Ven 28 Juil - 15:41
C’était comme se réveiller d’un rêve étonnamment réaliste.
Evyline se demandait ce qu’elle faisait là, au milieu de rien, dans un désert de poussière et de cendre, embaumé d’une odeur de vide, presque de mort. Elle se dit un instant que ça sentait peut-être comme ça, dans l’espace, là où il n’y a presque rien.
Puis elle regarda à gauche, et vit sa partenaire de voyage, non pas absente comme la sorcière l’était, mais bien concentrée, les yeux rivés vers l’avant, les côté, jetant parfois de rapides coup d’œils derrière elle, comme si elle craignait quelque chose qu’Evyline ne pouvait pas voir. La princesse se déplaçait avec aisance sur sa monture, bien plus qu’Evyline qui n’avait pas souvent eu l’occasion de se déplacer ainsi, malgré sa, à priori, très longue vie. Elle chercha du regard le reste de la petite troupe, mais ne trouva personne d’autre, se souvenant soudainement de la raison de sa présence ici, de ce qui avait précédé leur départ d’Andoria, de la mission urgente de l’ambassadeur Zvintoch, qui couplée à son mal-être provoqué par la région l’avait finalement arraché de l’expédition, le clouant sur place pour qu’il y assure son rôle. Après tout, c’était son travail, et comme l’ambassadeur, devenu l’ami d’Evyline, lui avait expliqué, il avait littéralement été conçu pour assurer ce genre de tâche, il ne pouvait possiblement s’y soustraire.
Son absence, fatalement associé également à l’absence de ses deux sœurs gardes du corps, avait laissé place à un sacré vide qu’il était difficile de combler. C’était lui qui assurait la conversation. Qui posait tout un tas de question à la sorcière. Qui calmait tout début de dispute qu’il y avait pu avoir entre elle et Elsbeth. C’était très certainement cette absence d’anecdote lancée par l’ambassadeur, de questions ou bien de plaintes concernant le climat ambiant qui avait fini par embourber Evyline dans un semi-sommeil.
« De retour parmi les vivants? »
Elsbeth avait par miracle décidé de briser ce silence atrocement lourd, et la sorcière décida de lui en être reconnaissante, malgré le ton employé par la princesse. Son choix de mot était même plutôt ironique ce qui lui arracha un petit sourire microscopique, fort heureusement invisible pour l’autre.
« Désolée, j’ai du m’assoupir.
- Ça arrive souvent, depuis notre départ. Nous devons rester particulièrement prudent.
- Je sais, je sais. Cet endroit me draine, pour être honnête, et je m’ennuie sans notre ami.
- J’espère que vous n’attendez pas de moi que je fasse autant la conversation que lui...
- Grand dieux, non ! »
Ils s’arrêtèrent quelques minutes, pour faire circuler le sang dans leurs jambes, s’étirer, boire et faire boire leurs chevaux, consulter les cartes. « Cartes » était un bien grand mot pour décrire ces étranges gribouillages des précédents explorateurs, qui pour la plupart ne s’étaient soit pas aventuré bien loin, soit étaient revenus à moitié fous. Le meilleur parchemin constituait un curieux mélange d’extraits d’archives et d’estimation de la part d’Andoriens. Dans la réalité, le coup d’œil que jeta Elsbeth aux papiers ne servait pas à grand chose, si ce n’était peut-être se rassurer de ne pas être encore complètement perdu; après tout, ils ne savaient même pas exactement où ils allaient.
Il avait été convenu, après d’innombrable soupirs de la part de la princesse, que le plus simple serait de suivre l’instinct d’Evyline. Cette région, c’était supposément son ancienne maison, aussi cette façon de faire pouvait ne pas sembler être complètement stupide. Mais après plusieurs siècles supposés et une amnésie avérée, il lui était bien difficile de se repérer ici. Elle savait simplement qu’ils étaient plus ou moins sur la bonne voie. Depuis leur départ de la grande cité, elle s’était rendu compte que son cœur agissait comme une sorte de boussole, ou plutôt de radar. Au plus il battait vite et fort, au plus ils se rapprochaient du but. C’était en tout cas ce qu’elle en avait conclu après plusieurs crises de panique et de vomissements. Ils reprirent rapidement la route, sans s’attarder plus que nécessaire.
« Evyline, atten- »
Sans avoir pu finir sa phrase, Elsbeth ne put que regarder le cheval de la sorcière se prendre le sabot dans un obstacle à moitié camouflé par la cendre. Il tituba en avant, renversant au passage Evyline qui se rattrapa avec très peu de grâce, s’arrachant la peau des mains au passage.
« Putain. »
Peu profondes voir même anodines, ce genre de blessures avaient tendance à envoyer Evyline dans une profonde colère envers elle-même. Ce corps était le seul dont elle disposait, et elle devait en prendre le plus grand soin. L’esquinter de la sorte était tout simplement inacceptable.
La princesse descendit de sa monture, laissa Evyline pester et se dirigea plutôt sur l’obstacle incriminé; une gigantesque pierre arborant une couleur similaire à celle du reste de la région, couvert de ce fameux mélange de poussière, de cendre et de terre qui caractérisait absolument tout ce qui se trouvait à des kilomètres.
Prudente, elle souleva du mieux qu’elle put la pierre, constatant ainsi qu’elle s’était fourvoyée concernant sa nature; particulièrement acérée, l’objet avait véritablement la forme d’une très ancienne dent, particulièrement grande, appartenant à quelque chose qu’il ne fallait mieux ne même pas imaginer.
Evyline rassura son cheval, examina rapidement son sabot puis s’approcha d’Elsbeth, en pleine réflexion.
« Ça ne vous dit rien?
- Absolument pas, répondit la sorcière. Mais il y en a d’autres, regardez. »
Non loin du premier, plusieurs objets similaires traînaient, à moitié enterrés dans le sol mort. Evyline s’approcha lentement de chacun d’eux, fit le tour de la zone, puis pointa du doigt une petite butte à proximité, similaire à une petite falaise, qui fit penser à Evyline que l’endroit ressemblait parfois à une ancienne mer qui aurait entièrement drainée. Sans dire mot, elle prit sa direction en traînant sa monture par son licol. Elsbeth la suivit, non sans un profond et bruyant soupir avant.
L’étrange formation géologique était trop basse pour leur offrir assez d’indications sur la suite de la route, mais elle surplombait suffisamment la minuscule forêt d’arbres morts à proximité de laquelle le petit accident s’était produit pour leur offrir un meilleur point de vue sur la chose. D’ici, les étranges pierres étaient plus visible qu’au niveau du sol, le soleil se reflétant d’une étrange manière sur leur surface exposée, devenant d’un blanc immaculé qui rappela à Evyline les murs d’Andoria.
Elle se mit à vomir le maigre contenu de son déjeuner, qui vint s’exploser en contre-bas. D’ici, les pierres-dents semblaient avoir été disposée ainsi de manière consciente, formant un symbole fait de spirales.
« A en juger par votre réaction, j’imagine que cela vous rappelle quelque chose. »
Evyline sortit un mouchoir de sa poche, déjà bien bruni, et s’essuya la bouche sans répondre.
« Vous me raconterez en chemin, mes sens ne me jouaient pas des tours tout à l’heure, fit-elle en pointant du doigt l’horizon dans la direction d’où ils venaient. Nous sommes suivies. »
La sorcière suivi à contre-cœur sa partenaire, sans quitter du regard les spirales.
C’était un symbole religieux.
Qu’Il nous protège du Dévoreur, pensa-t-elle machinalement, sans même se rendre compte que ces mots lui parvenaient d’un passé vieux de plusieurs siècles.
Evyline se demandait ce qu’elle faisait là, au milieu de rien, dans un désert de poussière et de cendre, embaumé d’une odeur de vide, presque de mort. Elle se dit un instant que ça sentait peut-être comme ça, dans l’espace, là où il n’y a presque rien.
Puis elle regarda à gauche, et vit sa partenaire de voyage, non pas absente comme la sorcière l’était, mais bien concentrée, les yeux rivés vers l’avant, les côté, jetant parfois de rapides coup d’œils derrière elle, comme si elle craignait quelque chose qu’Evyline ne pouvait pas voir. La princesse se déplaçait avec aisance sur sa monture, bien plus qu’Evyline qui n’avait pas souvent eu l’occasion de se déplacer ainsi, malgré sa, à priori, très longue vie. Elle chercha du regard le reste de la petite troupe, mais ne trouva personne d’autre, se souvenant soudainement de la raison de sa présence ici, de ce qui avait précédé leur départ d’Andoria, de la mission urgente de l’ambassadeur Zvintoch, qui couplée à son mal-être provoqué par la région l’avait finalement arraché de l’expédition, le clouant sur place pour qu’il y assure son rôle. Après tout, c’était son travail, et comme l’ambassadeur, devenu l’ami d’Evyline, lui avait expliqué, il avait littéralement été conçu pour assurer ce genre de tâche, il ne pouvait possiblement s’y soustraire.
Son absence, fatalement associé également à l’absence de ses deux sœurs gardes du corps, avait laissé place à un sacré vide qu’il était difficile de combler. C’était lui qui assurait la conversation. Qui posait tout un tas de question à la sorcière. Qui calmait tout début de dispute qu’il y avait pu avoir entre elle et Elsbeth. C’était très certainement cette absence d’anecdote lancée par l’ambassadeur, de questions ou bien de plaintes concernant le climat ambiant qui avait fini par embourber Evyline dans un semi-sommeil.
« De retour parmi les vivants? »
Elsbeth avait par miracle décidé de briser ce silence atrocement lourd, et la sorcière décida de lui en être reconnaissante, malgré le ton employé par la princesse. Son choix de mot était même plutôt ironique ce qui lui arracha un petit sourire microscopique, fort heureusement invisible pour l’autre.
« Désolée, j’ai du m’assoupir.
- Ça arrive souvent, depuis notre départ. Nous devons rester particulièrement prudent.
- Je sais, je sais. Cet endroit me draine, pour être honnête, et je m’ennuie sans notre ami.
- J’espère que vous n’attendez pas de moi que je fasse autant la conversation que lui...
- Grand dieux, non ! »
Ils s’arrêtèrent quelques minutes, pour faire circuler le sang dans leurs jambes, s’étirer, boire et faire boire leurs chevaux, consulter les cartes. « Cartes » était un bien grand mot pour décrire ces étranges gribouillages des précédents explorateurs, qui pour la plupart ne s’étaient soit pas aventuré bien loin, soit étaient revenus à moitié fous. Le meilleur parchemin constituait un curieux mélange d’extraits d’archives et d’estimation de la part d’Andoriens. Dans la réalité, le coup d’œil que jeta Elsbeth aux papiers ne servait pas à grand chose, si ce n’était peut-être se rassurer de ne pas être encore complètement perdu; après tout, ils ne savaient même pas exactement où ils allaient.
Il avait été convenu, après d’innombrable soupirs de la part de la princesse, que le plus simple serait de suivre l’instinct d’Evyline. Cette région, c’était supposément son ancienne maison, aussi cette façon de faire pouvait ne pas sembler être complètement stupide. Mais après plusieurs siècles supposés et une amnésie avérée, il lui était bien difficile de se repérer ici. Elle savait simplement qu’ils étaient plus ou moins sur la bonne voie. Depuis leur départ de la grande cité, elle s’était rendu compte que son cœur agissait comme une sorte de boussole, ou plutôt de radar. Au plus il battait vite et fort, au plus ils se rapprochaient du but. C’était en tout cas ce qu’elle en avait conclu après plusieurs crises de panique et de vomissements. Ils reprirent rapidement la route, sans s’attarder plus que nécessaire.
« Evyline, atten- »
Sans avoir pu finir sa phrase, Elsbeth ne put que regarder le cheval de la sorcière se prendre le sabot dans un obstacle à moitié camouflé par la cendre. Il tituba en avant, renversant au passage Evyline qui se rattrapa avec très peu de grâce, s’arrachant la peau des mains au passage.
« Putain. »
Peu profondes voir même anodines, ce genre de blessures avaient tendance à envoyer Evyline dans une profonde colère envers elle-même. Ce corps était le seul dont elle disposait, et elle devait en prendre le plus grand soin. L’esquinter de la sorte était tout simplement inacceptable.
La princesse descendit de sa monture, laissa Evyline pester et se dirigea plutôt sur l’obstacle incriminé; une gigantesque pierre arborant une couleur similaire à celle du reste de la région, couvert de ce fameux mélange de poussière, de cendre et de terre qui caractérisait absolument tout ce qui se trouvait à des kilomètres.
Prudente, elle souleva du mieux qu’elle put la pierre, constatant ainsi qu’elle s’était fourvoyée concernant sa nature; particulièrement acérée, l’objet avait véritablement la forme d’une très ancienne dent, particulièrement grande, appartenant à quelque chose qu’il ne fallait mieux ne même pas imaginer.
Evyline rassura son cheval, examina rapidement son sabot puis s’approcha d’Elsbeth, en pleine réflexion.
« Ça ne vous dit rien?
- Absolument pas, répondit la sorcière. Mais il y en a d’autres, regardez. »
Non loin du premier, plusieurs objets similaires traînaient, à moitié enterrés dans le sol mort. Evyline s’approcha lentement de chacun d’eux, fit le tour de la zone, puis pointa du doigt une petite butte à proximité, similaire à une petite falaise, qui fit penser à Evyline que l’endroit ressemblait parfois à une ancienne mer qui aurait entièrement drainée. Sans dire mot, elle prit sa direction en traînant sa monture par son licol. Elsbeth la suivit, non sans un profond et bruyant soupir avant.
L’étrange formation géologique était trop basse pour leur offrir assez d’indications sur la suite de la route, mais elle surplombait suffisamment la minuscule forêt d’arbres morts à proximité de laquelle le petit accident s’était produit pour leur offrir un meilleur point de vue sur la chose. D’ici, les étranges pierres étaient plus visible qu’au niveau du sol, le soleil se reflétant d’une étrange manière sur leur surface exposée, devenant d’un blanc immaculé qui rappela à Evyline les murs d’Andoria.
Elle se mit à vomir le maigre contenu de son déjeuner, qui vint s’exploser en contre-bas. D’ici, les pierres-dents semblaient avoir été disposée ainsi de manière consciente, formant un symbole fait de spirales.
« A en juger par votre réaction, j’imagine que cela vous rappelle quelque chose. »
Evyline sortit un mouchoir de sa poche, déjà bien bruni, et s’essuya la bouche sans répondre.
« Vous me raconterez en chemin, mes sens ne me jouaient pas des tours tout à l’heure, fit-elle en pointant du doigt l’horizon dans la direction d’où ils venaient. Nous sommes suivies. »
La sorcière suivi à contre-cœur sa partenaire, sans quitter du regard les spirales.
C’était un symbole religieux.
Qu’Il nous protège du Dévoreur, pensa-t-elle machinalement, sans même se rendre compte que ces mots lui parvenaient d’un passé vieux de plusieurs siècles.