Jeu 5 Jan - 3:13
Il ne te restera plus que tes ailes.
Son perchoir s’élève de plusieurs mètres vers le ciel. Alae s’y tient accroupi sur l’un des bords, penché vers la terre ferme. Il sourit au vertige tandis qu’une bourrasque court sur la face verticale de l’immense stèle et vient fouetter son visage et faire virevolter ses mèches pâles. Il lève le menton en fermant les yeux et laisse le vent emporter l’écho d’un souvenir vers les quelques nuages immaculés flottant loin au-dessus de sa tête.
Il y a longtemps qu’il a goûté cette légèreté. C’est peut-être le repos des derniers jours, le temps accordé à se défaire de ses doutes et de la poussière qui n’en finit jamais de retomber, lui semble-t-il. Peu importe la raison. Ici, maintenant, Alae est occupé.
Il se dresse sur ses jambes et recule à l’extrémité opposée du sommet du cénotaphe. Ses ailes dressées derrière lui, appuyées l’une contre l’autre, il recule son pied gauche, incline son corps vers l’avant et à la prochaine bourrasque, s’élance à toutes jambes. Tête première, Alae plonge dans le vide. Le sol se rapproche à une vitesse étourdissante, mais il tient bon, et ce n’est qu’au tout dernier instant, juste avant de s’écraser, qu’il tend brusquement ses ailes et, en un mouvement étonnamment gracile, dessine de son corps une courbe qui lui permet de doucement, en contrôle, retomber sur ses deux pieds.
Des perles de sueur glissent sur ses tempes et le long de son dos. Satisfait de sa séance, Alae empoigne d’une main son lourd manteau de fourrure laissé quelques heures plus tôt au pied du monument. Son maigre bagage récupéré, il se tourne vers la forêt qui le cerne et d’un pas sûr, se fraie un chemin entre les arbres, enveloppé de son aura.
Le clapotis d’un cours d’eau à proximité le guide. Il ne saurait dire combien de temps il marche. C’est néanmoins l’esprit dégagé et le pas solide qu’il le fait. Enjambant racines et contournant branches avec la confiance de celui qui sait où il va et qui ne craint pas les mauvaises rencontres. Pas aujourd’hui. Il ramasse au passage une branche morte qui lui fait office d’appui ou encore lui permet de tasser la végétation lorsque trop dense.
Et puis entre deux arbres, il l’entrevoit enfin : la rivière. Le soleil n’est plus aussi haut qu’à son arrivée, mais il lui reste suffisamment de temps avant la tombée de la nuit pour se reposer. Alae dépose son manteau sur un tronc d’arbre mort et y appuie son bâton. Pour tout autre vêtement, il ne porte qu’un simple pantalon de toile. Au moment d’en défaire l’attache, il s’immobilise d’un coup. Quelque chose lui picote la nuque, comme un murmure à son oreille, un pressentiment. Tu n’es pas seul, ici. Il jette un regard circulaire aux alentours, fouille de loin bosquets et feuillages, mais n’y observe aucun signe trahissant la présence d’un autre. Il en déduit qu’il s’agit sans doute d’une bête préférant elle aussi ne pas être vue, et donc probablement inoffensive…
Alae défait le nœud retenant le vêtement sur ses hanches et, nu, entre dans l’eau fraîche qui lui monte jusqu’au nombril en tendant haut ses ailes, préférant éviter de les mouiller pour l’instant et surtout, avisant l’éventualité où il devrait prendre son envol rapidement. De ses mains, il lave le haut de son corps et termine en se penchant vers l’avant afin de tremper sa tête dans l’eau. C’est au moment de dégager son visage de ses cheveux que parvient à son oreille un froissement de feuilles, craquement de brindilles. Étirant un bras vers le fond de l’eau, il attrape un galet et à nouveau, cherche, prêt à frapper s'il le faut.
Quelque chose lui échappe. Encore. Ce n'est pas tant la peur que la contrariété qui lui fait serrer les doigts sur la pierre lisse.
Son perchoir s’élève de plusieurs mètres vers le ciel. Alae s’y tient accroupi sur l’un des bords, penché vers la terre ferme. Il sourit au vertige tandis qu’une bourrasque court sur la face verticale de l’immense stèle et vient fouetter son visage et faire virevolter ses mèches pâles. Il lève le menton en fermant les yeux et laisse le vent emporter l’écho d’un souvenir vers les quelques nuages immaculés flottant loin au-dessus de sa tête.
Il y a longtemps qu’il a goûté cette légèreté. C’est peut-être le repos des derniers jours, le temps accordé à se défaire de ses doutes et de la poussière qui n’en finit jamais de retomber, lui semble-t-il. Peu importe la raison. Ici, maintenant, Alae est occupé.
Il se dresse sur ses jambes et recule à l’extrémité opposée du sommet du cénotaphe. Ses ailes dressées derrière lui, appuyées l’une contre l’autre, il recule son pied gauche, incline son corps vers l’avant et à la prochaine bourrasque, s’élance à toutes jambes. Tête première, Alae plonge dans le vide. Le sol se rapproche à une vitesse étourdissante, mais il tient bon, et ce n’est qu’au tout dernier instant, juste avant de s’écraser, qu’il tend brusquement ses ailes et, en un mouvement étonnamment gracile, dessine de son corps une courbe qui lui permet de doucement, en contrôle, retomber sur ses deux pieds.
Des perles de sueur glissent sur ses tempes et le long de son dos. Satisfait de sa séance, Alae empoigne d’une main son lourd manteau de fourrure laissé quelques heures plus tôt au pied du monument. Son maigre bagage récupéré, il se tourne vers la forêt qui le cerne et d’un pas sûr, se fraie un chemin entre les arbres, enveloppé de son aura.
Le clapotis d’un cours d’eau à proximité le guide. Il ne saurait dire combien de temps il marche. C’est néanmoins l’esprit dégagé et le pas solide qu’il le fait. Enjambant racines et contournant branches avec la confiance de celui qui sait où il va et qui ne craint pas les mauvaises rencontres. Pas aujourd’hui. Il ramasse au passage une branche morte qui lui fait office d’appui ou encore lui permet de tasser la végétation lorsque trop dense.
Et puis entre deux arbres, il l’entrevoit enfin : la rivière. Le soleil n’est plus aussi haut qu’à son arrivée, mais il lui reste suffisamment de temps avant la tombée de la nuit pour se reposer. Alae dépose son manteau sur un tronc d’arbre mort et y appuie son bâton. Pour tout autre vêtement, il ne porte qu’un simple pantalon de toile. Au moment d’en défaire l’attache, il s’immobilise d’un coup. Quelque chose lui picote la nuque, comme un murmure à son oreille, un pressentiment. Tu n’es pas seul, ici. Il jette un regard circulaire aux alentours, fouille de loin bosquets et feuillages, mais n’y observe aucun signe trahissant la présence d’un autre. Il en déduit qu’il s’agit sans doute d’une bête préférant elle aussi ne pas être vue, et donc probablement inoffensive…
Alae défait le nœud retenant le vêtement sur ses hanches et, nu, entre dans l’eau fraîche qui lui monte jusqu’au nombril en tendant haut ses ailes, préférant éviter de les mouiller pour l’instant et surtout, avisant l’éventualité où il devrait prendre son envol rapidement. De ses mains, il lave le haut de son corps et termine en se penchant vers l’avant afin de tremper sa tête dans l’eau. C’est au moment de dégager son visage de ses cheveux que parvient à son oreille un froissement de feuilles, craquement de brindilles. Étirant un bras vers le fond de l’eau, il attrape un galet et à nouveau, cherche, prêt à frapper s'il le faut.
Quelque chose lui échappe. Encore. Ce n'est pas tant la peur que la contrariété qui lui fait serrer les doigts sur la pierre lisse.