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Des paillettes sur les arbres

Des paillettes sur les arbres Brandw10
Mar 19 Juil - 18:37
TU me dégoûte. Dès que je t’ai vu ! En fait non, c’est pas ça. Tu me fais flipper. J’en ai vu des trucs bizarre mais alors des comme toi, y’en a pas deux. Ta tronche va me filer des cauchemars, pire que ceux que je fais d’habitude ! Ceux-là, c’est que dalle, ça fait tellement d’années maintenant, j’me réveille plus en sursaut. Mais toi mon gars, j’imagine déjà la gueule des visions nocturnes, bah, si j’pouvais me cogner la tronche dans un arbre centenaire pour t’oublier, j’hésiterai même pas, mais à mon âge, je risque juste de crever. Et je veux surtout pas que la dernière chose que je vois, ça soit toi.

C’est quand même vachement drôle, parce que tu vois, moi c’qui m’amène ici, c’est justement le cauchemardesque. Je veux en voir, mes yeux ont faim, tu sais. Mais toi, tu dénote trop, y’a un truc qui me revient pas. J’suis venu ici pour voir si ces arbres recèlent vraiment des machins intéressants, où si les gueux ont appelé cette forêt comme ça parce qu’ils flippent dès qu’un voisin lâche une caisse un peu plus bruyante que la normale. Jusqu’ici, mon petit monstre, c’est la théorie la plus probable ! Ça pue la merde ici, laisse moi te le dire.

J’me suis fait chier à rejoindre une caravane pour atterrir jusqu’ici, les gens ont passé le voyage à m’éviter, soit disant mon odeur est pas supportable. Ça m’arrange, je pouvais pas les blairer ces cons, mais t’aurais dû voir leurs têtes quand je leur ai dit que je descendais ici, en pleine nuit. Putain, que je me suis marré ! Soit-disant, j’suis taré. Que y’a qu’un taré pour se balader ici alors que la lune est bien visible dans le ciel, que c’est plein à craquer de malédiction ici ! Alors je te dis pas, j’ai pressé le pas, moi je veux les voir, les malédictions, je veux parler avec !

Je me demande si je peux parler avec toi. J’espère, parce que tu m’as l’air sacrément maudit mon pote. Tu veux que je te raconte la vision d’horreur que ça m’a filé ? J’étais pénard, entrain d’être paumé au milieu de ces arbres centenaires, j’avais envie de pisser alors ni une ni deux, j’sors l’engin et je fais mon affaire. C’est là que je t’ai vu, au loin, entre deux arbres, les lucioles verdâtres te tournaient autour, comme si l’endroit voulait que je regarde vers toi, fallait que j’te vois. Ta grande gueule qui dépasse du bois, ton corps émet des lumières qui me filent la nausée, y’a du rose parmi les couleurs, tu n’as rien de naturel, mais mon gros pif me dit que t’as rien de trop surnaturel non plus. Pas sûr que les esprits brillent en rose pétant.

Tu n’es pas un esprit, hein ?



Ça tire. Mes précieuse copines me triturent la barbe. Je crois qu’elles me disent NON. Tu n’es pas un esprit ! Les esprits, ces petites elles connaissent merveilleusement bien. Ces minuscules créatures du vide sont en contact permanent avec la Mort. T’es pas un esprit. Ton museau est-il là pour faire jolie ? Tu peux sentir les superbes effluves du monde réel ? Si j’en largue une, tu vas réagir ? Je marche à quelques mètres derrière toi, tu t’es toujours pas retourné. J’pense pourtant dauber à des kilomètres à la ronde. Tu marches lentement, j’peux te rattraper aisément. Tellement que t’es maintenant à portée de caillasse. Si t’es pas un esprit, j’peux te caillasser, et j’en ai un peu marre de jouer aux devinettes. Voilà, ce roc fera l’affaire, bien lourd, belle forme, c’est important pour le l’aérodynamisme, tu sais.

BAM.

Raté. Mon précieux caillou s’est planté dans l’arbre juste à côté de ton corps étrange. Tu te retourne, mais pas vers ce bon vieux Tormog ! Tant pis, quand la violence rate, reste plus qu’à utiliser la solution de secours, mon dernier recours. La diplomatie.

« Eh oh, du con, tu parles ? »
Ven 29 Juil - 22:54
Quelle ne fut pas ma surprise ! Je pars à la cueillette de mes habituelles plantes organiques, celles qui n'émergent des profondeurs que lorsque la Lune les appelle, celles qui chantent d'adorables blasphèmes la nuit tombée. Bref, je cherche mes amies plantes, et voilà donc que je tombe sur un horrible petit farfadet ? On marche sur la tête... Tu viens faire tes courses et tu tombes sur des farfadets puants, perdus dans la forêt ? Mais qu'est-ce que tu veux que j'en foute, moi, de ce farfadet ? Ce serait un merveilleux challenge de retravailler son affreux corps à la recherche d'harmonie.

Qu'il est laid ! Il ressemble à mes brouillons, ceux qui finissaient leur vie dans des cirques à quémander des cacahuètes aux gros lards de la Haute-Ville. Aujourd'hui mon Art s'est grandement raffiné au point de commencer à toucher, timidement, la Perfection. Mais au début, mes peintures de Chair et de Brume ressemblaient parfois à d'horribles petits farfadets de cet acabit.

<< Bien sûr que je parle >>

Note qu'habituellement, mes sessions cueillettes sont réalisées dans mon plus simple appareil, ni peignoir, ni pantalon, uniquement ma fabuleuse chair, et la lumière lunaire pour en sublimer chaque relief. Les risques de rencontrer une entité consciente perturbée par la nudité de Ratamahatta sont normalement extrêmement minces. Aujourd'hui, j'ai mis un pantalon. Mais demain, ou après-demain ? Il n'y aura plus de pantalon, et il n'y aura plus non plus de farfadets.

Il est TELLEMENT laid. Éclairé par la Lune, ce petit bonhomme amusant paraît extrêmement petit, ridicule et vraiment pas beau, pas beau du tout.

Je ne vais pas te mentir, je suis shooté, shooté au mucus rose surnaturel : j'ai pour ainsi dire remplacé mon sang par du mucus rose surnaturel, c'était pour catapulter mon esprit dans l'univers des poètes mélancoliques, c'est la seule manière de mettre en confiance les plantes organiques nocturnes.

<< Tu es formidablement laid. Magnifiquement laid >>

Me laisseras-tu t'approcher ? Je ne me satisfais plus des contours grossiers que la Lune me laisse entrapercevoir. Je veux profiter de l'expérience entière, l'expérience totale de la laideur, je veux coller mes naseaux à ta peau puis vomir la salade de mucus rose surnaturel que j'ai ingéré cet après-midi avant de partir.

Il me hurle des insultes que je relève même pas.

Je prends l'initiative d'avancer vers lui, dansant comme toujours, suivant le tempo dicté par mon juke-box interne. Il me jette d'autres caillasses. L'une d'entre elle vient se ficher dans mon mollet, je manque de me rétamer mais avec grâce je retombe sur mon pied le plus habile (ma main droite)

<< As-tu subi des accidents pour devenir aussi laid ? Est-ce un don naturel ? >>

La beauté n'existe que par contraste avec le laid ! Ton existence est nécessaire, et disons-le, sublime. Parce qu'à force de vivre dans mon étroit microcosme, dans lequel je travaille les millions de facettes de la beauté et de la perfection, j'oublie qu'en dehors le Laid règne en maître. Ta laideur est HYPNOTISANTE. Depuis que mon oeil s'est posé sur toi, il est resté tout simplement collé. Tu es tout simplement un pro de la laideur, et ça me réconforte de savoir qu'il en existe encore. Tu tiens un bon concept, en étant aussi petit, laid et répugnant. Trèèès intriguant. Tu as volé les yeux de Ratamahatta !

A bien y regarder, je crois desceller quelques vagues s'agitant dans sa barbe. Je sais pas si c'est parce qu'il essaye de me parler mais que ses sons se perdent dans ses poils... ou si parce que sa barbe est toute aussi vivante que lui... On va passer une nuit étonnante, toi et moi... Tu pars cueillir des plantes, mais voilà, tu tombes sur un farfadet... La Brume est décidément pleine de surprises...

Je reste planté devant lui à une poignée de mètres, je ne voudrais pas l'effrayer, je ne voudrais pas le voir se carapater dans les buissons, brusquant ses toutes petites jambes. Je reste immobile, dans la position dite "du cygne", idéale pour appâter les plantes organiques entre Minuit et deux heures du matin.

<< Veux-tu du mucus rose ? >>

Proposé poliment, peut-être baissera-t-il sa garde ?
Mer 28 Sep - 11:07
Je les sens ! Mes copines frétillent ! Elles ont faim. Ou soif. Je sens James qui se balance entre mes poils, ce coquin veut grimper sur ce monstre ! Le piquer peut-être, il m’a souvent piqué, James. Pour me rappeler qu’il existe, que moi aussi j’existe encore ! J’suis croulant mais pas mort, je sens encore la douleur, c’est toujours bon signe ça. J’ai prévu d’accueillir la mort comme un vieux pote, pas comme mes anciens potes que j’ai PU surriner dans le dos non non, comme un vrai copain que j’serai content de retrouver. Imagine un peu, la dernière frontière, ça doit être quelque chose à voir. La réponse à plein d’questions. Mais j’suis pas encore prêt, en tout cas, j’veux pas crever comme ça. Pas sous les sabots de ça. Mes copines sont formelles, ça pue la fiante. Mes anti-corps sont surpuissants, mais je veux pas risque de chopper une coulante, ou pire. James a raison de vouloir tâter le terrain.

« C’est une drogue que j’connais pas ? Dis, tu veux voir mes copines ? »

James n’attends pas de réponse, de toute façon, mes araignées ne comprennent pas le langage humain ! Seulement la langue du Vide. Après un saut, v’là ma copine sur ce type flippant, qui me fixe toujours, il m’observe et j’ai presque l’impression qu’il se lèche les babines. Ses yeux brillent, ils valent peut-être cher, si j’ai moyen de les arracher, ça, au marché noir…

Je n’entends plus James, la distance qui nous sépare coupe notre lien sacré ! J’aime pas ça, c’est comme être privé d’un de ses sens. Mes sens encore présents me font dire que la situation est gênante, nous deux, comme des piquets, à se regarder dans le blanc-violâtre des yeux, comme deux cons. Qu’est-ce qu’il est entrain de se dire ? Si il pouvait rentrer dans ma tête, il se demanderait sûrement quoi et détallerait aussi sec. Mais si moi je pouvais rentrer dans sa caboche, qu’est-ce que je verrais ? Dans le noir, comme ça, j’ai du mal à dinstinguer, mais j’crois bien qu’il sourit.

Pac. James est de retour à la maison ! Tu entends ça ? Elle frétille de partout, elle danse ! Le toucher n’est pas fatal. James me susurre des choses dans mon esprit, ce type là a un sang tout particulier. Je me demande ce que je verrai si j’en goute un peu. T’as jamais goûté le sang de tes potes, toi ? James effectue une dernière danse, puis sombre dans les limbes, suspendu à mes poils par un fil microscopique, elle se balance au gré du vent, c’est magnifique ! Mais je dois faire gaffe à pas la faire tomber.

« Bon. BON ! Ma copine t’aime bien, tas de fumier. T’as une gueule à faire peur à voir, mais t’as bon goût ! J’te pardonne tes BASSES critiques sur le physique car tu as RAISON. Moi, jamais j’m’abaisserai à ça, tête de fion. »

Je me bouche une narine et j’souffle un coup pour évacuer, on se les gèle ici.

« Toi aussi tu viens rencontrer la Mort et le Vide ici ? »
Jeu 16 Fév - 18:48
« Eh bien, j'ai déjà la Mort et le Vide dans ma maison ! Alors ici, je viens plutôt cueillir ce qui me manque »

Ce petit gros héberge des araignées dans sa barbe. Ça me fait fondre, tellement c'est mignon, et je peux te dire que si je mesurais trois ou quatre centimètres j'hésiterais pas à me faufiler là-dedans non plus, malheureusement je mesure deux bons mètres et c'est handicapant lorsqu'il s'agit de rentrer dans les gens.

Et puis si je plais à ses araignées, si elles me trouvent beau comme il se doit, eh bien alors allons-y ? Oui, allons-y. Toi, moi, tes araignées, la nuit, je crois qu'on a tout les ingrédients ?

« Je cherche des plantes organiques, ce sont des petits champignons de viande qui sortent de terre la nuit tombée

On les entend parfois chanter, et si on est dans le bon mood, elles peuvent nous laisser danser avec elles

Après avoir dansé avec elles, je leur arrache la tête, je les broie et les bouffe, ça me fait planer, ça me fait rigoler, ça fait germer en moi des idées révolutionnaires, ça me fait me chier dessus, puis tout redevient normal. Une expérience purificatrice

Veux-tu m'aider à les trouver, petit gros ? »

C'est, encore une fois, un sacré délire que de tomber sur un gentil nabot en pleine nuit dans ma forêt ! Hors de question que je le lâche. D'ailleurs, mes yeux le lâchent pas, et mon sourire continue à se propager dans ma gueule, à tel point qu'il commence à envahir mes oreilles, et que plus rien ne retient ma salive de s'écouler abondamment dans la nature.

« Ecoute, voilà ce qu'on va faire : je vais gambader dans la forêt, et toi tu vas me suivre sur tes petits pieds. Si je vois mes champis amusants, je m'arrête et je te fais goûter. A contrario, si toi tu vois un machin intéressant sur la route (autre que toi-même), tu t'arrêtes et tu me fais goûter. D'acc ? »

J'ai en tête un conte, un conte qui parle d'un petit nain hideux habité par des insectes croustillants, et de son pote qui est un très bel équidé à plumes. C'est un conte post-exotique qui s'affranchit des carcans de la littérature classique, car ces deux personnages ne correspondent pas aux canons traditionnels de beauté (sauf l'équidé, qui est excessivement beau). Bref, ces deux personnages deviennent bizarrement très proches, puis se lancent dans un génocide végétal dans la forêt, avant de commettre de nombreux rituels, loin de la civilisation, de la décence, de la pudeur et de ces niaiseries là. Le conte se termine sur la libération des coeurs, et sur la fin des Temps.

Ce conte n'existe en fait pas : car nous sommes en train de l'écrire ! C'est ça l'astuce.