses oreilles appréciaient de regarder l’avenir avec toi. « Vous êtes bel et bien renseignée. Certaines de mes recherches portent en effet sur les problématiques respiratoires rencontrées à Épistopoli. Même si ne soyons pas aveugles, ces problématiques sont un fléau basé sur des priorités qui mériteraient d’évoluer pour le bien des habitants. » Vous étiez désormais au niveau du chandelier étincelant. Il ajouta, ravi d’un échange qui ouvrait ses perspectives : « Une autre partie de mes recherches est davantage en lien à la psychanalyse comportementale...Un pan de la médecine assez récent, mais passionnant. » Dès que cela touchait l’humain, cela le devenait ne croyais-tu pas? Il en était persuadé de son côté. Même si ses recherches, au-delà de compiler des informations, consistaient à faire des recherches plus chimiques en vue de modifier les comportements problématiques.

Il arrêta ses paroles, t’observant avec plus d’acuité, autant pour ta beauté que par ton comportement qui semblait chercher une issue. Et c’est là que la fissure eu lieu. Là que les regards se braquèrent sur toi, comme si tes pas sur l’eau virtuelle avait causés un tsunami, pourtant inaudible et invisible. Le sourire de l’élémentaire s’élargit d’autant plus quand il aperçu ton invitation, de cette main levée, mais également en captant cette étincelle dans ton regard. Avec une certaine agilité, il te rejoignit, sa main se saisissant de la tienne et osant une pratique désuète. Il leva ta main afin de déposer un baiser sur cette dernière à la vue de tous. Il déposa cette dernière avec une infinie douceur, avant de se tourner vers l’assemblée, un bras levé, comme un chef d’orchestre qui allait annoncer le prochain morceau. À la place il glissa d’une voix suffisamment forte : « Je vous en prie, poursuivez donc vos conversations. » Il se savait aimé de bien des façons. Aimé, cela voulait aussi dire respecté ou encore détesté. Dans l’absolu, son influence n’était plus à faire…

Quant à ta réputation, il ferait en sorte qu’elle ne soit point entachée. Tu le surprenais suffisamment pour qu’il ait de telles envies. Son attention se porta sur les formes qui se dessinaient au fur et à mesure de votre avancée : « Où donc m’emmenez-vous très chère? Puis-je le savoir? »


Mer 10 Jan - 17:14



Avec élégance, tintent les astras.

En compagnie de Seraphah Von Arendt


Il est des magiciens, capables de faire danser le feu sur une étendue d’eau. Des magiciens. Et des malicieuses créatures. L’élémentaire se saisit de la délicate dextre, la retourne entre ses doigts agiles et se plie d’un théâtral baiser. L’homme aimait attirer l’attention, était-ce son reflet dans les yeux de son public ou le pouvoir que lui conférait cette naturelle attraction, qu’il appréciait tant ? Il déployait un bras et sa voix, ouvrant et refermant le rideau sur sa propre scène. Il jouait un rôle taillé sur mesure.

Ainsi était-il esthète, chercheur, scientifique, explorateur et diplomate. Pouvait-on douter de ses qualités de comédien lorsqu’il endossait autant de rôles ? La Monétariste disparaissait dans l’ombre du Von Arendt, protégée des regards par son extravagant flamboiement. Loin de chercher la lumière qu’il attirait, la demoiselle souriait avec amusement, apparemment peu inquiète des quelques commérages qu’il pourrait semer dans son sillage. Lorsqu’on invite un feu en sa demeure, il faut s’attendre à voir voler des étincelles. Sa maison ne brûlerait pas pour si peu.      

Puis. N’avait-elle pas dit qu’elle les aimait ? Ces étincelles.

Qu’il flamboie. Qu’il brille. Qu’il vive. La jeune femme l’observe, le couve d’un regard d’agate et accueille avec bienveillance le retour de son attention et de sa curiosité. Où l’emmenait-elle ? Quelque chose se glisse dans le sourire qui plissait ses lèvres, un frémissement d’aile de papillon, une lueur impromptue qui s'éprend de sa bouche rubis.

- Où vous désirez aller, monsieur Von Arendt.

Ce n’était pas une question, non, c’était une affirmation, une sibylline promesse. Elle le mènerait là où il désirait aller. N’était-ce pas une devise parfaite pour les Monétaristes ? Quels que puissent être ses désirs, ils seraient là pour l’accompagner jusqu’à leur réalisation. Une réponse de banquier. Vraiment ? Seulement ? Il y a sur ce visage, sur ce sourire, dans le feu qui se reflète au fond de ses prunelles rougeoyantes, surement plus, qu’une banquière.

Les talons de ses escarpins font doucement résonner le sol sous leurs pieds alors qu’elle fait un pas sur le côté, accompagnant le mouvement virtuel du nénuphar projeté sous leurs pieds.

- Mais pour l’heure, je vous conduis auprès d’un artiste que vous apprécierez, je l’espère.

Encore un pas sur le côté. Un mouvement fluide. Le papillon danse autour de la flamme. A-t-il jamais cessé ? Elle sourit à nouveau, comme une enfant intriguée de savoir si elle a trouvé un partenaire de jeu, une candeur fugace qui s’échappe de quelques pas en arrière, ses chevilles nues effleurées par le rideau lumineux qui simulait l’onde aqueuse. Elle grimpe sur la berge avant de se tourner à demi vers l’élémentaire.

- Si il vous plait de m’accompagner, bien entendu.

S’amusait-il en sa compagnie ? Elle l’espérait mais il était libre de la quitter s’il le désirait. Ils n’étaient attachés que par le fil ténu de leur conversation, après tout. Un fil tissé par une curiosité mutuelle, un intérêt réciproque. Un fil, c’est peu. Un fil pourtant, pouvait tout entreprendre. Il s’en tissait ici par centaine. De quelle couleur serait le leur ?

Le papillon guidait la flamme au travers de son palais d’or et d’astras, il se chuchotait quelques promesses de transaction par ci, des discussions passionnées mais polies par là. Ils parvenaient rapidement et sans difficulté à l’exposition souhaitée. Il fallait bien admettre qu’elle était visible de loin.

Une lumière dorée arpentait les hautes courbes d’un triptyque métallique. Une autre sculpture aux dimensions fantasques ? Pas tout à fait. Au pied de l’élément central, un banc tout en longueur faisait courageusement face à une armée de touches. Quatre panneaux affichant fièrement leurs soixante-et-une marches noires et feintes dorées s’offraient à la vue et à la curiosité des visiteurs. Ceux qui ignoraient l’utilité d’une telle oeuvre ne la concevaient que comme un étrange mais rutilant objet d’art. Quant à ceux qui connaissaient l'instrument, ils se demandaient si pareil mastodonte pouvait émettre autre chose qu’un désastreux barrissement.

Approchaient alors deux silhouettes, semblant minuscules à côté de l’imposante structure. La première prenait place sur le banc, la seconde s’asseyait à sa droite, le silence s’installait en même temps qu’eux. Un sourire énigmatique aux lèvres, Chaya semblait attendre sagement que quelques invisibles engrenages se mettent en branle. Elle glissait un regard sur l’élémentaire au moment où les lumières se tamisaient, passant de l’or éclatant à un bleu de velours. Les doigts experts se tendaient vers les claviers et les premières notes s’envolaient, profondes et vibrantes. Loin pourtant du barrissement, elles faisaient penser à une mélodie sous-marine, un chant de cétacés aux harmonies lentes et maîtrisées. Après quelques secondes, le second organiste rejoignait le banc et c’est à deux qu’ils jouèrent, de leurs pieds sur des pédales invisibles et de leurs doigts sur les multiples touches, entrainant le public médusé, aux tréfonds d’un océan mélodieux.

Spoiler:
Sam 20 Jan - 23:57



Avec élégance teintent les astras

Ft. Chāyā Lelwani


Ambiance

N'étions-nous pas tous acteurs? À revêtir les rôles que les sociétés voulaient bien nous offrir...N'étions-nous pas partisans inconscients de ces règles qui brimaient pour mieux intégrer l'ordre? En tant qu'élémentaire, il avait pendant longtemps observer le cirque des hommes, se rendant compte avec les années comme beaucoup oubliaient le plus important: rire. S'amuser. Aller au-delà des ambitions, des envies et des contingences de leur époque. Alors était-il un acteur, ou un être libéré de ce que l'on pouvait attendre de lui? Ne manipulant pas, mais sautant d'un rôle à l'autre pour laisser transparaitre sa nature première: celle de briller. Non pas pour éclairer. Celle de réchauffer. Non pas les hommes, mais le coeur de cette terre qui se croyait étouffer à l'approche de la Brume, alors qu'elle n'en serait que plus révéler.

Comme vos pas qui vous avaient menés jusqu'au centre de ce théâtre, vu que chacun jouait son rôle à la perfection. Ici, point de mère, de fils ou de fille. Que des dirigeants, des êtres porteurs d'un espoir mais surtout d'un désir qui voulaient le faire coexister avec un autre. Était-ce également ce que vous faisiez ensemble en cet instant présent? Co-exister? Ou allez-vous tenter de vous connaître? Aller au-delà des apparences pour laisser apparaitre ce qu'il aimait voir comme l'âme. Oserais-tu seulement aller jusque là, ou le laisseras-tu se contenter de tes lèvres cerises et ton regard vermeille?



«Ne faîtes point de promesse que vous ne pourrez tenir.» Il le dit sur le même ton que toi. Assuré et en même temps empreint d'une certaine légèreté. Tu revêtais un rôle toi aussi, bien sûr. Tu gardais tes secrets précieusement, tu ne voulais rien lui révéler. Rien qui ne serait compromettant, parce-qu'il fallait préserver les apparences...Mais ces dernières n'avaient rien à voir avec la beauté de cette terre. Sauras-tu lui offrir plus que des paroles, des sourires et ta beauté apparente?



Rien ne laissait paraître, à part peut-être ces quelques mots, cette soif de vérité qui brûlait en son coeur. Parce-qu'il savait se réjouir que de te voir si élégante. Il savait se satisfaire des surprises que tu semblais lui réserver à l'énonciation du mot "artiste" qui ravivait en effet son intérêt. Étais-tu tel un papillon? Beaucoup devait penser que tu étais la flûte dont la mélodie charmait le serpent...À moins que ce ne soit l'inverse? En tout cas oui, il te voyait danser, et du haut de sa grande stature, imposante de son charisme et de sa chevelure de feu, il trouvait cela charmant au demeurant. Quelque part, lui aussi possédait cette innocence quand l'art s'enroulait autour de son âme aussi sûrement qu'un pacte avec le diable.



Ce qui était le plus envoûtant en cet instant était l'attention que chacun portait sur ce couple bien assorti mais dont le lien restait inconnu. Le dirigeant était connu pour son élan naturel envers autrui, pour sa générosité, mais aussi pour ses folies d'expéditions. Il ne doutait pas que tu t'étais renseigné sur lui, comme il l'avait fait sur toi. Les informations étaient d'ailleurs bien trop lisses pour expliquer ton ascension même si, encore une fois, il n'était pas de ceux qui remettaient en question les raisons de ta présidence. Mais comme tout passionné, il souhaitait révéler la profondeur de ton être. Il ne se contenterait pas de la surface, sans pour autant rechercher le moindre contrôle. Chance. Ou Malchance. Quitte ou double pour le dire autrement. Une relation était avant tout faite de valeurs communes...auriez-vous l'art en commun?



La lumière était attrayante et surtout la grandeur de cet orgue gigantesque. Au regard de Seraphah, il ne faisait aucun doute que tu avais fait mouche. L'émerveillement parait désormais ses traits, tandis que tout son corps s'électrisait face à tant de somptuosité. Son regard ne quitta pas la scène tandis que deux virtuoses se mettaient en place avant de laisser la musique s'éprendre de tout un chacun. Il se permit alors de fermer les yeux, se laissant envahir des notes cristallines et profondes qui s'emmêlaient les unes aux autres comme si elles dansaient une oeuvre qu'il appellerait: ombre et lumière.

Il ne se souvenait pas avoir pu assister à un tel spectacle par le biais des Monétaristes. Était-ce une demande particulière de son hôte? Il se laissa ainsi transporter, le temps de la mélodie, chaque musique ponctué d'un moment de silence pour que chacun soit libre d'aller et venir sans interrompre le spectacle, c'est ce dernier qui s'interrompait pour tous ces invités aux ports nobles et aux poches ambitieuses.



Il se tourna alors vers toi, Rubis capteur de trésor, avant de murmurer: «C'est grâce à vous que cet endroit se dote d'un tel instrument? Je dois bien avouer que je n'en ai jamais vu d'aussi remarquable. Comment pourrais-je vous surprendre à mon tour?» Qu'est-ce qu'une femme comme toi pourrait bien vouloir? Là était sa véritable demande.


Mer 7 Fév - 16:16



Avec élégance, tintent les astras.

En compagnie de Seraphah Von Arendt


Ils glissent sur ses lèvres, des mots comme des promesses interdites, perles de pluie sur les écailles du dragon. Il craint le mensonge. Lui qui sait, lui qui devine, toutes les facettes que se plait à revêtir la rose noire. Il doute peut-être, de son honnêteté alors qu'elle murmure pouvoir le mener là où il désirait aller. Elle sourit à sa réponse, silencieuse et secrète, elle tait l'évidence, la promesse n'était pas la question. La destination l'était.

Peut-être étaient-ils arrivés, lorsqu'ils s'arrêtèrent devant le magnifique orgue. Elle l'observe, lui bien davantage que l'instrument mis en lumière. C'est qu'il est aisé de lire sur son visage, il irradie de cette innocente exaltation. Une beauté presque enfantine qui arrache un sourire tendre à Chaya. N'avait-elle pas trop joué ? Elle qui déambule sur les fils d'or et de fer de la politique et des astras, voilà bien longtemps, qu'elle n'avait pas vu un regard aussi pur. Tourné tout entier vers la musique, le feu se fige, paupières closes, il s'abreuve de notes. Elle disparait de ses sens et détourne le regard.

Devant elle, des convives se sont aussi tut, ils écoutent, religieusement. Le silence enlace ses êtres ambitieux, entre chaque note, à la fin de chaque ligne, il s'impose sans forcer son passage. Et ils prient. Ils prient sans même s'en rendre compte. L'harmonie qui apaise leur respiration, invisible et pourtant présente, la caresse d'un dieu qu'il renieront l'instant suivant. Car l'homme craint l'être supérieur, aveugle à l'évidence, les douze ne sont pas là-haut, ils se logent dans le creux de sa poitrine.

La mélodie prend fin et chacun reprend son souffle habituel, ses pensées parasites, ses ambitions mercantiles. Ainsi étaient-ils. Mais lui murmure, à l'oreille de la rose, il veut savoir, ce qu'elle désire. Les cils d'ébène balaient son regard alors qu'elle se tourne à nouveau vers la noble flamme. Il n'avait nul besoin de la surprendre, il était celui qu'elle devait charmer, satisfaire, rassurer, il était l'investisseur, elle la banquière, elle lui devait d'être parfaite dans son rôle, pas l'inverse. Il devait pourtant avoir l'habitude d'être courtisé. Cependant, cela ne ressemble pas à une formule polie, une question qui n'attend aucune réponse, il brille dans ses yeux, une curiosité sincère.

Le sourire sur ses lèvres se colore d'un innocent amusement, d'une pétillante surprise, elle rit discrètement et le velours de sa voix se teinte de cristal.

- Vous êtes un homme surprenant, monsieur Von Arendt. Je ne doute pas que vous soyez capable de m’émerveiller.

Ses traits se sont adoucis alors qu'elle le guide d'un signe de la main, l'entraine à nouveau sur cet itinéraire dont elle garde le contrôle. Ils approchent de l'immense instrument alors que les convives s'en détournent.

- Grâce à moi... commençait-elle, songeuse alors qu'elle levait les yeux sur les hautes arcades dorées,  surtout grâce à ceux qui l'ont portés et à celui qui a eu la folie d'écouter mes ambitieux désirs.

Ils font encore quelques pas vers les organistes qui s'inclinent légèrement à leur arrivée et à celle d'un homme dans la fleur de l'âge, ses cheveux poivres et sel tranchaient avec le costume bordeaux dont le style devait être très en vogue une dizaine d'années plus tôt. Il ajustait ses lunettes rondes à l'approche de la monétariste et de son précieux invité.

- Monsieur Von Arendt, permettez-moi de vous présenter monsieur Garnier, l'artiste que je souhaitais vous présenter, c'est à monsieur Garnier que nous devons cette œuvre d'art.

L'homme en question semblait peu à l'aise face au phrasé et au charisme irréel du couple en face de lui, Chaya l'encourageait pourtant d'un petit mouvement du menton, son regard se transformant instantanément, porteur d'une rassurante confiance.

- Hé bien.. oui.. je suppose qu'on peut le présenter ainsi mais, c'est avant tout un instrument. Je ne fais pas de choses aussi grandes d'habitude..

Si l'élémentaire se faisait curieux, l'homme répondait plus naturellement à ses questionnements, détaillant sans mal et avec bien plus d'aisance, les moindres engrenages de sa fabuleuse machine. Il finissait par se tourner par Chaya puis Seraphah.

- Peut-être.. voudriez-vous essayer de jouer ?

Mar 12 Mar - 16:38



Avec élégance teintent les astras

Ft. Chāyā Lelwani



L'innocence était l'unique manière de se laisser pénétrer par le miracle. Objet d'émerveillement. N'était-ce pas cela que la musique qui s'élevait de cet instrument gargantuesque et à la beauté élogieuse par tous les sens? Beaucoup oubliaient que la musique était avant tout vibratoire. Elle venait faire danser nos cellules aussi sûrement que les couleurs venaient nous transporter dans une autre dimension. La vibration était celle qui l'avait invité à se matérialiser en homme, à venir jouer avec les cartes des mortels. Parce qu'un coeur battant était un coeur courageux. C'est ainsi que la beauté s'élevait toujours au-dessus des peurs. Ainsi les esthètes percevaient le vivant en tout. Tandis que ceux qui n'y étaient pas sensibles étaient déjà mourants.

Mais toutes ces pensées étaient superflus face à la volupté des notes qui se suivaient, se pourchassaient en un rythme effréné et d'une douceur inouïe. Il ne percevait pas ton regard sur lui à cet instant. Il était absorbé par ce qu'il entendait de ses pores. Il ne faisait qu'un avec l'ensemble ce qui lui prodiguait une sensation de jouissance sans précédent. Parce que là où la vie se trouve, la mort aussi. Les deux enlacées créaient un autre espace temps dans lequel le plaisir était au-delà de toute chair...

La vague se retira. Des applaudissements fusèrent...Le regard ambré sembla pris d'un feu plus fort avant que ses mains ne viennent rejoindre l'allégresse ambiante. C'est à ce moment-ci qu'il te glissa ces quelques mots. Ces perles qui ne trouvèrent pas de réponses immédiatement. Après tout, n'était-ce pas toujours ainsi avec toi? Il se le demanda. «Ainsi vous acceptez que je vous émerveille...» Un sourire ténu étira ses lèvres. Il y avait de la délicatesse mais aussi un feu ardent dans ses paroles. Il n'était pas que douceur, il était avant tout élan de vie qui avait appris à jaillir au bon moment. Pas maintenant.

Il te suivit, ravi sans nulle doute. Peu étaient les personnes qui parvenaient à le captiver, à l'émerveiller, à vouloir lui faire plaisir à ce point là. Bien sûr qu'il avait conscience que cela n'était que les affaires. Que lorsque la soirée se finirait, tu disparaitrais...à moins que tu n'acceptes sa volonté de réellement te connaître. Qu'est-ce que cela fait d'être vue au-delà de tes apparats? D'être autre chose que le statut que tu te dois d'afficher?

Il approuvait tes dires. Cet instrument était là par son désir de le voir ici, mais le mérite physique revenait à d'autres. Il observa les moindres détails de l'orgue tandis qu'ils montaient sur scène et se dirigeait vers un homme dont le charisme ne put s'exprimer qu'après que Seraphah ait posé des questions d'intérêt concernant l'orgue. Il adorait percevoir la passion chez ceux qui l'entouraient. Voir s'animer un être était un cadeau qu'on prenait rarement le temps de contempler. Il apprit ainsi que cet instrument était une création d'exception, et que oui il avait d'autres instruments qui pourraient sans doute lui plaire...Le Marquis possédait une salle de musique après tout.

À la proposition de monsieur Garnier, il ne cacha nullement sa joie: «Cela ne pourrait me rendre plus heureux monsieur.» Il te jeta un regard presque amusé, pas du tout embarrassé de te montrer sa joie. ll se dirigea vers le siège, prenant soin de caresser les touches de ses doigts, levant la tête afin de prendre conscience de toute l'ampleur de cet instrument extraordinaire. Il s'installa enfin. Ses doigts se posant sans un bruit sur les touches, ses pieds allant trouver les pédales. Le tableau était ainsi fabuleux avec sa chevelure qui faisait face à vous, unique public qui restait, bien que certains retardataires restèrent dans la pièce alors que la première note chantait.

Morceau

Et plus les notes se précipitaient hors de ses doigts, plus il s'évadait hors de ce corps, de cet endroit, plus il devenait ce qui se murmurait au-delà du son. Chacun pouvait ainsi y dénicher ses chagrins, ses regrets, autant que ce à quoi il aspirait réellement. La musique ne durait que cinq minutes, et pourtant le moment semblait infini, délibérément libératoire.

Le tempo ralentit, l'élémentaire laissait aller ses bras, ses doigts, son corps jusqu'au dernier souffle où ses mains restèrent suspendues dans les airs. Le silence enveloppa l'assemblée, jusqu'à ce que plusieurs applaudissements retentissent, ce qui le ramena définitivement dans l'instant. C'est ainsi qu'il se leva, se tourna vers ceux qui semblaient avoir apprécié et qu'il salua comme le musicien qu'Il était.

Il revint ainsi vers toi et monsieur Garnie, remerciant à nouveau ce dernier qui semblait ébloui par sa prestation, avant que de plonger son regard dans le sien: «Vous me gâtez Madame Lelwani. Je ne sais ce qu'on vous a dit de moi au-delà de ce que mes investissements auprès de votre banque parlent pour moi, mais vous avez à coeur de soigner votre relation clientèle. J'espère que vous apprenez ce soir à me percevoir au-delà de cette condition.» Il te tendit une main afin de descendre ensemble de scène. Une politesse qui revêtait d'autres promesses au vue des dernières paroles.


Jeu 28 Mar - 12:52



Avec élégance, tintent les astras.

En compagnie de Seraphah Von Arendt


Accepter l'émerveillement. Il glisse sur ses lèvres, un sourire comme un mirage, feu de satin. Que le rubis capture. Pour l'étincelle d'un peut-être. S'il réussi. Lui qui ne flamboie jamais aussi magnifiquement que lorsqu'il se laisse happer par la passion. C'est ce qu'il fait briller, dans les yeux de monsieur Garnier. Bien plus bavard maintenant que les mots n'avaient pas à se formaliser outre mesure, qu'ils pouvaient seulement se concentrer sur l'essentiel. L'art. Celui de la construction, celui de la musique. La vibration. Qui enchante les flammes lorsqu'il propose, bien aimablement, à l'élémentaire de jouer.

Heureux comme un enfant à qui on ferait un cadeau, sans n'avoir rien d'autre à fêter, que sa simple présence. Seraphah lui jette un bref regard alors qu'il s'en va, faire courir ses longs doigts, sur son présent inattendu. Elle sourit, de son allégresse. Bienveillante. À ceux que le temps épargne, que reste-t-il, de ces longues années à parcourir un monde peuplé de bien plus éphémères créatures ? Lui qui s'amusait, se contentait, de ce bref moment de surprise, de félicité. Seul. Devant l'orgue immense. Silhouette flamboyante noyée dans la grandeur de l'instrument. Que resterait-il, de ce souvenir en devenir.

Elles sont presque timides. Ces premières notes. Esseulées. Belles aussi, de leur solitude. Pourtant, elles ne s'envolent, vraiment, que lorsqu'elles sont rejoint, par d'autres. Les couleurs se mélangent, dessinent, entre l'or et le rouge ardent, des nuances plus personnelles. Elle écoute. Rose attentive. Et puisque les regards ne sont plus tournés vers elle. Qu'il ne reste, que cette chevelure flamboyante, qui s'agite à la mesure de la mélodie qui nait sous ses doigts. Elle se permet, de fermer les yeux.

Le rubis s'éteint. Juste un instant. Il ne reste que l'obscurité. Balayée par un vent mélodieux. Des notes comme des étoiles, perdues dans un ciel infini. Ce firmament qu'on ne voit jamais aussi bien que dans le désert.

Elle rouvrira les yeux, l'aramilanne de coeur, avant que la mélodie ne s'achève. Parce qu'elle n'est pas allongée dans le sable.  Un jour peut-être.. Mais pas maintenant. Les dernières notes s'élèvent. S'étiolent dans le silence. Brisé finalement par les applaudissements de ceux qui étaient restés et de ceux qui s'étaient approchés. Curieux et charmés. Elle joint ses mains, elle aussi alors que l'artiste salue son audience conquise.

- J'ignorais que vous étiez si talentueux, c'est un plaisir de vous avoir invité à en jouer.

Charmé, monsieur Garnier l'est aussi. S'il était surpris de le trouver si talentueux, c'était néanmoins qu'on avait déjà dû lui souffler, que l'ambassadeur l'était.

- N'hésitez pas à revenir vers moi si vous décidiez de vous procurer un orgue.

Il sourit et acquiesce en direction de la monétariste, reconnaissant, avant de s'effacer. Le feu s'est tourné vers le rubis. S'y plonge avec audace. Il semble ravi, de cette expérience, de cette attention. Celle que lui donne, si pleinement, la jeune femme. Sans rien attendre, en retour, que le ravissement qu'il exprime. Soigner sa relation clientèle. Il tend sa main, aimable gentleman, alors qu'un sourire amusé embrasse le carmin de ses lèvres.

- Pensez-vous que je ne sois motivée que par l’appât du gain, monsieur Von Arendt ?

Qu'elle gâtait un investisseur. Cela signifierait donc que la demoiselle faisait cela avec tous ? Monsieur Von Arendt ne pouvait ignorer qu'il n'était pas le seul, à confier ses précieux astras, aux mains habiles des monétaristes. Taquine, la jeune femme pose pourtant sa main dans celle de l'élémentaire. Poursuis, un ton plus bas, nuancée, comme toutes les mélodies.

- Je serai bien aveugle, de ne voir en vous que l'éclat des astras.

Son reflet, dans le grenat, flamboie. Parce qu'elle n'a jamais cessé de le regarder. Comment pourrait-elle, n'avoir capter de lui, que sa facette la plus policée ? Qu'elles autres, encore, pourrait-elle effleurer ? Elle sourit et le mystère enlace ses doigts aux siens alors qu'elle lâche délicatement sa main.

Une ombre se fait plus présente à mesure qu’ils s’éloignent de la scène, une silhouette en costume noir portant l’emblème des monétaristes s’approche de quelques pas, assez pour capter l’attention des grenats. Elle acquiesce discrètement dans sa direction et l’homme s’éloigne. La jeune femme se tourne, presque à regret vers son cavalier.

- Il semble que le temps nous manque, ce soir. Je me réjouis que nous nous retrouvions demain. Puissiez-vous profiter de la soirée, monsieur Von Arendt.

Elle s’incline avec légèreté et élégance, papillon aux élytres de soie. Quitter le feu après avoir danser avec lui, rompre l’attraction, avec détachement. Pourtant, un sourire court sur ses lèvres alors qu’elle se retourne vers lui, après quelques pas. Il brille dans le rubis, son reflet flamboyant.

- Peut-être aurons-nous le temps, de jouer, ensemble.

Malicieuse créature. Elle disparaît, enveloppée par la foule. Emportant avec elle, l’étincelle de leur première danse.