Dim 30 Oct - 10:26
Persival Qerel ✣ Percéphale
Contade / Vagabond
- 28 ans
- Triton intersexe
- Mer de l'Ouest
- Pansexuelle ∙ elle
- Mercenaire
- Persival Qerel (Theodyme)
Description
Le paysage est rude. Le froid est tranchant, extrême, dessinant sur la peau de quiconque s'aventurerait si loin sa morsure vermeille. Un parfum de vase et une odeur de cèdre pendent dans l'air, entremêlés. Un brouillard épais, teint de gris, peint sur les herbes humides et les épines des pins non loin érigés, tranquillement, menaçant, s'amasse. Vous plissez vos yeux pour y distinguer quelque chose, et avec beaucoup de peine, vous parvenez à reconnaître une forme étrange au sol. Elle semble endormie. La terre autours d'elle est-elle blanche ou bien est-ce votre vue qui ne parvient pas à s'accoutumer à la brume? La tête vous tourne un peu, il faut vous concentrer pour comprendre que cette image étrange, que vous pensiez écroulée au sol, flotte en réalité inerte, insaisissable, au bord de l'eau. En vous approchant, le pas hésitant, l'étrange figure se dessine plus clairement. Vous y reconnaissez un visage, yeux et lèvres clos, semblant dormir paisiblement au creux des doux remous de l'eau. Son dos rachitique en frôle la surface, mais vous pouvez encore distinguer son profil sous la vase. Un genou à terre, vous vous penchez, tendant une main incertaine; la créature était elle morte ou simplement assoupie ? Oseriez vous seulement risquer de la réveiller alors que vous n'avez pas la moindre idée de sa nature? Autour de vous, tout est calme. Peut être un peu trop; vous vous sentez mal à l'aise. Pas un cri d'oiseau, pas un sifflement de vent, mais seulement le clapotis des ondines caressant la fange à vos pieds, et cette brume épaisse coulant sur vos épaules et vos chaussures.
Quand brusquement, un œil s'ouvre. Vous basculez en arrière, de surprise et de méfiance, noyant vos mains dans la boue répugnante en quête d'appui. Le corps étranger demeure, inerte, englouti dans la vase, et vous vous demandez un instant si vous n'avez pas rêvé; mais bientôt, les secondes filent, la sueur perle dans le creux de votre nuque, et l'informité grandit. Dans un mouvement que vous ne comprenez pas, son dos se tord et, sans un bruit, se relève. De longs cheveux d'un orange brûlé, chaud et sale, fins, traînent dans la fange et dessinent des lignes sur la silhouette d'ivoire et de vermeil, parsemée de lignes sombres. L'obscurité et le brouillard ambiants viennent embuer votre vision et vous ne distinguez que très péniblement les traits étranges, presque féminins, de la masse qui s'érige sous votre regard désemparé. Gargantuesque, la créature ne devait faire qu'un peu plus de deux mètres, mais dans vos yeux effondrés, elle s'élevait tel un titan. De toute sa hauteur, elle vous toise alors, et ses iris vous plongent dans une crainte innommable. Ses yeux sont fades, mais luisent malgré tout d'une surnaturelle lumière grège et vous observent, grands ouverts.
Sa peau d'albe, aux motifs abstraits, de charbon et de corail, entièrement nue, aux formes tendres et aux courbures ingrates, semble dure, froide. La lueur de ses iris se reflète sur ses joues pâles et trahit la mollesse d’une peau d'une finesse incomparable. Ce même éclat miroite ça et là sur son corps cadavérique, dans la faible lumière de la nuit et dès lors que le brouillard laisse sa place au cauchemar. Au dessus de son regard sévère et curieux ajoutent à sa hauteur d'étranges cornes que vous n'aviez jamais vu chez personne auparavant: Elles sont hautes et courbes, d’un corail vif. Ses longues pattes s'atrophient de la plus incohérente des façons; des jupes et des branches de peau élastique s’amoncellent aux extrémités de son corps, et dans la chute de ses reins semble se balancer nonchalamment un bouquet de rouge. Ce qui ressemble à des branchies parsèment son corps singulier et justifient à votre regard qu'il s'agissait d'une créature de la mer. Les couleurs vives attirent votre regard, mais vous sentez qu’il ne serait pas bon d’en frôler les motifs. De toute sa grandeur et devant votre frayeur manifeste, elle se baisse vers vous, rampant au dessus de votre visage, plongeant sa silhouette dans la brume une fois de plus, et sans savoir que faire, instinctivement, vous fermez les yeux.
Une fraction de seconde plus tard, à travers vos paupières closes, une lumière vous éblouie; celle de la lune, perchée au loin dans le ciel nocturne. La créature a disparu sans laisser de traces, sinon la vase subsistante sur votre peau.
Quand brusquement, un œil s'ouvre. Vous basculez en arrière, de surprise et de méfiance, noyant vos mains dans la boue répugnante en quête d'appui. Le corps étranger demeure, inerte, englouti dans la vase, et vous vous demandez un instant si vous n'avez pas rêvé; mais bientôt, les secondes filent, la sueur perle dans le creux de votre nuque, et l'informité grandit. Dans un mouvement que vous ne comprenez pas, son dos se tord et, sans un bruit, se relève. De longs cheveux d'un orange brûlé, chaud et sale, fins, traînent dans la fange et dessinent des lignes sur la silhouette d'ivoire et de vermeil, parsemée de lignes sombres. L'obscurité et le brouillard ambiants viennent embuer votre vision et vous ne distinguez que très péniblement les traits étranges, presque féminins, de la masse qui s'érige sous votre regard désemparé. Gargantuesque, la créature ne devait faire qu'un peu plus de deux mètres, mais dans vos yeux effondrés, elle s'élevait tel un titan. De toute sa hauteur, elle vous toise alors, et ses iris vous plongent dans une crainte innommable. Ses yeux sont fades, mais luisent malgré tout d'une surnaturelle lumière grège et vous observent, grands ouverts.
Sa peau d'albe, aux motifs abstraits, de charbon et de corail, entièrement nue, aux formes tendres et aux courbures ingrates, semble dure, froide. La lueur de ses iris se reflète sur ses joues pâles et trahit la mollesse d’une peau d'une finesse incomparable. Ce même éclat miroite ça et là sur son corps cadavérique, dans la faible lumière de la nuit et dès lors que le brouillard laisse sa place au cauchemar. Au dessus de son regard sévère et curieux ajoutent à sa hauteur d'étranges cornes que vous n'aviez jamais vu chez personne auparavant: Elles sont hautes et courbes, d’un corail vif. Ses longues pattes s'atrophient de la plus incohérente des façons; des jupes et des branches de peau élastique s’amoncellent aux extrémités de son corps, et dans la chute de ses reins semble se balancer nonchalamment un bouquet de rouge. Ce qui ressemble à des branchies parsèment son corps singulier et justifient à votre regard qu'il s'agissait d'une créature de la mer. Les couleurs vives attirent votre regard, mais vous sentez qu’il ne serait pas bon d’en frôler les motifs. De toute sa grandeur et devant votre frayeur manifeste, elle se baisse vers vous, rampant au dessus de votre visage, plongeant sa silhouette dans la brume une fois de plus, et sans savoir que faire, instinctivement, vous fermez les yeux.
Une fraction de seconde plus tard, à travers vos paupières closes, une lumière vous éblouie; celle de la lune, perchée au loin dans le ciel nocturne. La créature a disparu sans laisser de traces, sinon la vase subsistante sur votre peau.
Habiletés et pouvoirs
Branchies. ꞏꟷ A l'ombre des arbres et à l'abri sous la vase, cette singulière créature s'échappe au regard humain. Elle est dans son élément, ainsi immergée dans son berceau céruléen, dansant dans l'opacité de l'eau. C'est une amphibienne, à n'en plus douter; elle semblait s'épanouir parfaitement sous le seuil de la terre, s'amusant de la frayeur qu'elle venait de causer à l'aventurier égaré qui avait interrompu son sommeil. Le trouble de la marée ne semble pas la gêner. Elle est à l'aise dans ces vastes marécages, comme s'ils étaient son foyer.
La créature vint se poser sur le bord, traçant son sillon dans la fange, ignorant les insectes qui virevoltaient autour d'elle. Au contact de l'air et quelques secondes passées, et l'éclat humide de sa peau s'éteignit pour laisser place à des couleurs plus fades. Des reflets bleutés commencèrent à apparaitre sur sa peau comme si l'oxygène ambiant la rouillait. Par chance, sa longue crinière ruisselant sur son corps lui apportait encore une quelconque fraicheur; mais elle savait que ça n'allait pas durer longtemps. Elle eut beau vivre longtemps hors de l'eau, elle peinait encore à s'habituer physiquement à la surface. Quelque part, les probabilités qu'elle ne s'y fasse jamais étaient assez grandes. Les individus de son espèce ne vivaient pas beaucoup sur la terre, et à raison, mais elle gardait un sentiment de supériorité considérable face aux autres ethnies qu'elle put croiser jadis. Sa carrure était imposante, son corps flexible, sa peau épaisse et élastique, et sa constitution forte. Bien plus forte que tous les humains qu'elle eut l'occasion de rencontrer jusqu'alors. L'amphibienne s'en satisfaisait grandement.
Glandes toxiques. ꞏꟷ Innocents et naïfs, quelques insectes venaient parfois se poser sur sa peau vive. Son sang n’attirait pas beaucoup les moustiques ; il était froid, salé, et coulait à peine, comme un ruissellement délicat. Mais les quelques aventureuses créatures qui venaient se poser sur son corps finissaient généralement par en payer le prix. Sous ses jupes de chair molle et orange, l’aspect coloré et égayé de leurs lignes dissimulaient des glandes qui secrétaient en continue des toxines discrètes mais redoutables, protégeant tendrement la nudibranche des prédateurs aquatiques. Hors de l’eau, il était plus difficile de réguler cette capacité. Si elle ne faisait pas attention, ses glandes séchaient et devenaient inutilisables. Elles se repentaient de son régime alimentaire de prédilection ; les éponges, dont l’amphibienne conservait les toxines en réserve dans son corps jusqu’à pouvoir les libérer.
Rhinophores. ꞏꟷ Les espèces de cornes molles qui ornaient quant à elles son visage désabusé servaient d’outil de repérage sous l’eau. Objets sensoriels visant à repérer les prédateurs, la nourriture ou simplement se diriger dans les courants, elles en deviennent vite la région la plus sensible du corps. Il était possible pour la nudibranche de les rétracter pour les protéger, mais rares étaient les occasions où elle ne se sentait pas sur le vif, à l’affût du danger.
La créature vint se poser sur le bord, traçant son sillon dans la fange, ignorant les insectes qui virevoltaient autour d'elle. Au contact de l'air et quelques secondes passées, et l'éclat humide de sa peau s'éteignit pour laisser place à des couleurs plus fades. Des reflets bleutés commencèrent à apparaitre sur sa peau comme si l'oxygène ambiant la rouillait. Par chance, sa longue crinière ruisselant sur son corps lui apportait encore une quelconque fraicheur; mais elle savait que ça n'allait pas durer longtemps. Elle eut beau vivre longtemps hors de l'eau, elle peinait encore à s'habituer physiquement à la surface. Quelque part, les probabilités qu'elle ne s'y fasse jamais étaient assez grandes. Les individus de son espèce ne vivaient pas beaucoup sur la terre, et à raison, mais elle gardait un sentiment de supériorité considérable face aux autres ethnies qu'elle put croiser jadis. Sa carrure était imposante, son corps flexible, sa peau épaisse et élastique, et sa constitution forte. Bien plus forte que tous les humains qu'elle eut l'occasion de rencontrer jusqu'alors. L'amphibienne s'en satisfaisait grandement.
Glandes toxiques. ꞏꟷ Innocents et naïfs, quelques insectes venaient parfois se poser sur sa peau vive. Son sang n’attirait pas beaucoup les moustiques ; il était froid, salé, et coulait à peine, comme un ruissellement délicat. Mais les quelques aventureuses créatures qui venaient se poser sur son corps finissaient généralement par en payer le prix. Sous ses jupes de chair molle et orange, l’aspect coloré et égayé de leurs lignes dissimulaient des glandes qui secrétaient en continue des toxines discrètes mais redoutables, protégeant tendrement la nudibranche des prédateurs aquatiques. Hors de l’eau, il était plus difficile de réguler cette capacité. Si elle ne faisait pas attention, ses glandes séchaient et devenaient inutilisables. Elles se repentaient de son régime alimentaire de prédilection ; les éponges, dont l’amphibienne conservait les toxines en réserve dans son corps jusqu’à pouvoir les libérer.
Rhinophores. ꞏꟷ Les espèces de cornes molles qui ornaient quant à elles son visage désabusé servaient d’outil de repérage sous l’eau. Objets sensoriels visant à repérer les prédateurs, la nourriture ou simplement se diriger dans les courants, elles en deviennent vite la région la plus sensible du corps. Il était possible pour la nudibranche de les rétracter pour les protéger, mais rares étaient les occasions où elle ne se sentait pas sur le vif, à l’affût du danger.
Biographie
Des voyageurs humains, elle en a vu passer. Des aventuriers hasardeux, stupidement braves, qui venaient là se perdre dans la brume, elle en a vu défiler des centaines. Les années passant, isolée dans ces marécages, la créature avait guidé les téméraires vers leurs morts, les uns après les autres.
De nature triton, elle naquit dans les mers de la Déchirure il y a vingt-huit ans, dans les courants où peu de vivants osaient se jeter. Sa mère, morte en couche, avait vernis les eaux territoriales d'incarnat et d'un goût de fer, alors que son père emportait le nourrisson avec lui. Ils appartenaient à un foyer, auparavant; une communauté retirée dans les eaux abyssales - mais un désaccord avec leur chef les en ont écartés et, seul avec son enfant, le jeune père s'enfuit. Avel, de son nom, se retrouva terrifié pour sa petite, incapable de lui offrir un abri. Il chercha refuge sur la côte, sans réfléchir, et erra sur les rivages de la péninsule des ours.
Le jeune homme y rencontra un vieux bucheron esseulé dans sa cabane, au bord des marais. Il n'avait plus toute sa tête, le pauvre bougre, à vivre là, au bord de l'abîme brumeux, à un fil de la démence; mais il était gentil, et bienveillant, et devant le désarroi du triton et de sa progéniture, il les accueillit à bras ouvert. Il n'avait plus grand chose à offrir, ce vieux bucheron, sinon la protection de sa hache usée, et une oreille attentive. Il s'appelait Erald, et était un ancien aventurier avide d'exploration et de richesse jusqu'au jour où il perdit sa jambe et un compagnon dans une expédition trop peu préparée. Depuis lors, il avait bâti demeure non loin du drame, désireux de vivre là en hommage à son ami perdu.
Ils se tinrent compagnie pendant quelques années. Pour le vieil homme, c'était une douce consolation que de partager ses maigres possessions avec ce père et sa fille, lui qui n'avait jamais eu de famille et qui avait toujours vécu pour la gloire de l'aventure. C'était un petit bonheur modeste que d'avoir ce foyer maladroitement recomposé, et une profonde amitié lia Avel et Erald, sous le regard candide de la jeune enfant. Mais la brume faisait parfois son chemin non loin de là, et la vieillesse serpentait lentement dans le coin de ses yeux. Bientôt, il n'était plus que l'ombre de lui-même. Lorsque la petite Persival fêta ses huit ans, le vieil Erald rendit son dernier soupir, et laissa derrière lui tout ce qu'il avait de plus précieux. Avel entretint sa demeure avec sa fille des années encore après sa mort, faisant fleurir les plus beaux bourgeons et abritant les plus délicates lucioles à ses fenêtres. Ensemble, ils firent de cette ancienne cabane en ruine un havre de beauté, dans la luxuriance des marais, dans la luminescence de la végétation. Et ils vécurent là encore longtemps. Les années passées et, sans autre but que d'élever droitement sa fille, le brave Avel en vint à s'inquiéter pour son avenir. Quel destin pour sa fille qui, retirée avec lui dans ces marécages, n'avait jamais connu la vie en société ? Il lui apprit la chasse, l'herboristerie, et tout ce qu'il fallait pour survivre seul dans les entrailles de la terre; mais quel futur l'attendait, seule dans les confins du monde?
Et pendant que ses inquiétudes se tissaient lentement dans son esprit, la jeune amphibienne touchait l'adolescence. De plus en plus, elle errait dans les marais en solitaire, sillonnant les routes et la fange. Elle croisait régulièrement ces fameux aventuriers qui s'en allaient à une mort certaine, dans les tréfonds de la brume, pourtant certains de leurs retours. Elle repensait à ce vieil ami qui leur avait apporté toute la chaleur qu'il put, de ses récits de conquêtes, de ses odyssées fantastiques dans les abysses inconnues de la terre. Les rares fois où le brouillard avait serpenté jusqu'à leurs marais, la sérénité subsistait, à tel point que la jeunette s'était demandé si ces fantasmes de baroudeur que le vieil Erald lui avait tant raconté étaient vrais. Mais une certitude demeurait: Aucun des braves qu'elle eut croisé en ces lieux ne revint de leurs expéditions imprudentes.
Parfois, Avel et elle trouvaient des restes d'affaires perdues au milieu des bois. Des armes. Des ressources. Des potions de toutes sortes. Ne sachant que faire de mieux, Avel entraina sa fille au combat, espérant qu'un jour, peut-être, elle saurait y trouver une utilité. En tant que mercenaire, elle trouverait forcément du travail. On n'en manquait jamais, et il savait sa fille de bonne constitution. Il ne fallut pas longtemps pour que l'élève ne dépasse le maître, et elle devint rapidement bien plus agile et plus forte que lui. Elle continua à s'entrainer quotidiennement, avide de l'adrénaline, mais elle rêvait d'une vie toute autre; de ses rencontres avec les aventuriers, on lui avait raconté mille et un contes sur les grandes cités et l'abîme de savoir et de technologie qu'elles cachaient. Certains explorateurs érudits lui avaient fait le récit de leurs études, de leurs apprentissages, de leurs enfances; et tout ce dont rêvait Persival, en dépit de ses facilités au combat, c'était d'apprendre. De découvrir la physique. Les mécanismes de la terre. Les rouages du vivant. De comprendre la brume, comprendre le temps, comprendre ces mystérieux artefacts que les voyageurs égaraient avec leurs dépouilles. Elle garda tout ce qu'elle put trouver avec l'espoir amer qu'un jour, elle puisse voyager avec son père vers ces palais gigantesques et ces dédales humains qu'étaient ces majestueuses cités telluriques.
Et comme une mauvaise blague, ses rêves s'évanouirent lorsque son père tomba malade alors qu'elle fêtait ses vingt-cinq ans. Avel s'éteignit brusquement, laissant seule, isolée dans les profondeurs des marécages, son unique fille Persival. Elle érigea auprès de son vieil ami un autel en sa mémoire, gardant ce doux et amer souvenir de son enfance. Embarquant avec elle toutes ses possessions, elle se mit en route pour la terre des hommes, n'ayant plus rien à vivre dans ces marais qui l'avaient vue grandir, et fit son chemin. Elle se fit un nom en tant que mercenaire, comme son père l'avait prédit.
On lui attribua le surnom de Percéphale, la grande, la sévère. Et son histoire commença à s'écrire.
De nature triton, elle naquit dans les mers de la Déchirure il y a vingt-huit ans, dans les courants où peu de vivants osaient se jeter. Sa mère, morte en couche, avait vernis les eaux territoriales d'incarnat et d'un goût de fer, alors que son père emportait le nourrisson avec lui. Ils appartenaient à un foyer, auparavant; une communauté retirée dans les eaux abyssales - mais un désaccord avec leur chef les en ont écartés et, seul avec son enfant, le jeune père s'enfuit. Avel, de son nom, se retrouva terrifié pour sa petite, incapable de lui offrir un abri. Il chercha refuge sur la côte, sans réfléchir, et erra sur les rivages de la péninsule des ours.
Le jeune homme y rencontra un vieux bucheron esseulé dans sa cabane, au bord des marais. Il n'avait plus toute sa tête, le pauvre bougre, à vivre là, au bord de l'abîme brumeux, à un fil de la démence; mais il était gentil, et bienveillant, et devant le désarroi du triton et de sa progéniture, il les accueillit à bras ouvert. Il n'avait plus grand chose à offrir, ce vieux bucheron, sinon la protection de sa hache usée, et une oreille attentive. Il s'appelait Erald, et était un ancien aventurier avide d'exploration et de richesse jusqu'au jour où il perdit sa jambe et un compagnon dans une expédition trop peu préparée. Depuis lors, il avait bâti demeure non loin du drame, désireux de vivre là en hommage à son ami perdu.
Ils se tinrent compagnie pendant quelques années. Pour le vieil homme, c'était une douce consolation que de partager ses maigres possessions avec ce père et sa fille, lui qui n'avait jamais eu de famille et qui avait toujours vécu pour la gloire de l'aventure. C'était un petit bonheur modeste que d'avoir ce foyer maladroitement recomposé, et une profonde amitié lia Avel et Erald, sous le regard candide de la jeune enfant. Mais la brume faisait parfois son chemin non loin de là, et la vieillesse serpentait lentement dans le coin de ses yeux. Bientôt, il n'était plus que l'ombre de lui-même. Lorsque la petite Persival fêta ses huit ans, le vieil Erald rendit son dernier soupir, et laissa derrière lui tout ce qu'il avait de plus précieux. Avel entretint sa demeure avec sa fille des années encore après sa mort, faisant fleurir les plus beaux bourgeons et abritant les plus délicates lucioles à ses fenêtres. Ensemble, ils firent de cette ancienne cabane en ruine un havre de beauté, dans la luxuriance des marais, dans la luminescence de la végétation. Et ils vécurent là encore longtemps. Les années passées et, sans autre but que d'élever droitement sa fille, le brave Avel en vint à s'inquiéter pour son avenir. Quel destin pour sa fille qui, retirée avec lui dans ces marécages, n'avait jamais connu la vie en société ? Il lui apprit la chasse, l'herboristerie, et tout ce qu'il fallait pour survivre seul dans les entrailles de la terre; mais quel futur l'attendait, seule dans les confins du monde?
Et pendant que ses inquiétudes se tissaient lentement dans son esprit, la jeune amphibienne touchait l'adolescence. De plus en plus, elle errait dans les marais en solitaire, sillonnant les routes et la fange. Elle croisait régulièrement ces fameux aventuriers qui s'en allaient à une mort certaine, dans les tréfonds de la brume, pourtant certains de leurs retours. Elle repensait à ce vieil ami qui leur avait apporté toute la chaleur qu'il put, de ses récits de conquêtes, de ses odyssées fantastiques dans les abysses inconnues de la terre. Les rares fois où le brouillard avait serpenté jusqu'à leurs marais, la sérénité subsistait, à tel point que la jeunette s'était demandé si ces fantasmes de baroudeur que le vieil Erald lui avait tant raconté étaient vrais. Mais une certitude demeurait: Aucun des braves qu'elle eut croisé en ces lieux ne revint de leurs expéditions imprudentes.
Parfois, Avel et elle trouvaient des restes d'affaires perdues au milieu des bois. Des armes. Des ressources. Des potions de toutes sortes. Ne sachant que faire de mieux, Avel entraina sa fille au combat, espérant qu'un jour, peut-être, elle saurait y trouver une utilité. En tant que mercenaire, elle trouverait forcément du travail. On n'en manquait jamais, et il savait sa fille de bonne constitution. Il ne fallut pas longtemps pour que l'élève ne dépasse le maître, et elle devint rapidement bien plus agile et plus forte que lui. Elle continua à s'entrainer quotidiennement, avide de l'adrénaline, mais elle rêvait d'une vie toute autre; de ses rencontres avec les aventuriers, on lui avait raconté mille et un contes sur les grandes cités et l'abîme de savoir et de technologie qu'elles cachaient. Certains explorateurs érudits lui avaient fait le récit de leurs études, de leurs apprentissages, de leurs enfances; et tout ce dont rêvait Persival, en dépit de ses facilités au combat, c'était d'apprendre. De découvrir la physique. Les mécanismes de la terre. Les rouages du vivant. De comprendre la brume, comprendre le temps, comprendre ces mystérieux artefacts que les voyageurs égaraient avec leurs dépouilles. Elle garda tout ce qu'elle put trouver avec l'espoir amer qu'un jour, elle puisse voyager avec son père vers ces palais gigantesques et ces dédales humains qu'étaient ces majestueuses cités telluriques.
Et comme une mauvaise blague, ses rêves s'évanouirent lorsque son père tomba malade alors qu'elle fêtait ses vingt-cinq ans. Avel s'éteignit brusquement, laissant seule, isolée dans les profondeurs des marécages, son unique fille Persival. Elle érigea auprès de son vieil ami un autel en sa mémoire, gardant ce doux et amer souvenir de son enfance. Embarquant avec elle toutes ses possessions, elle se mit en route pour la terre des hommes, n'ayant plus rien à vivre dans ces marais qui l'avaient vue grandir, et fit son chemin. Elle se fit un nom en tant que mercenaire, comme son père l'avait prédit.
On lui attribua le surnom de Percéphale, la grande, la sévère. Et son histoire commença à s'écrire.
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Dernière édition par Percéphale le Dim 8 Jan - 15:41, édité 14 fois