Light
Dark
Bas/Haut

[Rumeur] Le club du XIII

[Rumeur] Le club du XIII Brandw10
Mer 4 Déc - 6:53

Le Club du XIII

La tour d'Ysir

Dans ton simple appartement, tu prépares tes affaires. Tu as reçu, il y a peu, un message du Culte. Cela faisait bien longtemps qu'aucune nouvelle ne t'était parvenue depuis leurs exploits d'Opale. Intriguée, même excitée à cette reprise de contact, tu as ouvert l'enveloppe quelque peu tremblante :

Le Paon et la Perdrix

Il ne se faut jamais moquer des misérables :
Car qui peut s’assurer d’être toujours heureux ?
Le sage Savant dans ses essais jetables,
Nous en donne un exemple ou deux.
Celui qu’en ces mots je propose,
Et les siens, sont même chose.

Le Paon et la Perdrix, concitoyens d’un champ,
Vivant dans un état, se sentent, assez tranquille,
Quand une Meute s’approchant
Oblige le premier à chercher un asile.
Il s’enfuit dans son fort, met les chiens en défaut, sans même excepter l’Ours.

Pour apaiser sa course,
Les esprits sortants de son corps échauffé.
Le pauvre malheureux demande à son amie un gîte.
La Perdrix s'agite :
“Toi qui était si beau,
Nous te redonnerons tes joyaux.”

À défaut de railler, rester en retrait,
Elle préfère voler vers des eaux fortunées.
Au lointain, un sarment carmin
Entour un cloché ancien.
Gîte nouveau pour l’un,
Secours bienvenu pour l’autre,
La chance peut prendre fin
Pour chaque apôtre.


Ton sac prêt. Tu as relu une dernière fois, pour ne rien louper, avant de brûler le papier. Sans rien dire, tu es partie au petit matin. Des répercussions ? Tu n'en doutes pas. Tant pis pour ces chiens, un allié a besoin de toi.
Lun 9 Déc - 4:44
Le fourgon noir trace à travers champs, moi dans le compartiment arrière accompagné de mes amigos des ténèbres,
Vilaine, mon infirmière libellule araignée,
Anatole, le triton mutant aux dix yeux,
Colin, l'escargot au corps gluant mais au cerveau croustillant,
Bec, la perroquette aux couleurs explosives,
Justin, le cyclope narcoleptique,
Je ne sais pas si ces cinq là sont mes meilleures oeuvres, mais ce sont eux que j'ai choisi d'embarquer dans ma loge VIP, parce qu'ils sont fidèles, gentils, pas chiants, balèzes en bagarre et en sciences, et surtout, esthètes. J'avais besoin d'esthètes avec qui m'émerveiller durant ce pénible voyage ben bien sûr.

T'imagines ? J'ai abandonné Episto, je suis éreinté, orphelin, mou et plaintif ; et j'ai tapé zéro poudre, zéro molécule récréative et spirituelle depuis quatre jours ; la dernière fève d'Anastase est partie hier et elle était trop moisie pour me catapulter loin. Je suis sobre. Brutalement sobre. Mon corps est un puzzle douloureux, mais mon esprit lui est si net que je peux y voir mon propre reflet !

Episto loin dans le rétro. Les nuits démentes et sans fin, les lumières bruyantes et mes orchestres étincelants, les relents entêtants de mes parfums occultes. Les souvenirs que j'ai bricolé là-bas avec les potes sont comme de gros blocs de sel coincés dans mes ventricules ! Je vais faire une attaque ! J'ai déjà le mal du pays, je veux retourner sur le parvis des Limbes,

- La nostalgie me tiraille, Vilaine ! la vois-tu dégouliner sur mon museau ?
Elle dissout ma beauté dans les larmes, elle fait fondre mon mascara
- Ah je comprends,
elle répond en soupirant, les descentes de flics et les fusillades avec les copains me manquent déjà.
Elle se vautre dans son sarcasme puis détourne le regard et retourne se limer les mandibules en chantonnant quelques blasphèmes de sa voix d'araignée.

Vilaine, mon infirmière, mon infirmière libellule araignée, mon infirmière libellule araignée amatrice de défonce et de bons mots. Elle prend ça à la légère, a dit Adieu à Episto sans regrets, elle s'imagine déjà se la couler douce à Xandrie, à fumer les calumets de mandragore macrodosés, tout en faisant pousser des pétales de doigts sur nos tulipes de viande.

A Xandrie tout sera différent aah mais pourtant ma vie restera délicieuse ! Nouveau départ, nouveaux amis, nouveaux sangs nouvelles sueurs, nouvelles danses hystériques jusqu'à ce que le donut s'arrête de tourner, jusqu'à ce que l'univers se disloque et même après. Je rêve de Xandrie, je fantasme Xandrie.

- A Xandrie tout sera différent, je m'exclame, On fabriquera un autre rêve
Un rêve qui étendra ses douces tentacules partout où il y aura des assoiffés de liberté


Les copinous végètent ou somnolent, éreintés. Ils réagissent peu à mes mots. Vilaine m'ignore. Y a que Colin l'escargot qui tremble d'anticipation et qui est suspendu à mes lèvres, il bave un max comme s'il s'apprêtait à me bouffer, il pense que je vais le régaler d'une jolie tirade. Mais bah non j'ai rien d'autre à dire

- Monsieur R ?

J'entends une voix rauque gargouillante derrière moi, qui jaillit de la vitre de la cabine du conducteur. C'est la voix de Charon, notre chauffeur du XIIIème Cercle, un cadavre ramené des limbes qui sent les encens funéraires. Il m'interpelle une nouvelle fois mais je fais mine de pas l'avoir entendu pour faire mon intéressant.

- Monsieur R ? Nous arrivons à la tour.
Je n'ai pas reçu de nouvelles des alliés qui ont été convoqués pour nous aider. Probablement sont-ils déjà arrivés. Nous avons pris beaucoup de retard à cause de... euh... vos nombreuses pauses.
- "Pauses" ?! Gambader et danser dans la Brume fait partie de mon travail, on appelle ça séduire la Muse,
vieux nigaud va

Sous le foin blanc qui lui sert de crinière il lui reste pas beaucoup d'esprit artistique à ce gueux.

Et pourtant, ce voyage, quel délice ! Dans les étendues noyées sous la Brume, on a vu des nuages iridescents dévorer la nuit, on a vu des tempêtes dont les tentacules faisaient trembler le jour ; on a traversé de captivants paysages dont les échos résonnent encore dans mon âme et dans mon slip.

La Brume, ma muse, elle tournoie sous mon crâne, je pourrais y sculpter des dimensions et y peindre des cosmos. Mais je suis enfermé dans ce fourgon sans mon matos ! Alors je réprime ma pulsion créatrice en tripotant les branchies d'Anatole, mon voisin triton mutant la truite aux dix yeux, je fais squicher ses branchies sous mes doigts, je me délecte de son pouls. En réaction, Anatole braque sur moi cinq de ses yeux, globuleux et inquiets.

***
Et puis, enfin, la Tour d'Ysir pointe à l'horizon. Enveloppée dans une fine Brume, la Tour nous présente une ombre timide. On dirait que cette coquine veut rester cachée. Comme si elle avait honte de ses secrets !

Le XIIIème Cercle m'a parlé d'une réunion, d'une épreuve, d'une mission, dont Xandrie sera ma récompense.
R est mis à l'épreuve. R ne sera qu'un simple soldat aujourd'hui dirait-on ! un vaillant grouillot, un beau morceau de viande.

Le Cercle ne veut pas me donner tout de suite ma Xandrie. Ils veulent me tester d'abord.

Parce qu'ils croient que je me gâche dans mes drogues et dans mes explorations chamaniques et dans la redéfinition incessante de mon âme géniale, alors ils veulent me sevrer de mon quotidien orgiaque désoeuvré. Mais de quel droit voudrais-tu me materner XIIIème ?! t'es pas ma mère ?? JE suis ma mère, JE me suis engendré tout seul, JE suis mon propre paradis. Le Cercle veut me "sauver". Me sauver ! AH.
De quoi voudrais-tu me sauver, XIIIème ?! De la police ? De la torture ? De la mort ? De mes cauchemars ? De moi-même ? bah c'est que de la branlette tout ça. Je peux crever onze mille cent sept fois, la mort ça restera de la branlette.

Leur civilisation nous distrait, elle nous écarte du Rêve. Les amis, dois-je vous rappeler que la fin des Temps c'est demain ? Et le Rêve, après-demain.
Me sauver ? Me tester ? C'est trop tard pour ces âneries. Alors on se bouge le cul s'il vous plaît. Xandrie m'attend...