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Chasse au Serpent

Chasse au Serpent Brandw10
Sam 29 Juil - 17:41
La zone industrielle de Xandrie se réveille tranquillement, caressée par les rayons de l'aurore. Tout est si calme, on soupçonnerait jamais qu'un bain de sang se prépare. C'est toujours comme ça, pense Jérémiah, le temps semble s'arrêter quelques minutes avant un assaut. C'est une sensation douce, car alors plus rien ne compte. Le cerveau sait que s'il commence à ruminer ou à déterrer de mauvais souvenirs, il va se faire trouer, alors il te plonge dans une sorte d'état méditatif voué au succès de la mission. L'adrénaline, pense Jérémiah, c'est un meilleur whisky que le whisky lui-même, je pourrais devenir junkie de ce truc.

Les hommes sont masqués et leur peau entièrement couverte d'un uniforme noir. Ils nous viennent pour la plupart des brigades xandriennes, alors tu comprendras qu'il vaut mieux pas que le Cartel voit leurs petites bouilles. Des agents de terrain du Magistère d'Opale sont venus en renfort, fourbus de connaissances occultes et de gadgets exotiques qui seront bien utiles pour la résolution définitive de cette affaire.

Un chercheur junior du Magistère, aidé d'un complice haut placé au service logistique, a jugé bon de fournir au Cartel du Serpent Noir de nombreux nascents expérimentaux en échange d'une somme coquette. Jérémiah a identifié ces deux fruits pourris au cours de son enquête, et les a interrogés. Le junior s'est montré très coopératif, le haut-placé beaucoup moins, et il a forcé le pauvre Jerry à employer des méthodes d'interrogation plus "primitives" pour le rendre bavard. Les renseignements obtenus étaient utiles et vérifiables. Il ne restait qu'à alerter la police xandrienne et à mettre sur pied cette opération.

Car tu penses bien que le Magistère n'aurait pas dépêché des hommes sur Xandrie pour un vulgaire trafic de stupéfiants. Cet assaut est la consécration de deux mois d'enquête, d'indics interrogés, de dizaines d'os brisés, de centaines de punaises sur un tableau, tout convergeant ici, dans cet entrepôt délabré, et aujourd'hui, le jour où les nascents sont censés prendre la route et nous dire ciao à jamais.

Postés à trois cent mètres de l'entrepôt du Cartel, dans une usine désaffectée, les forces d'intervention xandriennes fignolent les derniers détails avant l'assaut. C'est dans quelques minutes, on vérifie le tranchant des lames et la mécanique des flingues, on révise une ultime fois le plan, la tension monte. L'équipe du Magistère, installée à l'écart, est composée de huit agents spéciaux, mieux équipés que leurs homologues xandriens, mais davantage habitués aux opérations subtiles et à la collecte d'informations qu'aux assauts frontaux. Ils sont là en support, là pour s'assurer que les précieux nascents du Magi' ne finissent pas amochés.

Assis sur son petit tabouret qui couine sous son poids, Jérémiah inspecte le système pneumatique de son fidèle AED, tout en laissant son esprit vagabonder ici et là. Le gros mutant est un homme d'action à la cervelle bien remplie, il sait reconnaître du premier coup d'oeil une situation qui pue. Et cette situation là, elle pue sévère.

Collaborer avec des opalins n'est pas chose aisée pour les brigades xandriennes, tu t'en doutes bien. Difficile d'harmoniser les objectifs...

« Leur capitaine est une vraie tête de con. »

L'inspectrice Pola revient vers ses collègues du Magistère. Elle était partie négocier avec le capitaine de la brigade xandrienne, afin de discuter de quelques ajustements stratégiques de dernière minute. Malheureusement en vain.

« Il veut lancer l'assaut tout de suite. Il n'accepte pas qu'on parte d'abord en reconnaissance pour localiser la marchandise.
- Mais putain, c'était le plan, c'est ce qu'on avait prévu en amont avec le commissaire !
- Je sais bien, mais ce connard veut se la jouer chien fou. Il veut déglinguer du trafiquant, les gars, il s'en tape de nos nascents. »

Jérémiah vient soulever un détail inquiétant.

« Si on ne sait pas où trouver les nascents et qu'on tarde trop, ils pourraient essayer de les faire disparaître, ou pire, de les détruire. S'ils essayent de les détruire, ça va être un carnage.
- Quoi ? Mais putain, c'est quoi, ces nascents ?
- Il y en a un parmi eux qui est particulièrement explosif ! précise le gros Jerry.
- Explosif, comme...
- Explosif comme il pourrait pulvériser la moitié de cet entrepôt. »

Le prototype Morte Scintillante est l'un des bébés de la division explosive du Magi', un secteur rempli de tarés qui aimeraient voir le monde brûler, mais qui au moins ont plein d'anecdotes à raconter autour de la machine à café. L'objet ressemble à une boîte à musique du siècle passé tout à fait inintéressante, à laquelle on a greffé un nascent physique d'autodestruction chargé. Cette saloperie est censée rester enfermée dans sa cage de gel en permanence, isolée de toutes sources d'énergie ou de chocs. Le Cartel a surement été moins précautionneux que ça en le manipulant, c'est un miracle que ces crétins ne l'aient pas encore enclenché...

« Merde. Vous pouviez pas nous le dire avant ?
- Ben avant, c'était une information qui vous aurait inquiété et déconcentré sans rien vous apporter. Mais maintenant la situation a évolué, c'est devenu important pour vous de le savoir ! Parce que maintenant, je pense que le temps nous est compté...
- Génial, Jerry. T'es un sacré connard, parfois, tu sais ?
- Puisqu'on a pas le droit à la recon, on va devoir trouver quelqu'un à interroger sur place pendant l'assaut, et rapido. »

Le capitaine xandrien vient d'ordonner à ses troupes de se mettre en branle, l'assaut va démarrer avant même que nos vaillants lurons du Magi' n'aient eu le temps de réfléchir à un plan B pour localiser leurs nascents. Les commandos xandriens sont comme ça, ils aiment en découdre selon leurs propres méthodes, et détestent quand des opalins viennent leur donner des leçons de stratégie.

L'équipe suit le mouvement, tandis que Pola jette ses ordres à la volée.

« Tant pis, on suit ce qui reste du plan de base. Xandrie envoie Alpha et Béta aux deux entrées principales du bâtiment. Nous, on tente une infiltration par les issues de secours. Dès qu'on a trouvé et sécurisé les nascents, on se taille de ce trou sans demander notre reste. Au moindre doute, si ça canarde trop ou si on s'enlise, on se replie.
- Fais chier, ça va être crade ! » fait remarquer justement Clyde, agent cadet et portebrume. Des circonstances aussi pourries, c'est pas l'idéal pour une première, pense Jérémiah, mais si le petit jeune se contente de réciter sa leçon et d'obéir aux ordres, il y a une probabilité raisonnablement haute qu'il s'en sorte vivant !

En espérant que le Cartel n'ait pas anticipé cette attaque, ou c'est du côté de la police que ça va être un bain de sang...
Sam 29 Juil - 22:56
Vivre du crime, cela était loin de donner une vie classique, monotone et sans problème. Dans son existence pluricentenaire, le Cartel avait expérimenté toute sorte de choses, des grandes victoires aux défaites les plus terribles. Après tout cela était le prix à payer pour obtenir de l’argent et du pouvoir facile contre la morale et l'éthique. Malgré tout, de toutes ses épreuves, que ce soit contre des organisations criminelles rivales ou encore contre les autorités de Xandrie ou d’ailleurs, le Cartel avait toujours survécu.

Il fallait dire que cela était le fruit de son organisation qui rendait sa décapitation définitive particulièrement difficile. L’avantage du fonctionnement en cellule autonome qui devait remplir des rôles sans vraiment poser de question était que cela limitait la dangerosité des potentielles fuites. Ce qui restait après tout immuable.

Certains s'occupaient de l’approvisionnement, d'autres du transport, d'autres de la vente… La plupart des gens n’avaient aussi aucune idée de l’ampleur réelle de la moindre de leurs missions. Et cette fois, la mission actuelle n’était pas non plus une exception.

Pas grand monde, Violette y compris, n’avait la moindre idée de la valeur de ce qu’il transportait. D’autant plus que la plupart des contrebandiers seraient eux même incapables de ne serait ce que situer la marchandise frauduleuse qu’il transportait, celle ci étant systématiquement camouflée dans des leurres eux même glissés dans des dizaines voir des centaines de copies en fonction de la taille des biens en question.

Bien évidemment pour ces contrebandiers, le fait de devoir transporter jusqu’à Xandrie des dizaines et des dizaines de boîte à musique avait été au départ malgré l’expérience assez surprenant. Mais il était aisé pour eux de se douter de la réalité d’un convoi qui ne servait que de leurre pour rendre introuvable les nascents pour le commun des mortels. La seule personne qui savait exactement où se trouvaient les nascents était celle qui avait organisé la cargaison au départ, et malheureusement comme cela était classique dans ce genre de mission, elle s’était évaporée dans la nature pour attendre la cargaison au point final où elle disparaîtrait définitivement.

La première partie de l’aventure avait été tranquille pour le cartel. La cargaison disséminée dans un convoi artisanal d’opale en direction de Xandrie avait passé les barrières douanières pour se retrouver dans le royaume. Celui ci avait été ensuite caché dans un entrepôt désaffecté en attendant la vente ou l’utilisation des nascents par le Cartel. A vrai dire personne ne savait trop ce que les chefs avaient prévu. Peut être qu’elles seraient vendues au marché noir xandrien, peut être envoyé vers des acheteurs étrangers, peut être tout cela serait il utilisé par le Cartel directement. Qui pouvait fondamentalement le savoir à part des personnes beaucoup trop haut placé pour se retrouver elles même sur le terrain ?

Violette elle-même n’avait vraiment cure de ce qu’étaient les intentions du cartel. La seule chose qui l'intéressait, c’était son salaire tout simplement. Et pour cela elle devait veiller sur cet entrepôt. Les dangers étaient après tout multiples contre ce genre de cargaison. Que ce soit de la part de voleurs, de la police ou encore d’organisations criminelles rivales.

Toujours était il que pour contrer ces menaces, l'entrepôt désaffecté n’avait de désaffecté que le nom. Il n’avait d’ailleurs d'entrepôt que le nom également. C’était en réalité une véritable forteresse invisible qui avait été spécifiquement conçue et organisée pour rendre les tentatives de vol et de descentes le plus difficile possible. L'entrepôt en lui-même était grand, divisé en plusieurs étages et un sous-sol, les différentes cargaisons étaient entreposées volontairement à plusieurs points différents pour contraindre toute force un peu trop renseignée à se diviser pour réduire le temps d’intervention. De même, l’entrepôt restait lui-même quelque peu labyrinthique et faiblement éclairé surtout en plus nuit. Et tout cela sans compter les possibles pièges qui peuvent être apposés ici et là. Bref, cet entrepôt disposait d’un ensemble d'obstacles qui n’étaient pas insurmontables pour des gens déterminés et organisés mais qui restaient gênants.

Naturellement, à cette défense intérieure était également ajouté le système des guetteurs présents ici et là dans le quartier 24h sur 24 pour prévenir les criminels de toute entrée ou de tout mouvement suspect dans les zones sensibles. Ce système n’était pas spécifiquement lié à l'entrepôt, il servait plus ou moins à toutes les activités du cartel pour savoir quand disparaître pour éviter d’être là au mauvais endroit au mauvais moment face à des gardes.

Enfin, au sommet de cette organisation se trouve Violette, la portebrume de la fortune, dont la présence visait encore une fois à parfaire la défense des lieux pour protéger la cargaison ou faire disparaître les preuves. Si elle ne pouvait pas naturellement affronter des dizaines et des dizaines de personnes à la fois, son pouvoir lui était capable de frapper simultanément un nombre conséquent de personnes. Et Violette avec le temps avait fini par comprendre comment utiliser efficacement cette capacité passive qu’elle appelait elle-même un pouvoir créateur d'opportunités.

Le pouvoir de la chance et de la malchance était une capacité qui prenait appui sur les différentes variables et possibilités pour une situation donnée. Ainsi plus une situation avait de variables potentielles, plus le pouvoir de la fortune devenait puissant et imprévisible. Et ce constat, la portebrume le concevait de deux manières.

Plus l’environnement dans lequel elle se trouvait était dangereux et complexe, plus sa fortune devenait puissante.
Plus les gens autour d’elle étaient contraints par leur situation à effectuer un nombre conséquent d'actions, plus sa fortune devenait également puissante.

Ici, elle était présente dans un environnement dans lequel, les variables de malchance étaient immenses. Ne restait plus qu’à contraindre d’éventuels assaillants à effectuer un maximum d’actions pour parfaire son pouvoir et son travail. Mais ça c’était son rôle, elle en avait l’habitude. Le pouvoir de la fortune nécessitait de savoir très bien utiliser son cerveau.

Se grillant une cigarette dans les étages supérieurs alors que les criminels du cartel jouaient aux cartes ici et là dans l'entrepôt, la contrebandière passait le temps en regardant du coin de l'œil le paysage urbain endormi à travers les planches d’une fenêtre condamnée. La nuit était pour l’instant calme. Tant mieux. Elle espérait que cela resterait comme ça.

Ici les assaillants étaient chez elle, sur son échiquier. Mais si la magicienne savait une chose, c’était que même dans des conditions favorables, aucun pouvoir qu’importe sa puissance ne pouvait se targuer d’être absolu. Et elle n’avait pas envie de tester la limite de sa propre chance juste pour jouer.

Malheureusement, c'était précisément ce qui était en train de se passe aujourd'hui, alors que des gardes déboulaient comme des dératés par les portes principales de l'entrepôt dans le but de capturer les criminels le plus rapidement. Quand bien même certains avaient été avertis par le biais d'un utilisateur de cristal de télépathie de l'arrivée prochaine de soldat peu gouteux du concept de discrétion, tous ici n'avaient eu le temps d'être informé et ceux trop proche des entrées furent rapidement interpellée sans grande résistance vu le nombre de policier qui déboulaient sur eux. Première victoire rapide pour les officiers, qui malheureusement déchantèrent rapidement en voyant la configuration du bâtiment qui les forçaient à se diviser pour être efficace. Et tandis que la première difficulté logistique était constatée, la malchance commençait dans le même temps à consumer petit à petit toutes les personnes présentes. Certains gardent traversèrent un plancher de toute évidence moisie, pour s'écraser un étage plus bas, d'autre sans totalement traversait partiellement le plancher pour se tordre la cheville, enfin de temps à autre des étagères s'effondraient sur des gardes.

Rapidement tout les assaillants pouvaient comprendre que pour des raisons occultes, tout ce bâtiment était un piège géant. Le moindre des détails du décors pouvait potentiellement blesser ou tuer. Le moindre sort mal maîtrisé pouvait avoir des conséquences désastreuses. L'environnement s'avérait bien plus hostile que prévu.

Dans le même temps toujours au sommet de l'entrepôt, la portebrume soupirait. D'ici elle entendait le grabuge, les combats étaient féroces. Il était temps pour elle de se préparer également. Elle ne comptait pas descendre se battre, bien au contraire, mais elle avait une cargaison à protéger au cas où un des assaillants parviendrait au bon endroit. Le problème était qu'elle ne savait pas où était la véritable cargaison... mais pour ça elle avait sa chance, donc ce n'était pas vraiment gênant.

Avançant aléatoirement vers l'emplacement de la première cargaison de boite à musique qui lui venait à l'esprit, la magicienne se préparait. Attachant ses cheveux, dissimulant son visage derrière un voile noir, il fallait qu'elle réfléchisse à un plan. Vu l'ampleur de l'attaque, il était probable que certains assaillants disposent de capacités, que ce soit par le biais d'une race, de cristaux ou d'arme. Il lui fallait se préparer. Elle avait un peu de temps, ne serait ce que monter les étages et passer par les escaliers serait périlleux.
Dim 30 Juil - 11:31
Sous leurs costards officiels bien taillés, des gilets pare-balles. Leurs visages recouverts d'un masque de ferraille épais, servant à la fois à se protéger des tirs à la tête, et de la découverte de leur identité. Les agents spéciaux du Magi' dénotent de la police xandrienne, on voit direct qu'ils ne proviennent pas du même corps, ils ressemblent à des bureaucrates pas commodes... Leur troupe de huit s'est dispatchée en trois plus petites équipes, deux de trois hommes s'attaquant aux issues de secours, une de deux hommes escaladant le bâtiment en recherche de faiblesses sur le toit.

L'une des équipes est postée devant une issue de secours. T'as le bon gros Jérémiah, que tu connais, le vieux Vikram, celui qui fut son mentor, et Clyde, le petit jeune.

Vikram c'est un vétéran grisonnant, le genre blasé mais bienveillant, un aramilien de sang naturalisé opalin. Il a développé des réflexes surprenants à force de traîner dans les trous les plus puants de ce monde, à la recherche d'artefacts perdus ou volés, à gérer bandits, braconniers et trafiquants, Vikram il a de la bouteille, un sang-froid inébranlable, et il a vu tout le pire que le genre humain a à offrir.

Le gros Jerry, c'est un gars loyal, un être entièrement patriote jusqu'à ses poils de cul et qui rechigne jamais à se salir les mains pour Opale, il a le nez dans cette enquête depuis le début, et le fait qu'il combine sa haute jugeote naturelle à sa force titanesque en fait un super pote lorsqu'il s'agit d'"ouvrir des voies". Il peut réduire la plupart des obstacles conventionnels en charpie, et sa gueule de monstre fait peur aux enfants et aux mamies.

Et Clyde, le petit nouveau pas encore très assuré, il est habité par la Brume. Ses yeux perçoivent l'infrarouge et peuvent émettre des rayons X, voyez-vous ça. Il lui suffit de fixer un mur quelques secondes pour être capable de localiser les sources de chaleur cachées derrière, et d'obtenir une connaissance raisonnable de l'architecture de la zone. Un atout maître pour la reconnaissance et le glanage d'informations, que tous les agents du Magi' s'arrachent déjà.

Par une succession de symboles silencieux dessinés avec ses doigts, il fait comprendre à Jérémiah et à Vikram qu'il y a un couloir derrière cette porte qui contient deux ennemis, une configuration dangereuse. Ces types se mettent en mouvement, se dirigent vers l'issue de secours. Le colosse se glisse doucement devant la porte, attendant un signal de Clyde. Après une courte attente, le signal arrive.

Jérémiah pousse la porte avec sa paume, comme s'il voulait l'ouvrir. Mais Jérémiah étant Jérémiah, la porte s'ouvre brutalement en s'arrachant de ses gonds, venant fracasser la face du type qui s'apprêtait à l'ouvrir. Vikram complète aussitôt l'offensive, en se hissant sur la porte défoncée et en braquant de son fusil le deuxième mec, pour qui l'action semble s'être déroulée bien trop vite, et dont le cerveau a pas eu le temps de dégainer le flingue.

Le beau et gros titan le choppe par le col, et le plaque aussi doucement qu'il en est capable contre un mur, Vikram continuant à le braquer de son arme. Pendant ce temps, le petit jeune fout ses yeux magiques partout où il le peut, avant de déclarer un rassurant "R.A.S".

« Où sont les nascents ? Jérémiah demande gentiment.
- Je sais pas !
- Où sont les nascents ? Jérémiah redemande gentiment.
- J'en sais rien, pitié ! Je suis personne ! Si je parle ils me tueront !
- Si tu nous dis rien c'est ici et tout de suite que tu vas souffrir.
- Y a des caisses avec des boîtes à musique un peu partout ! C'est elles que vous cherchez ? »

Putain, pense Jérémiah, putain, mes indics ont zappé ce détail. Ils ont noyé les nascents dans de la camelote, ils sont bien plus organisés que prévu.

« On a plus besoin de lui, fait remarquer Vikram, pour qui il est temps de passer à la suite.
- Eh, atten- » le filou ne finit par sa phrase, sa tête rencontrant violemment le mur derrière elle. Jérémiah le laisse retomber au sol. Oh, il s'en sortira, avec une horrible migraine, quelques points de suture, et encore plus con qu'il ne l'était déjà, mais il fera la sieste quelques heures d'ici là.

On entend tirs et cris redoubler de volume : les combats ne sont pas loin, et semblent s'intensifier. Une cacophonie pas possible, comme si l'entrepôt s'effondrait sur lui-même, ça c'est mauvais signe. On ne peut que prier les douze dieux pour qu'il n'arrive rien aux nascents. En attendant, les xandriens font une diversion décente pour l'équipe du Magi'. Pourvu que ça dure...

« Vous croyez qu'ils s'en sortent ? demande Clyde, qui se fait sincèrement du mouron pour les petits flics xandriens.
- Ça ne nous concerne plus, répond sèchement Vikram. Suivez moi. »

Le vétéran s'élance dans un escalier menant vers les étages supérieurs. Personne ne la dite à haute voix, mais la tactique à adopter est évidente : la victoire des xandriens sur le Cartel ne semble plus si certaine, alors la troupe du Magi' n'aura probablement pas le temps pour des fouilles approfondies. On ne va pas ouvrir chaque caisse et contrôler chaque boîte une par une, il faut dénicher quelqu'un qui sait, ou un papelard, un registre, n'importe quoi qui aidera à localiser précisément nos précieux nascents.

Jérémiah dégaine son AED, pas idéal pour le combat en espaces confinés mais mieux que rien pour couvrir la distance. Vikram, talkie en main, tente de contacter les collègues pour partager les infos, mais semble galérer à allumer l'appareil. Quant au petit Clyde, il a pris la tête de la marche, ses yeux étant vitaux pour prendre l'initiative s'ils rencontraient plus d'ennemis sur la route.

La grande salle vide sur laquelle ils débouchent à l'étage offre un panorama sur le hangar principal de l'entrepôt. Jérémiah, en restant à couvert, part regarder par la grande fenêtre comment se démerdent les xandriens. Ils se démerdent mal, très mal, faut le dire, ils perdent manifestement du terrain sur le Cartel. Ils tombent à travers le plancher, se prennent des poteaux dans la gueule, dérapent dans des flaques d'huiles. Le Cartel reste étrangement passif, en comparaison, regardant les flics s'enliser et reculer. Ils tirent peu, se contentent de prendre une ou deux vies au corps à corps quand un type étalé au sol passe à leur portée.

C'est ridicule. Le capitaine xandrien a fait n'importe quoi. Pourquoi ça tourne aussi mal ? se demande Jérémiah. Ils sont en supériorité numérique claire, comment ils peuvent reculer face à quelques trous de balle du Cartel ? Ça tourne pas rond.

Ce qui tourne pas rond non plus, c'est l'AED que Jérémiah gardait entre ses bras. Il vient de s'éteindre tout seul, et n'accepte pas le redémarrage.

« Mon AED m'a lâché.
- Ben qu'est-ce qu'il a ?, Clyde devient très inquiet.
- Y a plus de pression, la pompe a lâché. Je sais pas pourquoi, je l'avais vérifiée pourtant. Merde. »

De son côté, Vikram rouspète, c'est rare de le voir aussi frustré. Mais tu comprends vite ce qui lui arrive. Dans sa main, la batterie du talkie qu'il essayait d'allumer, dans un état déplorable alors qu'elle était censée être neuve. On dirait qu'elle a fondu dans son compartiment, type défaillance électrique grave. T'y crois à ça ? Quelle poisse !

Et Vikram déclare dans ce ton mi-tragique mi-blasé qui lui est propre, « On est isolés des autres. »

Là, on peut commencer à tiquer. Qu'est-ce qui se passe ici ? Jérémiah, il croit pas à "la poisse", il croit ni au hasard, ni au chaos. Si tu as connaissance de tous les paramètres, alors tu peux potentiellement tous les contrôler. Le Cartel doit avoir un atout caché qui lui échappe, ils ont intérêt à vite comprendre de quoi il s'agit avant de se faire dévorer. Comme si cet endroit entier était un piège. Un télékinésiste, un magnéto ? Non, si c'était ce genre de pouvoirs, ils auraient été attaqués bien plus frontalement. C'est une force plus subtile qui les saborde. Mais quoi, putain ? Est-ce que quelqu'un les observe ?

« Y a du sabotage dans l'air, les copains. Je pige pas bien ce qui se passe mais faites gaffe, ça pue », affirme calmement Jérémiah.

Des signaux de Clyde, tout le monde se tait. Il fait comprendre à ses collègues qu'il y a quatre gus, certains sont armés, ils descendent un escalier et courent vers la double-porte qui se tient au fond de la grande salle. C'est trop tard pour se replier, ils ont perdu du temps à cause du matos qui part en vrille. Va falloir agir et avancer. Le trio se déploie pour accueillir comme il se doit ces bandits.

Le moral de Jérémiah ne s'érode pas, malgré les défaillances techniques. Ils vont comprendre ce que ça signifie de piquer ses affaires au Magistère, pense-t-il, manquer de respect à la belle et noble Opale, c'est creuser sa propre tombe.
Dim 30 Juil - 14:41
Alors que les combats faisaient rage dans les étages inférieurs, d’un pas calme, au sommet de tout ce merdier, la portebrume avançait d’un pas calme vers le point d’accès le plus proche du danger. Une cigarette encore fumante entre les lèvres, ses actions méthodiques, au point qu’elle n’y réfléchissait même plus. A chacun de ses pas, prenant entre deux doigts une de ses dagues, elle tapotait de la garde les différents murs, histoire de tester leur solidité et de vérifier quelles seraient ses options et ses variables si jamais il devait y avoir du grabuge par ici. Elle en faisait d’ailleurs de même avec le sol, tapotant tous les deux mètres le plancher d’un rapide mouvement de la pointe du pied.

Tandis qu’elle continuait sa petite préparation, une voix se fit entendre dans son esprit.

*Vivi. Ca va bien pour l’instant ?*

Capacité télépathique, il s’agissait d’un utilisateur de cristal. Le Cartel était loin d’avoir les ressources en termes de capacité spéciale d’une institution gouvernementale, mais avec le temps l’organisation avait compris comment utiliser ses faibles ressources de manière optimale, privilégiaient lorsqu’elle le pouvait l’obtention à travers des cristaux ou des nascents de capacité d'intérêt logistique plus que de combat.

Un télépathe avait après tout plusieurs utilités pour ce genre d’organisation. Premièrement bien entendu, la communication rapide et directe des dangers potentiels ou différents criminels, mais il pouvait également servir de détecteur en cas d’infiltration, si jamais un criminel fixé à un endroit précis ne répondait plus au télépathe.

*Tranquille pour l’instant. T’inquiètes pas pour moi. Comment ça se passe plutôt en bas ?*

*Trop chaotique pour que je puisse le savoir. On verra quand l’offensive se tassera que c’est imbécile seront plus prudents plutôt que de nous rentrer dedans sans réfléchir. *

*D’ac’*

Un silence s’installa pendant quelques secondes.

*Une personne ou un groupe d'ennemis sont en train de monter. Claude répond pas. J’ai envoyé le groupe d’Igor descendre pour voir la situation, les dégager ou au mieux les jauger.*

Rangeant sa dague à sa ceinture, la portebrume laissa tomber sa cigarette au sol avant de l’écraser du pied.

*S’ils ont vraiment réussi à monter jusqu’ici sans faire de vague autre qu’une élimination, je doute qu’un groupe de 4 quidam fonçant sur eux puisse leur faire grand-chose.*

Malgré sa chance.

Monter l'entrepôt était aussi risqué que de se battre au rez-de-chaussée. Si le ou les inconnus étaient parvenus à monter sans bruit, cela signifiait deux choses. Soit ces gens étaient suffisamment puissants pour pouvoir parer toute action de la malchance. Soit ils étaient suffisamment organisés et efficaces pour réduire au strict minimum le nombre de variables pouvant influer sur leur destinée. Et cela pouvait être également les deux à la fois. Bref, ces gens étaient sans doute plus puissants ou tout du moins plus expérimentés et organisés que la police xandrienne classique. La question était de savoir qui ils étaient exactement, d’où ils venaient, etc. Ce qui restait encore un mystère au yeux de la jeune femme.

Si c’était une véritable escouade, mieux valait encore amplifier la création de paramètres plutôt que de les laisser libres éliminer un par un les individus qu’ils croisaient. Ce qui signifiait de prendre des risques et d’aller à leur rencontre.

*Je vais “descendre”, laisser les autres les fatiguer ça m’arrangera.*

Alors qu’elle était elle-même face à la porte menant aux escaliers, son regard se détourna un instant vers une des cargaisons de boîte en musique. S’approchant, elle en prit une avec elle.

De toute évidence, ils étaient à la recherche de la véritable cargaison. Mais restait à savoir pourquoi avait il été motivé au point d’organiser une descente d’une telle ampleur. Ce n’était sans doute pas la vraie, mais lire leur réaction à la vue d’une de ses boîtes pourrait être précieux dans sa gestion des variables.

Au moment où elle commençait à descendre tranquille, les 4 bandits eux, arrivaient justement face à l’escouade ouvrant la porte avec plus de prudence que les opalins pour ensuite se positionner de manière défensive face aux soldats.

Les bandits ne semblaient pas avoir l’intention d’engager le combat, restant dans des positions défensives comme s’ils se contentaient d’attendre l'assaut. On pouvait sentir également une méfiance dans leurs expressions la vue des uniformes trop différents de ceux de la police Xandrienne pour que même le plus stupide des bandits ne comprenne pas qu’il y avait un problème avec ces assaillants.

Celui qui semblait le chef du groupe, un peu plus en avant par rapport à ses semblables, une lame dans chaque main, toisait du regard les opalins avant de parler d’un ton ostensiblement méprisant et insultant.

Dégagez les ‘tites putes. C’pour les adultes ici. Repartez d’où vous venez et on vous butera pas.

La réalité était surtout que conformément aux ordres qu’ils avaient, les bandits cherchaient volontairement à provoquer les policiers pour les encourager à attaquer.

Dim 30 Juil - 18:33
C'est comme tout à l'heure, pense Jérémiah, quand je les observais à travers la fenêtre jouer avec les xandriens. Ils sont passifs. Ils nous laissent venir à eux, et nous provoquent pour nous pousser à la faute. Y a clairement un piège, mais on a pas le temps pour ça.

Les agents ne répondent pas à l'invective du bandit. Si l'attaque se déroule correctement, il recrachera de toute façon bien vite ces vilains mots.

Pendant que le patron blablate, Clyde décrit, grâce à une succession de signes de main, où est positionné l'ennemi situé de l'autre côté du mur contre lequel Jerry s'est mis en couverture. Lorsque la gentille brute a suffisamment d'informations, et que Clyde a validé sa frappe d'un pouce en l'air, il envoie une grande patate dont il a le secret dans le mur. Bingo ! Il a creusé un beau trou dans le mur et attrapé à la gorge le bandit situé derrière, l'étranglant. Outre les dégâts infligés à ce pauvre type, cela crée un état de sidération provisoire chez ses copains, donnant toute latitude à Vikram et à Clyde pour démarrer leur offensive.

La moindre seconde est précieuse, lors d'un assaut de ce genre. Inondés d'adrénaline, le temps semble comme ralentir autour de nos agents. Lorsque Vikram passe la tête derrière la porte, fort de son expérience, il analyse la scène à une vitesse fulgurante. Le gars aux longs couteaux n'est pas la priorité, il faut d'abord éjecter ceux qu'ont des flingues. Fusil à l'épaule, le vétéran colle d'abord une unique balle dans le bras d'un second bandit qui présentait une faille dans sa défense, le mettant instantanément hors d'état de nuire.

Un troisième loubard sort de sa couverture, visiblement paniqué, Vikram le verrouille mais lorsqu'il appuie sur la gâchette, rien ne sort, putain, fusil enrayé ! Putain ! Clyde assure ses arrières, heureusement, et tire une salve vers l'imbécile, qui s'écroule dans un cri de cochon. Il veut enchaîner, le Clyde, il tente de tirer sur l'énorme connard avec ses deux lames, mais à lui aussi, son flingue s'enraye, la poisse !

Le chef de leur petite meute arrive ainsi à portée de Vikram, qui se défend comme il peut des coups de sabres en utilisant son fusil. Ce mec est là, souriant, sadique, il harcèle de coups un Vikram devenu impuissant. Il est doué, plus que ses trois potes, le vieux Vikram a besoin de renforts illico, ça va mal se finir.

Y a une frappe qui vient frôler la gorge de Vikram, mais le deuxième coup est intercepté par Jerry, qui attrape le sabre à pleines mains, le cassant en morceaux au passage. Le mutant sent un violent picotement dans sa paume maintenant, probablement s'est-il blessé. Pas grave.

Maintenant que ce salopard a l'attention du colosse, il a l'air moins tranquille. Il tente de se dégager pour s'enfuir, mais dérape en se cassant la gueule : tant pis pour lui. Jérémiah lui attrape un avant-bras, t'entends le doux son de la fracture, sa lame tombe dans un son cristallin se mariant à merveille au cri de douleur du bandit. La deuxième main de Jérémiah, bien que blessée, se joint à la danse, et part broyer les os du deuxième avant-bras du trafiquant.

Tu l'auras deviné, ça devient graphique. Subir d'horribles fractures aux deux avant-bras en pleine bagarre, ben ça fracture aussi ton moral, pense Jérémiah, il est mûr pour être questionné.

« C'est quoi votre plan ? Vous nous attendiez ? Vous avez des portebrumes ?
Soit tu m'expliques ce qui se trame ici, soit tu dis Adieu à tes deux bras.
N'essaye pas de gagner du temps. »

Jérémiah est parfaitement sérieux dans sa menace, et fixe froidement son otage à travers son masque, de ses deux orbites creuses. Commettre des horreurs pour protéger les intérêts du Magistère ne lui cause aucun souci de conscience, surtout quand il s'agit d'un simple grouillot du Cartel. Ben évidemment, la vie de ce type n'a aucune valeur, comparée aux intérêts supérieurs de la science d'Opale !

Par chance, la blessure au cou de Vikram semble superficielle. Un peu de sang a coulé, quand même, c'est pas passé loin, mais le pire a été évité. Quant à Jérémiah, bloquer et briser la lame à mains nues lui a laissé une plaie à travers son gant, une plaie du genre qui picote fort. Sa force et sa carrure ne le dispensent pas de souffrir lorsqu'il se fait toucher aux endroits non protégés par les pièces d'armures, et tandis qu'il resserre son étreinte sur le bandit, il sent la douleur s'accentuer dans sa paume.

L'affrontement a été très rapide, cette action frénétique ne s'est étalée que sur une dizaine de secondes, les bandits se sont fait écraser. Pourtant, sur un combat aussi banal, contre de tels amateurs, les agents surentraînés du Magi' auraient du s'en sortir indemnes. Même ces blessures minimes sont inacceptables. Que s'est-il passé ?

« Je suis trop vieux pour ces conneries. J'ai failli me faire trancher la gorge à cinq ans de la retraite, tssk, ronchonne Vikram.
- Nos deux fusils se sont enrayés en plein combat ?! fait remarquer Clyde, tout tremblotant. C'est flippant, on dirait que cet endroit est maudit ! »

Clyde a dit ça sous le coup du stress, mais il a peut-être raison. Depuis qu'ils ont monté cet escalier, les déconvenues s'enchaînent, des déconvenues qu'ils ne pouvaient pas prédire, des coups du sort liés au chaos. A cause de ça, ils ont été forcés d'improviser, et de laisser encore davantage de place au chaos. Il faut reprendre le contrôle de la situation, et comprendre exactement ce qui se passe. Jérémiah, tout comme ses collègues, il est pragmatique et rationnel, mais il a vu suffisamment d'anomalies délirantes durant ses missions pour rester ouvert aux théories les plus fumeuses.

Cet endroit est peut-être vraiment maudit. Pourquoi pas ? Mais par quoi ?
Si ce bandit tient à ses bras, peut-être sera-t-il capable d'éclairer la lanterne de nos braves agents ?
Faut se magner, en tout cas. Ce ramdam va surement attirer du renfort. Jérémiah réitère sa menace :

« Dernière chance mon gars. Si tu veux vraiment pas nous parler, j'arrache ces bras et on passe à la suite. C'est comme tu veux. »
Lun 31 Juil - 11:47
Face aux simples bandits, les agents d’Opale avançaient face à une difficulté imprévue mais qui restait toutefois plus ou moins légère vu la différence de niveau qui existait entre les deux groupes. La différence de puissance, d’expérience ou encore de coordination et de cohabitation était trop terrible pour que les agents du cartel ne puissent faire autre chose qu’affaiblir l’escouade ennemie.

D’une certaine manière, ils en étaient conscients. Mais l’humain avait en lui cette émotion à la fois indispensable mais également dangereuse qu’était l’espoir. La croyance en sa destinée et en sa capacité à surmonter les épreuves les plus difficiles. C’était ce qui lui avait conduit avec erreur à défier ouvertement les soldats.

S’écrasant lourdement au sol maîtrisait par les étrangers, le chef de la bande, quelque peu sonné, regardait d’un œil vague l’état de ses amis, alors qu’un homme masqué au-dessus de lui, l’intimait à parler et à dénoncer les autres sans peine de lui briser le bras.

Restant quelques secondes silencieux comme pour reprendre son souffle, le malfrat se mit à rire doucement. Lui balancer les autres ? Pas sans torture. Peu de gens était capable de résister à la torture il était vrai. Mais encore fallait-il que ses enflures puissent avoir le temps de le faire. D’autant que vu sa situation, il n’était pas envisageable de tout balancer à la première menace. Le Cartel n’achetait pas la “loyauté” de ses troupes uniquement par l’argent ou l’honneur. Les gens étaient recrutés ici dans le quartier. Trahir c’était trahir le quartier pour devenir un marginal qui n’avait d’autres choix que l’exil. Trahir c’était mettre en danger sa famille et surtout sa femme et ses enfants. Une prise d’otage douce valable sur la plupart des membres du cartel.

Avec un regard et une expression crispée et douloureuse, le bandit commença à rire doucement et difficilement.

C’est vot’ faute… d’prendre les gueux pour des imbéciles sans pouvoirs...

Il n’eut pas le temps de rajouter une phrase de plus que ce fut au tour de la portebrume d’apparaître elle-même en hauteur dans la cage d’escalier, une boite à musique dans la main gauche, un pistolet de poing dans la main droite. Tirant une première fois sans grande hésitation sur le premier qui passait, elle jeta immédiatement après la boîte à musique au sol pour qu’elle se brise aux pieds de l’escouade. Une action qui avait deux intérêts, d’une part permettre de savoir quels étaient leurs réactions face à la cargaison qu’ils recherchaient, d’autre peu, forcer leurs réflexes oculaires à se diriger vers le sol afin de détourner ne serait ce qu’un instant leur champ de vision vers le bas. La criminelle en profitant pour relever son arme et tirer directement dans un des coins du mur de la salle, la puissance d’impact le craquelant, avant que les fissures ne se propagent vers le haut et qu’une partie du plafond commence également à s’effondrer sur les têtes de tout ce monde.

Elle n’attendit pas de voir le résultat de cette situation, remontant immédiatement d’un pas rapide vers les étages supérieurs. Vu le trou que l’un des membres de ce groupe mystérieux avait fait dans le mur, il devait disposer d’une force colossale. Autant dire que cela ne serait pas joli à voir si jamais il parvenait à l'attraper. Il lui fallait donc rester systématiquement mobile pour éviter de se retrouver dans une formation dont il serait le cœur. A ce titre agir directement dans les escaliers était plus pratique, car un terrain plat serait à leur avantage. Il était plus difficile d’attaquer en montant ou de profiter d’un avantage numérique dans des espaces étroits.

Remontant ainsi d’un étage, en rechargeant d’un geste mécanique son arme, la magicienne les attendaient, arme au poing.
Mar 1 Aoû - 15:50
Y a du dégât. Jérémiah s'est fait ensevelir sous du plâtre, dont il n'a aucun mal à se défaire, seulement c'est dommage de saloper ainsi son beau costume. Après s'être dégagé, le géant aide Clyde, dont les jambes se sont retrouvées bloquées sous un grand morceau de plafond. Ça craint, il va peiner à poursuivre l'opération. Quant aux bandits, ils sont ici et là à gémir sous les décombres, plus ou moins blessés.

Fais chier, il n'a fallu qu'une seule balle pour faire s'écrouler le plafond ? Soit le tireur est un vrai génie connaissant parfaitement la structure de l'endroit et capable de frapper dans ses faiblesses, soit c'est vraiment la poisse.

Vikram, sorti indemne de l'éboulement, court examiner la boîte à musique jetée en bas de l'escalier par l'ennemie. Sa ressemblance avec les prototypes originaux est bluffante, mais le Cartel n'irait probablement pas jeter sa précieuse contrebande à l'ennemi pour tendre un simple piège.

« Ça doit être un faux. Cette connasse veut qu'on la suive ? »

Mis à terre, Clyde se concentre en fixant ce qui reste du plafond. Sa vision thermique lui indique une silhouette humaine située au-dessus d'eux, c'est peut-être la femme en question. Il le notifie à Jérémiah, qui lui répond par un ordre simple.

« Donne moi ton fusil ! »

Le jeune s'exécute, grimaçant de douleur. Jérémiah attrape l'arme et vise le plafond, dans la direction pointée par son collègue. Le plafond ne semble pas si épais, en plus d'être fragilisé, peut-être que ça le percera de part en part et flinguera la cible. Ils n'ont sûrement pas capté qu'on a un portebrume avec des yeux magiques dans notre escouade, c'est impossible qu'ils aient prévu un tel coup, espère Jérémiah.

Mais lorsque Jérémiah tente de tirer sa cartouche, le fusil s'enraye à nouveau, et c'est encore plus grave cette fois. La balle s'est fracturée et est maintenant coincée dans sa chambre, impossible à déloger sans devoir démonter la totalité de l'arme, la cata totale. Grosse poisse, mais cette fois, Jerry s'y attendait. Il a accepté qu'étant maudit, il allait falloir composer une stratégie adaptée. L'avantage, c'est que les ennemis sont tous passifs, peut-être parce qu'ils ne sont pas exempts de malchance eux non plus. Si personne ne bouge, alors personne ne fait d'erreur ? C'est ça leur tactique ? Plein de ressources ce Cartel, on les a sous-estimés. Mais leur passivité les rend lents et les oblige à réagir plutôt qu'agir.

Ça doit venir d'un portebrume ou d'un cristal, le connard à qui j'ai pété les bras l'a sous-entendu. Si on trouve la source de cette malédiction et qu'on la déboite, tout redeviendra normal ? On pourrait alors reprendre le contrôle de la situation, nous et les xandriens, pense Jérémiah. Plus facile à dire qu'à faire.

Parlant des xandriens, qu'est-ce qu'ils deviennent ? Ces cons doivent encore être en déroute, ça risque de libérer des bandits qui se pointeront ici en renforts. Heureusement, ils continueront surement à ne rien faire et à nous attendre puisque ça semble être leur tactique à tous. Il reste peut-être un espoir d'accomplir la mission mais il faut agir très vite !

« Elle est toujours debout et seule là-haut, ta silhouette ?
- Oui, Jerry, confirme Clyde en continuant de scruter le plafond.
- Compris. Tu peux te mettre debout ?
- A peu près...
- Écarte toi, mets toi à l'abri. »

Celle-là, elle est tellement confiante qu'elle se pointe en solo face à leur escouade, et se tient en embuscade toute seule à l'étage ? C'est soit une débile, soit une tarée qui a un plan. On va la tester, vérifier dans quelle catégorie elle est. On ne va pas monter, car c'est ce qu'elle veut. On va la faire descendre.

- Vikram, tiens toi prêt ! prévient Jérémiah en ramassant un débris du plafond effondré, le plus lourd qu'il est capable de trouver. Ensuite, il le projette aussi brutalement que possible en-dessous de la position supposée de la petite dame qui les attend là-haut, espérant faire s'écrouler le sol sous ses pieds.

L'équipe du Magi' s'attendait à devoir "retourner le bâtiment" pour trouver leurs nascents. Ça commence à devenir délicieusement littéral.
Ven 4 Aoû - 15:32
Plus on avançait, plus cette histoire devenait de plus en plus compliquée. Face à un groupe de toute vraisemblance particulièrement bien formée, la meilleure option pour la jeune femme était de les faire courir. Après tout, contrairement à eux, sa connaissance supérieure des lieux était à son avantage d’autant qu’à cela s'ajoutent l’infinité des variables d’une course-poursuite dans des bâtisses délabrées.

Malheureusement de toute évidence, cette escouade semblait un peu plus prudente que les autres et pire, dotée de capacités qui lui permettaient de ne pas courir vaguement sous l’emprise de la malchance.

Alors que la portebrume se trouvait déjà à l’étage supérieur, elle sentit tout à coup le sol commencer à se dérober sous ses pieds du fait d’un choc venant de plus bas. Baissant soudainement des yeux emplis de surprise vers le sol, elle commença à tomber avec celui ci avant de finalement basculer en arrière en perdant son équilibre avant de s’écraser douloureusement sur une partie du sol qui ne s’était pas effondrée sous le premier tir de l’escouade.

Désormais un grand trou d’environ 2m de large reliait les deux étages. Violette posée involontairement sur le rebord de celui-ci, les pieds dans le vide, pivota rapidement sur le côté pour se mettre à l’abri de toute attaque, bien qu’en réalité au vu de la puissance de tir de l’escouade, ils seraient aisément en mesure de la toucher une seconde fois s’ils parvenaient à tirer. Après tout à force de faire sauter le plafond, sa chance n’aura plus rien sur quoi se raccrocher pour éviter de tomber sur les fesses au beau milieu des ennemis.

Allongée sur un sol fragilisé et instable, le visage endolori par la douleur de s’être lourdement rétamé sur le dos, la portebrume prononçait quelques mots vis-à-vis de l’escouade d’une assurance factice et surtout forcée

Et bien… On peut dire que cette fois-ci vous vous êtes bien équipés.

Rechargeant son arme de manière ostentatoire pour que tout le monde en bas puisse l’entendre, son regard passait dans le même temps vers les escaliers à 3 mètres d’elle. Là, elle ressentait l'envie de se tailler le plus vite possible d’ici. Plus elle y pensait, plus elle se disait que c’était impossible de pouvoir la viser à l’aveugle avec une telle précision. En plus du colosse avec sa force extrême, il devait sans doute y avoir quelqu’un qui à travers un pouvoir, des cristaux ou des nascents possédaient une capacité de détection. En clair deux capacités spéciales dans un seul groupe dont une capable d'empêcher probablement la plupart des attaques surprises. Il était donc impossible en l’état des choses de pouvoir approcher un groupe avec un détecteur sur patte. Quelque chose pourrait être fait, si elle connaissait le style de détection de ce pouvoir, que ce soit les cinq sens, une vision spéciale,... Malheureusement elle n’avait pas le temps de faire du renseignement et contrairement aux pouvoirs plus expressifs physiquement, comprendre des capacités invisibles ne se faisait pas par hasard ou par accident.

D’autant que s’il y avait deux pouvoirs, il pouvait y en avoir plus. Dans cette situation, le mieux à faire était de battre en retraite plutôt que de tenter le diable face à plus fort que soi et surtout plus nombreux que soi. Mais encore fallait-il pouvoir le faire. Dans ce cas ci, la priorité ne serait pas de défier les combattants mais d’éliminer avant tout les supports et ce fameux détecteur. Problème, il devait avoir l’habitude de ce genre de chose et sans doute était-il discret sur son rôle.

Bref… la situation n’était pas fameuse… C’était une belle mission de merde…

Murmurant plus pour elle que pour l’escouade..

Putain… Vous faites chier…

Pivotant pour se mettre sur ses genoux sans affaiblir le sol plus que nécessaire, toujours proche du rebord du trou se focalisant sur son ouïe. Elle était trop loin des escaliers pour partir sans prendre une seconde salve de la part des soldats, or, si cela arrivait, elle doutait d’avoir suffisamment de variable pour que cela se termine bien pour elle. Tant que celui qui dégommait le plafond était focalisé sur elle, elle pouvait difficilement fuir. Sa seule option était de réussir à l’embrouiller pendant une dizaine de secondes mais elle ne savait pas encore comment y parvenir. En attendant, elle devait gagner du temps. C’était ce à quoi servait le fait qu’elle n’est pas caché le rechargement de son arme à feu, de cette manière celui avec la force réfléchirait normalement à deux fois avant de tirer par peur de se prendre en retour une balle pendant sa propre action. Mais bon ce n’était que théoriquement, entre les joueurs, les téméraires et les fanatiques, il y avait un risque qu’il tente le pari…

J’sais pas c’que vous voulez faire ici. Mais ça sert à rien. Personne ne sait où est c’que vous cherchez et il faudra des jours entiers pour fouiller tout c’qu’il y a ici. Devriez repartir. Z’êtes confiant avec votre nombre. Mais même si j’crève, j’doute de pas être en mesure d’emporter quelqu’un avec moi dans ma chute.

Son regard passait de droite à gauche dans le même temps. Mmm au cas où ça vrillerait, il y avait peut être quelque chose à faire.
Sam 5 Aoû - 10:50
« Vous êtes dans la merde. On a compris que vous aviez un pouvoir à l'oeuvre ici, un truc lié au chaos. Mais il faut plus qu'une petite malédiction pour impressionner le Magistère d'Opale, ma petite.

Vous avez aucune idée de la valeur et de la dangerosité de ce que vous avez volé. »

Les clampins du Guet sont la routine, mais peut-être que ça la déstabilisera de se rendre compte qu'aujourd'hui ils se sont aussi foutus Opale à dos ? Ces tocards n'ont pas l'habitude de gérer une opposition aussi "exotique", pas vrai ?

Vikram cherche un angle de tir sécurisé depuis l'escalier. S'il se montre trop, la poisse viendra lui caser une balle dans le genou. On a pas le droit à l'erreur. La petite dame est une maline. Elle s'est retranchée dans une position qui empêche l'équipe du Magi' de prendre une initiative correcte sans lui dévoiler son jeu et sans s'exposer. C'est trop dangereux de laisser une ouverture visible en étant aussi maudit. On a déjà Clyde à terre, hors de question que quelqu'un d'autre se fasse toucher par ces conneries...

En parlant, Jérémiah évalue ses options. S'il faut évacuer en urgence, il y a toujours possibilité de se défenestrer, ça fera bobo mais après tout on est qu'au premier étage. La femme là-haut, comme tout le monde, doit être soumise à la malédiction locale. Elle peut brailler autant qu'elle veut, Jerry se doute qu'elle bluffe. Que peut-elle faire, à part gagner du temps et espérer du renfort ? Elle est pas en position de négocier mais il faut rester très prudent, ces minables sont des allumés. Ce serait dommage qu'elle tente une attaque suicide et réussisse son coup, quoi ?

Les professionnels agissent méthodiquement en essayant de protéger leur vie, alors que les grouillots désespérés des bas-fonds n'ont absolument rien à perdre. Elle est là, leur vraie force...

Vaut mieux lui laisser entrevoir une issue, ça lui évitera de faire tout de suite une bêtise. Jerry reprend la parole, en expliquant à l'ennemie quelle est sa meilleure option :

« On est pas comme le Guet, on tient pas à vous coffrer ou à vous buter. On vient juste récupérer le matos que ta bande a volé au Magistère.

Si vous vous barrez en laissant votre marchandise derrière vous, nous autres on vous courra pas après. On a mieux à foutre, car comme tu dis, on devra passer des jours à identifier le matériel au milieu de votre camelote. Vous nous aurez déjà bien fait chier et vous pourrez être déjà fiers de vous pour ça.

Si les xandriens vous poursuivent, ce sera sans notre appui. Gérable pour vous, non ? »

Si elle est rationnelle, peut-être qu'elle va étudier l'idée, peut-être au moins que ça lui instillera un doute ? Le moindre doute est bon à prendre, c'est une manière de fissurer la conviction ennemie.

C'est désagréable, de devoir négocier avec des voleurs, hein ? Mais ce combat continue sur le terrain psychologique. Après tout, parler n'a pas l'air d'activer la malchance. Jerry ne s'est pas encore mordu la langue en tout cas !

« Tu pourrais aller informer tes potes qu'on vous offre une sortie de secours ? Ce serait con qu'ils continuent à mourir bêtement. »

Si elle attrape cette occasion pour s'enfuir, on pourra avancer, leur prendre un peu de terrain et nous repositionner correctement, pense Jérémiah. Il faut qu'on trouve les autres collègues infiltrés, au moins qu'on sache s'ils s'en sortent, s'ils ont survécu. Tant qu'on aura pas trouvé la source de ce chaos, tout restera incertain, flou. Même notre avantage sur le Cartel qui devait pourtant être assuré...
Lun 7 Aoû - 22:04
Tssss.

Le Magistère.. Rien que ça…

Pendant un temps, la portebrume ne réagissait pas gardant le silence. Certains pourraient penser qu’elle hésitait à céder à la proposition de fuite de l'escouade, la vérité était pourtant tout autre. Il était vrai d’une certaine manière comme le pensait les Opalins que la force des agents du cartel résidait dans le fait qu’ils n’avaient rien à perdre. En réalité cette situation était quelque peu incomplète, le constat réel étant qu’ils n’avaient rien à perdre à se battre sans reculer car ils avaient tout à perdre d’une victoire ennemie. Chaque personne à des faiblesses sur lesquelles un pouvoir subtil peut s'agripper, notamment quelque chose d’universel qui veut que tout individu excepté les sociopathes et autres dérivés souffrant de problèmes de sociabilisation tends à développer des liens avec autrui, que ce soit une famille, des amis, un groupe social… Si jamais une personne fautait à travers une trahison ou de l’incompétence pure, tout ceux auxquels l’individu tenait pouvait être impliqué dans la vengeance. Le Cartel punissait rarement la simple défaite, il punissait de manière implacable tous ceux qui n’avaient pas tout fait pour l’éviter.

Violette n’était pas différente, elle avait une famille, des amis… des relations d’un temps révolu où elle n’était pas ce qu’elle est aujourd’hui. Toutes des cibles potentielles de la vengeance qui pourrait frapper suite à sa fuite.

C’est pourquoi la proposition de Jerry ne l’avait même pas fait hésiter une seule seconde, même si elle voulait se tirer ou éviter ce combat, le repli de cet entrepôt était impossible tant qu’aucun ordre n’avait été donné.

Pourtant il y avait bien un doute chez elle, mais elle ne considérait pas sa personne, mais plutôt ses ennemis. C’était confirmé, c’était des opalins, pire du Magistère. Les combattre était une chose, en tuer un pourrait avoir des conséquences gravissimes pour tout le monde. La criminelle ne savait pas de tête la valeur que donnait le Magistère à la vie de ses propres agents mais ne serait ce que par égo de leur part, il y avait un risque qu’il le prenne personnellement en cas de perte et que le cartel soit fiché directement comme institution à détruire. Le guet et les différentes forces de police de ce continent étaient déjà gênants, y ajouter comme ennemi mortel une force spéciale d’un autre niveau c’était compliqué. C’était bien pour éviter ce genre de vendetta que les criminels évitaient autant que possible de tuer des policiers, des juges ou des innocents peu importe le pays.

Combattre en évitant de tuer. Difficile. D’autant que la portebrume ne maîtrisait pas son pouvoir qui faisait les choses à son aise. Si jamais les soldats étaient trop faibles pour survivre aux variables elle ne pouvait pas faire grand-chose d’autant que sa fortune ne protégeait qu’elle et ne souciait pas des retombées d’une action “chanceuse” sur le coup. Il fallait miser sur la compétence de ses adversaires. Assez paradoxale comme réflexion durant un combat mortel.

Une dizaine de secondes après la fin du petit discours de l’opalin qui lui proposait de fuir, Violette répondit d’un ton particulièrement sec.

Pas mon problème d’savoir c’qu’on vous a pris. Ca vous regarde vous et les décideurs. J’veux même pas l’savoir. Si vous êtes du magistère, devez savoir qu’il y a des questions auxquelles vaut mieux pas chercher de réponse. Etat et crime, bouteille différente, alcool similaire.

Elle n’était pas suffisamment curieuse pour mettre idiotement sa vie en danger en obtenant des infos qu’elle n’aurait jamais dû avoir. Le secret était quelque chose dont il ne fallait pour son propre bien jamais s’approcher. L’escouade en elle-même devrait parfaitement comprendre cela. Même si les buts et les objectifs étaient différents, comme la portebrume le disait, les pratiques des criminels et de ceux agissant dans l’ombre pour le compte des Etats étaient tout à fait similaires.

Y a pire que la mort dans ce monde j’vais devoir décliner votre proposition. Comme j’le dis c’était pas pour moi mais pour vous. Malgré tout votre acharnement vous ne trouverez rien. Enfin, si vous êtes si convaincu d’votre bonne étoile, venez si vous avez des couilles, j’vous attends.

Son regard passait successivement sur les différents points où pouvait se présenter l’ennemi.

Pour l’instant elle ne tentait rien. Après tout, il n'était pas dans son intérêt de prendre des initiatives. Son objectif était de leur faire perdre suffisamment du temps pour qu’ils ne puissent pas explorer l’endroit. C’était clairement les plus dangereux et les plus efficaces de toute l’attaque. Peut-être avaient ils une parade contre les astuces du cartel. C’étaient eux qu’il fallait bloquer prioritairement.

Au vu de leur manière de faire très paramétré, couplé au fait qu’ils aient essayés de la convaincre sans l’attaquer, la portebrume pouvait déja dire que son pouvoir les avait déja impacté psychologiquement. Après tout, au-delà de la malchance en elle-même, la force de la fortune était de pousser à l'immobilisme et au doute par peur de la subir. Qu’ils tentent quelque chose ou maudissent leurs impuissances, la fortune gagnera toujours.
Mer 9 Aoû - 8:33
Evidemment, on a affaire à la chair à canon. S'ils reculent, ils seront punis. Elle ne collaborera pas, le danger posé par leur Cartel est direct et immédiat, alors que celui posé par le Magistère est lointain, abstrait. Ils sont des voleurs et des trafiquants, mais également otages du Cartel. Est-ce une raison pour les prendre en pitié et s'adoucir ? Bien sûr que non. Ils se tiennent sur la route du Magistère, entravent sa bonne marche, profèrent des menaces, refusent le dialogue. Ils ont scellé leur sort.

C'est ainsi que fonctionne Xandrie. Les miséreux tombent soit dans la Révolution, soit dans le crime sale. Beaucoup de feignants qui n'ont ni espoir, ni volonté de faire les choses bien, qui se contentent d'attraper la première occasion facile de se faire du blé et des potes, et qui s'étonnent ensuite de se retrouver rouages d'une machine qui les détruit.

Qu'est-ce qu'on peut y faire ? Quand tu neutralises un voleur, y en a trois nouveaux qui sortent des bidonvilles le lendemain... Xandrie est une usine à feignants, une pouponnière de crime, qu'Opale a placé en assistance respiratoire pour son propre bien. Vraiment une mission de merde, pense Jérémiah, décidemment, à chaque fois que je suis envoyé sur Xandrie, c'est pour m'y faire chier.

L'agent caressait quelques espoirs d'ouvrir une brèche dans leur défense par le dialogue, mais il semble qu'aujourd'hui les problèmes ne pourront se résoudre que par la violence. C'est pas grave, y a des jours comme ça. Ça aurait été bête de ne pas tenter le coup.

Jérémiah n'est pas dupe, ses collègues non plus. La mission tourne au vinaigre, les espoirs de retrouver les nascents s'amincissent à chaque minute qu'ils perdent à s'enfoncer dans ce bourbier de poisse. Mais il est hors de question de sonner la retraite tout de suite, sans même savoir où sont les collègues, et sans rien tenter contre cette femme qui, au demeurant, est isolée et impuissante là-haut, et possiblement blessée. Hors de question de reculer face à ce Cartel minable, quelle honte ce serait que de retourner à Opale avec une telle débâcle venant salir le très beau CV de Jérémiah.

N'oublions pas qu'il ne suffirait "que" de trouver leur source de malchance pour renverser la situation...

« Tu as fais ton choix et nous aussi ! On va monter te voir » conclut simplement Jérémiah.

Ça n'annonce pas forcément une attaque immédiate, mais une telle menace, proférée avec une telle assurance, fait monter la pression et pousse à la faute. Faut garder en tête qu'elle est seule, que ce n'est pas probablement pas une tireuse d'exception, qu'elle n'a pas de stratégie autre que de nous faire perdre notre temps, et qu'elle doit être frappée de malchance comme nous tous.

Même si elle s'est retranchée sur une position difficile d'accès, une attaque synchronisée devrait faire l'affaire : Jérémiah l'attaquera par en-dessous, Vikram depuis l'escalier, le pari c'est qu'elle ne pourra pas couvrir deux fronts et cédera à la panique -et à la malchance-. Clyde valide la position de l'ennemie à Jérémiah, toujours perchée au-dessus de leurs têtes à côté du trou. On passe ensemble en attaquant puissamment et précisément, on l'écrase, on passe à la suite. Simple. La base d'un assaut commando.

Pas le temps de communiquer, Vikram comprendra. Dans un énorme vacarme, Jerry attrape l'un des morceaux de plafond effondré, et se cache derrière, l'utilisant comme un gros bouclier de fortune. Il se précipite dans le champ de vision de la petite dame, mimant l'intention de lui jeter ce tas de béton à la gueule. Le but est de la terrifier suffisamment pour capter toute son attention sur ce qui se passe en bas...

... pendant ce temps, Vikram finit discrètement son ascension de l'escalier et s'apprête à canarder l'ennemie. Même si le fusil s'enraye ou lui pète dans les doigts, il suffit de deux ou trois secondes et d'une ou deux balles, le vétéran est très bon tireur.

L'objectif est simple : Vikram va vouloir caler une ou deux balles dans les bras de la petite dame pour l'empêcher de riposter, puis l'assommer pour lui éviter de donner l'alerte. Si on peut éviter de la tuer, on le fera. Mais ça dépend aussi d'elle...
Ven 11 Aoû - 3:48
Quelle situation de merde. Positionnée à couvert des frappes de celui qui disposait d’une puissance physique anormale, tout en surveillant l’évolution des stratégies ennemies, la portebrume maugréait sur sa propre situation. Il fallait dire que face à une escouade suffisamment puissante pour savoir gérer sa propre malchance, Violette ne pouvait que constater sa propre impuissance à pouvoir gérer leurs cas seuls.

Certes on pouvait lui rétorquer qu’être incapable de vaincre ou de faire reculer de son unique force une brigade spéciale d’Opale était normal, d’autant plus s’il y avait plusieurs utilisateurs de pouvoir que ce soir ceux de races diverses, de portebrume, de cristaux ou de nascents. Mais la jeune femme avait trop d’égo pour accepter cela, le fait de reposer uniquement sur les variables lui faisait sérieusement constater que face à des capacités plus physiques, elle ne pouvait que se défendre sans répondre. Il lui manquait une puissance de frappe consciente pour sérieusement l’attendre.

C’était la première fois en deux ans qu’elle se retrouvait dans ce genre de situation, depuis qu’elle était devenue portebrume plus exactement. Il fallait dire qu’il était rare de rencontrer des gens capables d’affronter les pouvoirs de la brume. S’il elle survivait à tout cela, il lui faudrait clairement face quelque chose à ce sujet, développer son propre pouvoir, investir dans des cristaux stratégiques dès lors qu’elle obtiendrait les fonds nécessaires. Jamais plus, elle ne devait se retrouver dans une situation d’impuissance face à un combattant.

Enfin, il valait mieux que cette prise de conscience arrive avant que son orgueil en ces pouvoirs ne devienne si important qu’elle entre dans une ère de stagnation insurmontable.

Encore fallait-il survivre toutefois.

Sur un ton sérieux, elle répondit alors à Jerry.

Très bien, j’vous attends.

Son attention était alors pleinement sur Jerry désormais à couvert derrière un bloc de pierre que de toute évidence il s’apprêtait à lancer. Il fallait dire qu’elle ne pouvait que se focaliser sur lui au vu de toutes les démonstrations de puissance qu’il avait fait jusqu’ici entre sa capacité à briser les murs à main nue ou encore à dégommer ce qui était le plancher pour elle et le plafond lui à coup de débris rocheux. D’autant que la pierre qu’il avait entre les mains était d’une autre taille et donc bien plus dangereuse que la précédente.

Voyant ce qu’il s'apprêtait ainsi à faire, et jugeant sa dangerosité, la portebrume tira en sa direction. Une première fois sur le bloc en question, trop solide pour que la chance puisse y faire quoi que ce soit, en désespoir de cause, elle tenta une approche plus alambiquée en tirant sur le sol avec un angle fermé en espérant que la balle ricoche pour le frapper dans les jambes.

Elle n’eut pas le temps de voir le résultat que soudainement jaillissant des escaliers, une personne commença à lui tirer dessus. Surprit, elle n’eut que le temps de tourner la tête.

Trop tard.

Elle ne l’avait pas vu venir.

Il fallait dire que depuis le départ, elle ne savait pas combien de personnes composait cette escouade et qu’enfin le trou creusé par Jerry ne lui avait jamais permis d’avoir un angle de vue complet sur toute la pièce pour détecter les départs. Enfin, le refus que faisait le bonhomme avait fort bien couvert son partenaire.

Ainsi, encore une fois alors que les balles fusaient sur elle, la chance ne pouvait rien pour la portbrume. Aucune variable à l’instant présent ne lui permettait d’esquiver des projectiles allant à cette vitesse. Tout juste sa chance lui permit par les circonstances que seul un de ses bras fut traversées de deux balles, l’escalier dans sa position actuelle se trouvant à sa gauche, son bras droit étant alors à l'opposé.

La jeune femme émit alors un cri de douleur, quelques secondes après l’impact le temps que la douleur monte au cerveau à cause de l’adrénaline. Sans lâcher son arme, par réflexe elle se tenait son bras rouge de sang, à genou le menton contre le sol en serrant les dents.

Alors que sans doute le tireur s’apprêtait à la maîtriser, ce fut là que sa chance une énième fois en profita pour agir. Le sol jusqu’ici affaibli avait tenu. Et bien c’était terminé. Le sol sous ses pieds s’effondra et la portebrume chuta à l’étage supérieur. Bien que par réflexe, elle amortit quelque peu sa chute sur les genoux, elle n’était alors pas en état d’avoir un équilibre fiable à cause de sa blessure nouvelle, s’écrasant alors plus ou moins lourdement sur le sol. Heureusement pour elle, les gravats emportés dans sa chute avaient décidé de ne pas lui tomber dessus, mais plutôt à côté d’elle, formant alors une pile qui lui permettait d’être à couvert, bien qu’au vu de son bras en moins, cela risquait de ne pas être suffisant avec l’autre colosse.

Concernant le tireur, si jusqu’ici sa réussite avait été total, sans vraiment le frapper les variables de malchance avait décidé à minima de lui compliquer la tâche pour finir le travail, les dégâts causés par les jets de pierre de Jerry ainsi que ses coups de poings dans les murs ne faisant effet que maintenant pour faire s’effondrer devant lui les portes qu’ouvraient la cage de l’escalier vers l’étage où se trouvait Jerry et Violette, ainsi que l’étage où la portebrume se trouvait précédemment la portebrume. Les accès étant maintenant recouverts de gravats de pierre. Vikram en lui-même n’avait rien pour l’instant, néanmoins à défaut d’être en mesure de traverser les murs comme son camarade, il lui faudrait monter encore un étage plus haut dans l’espoir de trouver un autre escalier pour revenir à son groupe.

Néanmoins malgré tout cela, la situation de Violette était loin d’être toute rose, bien au contraire. Incapable de se relever après sa blessure et sa chute du fait de sa constitution physique qui ne lui permettait pas d’être en mesure de se battre après tant de dégâts. Tout cela face à un type qui n’avait qu’à franchir un tas de gravats d’un bon mètre pour venir lui exploser le crâne d’une main. Elle tenait son arme avec l’énergie du désespoir prête à tirer s’il voyait sa tête surgir.
Mar 15 Aoû - 13:22
« PUTAIN, ENCORE ! » s'écrie Vikram. Pas étonnant, il commence à en avoir marre que cet entrepôt à la con s'effondre tout de suite au moindre tir. Il avait réussi à verrouiller sa cible, mais elle s'est dérobée à son viseur en traversant le sol. Le vétéran sait qu'il l'a touchée, mais est-ce que ce sera suffisant pour la neutraliser ? Coincé devant les gravats, il va devoir faire un détour pour vérifier où en sont ses camarades et son ennemie.

Ce qui isole encore davantage Jerry, ainsi que Clyde, qui s'est relevé péniblement et tremblote sur ses jambes.

« Fais gaffe, elle a encore son flingue, mais elle est neutralisée. On a qu'à la laisser là, t'en penses quoi ? » que Clyde murmure en désignant le monticule de gravats qui s'est éboulé devant le colosse.

Il la voit, elle est derrière, mise à terre mais toujours armée. Ce combat dure vraiment trop longtemps, pense Jérémiah, on galère et on est en train de se fermer des issues en affrontant cette connasse, c'est contre-productif de s'acharner sur elle.

Mais Jerry, il est tracassé. Les quatre guignols qui l'ont précédée se sont fait écraser en deux-deux, y a eu aucun défi.

Mais elle, elle a estimée judicieux de se pointer seule, peut-être parce qu'il y avait pas de renforts disponibles. Elle joue l'ignorante, elle joue le pion, mais son comportement est trop suspect pour que Jérémiah se soit contenté de boire ses paroles. A elle seule, elle leur a fait perdre plus de temps que les quatre autres clampins. Elle est maline et semble bien consciente de ce qui se passe ici, elle manipule la poisse ambiante mieux que ses camarades, c'est pour ça qu'on se retrouve à moitié enterrés sous les gravats avec un mec blessé et l'autre perdu à l'étage. C'est difficile à admettre, mais elle a réussie, seule, à porter un coup notable à l'équipe du Magistère, qui a pourtant scrupuleusement mené son assaut.

Alors, Jérémiah pense que même si elle joue l'ignorante, elle SAIT quelque chose. L'affronter a été trop difficile... C'est pas normal.

« Clyde, monte, va retrouver Vikram. Je vous rejoins après.
- Jerry, qu'est-ce que t'as dans la tête ? C'est pas le moment de la jouer perso, putain !
- Je me charge d'interroger la dame. Vous, faut pas que ça vous ralentisse. Vas-y !
- L'interroger ?! Mais elle dira rien !
- Laisse moi faire. »

Y a un truc avec Jérémiah, c'est que quand il a une idée derrière la tête, un doute, il peut pas se l'enlever. Notre énorme ami est un psychorigide à la tête dure qui hésite pas à mettre les méthodes conventionnelles de côté lorsqu'il croit avoir reniflé une solution à un mystère. Lorsqu'il est tracassé, Jerry est capable de se lancer seul dans l'exploration d'une piste précieuse au détriment du bon fonctionnement de son équipe. Tu peux penser ça comme une faute professionnelle, Jérémiah lui te dira que c'est du perfectionnisme.

Pendant que Clyde se barre vers l'escalier, boîtant à son rythme, Jérémiah s'approche du bloc derrière lequel est étalée son ennemie. Il pourrait le dégager d'une claque et se retrouver face à face avec la femme, pour une confrontation finale qui finirait sur des os brisés, quelques cris et possiblement une balle fichée ici ou là dans Jerry. Mais le colosse veut tenter d'être plus subtil que ça. Une nouvelle fois, il va ouvrir le dialogue.

« Je suis très superstitieux. J'aimerais comprendre pourquoi je nous sens aussi malchanceux ? Tu voudrais pas m'expliquer comment t'as fais s'effondrer ce plafond en une seule balle ? Tu voudrais pas me dire pourquoi tu t'es pointée seule face à mon équipe, et pourquoi pourtant tu t'en tires aussi bien ? »

Elle a pas parlé tout à l'heure, elle parlera pas plus tout de suite. Faut trouver une faiblesse, donner de l'espoir, un espoir crédible. C'est pas une dingo du Cartel, la rapide causette qu'ils ont tapé tout à l'heure prouve qu'elle a conscience de sa place. Le dialogue est compliqué, mais puisque Jérémiah la soupçonne de détenir une clé, il se refuse à la lâcher tout de suite.

« Tu crois que tu survivras combien de temps comme ça, à jouer le clébard du Cartel ? C'est vraiment comme ça que tu crois te protéger ? T'as pas une famille pour qui tu voudrais valoir mieux que ça ?

Si tu collabores avec le Magistère, personne n'en saura rien, mais nous on s'en souviendra.

C'est une opportunité qu'on rencontre qu'une seule fois, dans une vie telle que la tienne.
Si tu me dis non, je me tire, et je te laisse à ta vie de merde. »

Jérémiah ne dit rien de plus. Il attend une réponse, il espère que son interlocutrice n'est pas aussi bornée et têtue que lui ne l'est. Ça ressemble à de nombreuses situations où Jerry tenait une vie entre ses mains, mais a préféré s'en faire un indic, plutôt qu'une malheureuse victime sur un absurde tableau de chasse.

Il est comme ça, le gros Jerry. Il sait arracher des bras, mais aussi tendre une main secourable...
Mer 16 Aoû - 22:32
C’est avec la respiration lourde au point d’expirer et d’inspirer par les bouches que la portebrume tentait de contrôler son rythme cardiaque, toujours au sang au milieu de la salle qu’elle était il y a peu censée fuir. Belle situation compliquée, déjà que le simple fait d’être blessé était problématique, le fait de savoir qu’il y avait un voir deux ennemis à quelques mètres n’était pas pour arranger les choses. Immobile, bien que toujours vigilante même si vacillante, elle tentait sans se relever à travers les sons et les bruits de repérer le positionnement de ses adversaires, l’arme au poing.

Ainsi, elle fut dans un premier temps rassurée de savoir quand le groupe avait l’intention de se tirer pour continuer leur mission de recherche d’elle ne savait quoi. Le cartel était le cartel, mais elle n’avait pas non plus de tempérament particulièrement suicidaire ou fatigué de la vie malgré ses penchants pour les dépressions existentielles et névrotiques décuplés par ses addictions pour l’alcool et quelques drogues. S’ils ne pouvaient pas s’acharner sur elle d’autant qu’au vu des deux belles qu’elle avait dans le bras, elle avait suffisamment de preuves pour prouver que la potentielle prise de la cargaison n’était aucunement sa faute c’était tant mieux.

Malheureusement pour elle, ces espoirs furent rapidement douchés lorsque le colosse se décida malgré tout à l’interroger quitte à se séparer de son groupe qui devait pour l’instant continuer sans lui. Le mot interrogatoire laissa de son côté des sueurs froides à la jeune femme, celui là il pouvait signifier tout et rien à la fois. Mais il pouvait surtout signifier des choses terribles pour elle encore plus quand on savait la réputation qu’avaient les services opalins en la matière d’être bien plus imaginatif en matière de service à la question que les xandriens culturellement trop gentils pour leur propre bien. Surtout que le délire la douleur n’est qu’une information, on peut résister à une séance de torture ça n’existe dans la tête que de ceux qui n’ont jamais connus ce qu’est la véritable douleur. Même avec tout l'entraînement du monde, tu finis nécessairement par parler. Les seuls suppliciés qui ne parlent pas, ce sont ceux qui sont morts avant de parler car le bourreau est incompétent.

Bien qu’il s'approchait étonnement il semblait plus ouvert à la discussion qu’au combat, lui demandant des explications sur toute cette situation avant de lui faire une proposition. A la suite de tout cela, la criminelle restait silencieuse quelques secondes évaluant toutes ses possibilités.

Pouvait-elle refuser de parler avec lui ? Absolument pas, un silence trop prolongé pourrait l’encourager à attaquer, et les chances qu’elle en meure était trop élevée pour être acceptable. Tous les principes avaient leurs limites face à une perspective de mort imminente bien trop proche.

Pouvait-elle mentir ? Par principe non. Une des règles de base quand on était contrebandier, c’était de ne jamais mentir en face d’un policier ou d’un commerçant. Dans la situation où l’on était forcé de répondre, toujours privilégier les demi-vérités aux mensonges les plus construits. La faute aux arts occultes qui faisaient peser obligatoirement le risque de présence d’un liseur de pensée ou d’un détecteur de mensonge sur les criminels.

Elle était contrainte de lui répondre, d’une voix affaiblie à cause de sa blessure et de sa perte de sang.

J’pensais pas… devoir apprendre aux opalins… les arts occultes… Qu’est ce que ça peut être d’autre qu’une… malédiction… à ton avis…

Elle éludait sciemment les procédés techniques du pouvoir, comme son origine entre une capacité de portebrume, un cristal, un nascent ou autre. L’utilisateur du terme malédiction était aussi volontaire histoire d’appuyer le caractère inéluctable de la chose, afin d’éviter de lui donner des mauvaises idées notamment sur le fait de la liquider pour en supprimer les effets. Les malédictions bien souvent survivaient à leurs lanceurs.

Une réponse d’équilibre qui permettait de répondre, sans vraiment tout dire afin de laisser l’interlocuteur dans un flou par prudence.

Elle commença alors à rire difficilement.

Si je voulais me protéger… ça fait bien longtemps que j’m’serais tirée… de cette ville de fils de pute où si t’es pas fils de, t’as que le choix… entre laver la merde que les enculés d’en haut… chie par terre ou vendre de la poudre…

On sentait une haine particulière dans ses propos, une frustration maladroitement contenue. Elle haïssait particulièrement les élites xandriennes au point que sa voix en tremble. C’était loin d’être un cas isolé par ailleurs.

A côté de cela, elle signifiait en revanche que sa loyauté pour le cartel n’était qu’une affaire d’argent. Pas strictement dans un but pécunier puisqu’elle pourrait gagner plus en proposant ses services aux opalins ou à Epistopolis. Elle était rattachée à cette terre malheureusement, pour le meilleur et pour le pire. Elle avait une famille… et surtout c’était son pays. Elle avait beau haïr les nobles et désirer leur offrir un aller simple vers une terreur digne de Robespierre, cela restait sa terre. Ailleurs elle n’était qu’une étrangère. D’autant qu’il semblait avec cette réponse et celle de tout à l’heure montré quelques réticences morales à faire ce qu’elle faisait.

Sinon… pas besoin de venir titiller mon égo ou ma sensi’. Passons pas par quatre chemins… Qu’est ce que tu veux exactement ?

Elle n’avait de base aucune loyauté pour le cartel, le trahir ne lui posait pas plus de soucis que ça. Comme elle n’aurait aucune verve à planter des nobles. Néanmoins, si elle posait cette question, ce n’était pas juste par habitude du marchandage. Si trahir le crime et trahir le noble ne lui posaient pas de soucis, trahir Xandrie c’était différent. Elle aimait son pays au point de ne pas le quitter malgré sa vie de merde, au point d’être une graine de sans-culotte. Et les frontières entre Noble, Crime et Xandrie pouvaient être fines...

Ven 18 Aoû - 9:01
Elle ressent de la haine à l'égard de sa condition, ça peut être exploité. Elle est même ouverte à une collaboration avec Opale et ça c'est une nouvelle vraiment rafraîchissante ! D'habitude, les pouilleux de Xandrie se ferment à toute proposition de la Ville-Lumière, et aiment l'accuser d'être la source de toute la misère du monde.

Elle n'aime décidément pas sa vie. Dommage pour elle, mais cool pour Jerry. Y a quelque chose à travailler, pense Jérémiah, Heureusement que je suis tombée dessus avant la Révolution, hein ? On va essayer de transformer ce ressenti en quelque chose de constructif. Sinon, y a moyen que je la retrouve dans quelques années impliquée sur un attentat à la bombe ou sur un surinage de noble dans une ruelle sombre, celle-là.

« Connaître en avance les plans du Cartel et en savoir plus sur leurs capacités. Tu pourrais nous aider là-dedans... plus tard.
On investit beaucoup dans nos indics fiables. On peut donner de l'argent, des infos. De la protection, si nécessaire. »

Oh oui, le Magi prend soin de ses taupes chéries, elles sont si douces et précieuses ! Y a rien de plus important que l'information, c'est grâce à elle que tu évites de te péter les dents sur des missions impossibles. Une taupe, même très bas placée dans la hiérarchie, va faire une énorme différence entre un succès et un fiasco sur une opération de ce genre, sauver des dizaines de vies et épargner des crises de nerfs. S'ils avaient pu savoir en avance quel pouvoir ils auraient à affronter aujourd'hui, les agents du Magi auraient pu transformer cette pénible tempête en douce brise.

Mais le Magi' peine à récolter des informations sur ces Cartels. Ils savent rester opaques, et font suffisamment peur pour dissuader leurs soldats de collaborer avec les autorités. Rares sont ceux qui embrassent ce risque, malgré tous les avantages que ça offre d'avoir le Magistère dans son carnet d'adresse. Cette femme pourrait offrir un petit coup d'oeil dans leurs business mystiques. Tout est bon à prendre, même la collaboration d'un grouillot de base. Mais est-elle vraiment un grouillot ? Est-ce qu'elle serait fiable sur le long terme ? Voyons comment elle réagit à cette proposition de job avant de juger.

Et voyons tout de suite si elle est VRAIMENT prête à se montrer gentille avec notre gros Jerry.

« ... pour l'instant, tu dois me parler de cette malédiction.
On peut l'arrêter ? L'utiliser contre le Cartel ?
C'est un cristal, un portebrume ? Dis moi tout. »

Jérémiah commence à balancer sans ciller des termes techniques, il suppose qu'un Cartel spécialisé dans le recel mystique saura de quoi on parle. Mais y a pas que ça. Celle-là, particulièrement, elle a l'air bien au courant de ce qui se trame. Elle pourrait même avoir un rapport direct avec cette force occulte. Un affrontement trop long, trop difficile, c'est vraiment suspect. Moins poissarde que ses collègues...

Jérémiah n'a jamais assisté à ce genre de phénomène, t'as beau dédier ta vie aux anomalies de la Brume et à en être une toi-même, tu continueras d'être surpris chaque jour que les Douze font. Il y a un pouvoir ici qui trafique les probabilités, ça te touille le cerveau quand tu te demandes trop fort comment ça peut marcher. Est-ce que ça amplifie localement le chaos, ce qui expliquerait pourquoi il se passe rien quand on limite le bordel qu'on provoque ? Ça manipulerait l'entropie, une des lois les plus basiques de notre univers ? Le Magi adorerait disséquer une telle monstruosité.

Faut l'identifier, et si on peut, repartir avec. On rentrerait pas bredouille, au moins. Parce que vois-tu, notre promenade commence à dégénérer.

Car là-derrière, dans le grand hangar, se tarissent petit à petit les hurlements des soldats et des flingues. Ça peut vouloir dire qu'une seule chose : les xandriens se sont fait laminer, alors ils se replient en posture défensive, ou pire, sonnent la retraite. Le gros des troupes du Cartel risque de revenir dans les bureaux en renfort, ce qui signerait un échec, rare mais cuisant, pour l'escouade d'élite du Magi'.

L'instant est décisif, on dirait. Si le porteur de la malédiction se montre pas, on a plus qu'à nous-mêmes nous replier et à rentrer chez nous chialer un coup pour ce mois de boulot perdu. Jérémiah serre les dents à cette idée, il serre les dents à s'en faire pisser les gencives.
Sam 19 Aoû - 17:57
Heureusement pour Jerry, la haine qu’avait Violette pour les élites xandriennes était bien supérieure à tout le mépris qu’elle pouvait avoir vis-à-vis d’Opale responsable d’une certaine manière des nombreux problèmes du pays. Mais la portebrume était d’une nature bien trop cynique pour pleinement en vouloir au magistère qui ne faisait qu’après tout qu’effectuer ce qui était la logique d’un Etat. Dans cette situation à ses yeux, celui qu’il fallait critiquer, ce n’était pas le fort, qui agissait comme un Etat devait le faire dans l’intérêt de sa population et non de celles des autres, non le responsable était le faible incapable de prendre ses responsabilités en tant qu’Etat. La jeune femme n’avait aucun problème de fond avec tout ce qui tenait du darwinisme social ou d’une vision benthamienne du monde.

Qui était coupable ? Moralement Opale. Politiquement Xandrie. Car en matière de politique, l’absence de moralité est inscrite dans les règles du jeu, pas la bêtise.

De son côté, Violette restait silencieuse, écoutant sagement les paroles de l’agent spécial, bien que son regard et son attention vacillaient un peu de temps à autre. L’obligeant à s’efforcer de rester en alerte, heureusement camouflée dans ses divagations par le tas de gravas qui la séparait de son ennemi.

Donner des infos sur le cartel. Hum, quelque chose de bien risqué. Il fallait être très prudent lorsque l’on commençait à vendre des informations pour éviter que le recoupage de fuite de ne pointe directement sur soi. En clair, les risques étaient loin d’être minimes, pour elle-même et pour tous ceux qu’elle connaissait. Malgré tout, elle n’avait malgré tout pas vraiment envie de dire non, car il y avait là une opportunité en or de faire quelque chose qu’elle ne pouvait effectuer par elle même qu’importe la richesse que le trafic pouvait lui rapporter. Oh, ca riche, elle l’était par rapport à la plupart des Xandriens, le cartel payait très bien et ses primes étaient multipliés par sa nature de portebrume qui en faisait un élément essentiel qu’importe sa volonté. Elle n’avait donc pas vraiment besoin d’argent en lui-même, tout du moins il ne valait pas ce genre de prise de risque, surtout que cela ne l'intéressait pas. L’argent servait surtout à sa famille bien que ce combat lui signifiait à quel point elle devrait investir sur des cristaux ou des nascents dans le futur.

Mais qu’importe sa fortune noire, il y avait quelque chose que l’argent ne pouvait pas acheter à Xandrie. C’était un véritable avenir dans une société de corporatisme et de pouvoir nobiliaire. Si Opale et Epistopoli étaient les terres de la corruption, alors Xandrie, elle, était l’incarnation sur terre du népotisme. Cela faisait bien longtemps qu’elle voulait sortir les siens des bidonvilles, mais l’argent ne suffisait pas. Une manne de fond suspect serait automatiquement détectée par le guet. Il leur fallait avoir un véritable emploi, ou la possibilité d’accéder à une véritable éducation. Malheureusement, la liberté économique n’était pas le point fort de Xandrie où tout était monopolisé par des Guildes plus prompts à défendre les intérêts de leurs membres par un numerus clausus à l’entrée des professions qu’à assurer la liberté de tous à accéder au métier.

On peut obtenir beaucoup d’argent avec le pouvoir. Mais peu de pouvoir avec beaucoup d’argent. Une phrase cruellement véridique.

Elle-même ne pouvait pas faire grand-chose à ce sujet, mais Opale… peut être.

Pendant ce temps, l’opalin continuait, désirant plus d’information sur ce fameux pouvoir qui les avait tant fait souffrir. La portebrume resta dans un premier temps silencieuse, réfléchissant à ce qu’elle devait et pouvait bien dire. Le fait de trop blablater sur ses propres capacités n’étaient de toute évidence pas une bonne idée, néanmoins il n’avait pas l’air de connaître le fonctionnement de la fortune donc sans doute n’oserait il pas prendre des actions risquées, même si elle en parlait par peur qu’elle ne fournisse que des informations parcellaires.

D’un autre côté, elle ne pouvait pas non plus vraiment rien dire, car elle comprenait assez bien les intentions derrière cette question. Il ne souhaitait pas seulement comprendre le mal qui le frappait, mais analyser si elle était de bonne volonté avec lui dans l’arrangement qu’il lui proposait.

… Je suis une portebrume…

Inutile de mentir. Cela ne changeait rien à sa situation, s’il avait prévu de la tuer, il le ferait quand même. S’il ne l’avait pas prévu, il y réfléchirait à deux fois. Et de toute façon, en admettant que sa proposition était sincère, il finirait par s’en rendre compte et comprendre qu’elle lui avait caché une information aussi grosse.

… D’aucuns appellerait ça… le pouvoir de se rendre chanceux… et les autres malchanceux. Mais bon… Opale c’est des scientifiques… la chance ça n’existe pas vraiment… C’est juste une manipulation des degrés de liberté… de systèmes physiques et mathématiques à mon avantage… C’est juste rare parce que… la plupart de ses utilisateurs pensent que la chance… existe vraiment… et sont incapables de l’utiliser pour autre chose que gagner dans des maisons de jeu… et poser des malédictions…

Elle était l’une des rares qui l’utilisait pour se battre. Tout cela était sans doute lié à son attrait naturel pour les sciences. Malheureusement elle était née au mauvais endroit pour avoir ce genre d'intérêt.

Ca s’arrête pas… c’est passif… Et ça vise tout le monde sans distinction. Bien que grâce à vous j’viens de comprendre… comment forcer les choses.

Bien que dans sa situation, elle n’avait pas encore pleinement eu le temps de réaliser, c’était pour sa volonté personnelle de fuir le tireur que le sol s’était dérobé sous ses pieds. Une action de probabilité pour la première consciente, le premier pas vers son pouvoir vivifié.

Y a simplement des gens… qui savent optimiser la diminution des risques face au mauvais œil… et d’autre sans esprit d’analyse qui sont forts mais oublient… qu’en combat le cerveau est plus important… que les pouvoirs ou les muscles…

Lun 21 Aoû - 12:26
« Quel gâchis. »

C'est la première réaction de Jerry, qui a attentivement écouté toutes les explications de la criminelle. C'est un gâchis plutôt répugnant, oui, car une femme à la fois chanceuse et intelligente aurait été un atout incroyable pour la civilisation, si elle était née dans un endroit lumineux, tel qu'Opale, ce berceau de talents. Alors Jérémiah n'a pas pu se retenir d'annoncer le fond de sa pensée. Oui, c'est un effroyable gâchis, que de constater qu'une telle valeur ait pu aller se perdre dans la fosse septique qu'est Xandrie au lieu d'être utile aux honnêtes gens.

Nous avons là une portebrume, une capacité puissante, ainsi que l'intelligence et la curiosité nécessaire pour sortir des sentiers battus et l'optimiser. Quelle tristesse qu'un si intéressant assemblage soit sous le commandement d'un cartel...

« Tu as mieux à foutre que d'aider ces trous du cul à corrompre Xandrie. Et je suis certain que tu en as conscience. »

Veinarde ou pas, elle finira par crever misérablement si elle continue à défier en permanence les pronostics. Manifestement, ses collègues connaissent sa capacité et l'ont utilisé pour fortifier leur entrepôt : il est évident alors que ses supérieurs aussi savent de quoi elle est capable, et ceux-là n'hésiteront pas une seule seconde à lui réserver un trou dans la forêt, s'ils se sentent menacés, ou s'ils flairent la moindre envie de trahison de sa part. Un jour ou l'autre, sa chance se retournera contre elle.

Jérémiah pèse le pour et le contre. Le bon déroulé de la mission exigerait une neutralisation totale de cette femme, une mise hors service afin de finir le travail convenablement et de protéger ses coéquipiers. Mais que fais-tu du long terme ? La mettre dans ma poche pourrait résoudre énormément de problèmes plus tard, pense Jérémiah. Une taupe chanceuse et intelligente : voilà qui serait un sérieux atout pour Opale sur les affaires xandriennes. De stupides nascents explosifs semblent bien dérisoires à côté d'une telle opportunité.

Il faut savoir perdre des batailles pour gagner une guerre.

« Si tu es prête à aider le Magistère, tu seras récompensée en conséquence. La première de ces récompenses, je te la donnerais tout de suite. Je te laisserais continuer ta tâche pour le Cartel. Quitte à ce que ça nous coûte la mission... On verra bien.

Opale prend ou donne, et Opale se souvient de tout. Nous aider pourrait t'amener loin. »

Ce qui compte, pour le Magi', c'est les compétences. Ce qui s'agite dans le cerveau des employés leur importe peu. Des déviants, des sociopathes, des raclures qui font honte à l'espèce humaine, tu en as des dizaines qui circulent comme si de rien n'était dans les couloirs du Magistère, s'acquittant avec zèle du travail qui leur est confié.

Cela vaut aussi pour les indics et les agents dormants répartis à travers le monde. Beaucoup des collaborateurs de Jérémiah sont des gens parfaitement infréquentables, des pourritures fumantes qui auraient fini en geôle à manger leur propre merde, s'ils n'avaient pas eu le bon sens de s'allier à Opale. Ainsi s'est formée la glorieuse Opale : des millions de salopards ont bâtie une cité grâcieuse aux arts et aux sciences lumineuses. Et ainsi est Jerry : un dresseur de parasites, capable de convertir des tiques et des morpions en éléments productifs de la société.

Ne nous mentons pas. Cette femme n'est pas une cause perdue. Au-delà de son puissant pouvoir, elle n'est même pas vraiment dangereuse ! Ironiquement, elle n'est qu'une malchanceuse qui n'a pas su tirer un meilleur parti de la nebula qui rampe dans son âme. De tous les parasites que Jerry a essayé de dompter, elle est l'un des moins menaçants ! L'inspecteur a perçu la haine qui l'anime, et elle n'est pas dirigée contre Opale ; c'est donc une bonne haine.

Et vu l'explication exhaustive qu'elle lui a présenté, on dirait que pour elle, la collaboration est déjà actée.

Oh oui, c'était un gage de bonne foi formidable, car elle met sa vie en danger direct ! L'inspecteur aurait déjà pu illico lui arracher la tête pour vérifier ses dires ! Bien sûr, il n'en fera rien. Elle a marqué des points et gagné la confiance de l'inspecteur. Pour l'instant...

« Si ça t'intéresse vraiment, faudra qu'on se recroise en terrain neutre pour officialiser une collaboration. »

L'agent a développé de nombreuses méthodes pour communiquer avec ses indics sans avoir à les rencontrer physiquement. Mais un première tête-à-tête est souvent inévitable, malgré les risques que ça engendre.

Jérémiah pousse doucement le rocher qui le sépare de sa "complice". A travers son masque de fer, il peut enfin la regarder dans les yeux.

« Je préfère te prévenir. Si tu joues avec moi, je m'en rendrai compte très vite. »
Mer 23 Aoû - 1:27
La portebrume ne put s'empêcher de froncer les sourcils en serrant les dents quand l’opalin commença à parler de gâchis. C’était difficile de savoir comment elle devait le prendre. D’un côté c’était presque gratifiant de savoir qu’on considérait qu’on avait du talent quand toute sa vie on avait été un déchet exploité et coutumier de tous les échecs possibles. De l’autre… qu’il était frustrant de recevoir de la pitié. Ressentir cela chez les autres… Quelle humiliation…

Il n’y avait rien de plus terrible pour l’ego, que de savoir que l’on paraissait pitoyable, surtout quand on savait pertinemment que c’était factuel.

Néanmoins, Violette se gardait bien de commenter tout de suite cela comme elle l’aurait fait dans une autre situation. Quand bien même elle pouvait être impulsive et colérique, elle était encore suffisamment raisonnée pour savoir quand on pouvait être nonchalant et quand on ne le pouvait pas. Inutile d’être provocante de manière inutile.

Elle le laissa donc continuer, gardant une grande attention sur ses gestes et ses déplacements. Histoire de savoir ce qu’il allait faire. Il était possible qu’il cherche à la tuer. Après tout, elle était la source de tout ce malheur pour ses hommes et lui-même. Néanmoins, elle gageait sur la cupidité d’Opale pour se tirer de ce mauvais pas. A force de parcourir le monde pour le cartel, elle avait fini par discerner chez chaque pays, des particularités culturelles qui permettaient de sauver la vie. Xandrie avait son honneur et sa fraternité, Aramila la Foi et la rédemption.. Epis' comme Opale, le désir de saisir chaque opportunité quitte à prendre des risques et à parier. Après tout, c'était le lot de la science et de l’argent. Ces deux choses s’incarnaient dans des systèmes où les plus compétents ne pouvaient pas se permettre d’être lâche face à l’incertitude et d’avoir une vision des choses court-termistes.

Toutefois, quand bien même c’était un pari sur la nature opaline de son ennemi, les choses restaient incertaines. Il pouvait très bien être différent de ses comparses, raison pourquoi elle tenait encore très bien son arme.

Après une petite réflexion, l’agent spécial commença à parler, d’elle-même, du cartel, de sa proposition…

Elle valait mieux que la criminalité ? Et alors ? Elle n’avait aucune envie de quitter son pays pour aller vivre la belle vie en tant que portebrume dans un pays qui n’était pas le sien et dont elle ne partageait ni la culture ni les dialectes. Elle n’était pas une déracinée ou une citoyenne du monde capable de vivre durablement n’importe où sans problème. Sans compter qu’elle était liée à cette terre par sa famille. Et elle préférait encore être une criminelle vendant de la drogue plutôt que d’être une chienne à la solde des élites xandriennes à cause de ses pouvoirs. Jamais elle n’accordait la moindre aide à ces sales fils de pute.

Oui, elle avait parfaitement conscience qu’elle pourrait être bien mieux… si elle abandonnait certaines choses, certaines personnes, certains principes dont elle ne pouvait se décharger. Au final, quand bien même c’était par dépit, elle estimait aujourd’hui être dans la moins pire des places qu’elle pouvait obtenir.

La suite la fit toutefois plus réfléchir. Il lui proposait de continuer sa mission quitte à ce qu’il échoue. Cela la surprenait. Il n’avait aucun intérêt à faire ça. Ou alors ce qu’il comptait faire d’elle était plus important que ce qu’il devait rechercher ici. Pourtant si cette cargaison faisait mobiliser à la fois Xandrie et le Magistère, cela signifie que ce qui était transporté était particulièrement important. Certes, avoir des informateurs au sein du cartel devait valoir le coup, mais elle n’était pas non plus une dirigeante capable de lui dire tous les plans cette organisation. Bien au contraire et au vu de sa situation précaire il devait bien s’en rendre. Elle avait l’impression de louper quelque chose. Qu’est ce qu’il lui voulait exactement. Qu’est ce qui pouvait bien valoir l'échec d’une mission importante ?

Malheureusement, elle n’avait pas de moyen de savoir ce qui lui passait derrière la tête.

Alors que l’opalin terminait sur une menace en poussant le rochet pour la regarder, la portebrume se mit ensuite à rire difficilement avant de relever tout aussi difficilement pour faire face sur ses deux pieds au colosse, l’équilibre instable à cause de sa blessure et de sa chute.

Tu peux garder tes menaces… On sait tous comment ça marche… Nul doute que t’as un plan pour tout.

Il n’y avait pas besoin de lui répondre comme quoi elle ne ferait rien. Ce genre de chose n’était que factice. Le monde ne fonctionnait pas sur la base des serments, de l’honneur ou de la loyauté mais uniquement à travers des rapports de force et de dépendance. De la même manière qu’il n’hésiterait sans doute pas à la planter le jour où elle n’est plus utile ou exploitable, elle n’aurait aucune hésitation à en faire de même si c’était dans son intérêt après analyse du ratio entre les risques et les bénéfices.

Le seul moyen, en dehors de la force de trouver comment empêcher les gens de te trahir c’était de les rendre dépendants à ta personne en appuyant sur leurs faiblesses. Pour certains c’était psychologique, comme l’honneur, le nationalisme ou la vengeance. Pour d'autres c’était financier… Politique… Il était plus que probable que dès que cette histoire serait terminée, il fouillerait toute sa vie pour trouver en elle une raison pour laquelle elle ne pourrait jamais le trahir à moins de sacrifier quelque chose de terrible, ce qui n’était pas fondamentalement compliqué. Elle-même se doutait de ce qui pouvait ressortir de ce genre d’enquête. C’était d’ailleurs sans doute une des raisons de pourquoi il voulait rediscuter plus tard, il n’avait pas eu le temps de faire ses dossiers pour savoir comment la tenir en laisse.

Va pour. Ca me va comme ça tant que ça demande pas de parcourir des kilomètres en dehors de Xandrie.

C’était risqué, mais c’était dans son intérêt d’accepter plutôt que de crever ici ou d’être fiché à jamais par le magistère. Et d’une certaine manière les opalins n’avaient ils pas raison en considérant que les risques valaient les opportunités. Cela faisait bien longtemps qu’elle n’avait pas marché de son plein gré dans une incertitude. Mais… il fallait avouer qu’en-dehors d’une analyse purement rationnelle, elle était également intriguée parce que le Magistère pouvait lui proposer. Presque un espoir alors qu’elle avait déjà sombré depuis longtemps dans le fatalisme de sa vie de merde.

Continuez votre mission si vous le désirez. Même si à mon avis vous perdez votre temps.

Trouver une aiguille dans une botte de foin était déjà difficile. La trouver frappée par la malchance l’était encore plus. Sans compter que si leur cargaison était dangereuse, il y avait le risque que ça leur pète entre les doigts.
Sam 26 Aoû - 2:51
Trop tard pour inverser la vapeur, les xandriens se sont probablement déjà repliés. Ce que les agents du Magistère font, depuis une dizaine de minutes, c'est perdre du temps et limiter la casse. La seule perspective de victoire serait de pousser ces raclures du cartel à sonner la retraite. Mais il devient difficile d'y croire. Lâchés par les xandriens et livrés à eux-mêmes dans ce labyrinthe, combien d'agents risqueront de perdre leur vie dans le combat ? Ne nous leurrons pas, les jeux sont faits. Le Magistère a joué de malchance : pour une fois, cette excuse sera justifiable auprès de la hiérarchie.

Pour le Magistère, la perte du moindre agent est inacceptable, qui plus est dans une situation aussi ridicule ! Ce ne sont pas des ressources qu'on sacrifie avec légèreté comme un policier du Guet. C'est qu'ils coûtent formidablement chers à former et à entretenir, en temps et en astras. Un agent perdu, c'est un monde de possibilités qui s'envolent ! Le scénario prévu pour cet assaut était une promenade de santé se finissant par un retour glorieux à Opale ce soir, les bras chargés de cadeaux. A aucun moment il n'aurait du être question d'agents à terre, de forces occultes incontrôlables et d'une débâcle absolue des brigades xandriennes.

Il faut se replier et envisager la suite.

Un manque de coordination stratégique avec les flics. Leur capitaine qu'était pas enclin à collaborer avec nous. L'impossibilité de lancer une reconnaissance avant de lancer l'assaut. Et au final, c'est surtout parce qu'il manquait une info qu'on en est là, pense Jerry. Cette info est là, sous mes yeux, et peut-être qu'elle ne nous posera plus jamais problèmes. C'est la morale qu'on tire de ce genre d'histoires... Si tu rencontres un problème, essaye de le transformer en solution.

Et si le problème résiste malgré tout, détruis-le.

Jérémiah sort un minuscule carré de papier de sa veste, sur lequel il griffonne une série de nombres. Ensuite, il le tend à son Problème.

« Tu te rendras à ces coordonnées samedi prochain. Je serai là à 14h tapantes, et t'attendrai une dizaine de minutes.
C'est dans la banlieue de Xandrie. Evidemment, tu viendras seule. Tu peux venir armée, si ça te rassure, mais évite d'attirer l'attention sur toi en venant... »

Des recommandations de base qu'il vaut toujours mieux préciser.

Les coordonnées désignent un terrain vague en hauteur dans les collines, accessible à pied ou en moto. L'endroit offre un panorama époustouflant sur les bidonvilles de Xandrie, peut-être que la dame sera ravie de voir sa maison de là-haut ?

En tout cas c'est un lieu désert, idéal pour fréquenter des infréquentables, idéal également pour y disperser des morceaux de cadavres encombrants. Ce terrain vague, c'est largement l'un des lieux préférés de Jérémiah à Xandrie, ex-aequo avec un bar aramilien du centre-ville qu'il aime bien (mais pour d'autres raisons).

Une petite enquête préliminaire sera menée en amont de ce rendez-vous. Trouver l'identité de cette femme aux caractéristiques physiques particulières, et aux pouvoirs si utiles. S'assurer qu'elle ne cache pas d'antécédents critiques. Chercher quelques points de pression. En résumé, monter un dossier sérieux. Elle ne bosse pas pour le cartel par gaieté de coeur, ni par cupidité, elle doit surement avoir des proches pour lesquels elle accepte de tremper dans ces combines sordides.

Peut-être que ces proches pourraient servir de garantie, si cette criminelle venait à perdre en motivation durant sa collaboration avec le Magistère ?

Ne t'y méprends pas, le cartel et le Magistère se ressemblent en certaines de leurs méthodes. L'agent assassine, torture et menace, ça fait partie de ses compétences professionnelles : Jerry c'est un technicien et un technicien doit pouvoir compter sur une boîte à outils bien complète ! Mais le Magistère n'utilise pas ces outils détestables à la légère ! Ce sont les derniers recours tragiques lorsque tous les autres protocoles ont échoué. Ils ne servent qu'à protéger les intérêts de la science opaline et donc du peuple opalin lui-même.

La cause de Jérémiah est brillante, telle la nuit opaline. Tous les moyens sont valides pour la défendre.
Jerry invite cette femme perdue à aider la belle Opale.
Le fait de monter un dossier dans son dos pour éventuellement menacer sa famille si besoin est, ça n'enlève rien à la beauté, ni à la sincérité de cette invitation. Après tout, si elle est de bonne foi, elle n'a aucun souci à se faire : elle ne percevra alors que la face bienveillante et rédemptrice d'Opale !

« Nous parlerons des détails. Si je ne me suis pas fait trouer par ta faute d'ici-là, du moins »

Bien qu'imperceptible, c'est l'un des rares traits d'humour que Jerry est capable de livrer. Une microscopique familiarité qui prouve qu'une relation de confiance est peut-être en train de naître.
S'apprêtant à poursuivre et à conclure sa mission, l'inspecteur délivre un dernier cadeau à sa, peut-être, nouvelle indic. Il lui offre son surnom.

« On m'appelle Jerry. »

Par cette confession, l'agent l'invite à lui répondre par son propre nom. Si elle refuse, il finira bien par trouver son identité en utilisant d'autres sources. Mais c'est tout de même plus convivial de le faire ici, non ?
Mar 29 Aoû - 4:21
Debout bien qu’aussi chancelante qu’un roseau frappé continuellement par des vents, la portebrume usait de toute sa concentration pour pour comprendre les propos de l’opalin, son bras devenant de plus en plus douloureux à mesure que l'adrénaline qui jusqu’ici avait inhibé partiellement ces récepteurs sensorielles commençaient à se diluer de nouveau à mesure que s’éloignait le péril imminent, le danger mortel incarné par le magistère et son escouade.

Jerry lui tendit un papier qu’elle prit de bonne grâce en galérant quelque peu car devant cesser d’appuyer sur sa blessure, ce qui à défaut d’être utile avait une utilité psychologique. Heureusement, ce n’était rien de grave et de mortel par chance, souffrance tout de même.

Lisant d’un regard fatigué et presque vitreux le lieu alors que l’opalin lui donnait une heure, Violette tentait de réfléchir. Elle connaissait cet endroit de nom, mais elle n’y était jamais vraiment allée. Xandrie était une grande ville, probablement la plus grande en termes de superficie à cause de sa démographie et de sa propension à un étalement urbain anarchique à cause de sa politique de cohérence urbanistique inexistante.

Il avait bien choisi l’endroit, un terrain vague n’avait que peu de variable sur lesquels la fortune pouvait facilement s’appliquer. Si ce n’était le désavantage évident qu’était ce terrain pour elle, le reste n’était pas surprenant et plutôt logique. La portebrume hocha alors la tête pour signifier son acceptation.

D’acc’.... J’y serais.

Évidemment qu’elle serait armée. C’était la moindre des choses. Il y avait une règle immuable pour tous ceux qui voulaient survivre dans ce monde. Il valait mieux trop prévoir, que de ne pas assez prévoir.

Alors qu’il tentait une touche d’humeur, la criminelle de son côté ne riait pas sans doute à cause des deux balles dans son bras, se contentant d’un léger sourire crispée un brin moqueur.

Eh… Si tu te fais soulever par des troufions pouilleux, c’est moins honteux de plus être là...

Blague ou pas, on ne le savait pas trop. Elle-même ne le savait pas, trop fatiguée pour réfléchir à cela. Techniquement c’est ce qui était arrivé ou était en passe d’arrivée, du moins officiellement.

Ne s’éternisant pas sur le sujet, la criminelle donnait rapidement son nom. Inutile de le faire languir. De toute façon il le serait. La portebrume n’était pas une personne discrète. Qui pouvait l’être à Xandrie de toute façon ? Ce n’était pas Espistopoli où à travers la culture individualiste de la ville il était possible de vivre en anonyme. Difficile était la discrétion dans une société de guilde, de corporation et de quartier ou tout était affaire de réseau et de groupe d'intérêt soudé sur le plan légal et illégal.

Violette. Violette Helmael…

Si Jerry n’avait pas plus de chose à lui dire, la portebrume le laisserait alors continuer sa mission ou sa retraite avant de s’effondrer sur le sol pour reprendre sa respiration au moment où ce dernier n’était plus visible. Attendant qu’une personne vienne l’extraire pour l’emmener voir un médecin discret. Le fait qu’on vienne l’aider était certain. Elle était une portebrume, et au vu de la démonstration de force présente une puissance trop utile pour la perdre pour rien.

Il ne lui restait qu’à attendre.