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[Event] Voyage au centre de la Brume

[Event] Voyage au centre de la Brume Brandw10
Sam 16 Nov - 13:08

Voyage au centre de la Brume

La Cité Tourmentée - RP de trame


Camp morne, désertique. Les soldats sont déjà loin, laissant derrière eux le squelette de tentes vides, de feux de camp éteints se découpant sur le fond rougeâtre d'un temps d'aurore. La Mer de Brume avale tout, elle camoufle jusqu'aux premiers rayons du soleil, ne laissant pénétrer qu'une flaque pourpre, un mirage de teintes bordeaux à l'horizon.

L'homme est solide, malgré son âge ; le Chancelier se tient droit, campé sur ses deux guiboles à tenter de détailler l'assaut, malgré l'impénétrable purée de poix, comme le commandant qu'il est censé être. Lui aussi serait bien resté en arrière, à établir des stratégies avec son état-major, mais ce n'est pas ce qui justifie sa présence. Il se détourne de la bataille qui fait rage derrière le rideau de brouillard, à quelques dizaines de mètres et dont on ne voit rien, certes, mais on entend beaucoup. Les hommes du Treizième Cercle se sont concentrés, il ripostent ardemment ; d'autres ont sûrement fui. Et cela laisse cet endroit accessible au groupe ayant réalisé la percée, jadis défendu par un ou deux gardes à présent immobilisés. L'un d'eux est paralysé contre l'un de ces solides murs, la main contre son flanc. Il fait partie de Zénobie.

« - Ce n'est pas pour combattre que nous sommes là, » rappelle Panoptès. « C'est pour découvrir... et résoudre, autant que faire se peut. »

Des paroles mystérieuses, mais ceux qui sont le plus proches du vieillard le connaissent. Peut-être est-ce sa tenue ou bien l'air frais de la Brume, mais il ne paraît d'ailleurs plus si vieux que cela. Un javelot bleu-argenté déchire soudain l'opacité grise en direction du ciel, captant l'auditoire ; probablement l’œuvre d'un adepte. Le Mandebrume leur avait visiblement laissé de quoi se défendre et, malgré le nombre supérieur d'hommes dans l'armée de la coalition, des soldats comme des mercenaires ou des patrouilleurs, la victoire n'était pas donnée d'avance. Et elle se ferait au péril de milliers de vies. C'était davantage du temps gagné pour le moment : du temps pour se dérober aux regards inquisiteurs des hommes du Mandebrume, qui avaient quadrillé les environs, et se précipiter à l'intérieur de la ville sans éveiller de soupçons.

« - Ne perdons pas de temps. »

Ses yeux se posèrent brièvement sur chacun des hommes et femmes qui constituaient le commando d'élite. Essentiellement des visages jeunes qui ne lui disent rien ; il aurait aimé avoir le Maître à ses côtés, mais celui-ci n'avait pas fini de se rétablir et avait mieux à faire que de participer à une mission suicide, c'est du moins ce que pensait l'Éminence de l'Alliance. À la place, le Chancelier posa donc sa main sur l'épaule du patrouilleur qui était venu le voir à Opale, Ryker Lestat, et entra la premier dans l'ombre du tunnel aux profondeurs insondables. Il faudrait de la lumière ici avant longtemps ; Panoptès lui-même s'était équipé de matériel épistopolitain. Il brandit sa lampe torche pour dévoiler davantage les rails rouillés sortant de terre, là où la végétation cédait peu à peu du terrain à mesure que le soleil devait se faire rare, même à son apex.

De la petite dizaine, peu étaient militaires, mais juste assez pour avoir la discipline de former une avant-garde et une arrière-garde. Il espérait surtout d'eux une force de frappe extraordinaire : la raison principale de leur présence, car certains n'étaient pas des individus que l'on pourrait qualifier de « recommandables ». Le commandant sans âge avalait la distance à bon rythme, non loin du sergent du Guet qui ouvrait la marche : un gobelin dont personne n'avait véritablement retenu le nom et que tous préféraient appeler « Aigrette » en raison de ses cheveux hérissés en crête. Il n'en semblait pas particulièrement perturbé.

« - Ces tunnels. J'les sens pas, 'sieur.

- Moi non plus, fiston. Mais c'est notre unique accès. »

Ils marchaient depuis plusieurs bonnes minutes. La voie qu'ils suivaient était interminablement longue, sans croisements ni couloirs perpendiculaires. Si quelque chose leur tombait dessus, ils n'auraient d'autre choix que de fuir dans le sens opposé. Et il était hors de question qu'ils rebroussent chemin.

« - Y'a quelque chose, » précisa Aigrette en désignant, d'un léger mouvement du bras pour faire pencher sa lanterne, une ombre à terre.

Une silhouette vaguement humaine, si ce n'était qu'il manquait des morceaux et que ceux qui restaient présentaient une croute noirâtre épaisse sur une chair encore à vif. Une brève inspection permit d'apprendre que le macchabée, un homme du Mandebrume, n'était pas là depuis très longtemps. Ainsi ils n'avaient pas eu le temps de sécuriser tant que cela, ou alors étaient-ils partis à la hâte cette fois-ci ? Arkanis avait été aperçu dans le camp du Cercle, quelques jours encore : des éclaireurs l'avaient vu partir avec des hommes à plusieurs reprises au cours des dernières semaines, très certainement en empruntant ce même chemin.

Cette fois-ci, quelque chose avait mal tourné.

« - Augmentons la cadence. Et que chacun surveille les arrières de son voisin. »

Cela pouvait être l’œuvre d'un élémentaire sauvage ou d'un monstre cracheur de feu. Mieux valait ne pas savoir. Seulement, il était sûr et certain que s'ils n'avaient pas croisé cette chose en entrant dans le tunnel... c'est qu'elle était probablement encore là.

HRP:
Lun 18 Nov - 1:33

Le coup de chaud

C'est d'la bombe bébé ~


Lue marchait derrière ceux qui s'étaient retrouvés là eux aussi, bon gré mal gré, presque en apnée derrière les battements enragés de son palpitant. Naturellement, plusieurs d'entre eux s'étaient placés à l'avant, devant le Chancelier Panoptès et un étrange gobelin aux cheveux hérissés. La rousse s'était retrouvé à l'arrière avec un homme à la chevelure corbeau qui avait l'air bien plus équipé qu'elle. N'osant pas relâcher la pression sur ses dagues, elle avançait à pas prudents dans la pénombre à peine percée par les équipements dont disposaient ses alliés. Elle avait abaissé la capuche de sa cape, ce qui semblait être une décision judicieuse compte tenu du fait qu'ils ne savaient absolument pas à quoi s'attendre. S'ils étaient attaqués par d'autres individus, partisans du Mandebrume ou membres du treizième cercle, il valait mieux éviter de se tromper de cible dans ces conditions extrêmes. Pour ça, elle détailla du mieux qu'elle pouvait les personnes qui la précédaient. Quel groupe hétéroclite ils formaient... Elle n'avait aucune idée des capacités des individus qui se trouvaient là. Il faudrait improviser. Ah, elle détestait ça...  

Tellement concentrée sur son souffle et sur la découverte macabre de leur groupe, la Strigoi sursauta quand quelque chose les survola, étouffant par la même la fin de la phrase du Gobelin. La présence avait réchauffé l'air de la grotte, les mains de la rousse avaient cessé de trembler. Quoi que soit cette chose, il était peu probable qu'elle ait des intentions amicales. Elle n'eut pas le temps d'en douter, car un Blieg fonça sur l'homme qui fermait la marche avec elle, les obligeant à s'exiler hors du confort de la formation pour échapper à l'impact.

- Merde, souffla la jeune femme en se mordant la lèvre.

La créature se trouvait entre eux et le reste du groupe, et esquiver des charges dans un tunnel étroit qui n'était fait que d'une ligne droite pouvait s'avérer véritablement pénible et dangereux. Surtout que la seule chose que Lue savait de ces créatures était qu'elles explosaient au contact, autant dire pas grand-chose...

- Une idée de comment on se débarrasse de ce truc sans y passer ? Questionna-t-elle ironiquement, paniquée, la seule personne assez proche pour l'entendre.

La Strigoi esquiva une autre charge de justesse en se jetant de côté. Son épaule heurta la paroi en lui arrachant une grimace de douleur. L'espace était vraiment limité, si un autre de ces monstres débarquait, c'était terminé. Et le bruit risquait de les attirer autant que de trahir leur présence à ceux qu'ils pourchassaient...

Résumé:
Mar 19 Nov - 18:00

La dernière marche de l'Enclave

Les tunnels



La main du Chancelier lui fit plier les épaules. La douleur de l'inéluctable, la souffrance du devoir. Le voyage sans retour. Le Patrouilleur le regarda s'éloigner, ne sachant que trop bien le poids du fardeau qu'il venait de lui transmettre. Il serra les dents. Observa la petite équipe. Il connaissait son rôle, sa fonction. Le taux de survie afférent. Comme d'habitude, le Porte-Mort mériterait une fois de plus son damné surnom. Il les regarda. Un par un. Grava leur mort dans son coeur. Il y avait l'odeur de la poudre et du sang dans l'air. Celle des camps de guerre où les hôpitaux de campagne peinaient à empêcher les épidémies de se propager. Les latrines débordaient, la guerre faisait trembler la terre. Les machines rugissaient leur haine. Une terre qui n'avait connu pareil combat depuis des siècles, qui se nourrissait à nouveau du vermeil.

Il y avait Artémis. Ryker en était soulagé. Il lui sourit lorsqu'il passa devant lui. Puis s'en vint Maël. Le coeur du Mort Gris se serra lorsqu'il repensa aux conditions de leur première rencontre. Il n'était pas étonnant de retrouver l'énigmatique diplomate ici, qui avait bien prouvé son expertise au combat. Quant à celui qui s'en vint après ... Duscisio. Il avait tant changé : que lui était-il arrivé ? Quelque chose qui resterait dans le silence. Le reste ... il ne les connaissait pas. Juste, peut-être, certains des hommes d'arme du Chancelier. Chacun s'engouffra à la suite de Panoptès. A lui reviendrait la mission de fermer la marche et de surveiller leurs arrières. Il activa donc son cristal de lumière et, comme à son habitude, transforma la paume de sa main pour éclairer autour d'eux. Il sentit la petite langueur s'emparer de lui, comme toujours lorsqu'il usait de ces cristaux. Il avait pris de quoi surmonter un usage intensif, quitte à s'y perdre pour cette bataille.

Le Patrouilleur s'agenouilla devant le cadavre calciné. Il en gratta la croute de sa dague. C'était encore tiède. Impossible à identifier mais à voir la surface et l'état des murs, il avait pris une violente décharge de feu. Cela ne ressemblait pas à un lance-flamme, ou un pouvoir similaire. Il observa autour de lui, pendant que le reste avançait avec précaution. Il sentait une odeur d'ozone, quelque chose qui le préoccupait. Il posa sa main sur sa ceinture, à proximité de ses cristaux par simple acquis de conscience. Une des jeunes femmes qui avaient rejoint le groupe s'attarda avec lui. Elle avait un visage de poupon avec ses cheveux roux. Jolie. Trop pour être ici.

- Att ... lâcha-t-il lorsque la température grimpa en flèche.

Heureusement pour elle, la gamine eut assez de réflexes pour éviter la gerbe enflammée qui les frôla. Ryker s'était collé contre la paroi pour en faire de même. Il jura et glissa sa main sur un autre de ses cristaux. Ils étaient séparés du groupe à présent. Le Patrouilleur dira une dague sa ceinture et se prépara au pire tandis que la forme sphérique du Blieg ne cessait d'enfler. Il connaissait ces créatures. Il en avait déjà affronté à Dainsbourg avec Artémis.

- Putain de saloperie de merde. Si ce truc explose, ça va foutre le tunnel en danger. Ecoute, soldate. Tu vas faire exactement ce que je dis. Ou on va crever dans les cinq secondes. Prends ma main et laisse toi faire. murmura-t-il, sa main tendue vers Lue.

Il ne la laissa pas choisir et l'attira vers lui d'un geste. Son doigt glissa sur son cristal et il sentit son métabolisme grimper en flèche, sa température s'emballer et son rythme cardiaque cabosser sa poitrine. D'un sursaut d'énergie, le Patrouiller colla la jeune femme contre lui et s'assura de maintenir sa nuque de sa main. Puis dans un nuage de poussière, il bondit. Le monde devint flou autour de lui, réduit à la boule lumineuse qui enflait alors beaucoup moins vite. Il s'en rapprocha dangereusement puis dans le flou de la vitesse, il sortit sa dague et la plante dans la créature pour la faire voler en arrière, vers là d'où il venait. Il sentit son armure se racornir à ce simple contact mais sa vitesse l'entraîna vers l'avant. Il rejoint en une fraction de seconde l'autre partie du groupe, relâcha Lue à côté du Chancelier. Le Patrouilleur cessa d'utiliser le cristal et chancela sous le choc de retrouver un rythme normal. La faim s'empara de son estomac, il venait de brûler de l'énergie pour assurer une vitesse suffisante. La jeune femme avait été étonnamment légère ce qui lui avait simplifié la tâche, mais ce n'était pas le moment de s'en préoccuper.

- Un Blieg : il faut courir ou les flammes vont nous dévorer ... ou pire ! hurla-t-il, tandis qu'au fond du tunnel déjà l'écho de la déflagration se faisait entendre.

Et merde ...

- Artémis, protège nous avec ta barrière si tu le peux ! Les autres, courrez ! Soldate, tu te sens en état ? lui demanda-t-il, les yeux tournés vers le torrent de flamme qui n'allait pas tarder à se déverser sur eux.

HRP:
Mar 19 Nov - 21:36



Zénobie / Tunnel

Uhr 1901



Peu importe les décisions qu’il prend, Duscisio a toujours fait preuve d’une certaine préservation. Si les actes humains changent beaucoup son destin, en bien comme en mal, l’élémentaire s’en trouve toujours transformé. Même en vivant à Doucerive ses quelques dizaines d’années dans un coin tranquille, l’impact qu’a l’homme sur sa psyché est toujours présent. Depuis l’expédition Cœur d’Uhr, le marquage est aussi présent psychiquement que physiquement. La présence d’une belle jeune femme ne semble pas vraiment lui porter d’intérêt, le sort des soldats ne semble pas l’incommoder et la Brume l’attire bien plus que d’ordinaire.
Il doit cela à la présence de ce myste qui maudit son écorce et sa sève d’une teinte bleutée dont il n’est pas arrivé à se débarrasser. Le myste bloque tout, de sa régénération naturelle à la purification de celle-ci. Impossible de retourner à l’état de graine pour repartir de zéro. Une véritable malédiction qui l’éloigne de la Brume dont il demande de l’aide en permanence. L’écoute-t-elle ? L’entend-elle ?

Lors de son arrivée sur le champ de bataille et à la découverte du tunnel, Duscisio n’eut pas le choix. Les autorités l’ont dépêché sans lui donner de raison. Ses compétences, ses connaissances ou simplement parce qu’il est élémentaire. Il n’en sait rien. Cela lui laisse tout de même une place de choix pour en apprendre plus sur la Brume tout en se servant de ses cristaux pour être utile à qui veut bien l’entendre. D’un autre côté, c’est un mal pour un bien. Il n’y a rien à faire à l'extérieur et tout le mystère se concentre dans la source même de la Brume. Que va-t-il apprendre d’elle ? Comment va-t-il le prendre ?

L’entrée se fait tout en douceur. Le groupe maintenant dans le tunnel artificiel. Pour ce qui est du comité d’accueil, rien à voir avec les adeptes du Mandebrume au premier abord. Un boulet de canon leur fonce dessus, ce qui sépare deux personnes du reste du groupe, Ryker et une femme dont la nature séduisante ne fait plus l’unanimité pour l’élémentaire. Disons qu’il y a mieux à faire que de la contempler. Duscisio qui se retourne, observe la créature volante ressemblant à une bombe prête à exploser. S’il y a eu un petit moment d’hésitation, une courte discussion dont Duscisio n’entendait rien, mais un cristal manifeste sa présence. Il est utilisé pour accélérer les mouvements de Riker qui prend la jeune femme dans ses bras. Comme c’est mignon… Non, loin de là, il s’agit d’échapper au Blieg. Si la prise de vitesse ne suffira pas à les sauver, Ryker a le bon réflexe de prévenir l’un des membres du groupe de l’utilisation d’une barrière.
Nul besoin de s’en faire.

Duscisio n’eut pas besoin d’un ordre ou de l’information donné par le patrouilleur pour pouvoir agir plus vite qu’Artemis. Les cristaux attachés à la ceinture lui facilitent la tâche. En partie accroché par des ronces, bien caché sous sa cape, l’élémentaire sentira l’intention du Blieg d’exploser. Dans un laps de temps très court, il tend le bras vers la source de l’explosion, dès que le couple termine sa course. Une belle barrière, un champ de force qui, invisible au premier abord, se montre sous un mur d’hexagones bleus, contour cyan, les uns collés aux autres, faisant office de symbole pour démontrer qu’elle fonctionne bel et bien. Une protection aussi belle qu’efficace.
Tout le long, Duscisio reste impassible. Il donne l’impression de n’avoir fait que le nécessaire pour protéger sa personne, le groupe n’étant là que pour profiter de la zone de protection. Il maintient la barrière. La déflagration a endommagé l’entrée du tunnel, cela peut s’effondrer à tout moment. Information qui se vérifia un peu plus tard par la chute d’une portion du mur et du plafond, leur coupant le chemin du retour. De plus, la structure fragilisée par le temps s’effondre vers eux, toujours protégée par l’apothicaire qui ne montre aucun signe quelconque d’inquiétude vis-à-vis des deux rescapés.

Résumé:

Mer 20 Nov - 23:51

Voyage au centre de la Brume

Acte I - Event III

Le soulagement d’avoir rattrapé Panoptès et la joie de retrouver Jessamy et Ryker à ses côtés s’étaient vite dissipés face à la tension qui imprégnait Zénobie. Même Maël, d’ordinaire prompt à détendre l’atmosphère, semblait avoir laissé son humour au seuil de cette entreprise périlleuse. Son visage, bien que plus détendu que celui de ses compagnons, trahissait une résignation familière face à l’improbabilité de leur réussite. Le maître de l’Alliance était entouré d’un groupe disparate : un gobelin à l’œil vif, une jeune femme aux cheveux ardents, un homme aussi pâle que lui, paré de roses, un amélioré à l’air bourru, un vétéran serein et un homme à la myopie évidente. Une assemblée improvisée, rassemblée dans l’urgence, qui s’aventurait maintenant dans les entrailles de l’ancienne capitale sans même s’être présentée. Le Chancelier, imposant et silencieux, était leur seule ancre commune, la figure autour de laquelle se cristallisait leur fragile détermination.

Épée au clair, Maël progressait dans l’obscurité, ses sens en alerte. Contrairement à Ryker, il avait choisi de préserver la lumière de son cristal pour des situations où elle deviendrait indispensable – et elles viendraient, il en était certain. Sa peau, luisante d’un éclat discret, offrait un maigre repère à ceux qui le suivaient, tandis qu’il fixait son attention sur la torche de leur guide pour éviter de trébucher. Le silence oppressant fut soudain rompu par un souffle chaud qui fit frissonner l’air autour d’eux. Le grigori pivota juste à temps pour entendre Ryker s’exclamer : un blieg ! La créature, incandescente dans la pénombre, éclaira brièvement leur arrière-garde. Avant que Maël ne puisse réagir, le patrouilleur bondit, frappant la créature d’une violence inouïe avant de réapparaître à l’avant du groupe, aussi vif qu’une ombre. "Artémis !", lança-t-il, confirmant l’identité de l’homme aux yeux jaunes. Mais ce fut un autre qui intervint lorsque le blieg, dans un dernier éclat, explosa avec une puissance telle que les murs tremblèrent sous le choc. Une barrière inespérée s'érigea entre le groupe et l'explosion, les protégeant durant les longues secondes ou la chaleur déferla.

Quand Maël jeta un regard en arrière, il distingua deux nouvelles lueurs dans l’obscurité : non seulement le blieg avait survécu, mais il s’était scindé en deux, et chaque moitié grossissait à vue d’œil. Sans hésiter, le Veilleur détacha la courroie d’une poche fixée à son bras, laissant glisser dans sa main un objet complexe : un totem. En un instant, une silhouette éthérée se matérialisa à ses côtés : un félinimbus aérien, majestueux chat de nuages qui semblait presque fusionner avec la brume environnante. Sans un mot, Maël intima à l’élémentaire de leur offrir une couverture. Tandis que le félinimbus s’élargissait pour obstruer le tunnel, Maël pivota vers ses compagnons, sa voix tranchant l’air :

Fuyons  !

Il n’attendit pas de réponse, espérant que quelqu’un dans le groupe soit en mesure de les guider vers le coeur de la ville. Tout dans l’attitude de ces inconnus suggérait une expérience certaine ; il y avait là plus que de simples suivants.

Il devrait tenir un moment, lança-t-il avec un sourire en coin, sans ralentir sa course. Les félinimbus ont l’ascendant sur les bliegs.

L’adrénaline chassait l’inquiétude de Maël, ou peut-être était-ce la Brume elle-même qui le poussait à cet étrange état de sérénité, presque dangereux dans cet endroit aux milles périls. Pourtant, son esprit restait affûté. Le danger n’avait jamais suffi à brider son instinct : il avait une mission à accomplir et rien, ni la peur, ni le chaos, ne le ferait dévier de son objectif.

Résumé:
Ven 22 Nov - 11:06


Partir à l’aventure aux côtés du Chancelier n’encourageait guère le vagabond. S’il paraissait relativement bien conservé, il s’agissait tout de même d’un vieil homme, un politicien de surcroît. Une pièce rapportée en plus à protéger. Le gobelin, qui faisait office de guide, semblait être un vétéran expérimenté. Au moins un. Il reconnut évidemment le brave Duscisio dont l’apparence avait quelque changée. On ne lui demandera pas ce qu’il s’était passé, mais l’homme aux cheveux d’albâtre songea à ce qui lui avait dit Réno, notamment sur le fait qu’il le protégeait de certaines institutions qui rêvaient de s’emparer de lui. L’élémentaire n’avait pas été revu depuis l’incident de l’Arbre-Dieu. La suite n’appartenait qu’à ce dernier. Il croisa le regard de Ryker. Enfin une personne sur laquelle il pouvait compter. Quant aux autres, Artémis ne les sous-estimait point, mais ne les connaissait pas pour autant. S’ils étaient ici, on pouvait imaginer qu’on les avait jugés utiles à cette expédition.

L’entrée dans ce tunnel rappela un amer souvenir dans les ruines du Dainsbourg.  Il se souvint de sa rencontre avec Jessamy, dans les tréfonds de Dainsbourg, après un terrible affrontement contre un vestige du passé. Il se souvint d’une certaine zoanthrope, Elizawelle Flatterand, qu’il n’avait pas eu l’occasion de revoir depuis cette expédition. Redoutable guerrière. Mais celle qui resta toujours à ses côtés, de manière indéfectible, n’était autre que la Banshee. A l’échelle d’une vie, leur amitié était assez récente, mais il avait l’impression d’avoir une sœur depuis de nombreuses années. Elle et Ryker étaient présents lors des évènements de la tour d’Yfe. Les avoir à ses côtés était une bénédiction. Hélas, la destinée faillit en décider autrement en envoyant des maudits Blieg à leur rencontre. Les corps calcinés avaient interpellé l’ensemble de la troupe. Trop tard. Ryker et une inconnue, en fin de file, furent pris pour cible. La patrouilleur, fidèle à lui-même, réagit et emporta sa comparse avec lui, fusant à toute vitesse.

Un ordre. Une demande. Une évidence. Artémis allait activer une barrière magique, quand il s’aperçut que Duscisio réagit bien plus rapidement. Il créa une belle barrière énergétique qui stoppa la propagation des flammes vers le groupe. L’image était époustouflante, à couper le souffle. L’élémentaire avait suivi le mouvement ennemi, les déplacements de Ryker, afin de pouvoir soutenir l’équipe de la manière la plus efficiente possible. S’il donnait l’air de se moquer des autres, Loup Blanc se rappela son sacrifice lors de l’expédition à la forêt de l’Arbre-Dieu. Il sourit discrètement et se concentra de nouveau vers l’avancée. Cet homme, malgré les épreuves vécues, son cœur déchiré et son physique abimé, semblait continuer de croire en un meilleur avenir. Le vagabond remarqua que l’élémentaire s’était perfectionné durant ces longs mois.

Hélas, les différents choix, pour l’instant, semblaient jouer contre eux. Duscisio avait consommé une bonne partie de son énergie malgré l’air qu’il se donnait. Quant aux Bliegs qui venaient d’exploser, on pouvait percevoir deux petites sphères enflammées qui grossissaient à mesure du temps qui s’écoulait. Le Portebrume, pressé, tenta de correspondre la Brume, son amie, avec une certaine vigueur. Après quelques essais, elle finit par répondre à ses appels. Mais cette fois-ci, quelque chose semblait déranger l’homme aux cheveux d’albâtre. La Brume n’était pas comme d’habitude, son intensité différait, puis son apparence. Pour la première fois depuis qu’il lui eut été permis de communiquer avec la Malicieuse, elle prit une forme humaine. Il n’était pas le seul à la voir, ses camarades semblaient également l’observer. Une silhouette brumeuse d’un petit garçon ayant à peine l’âge de raison.

Ses poils se hérissèrent. C’était nouveau et peu habituel. Domptée et silencieuse depuis un moment, sa Nebula semble retrouver de sa vigueur et s’agita en son sein. Une voix s’imposa dans sa tête, Sa voix : « Tu ne devrais pas te soucier d’eux, mais des autres qui vous attendant dans la ville. Fuir est une sage décision. Seuls les morts les occuperont pour vous permettre de fuir. C’est ce qu’ils ont fait. », dit-il en jouant avec un objet que le vagabond ne parvenait pas à identifier. L’espace d’un instant, Artémis jurerait avoir vu le détail d’un vêtement, d’une expression sur son visage, d’un œil… Des mouvements constants, comme ceux d’un gamin de cet âge. La brume avait une réelle attitude d’enfant et cela lui fit ressentir un profond mal-être. Cette apparence ne pouvait signifier que certaines choses, et aucune de ces choses n’était agréable à visualiser. Alors qu’il voulut en savoir davantage sur les personnes qu’elle mentionna, la silhouette disparut une fois son office achevé.

Aussitôt, le vagabond fit part de ses découvertes sans plus de cérémonie. Maël, manifestement un Erilim à la couleur de ses ailes, réagit expressément. Il activa un totem d’invocation déployant un majestueux Felinimbus. Le chat constitué d’air constitué de nuages s’élargit pour offrir une couverture au reste du groupe. Le Grigori intima une fuite. Artémis effleura l’un de ses cristaux. Ses oreilles s’agrandirent et prirent une forme plus pointue, son nez s’allongea légèrement à l’instar d’un museau, ses yeux fendirent légèrement en oblique et ses pupilles devinrent bien jaunes. Le semi-canidé prit la tête du convoi et guida la troupe à l’aide de ses sens.

Le subterfuge semblait avoir fonctionné. Ils marchaient depuis une bonne demi-heure et n’avaient pas rencontré de Blieg. Loup Blanc s’inquiéta légèrement de l’état émotionnel de ses comparses. Ryker, Jessamy et lui avaient l’habitude de s’enfoncer dans la Brume, mais les autres en subissaient les effets peut-être pour la première fois. Et même pour des personnes expérimentées, le trouble agissait comme si c’était la première fois. Malgré les nombreuses expéditions réalisées et son affinité, Artémis ne se sentait pas à son aise. Cet environnement représentait l’enfer sur terre. Un enfer qui réservait de nombreuses surprises à chacun des aventuriers. D’ailleurs, l’homme aux cheveux d’albâtre ordonna aux autres de ralentir. Un élément à l’aspect métallique l’interloqua. Il s’approcha doucement, à pas de loup, constatant après une rapide inspection qu’il s’agissait finalement de wagons, au nombre de trois, sur les rails. L’ensemble n’était évidemment pas fonctionnel. Ils avaient été abandonnés par la locomotive. La poussière accumulée semblait permettre de croire que ces pièces-détachées étaient restées ici depuis un certain temps. Le vagabond fit quelques pas en arrière et retrouva ses camarades.

« Contournons ces wagons sans un bruit. Dieu seul sait ce qui peut encore dormir à l’intérieur. », dit-il en chuchotant très bas. Les Bliegs avaient déjà puisé dans les ressources de certains, probablement les psychés de tous, alors limiter les risques semblait être une bonne idée. Peut-être rataient-ils l’opportunité d’en apprendre davantage sur cet endroit. Peut-être. Le vagabond contourna discrètement les wagons, faisant attention à chacun de ses pas. Il ne voulait pas risquer de réveiller - peut-être - des êtres endormis depuis un bon moment.

Résumé:

Sam 23 Nov - 15:27

Elle avance prudemment, de sa marche à trois temps, au sein du cortège des éclaireurs. À ses côtés, des têtes connues — rassurantes. D’autres qu’elle espère ne pas être des traîtres, des infiltrés à la solde de leur adversaire — elle en a vu trop pour ne pas se méfier, même un peu, pour ne pas renâcler devant l’obligation de confiance inconditionnelle. Pourvu qu’ils soient fiables. Pourvu qu’ils savent arpenter le sentier brumeux. Elle considère un instant le cadavre calciné, fronce le museau devant le fumet de viande brûlée. Le souvenir qui lui revient lui paraît plus âpre que l’odeur.

« À la tour d’Yfe, il y avait quelqu’un dans le même état. Je suppose que nous sommes sur le bon chemin. », grince-t-elle.

Les plumes de Jessamy se dressent soudain sur son échine, agitées d’un frisson alors qu’un courant d’air chaud les frôle. Elle fait volte-face alors que la créature boursouflée dresse un mur incandescent, fractionnant le groupe. Sa mâchoire se contracte autant que ses phalanges. La sueur commence à perler sur son front, s’emmêlant dans ses cheveux rêches. Pourtant, Ryker et la Strigoi les rejoignent dans un souffle, à temps pour se réfugier derrière l’égide de l’éphèbe aux roses. À l’occasion, elle lui demandera dans quel terreau s’enfoncent les racines d’une fleur si curieuse. Question rompue net par l’effondrement d’une partie du plafond, rendant caduque tout espoir de rebrousser chemin. Ils ne pouvaient qu’avancer vers celui qui, peut-être, les attendait.

Poussée par l’ordre de Maël, la mutante suit le mouvement, regrettant de ne pouvoir s’attarder sur la forme féline qui les défend. Une invocation à l’image des mains qui l’ont façonnée — délicate, charmante et redoutable. Le temps est trop court, aussi, pour interroger Artémis sur cette silhouette d’enfant. Une apparition vaporeuse, subtile, d’autant plus inquiétante qu’elle arbore les traits de l’innocence. Péniblement, ses jambes l’amènent clopin-clopant au devant du groupe, tout près du Loup Blanc. Le souffle court, elle s’accroche à cette présence rassurante, à son flair qui les guide.

Sa canne butte contre des rails. Une vibration remonte du pied à au pommeau, pour se répercuter dans la main de la mutante. Elle grimace un peu, observant les restes de l’ancienne ligne de chemin de fer. Des wagons abandonnés sur leur voie, des mastodontes de fer poussiéreux. Morts, ou endormis. Artémis suppose que leurs carcasses nourrissent d’autres créatures des tréfonds, aussi voraces que leurs ennemis explosifs. Elle l’imite, frôlant en silence les parois surélevées par des roues.

BAM.
Un fracas surgit du côté de son oreille, et elle s’éloigne soudain dans un hoquet de surprise, réprimant le feulement qui lui irrite les cordes vocales.  Son regard trébuche sur l’ombre qu’elle perçoit à la fenêtre, à travers le verre pourtant éteint par les âges.

« À l'aide… »

Un pli se creuse sur le front diaphane. C’est une voix lointaine, étouffée, qui lui parvient à travers la vitre. Des syllabes infiniment tristes qui lui empoignent les viscères.

« Ma petite fille… Sauvez nous. Sauvez la… »

Son myocarde se serre. Sa main agrippe la manche d’Artémis, alors que ses prunelles hantées restent rivées sur l’ombre.

« Tu as entendu ? Là… À l’intérieur. Il y a quelqu’un. Ils nous ont vus. », souffle-t-elle.

Inutile, alors, de se terrer auprès de la poussière. Ce qui se cache ici déjà les attend. Lâchant le tissu, la mutante pose cette fois sa main griffue sur la vitre, là même où le désespoir l’a heurtée. La moiteur de sa paume colle sa peau au verre glacé. Elle appuie aussi son front, tentant de discerner autre chose que la vague silhouette qui l’a appelée. Sa carcasse semblerait presque entrer en fusion avec la paroi. D’une voix blanche, elle répète :

« À l’intérieur. On doit monter… à l’intérieur. »

Résumé:
Dim 24 Nov - 0:12

Maître du Jeu

Jessamy, Artémis, Lue

Après être entrée dans la voiture et avoir constaté la présence du fantôme de la petite fille, assise sur l'un des strapontins, et de sa mère, aux bras enroulés autour d'elle, une douleur te transperce le cœur Jessamy : la tristesse qui imprègne l'air de ce si petit espace, si grande et profonde. Le désespoir de ces défunts, apparaissant progressivement autour de vous, te clouent au sol. Artémis t'a rejointe à l'intérieur, sa peine semble moins lourde, mais il est aussi confus. « Aidez-moi », « s'il vous plaît » ou encore « j'ai si peur », les phantasmes se fendent de supplications à peine audibles, mais il n'y a rien que vous puissiez faire pour délivrer ces vestiges de ces personnes qui ne sont plus là depuis bien longtemps.

Soudain, le silence. La petite fille qui vous dévisageait jusque là lève son visage vers le toit de l’habitacle, quelques secondes avant qu'un bruit, un choc lourd, ne vienne résonner contre la tôle au-dessus de vous. Vous tremblez, mais ce n'est pas les vibrations : c'est toute la voiture qui est secouée à chaque coup successif contre le plafond. Vous en êtes sûrs désormais : quelque chose se déplace là-haut.

Encore proche de la sortie, tu peux constater en sortant, Lue, ce sur quoi se pose le faisceau de lumière de ta lampe : une monstruosité à la stature improbable, un corps musculeux, rose incandescent, une gueule garnie de crocs acérés et des bras aux extrémités griffues, d'abord conservés le long du corps, puis dépliés lentement pour dévoiler des ailes impressionnantes. Au moment où tu retournes à l'intérieur du véhicule, le monstre se jette à tes trousses et tente de s'introduire. Vous êtes pris au piège et il va bientôt parvenir à se glisser à l'intérieur...

Du brouhaha à l'extérieur vous informe, malheureusement, que les secours ne risquent pas de venir de sitôt, occupés qu'ils sont par d'autres assaillants potentiels.

Duscisio, Ryker, Maël

Sans que vous vous en soyez vraiment rendus compte, le groupe s'est divisé. Certains sont restés derrière pour investiguer le mystère des voitures du train tandis que d'autres ont continué à progresser. D'abord Duscisio, puis ensuite Ryker et Olaf, vous vous retrouvez en cercle à constater la présence à terre d'une masse rosâtre, pâle, entre vous. Un Fledermaus et, vu sa taille, probablement pas un adulte.

« Tué par balles, » que l'homme-taupe confirme, après avoir senti une douille « de fabrication épistopolitaine ». Sergei, qui surveille vos arrières, hausse les épaules.

Ryker, tu es le premier à redouter l'absence d'un second cadavre : la mère de la chauve-souris géante, juvénile. La réponse vient aussitôt : un bruit issu des voitures, derrière vous. L'amélioré sort sa sulfateuse sans avoir eu le temps de tirer une seule balle. La silhouette du monstre ayant atterri sur le toit du second wagon vient de disparaître à l'arrière pour gagner l'ouverture par laquelle sont passés vos comparses.

Le réflexe logique serait de leur venir en aide en submergeant l'ennemi. Seulement celui-ci n'est pas venu seul et Aigrette parvient tout juste à déjouer l'attaque sournoise d'un spécimen tombé de la voute du tunnel. Mael, tu te retrouves séparé du reste du groupe, le Fledermaus chassant Jessamy, Artémis et Lue sur ta gauche et un second spécimen, plus trapu encore, entre Sergei et toi. Ce dernier te fait signe de plonger à terre car il compte utiliser sa mitrailleuse Dexar, un sourire sadique sur le visage.

Tout cela est un peu étrange, pour les plus bûcheurs du Bestiaire parmi vous : les Fledermaus sont normalement des individus solitaires. Alors non seulement, deux, mais trois... Et ce n'est pas tout, car vous pouvez apercevoir la silhouette d'un autre juvénile ramper sur le toit du troisième wagon, le dernier et le plus proche de la dépouille que vous veniez de constater, rejoint par un autre encore.
HRP:
Dim 24 Nov - 23:22

Chasse nocturne

Des wagons ? Une gare ? Des monstres horrifiques ?



Il n'avait pas fallu longtemps pour que tout commence à s'échauffer. A peine le Patrouilleur avait eu les réflexes d'éviter de se faire calciner que la déflagration les avait rattrapé. La vitesse d'action de Duscisio les avaient protégé tandis que Maël les avait couvert à l'aide d'une invocation. Leur groupe était ... compétent. C'était une bonne chose. Il soupira en prenant quelques secondes de répit mais déjà il fallait se remettre en marche. Il s'approcha de la jeune femme qu'il avait pu tirer de là, s'inquiétat de savoir si tout allait bien de son côté et d'échanger quelques mots de politesse.

- Ah, oui désolé. On ne s'est pas présenté. La situation ne permet pas vraiment de faire de sentiment. Je suis Ryker. Patrouilleur de la Guilde des Aventuriers. lâcha-t-il avec un maigre sourire, conscient que ce statut avait tendance à mettre les gens mal à l'aise. Désolé pour tout à l'heure, c'était un peu rapide ... les cristaux ont souvent des effets ... surprenants.

Il s'avança ensuite vers la tête de peloton pour échanger quelques précautions avec Artémis puis Maël et revint enfin prendre son poste, sans avoir osé s'adresser à Duscisio. Les sévices qu'il portait étaient assez visibles, et il n'aurait su dire ce qui avait pu le projeter là. Il passa sa main sans y penser sur son flanc, là où un réseau de cicatrices avait tendu sa peau de veinules noirâtres qui peinaient à s'estomper. Tous avaient payé le prix de l'expédition auprès de l'Arbre-Dieu. Etait-ce cela pour l'élémentaire ? Le Patrouilleur sursauté lorsqu'une forme improbable se dessina aux abords de sa vision. Il fronça les sourcils, chercha dans les volutes informes de Brume. Etait-ce son imagination ?

Ryker n'échangea que peu avec les autres membres du convoi, qu'il ne connaissait pas. La taupe était excentrique, tandis que le gobelin ne faisait pas du tout attention à lui. L'épistote, lui, le rendait un peu inquiet. Il n'aimait pas la technologie, tout comme il sentait sa tumeur malicieuse s'agiter en sa présence. Il percevait un murmure constant de sa nebula, comme si elle lui parlait. Ce qu'il savait être une construction de l'esprit. Il frémit, tandis qu'ils marchaient sur les pas du Mandebrume. Là, du coin de l’œil ! Oui, il l'avait vu : il en était sûr ! C'était ... oh non ... non non. Pas ... encore. Il se frappa le crâne, se cacha l'oeil de la paume de sa main comme s'il cherchait à y enfoncer cette image qui venait de le prendre aux tripes. Un crâne dans la nuit, serti de bois de cerf. Pas encore. Il fouilla, chercha sur lui l'écharde du monstre. Elle ... n'y était pas. Il se retourna. Rien. Une vision de l'esprit ? Encore ce liéchi ?

Ce fut quand ils s'arrêtèrent sur un signe de l'homme-taupe que le Patrouilleur revint à la hauteur de la tête du groupe. Il laissa sur le côté les autres, qui fouillaient de leur côté, sans s'attarder sur l'attitude anormale de Jessamy. Il avait, de loin, reconnu cette patte décharnée. Ce rose putrescent et violacé qui avait hanté ses nuits pendant près de dix ans. Dix années pendant lesquelles il avait revu en cauchemar le massacre perpétré par un Fledermaus non loin du Val. Une expédition qu'il avait été censé guider et qui avait refuser d'attendre. La créature lui avait laissé de profondes cicatrices sur le torse, ainsi qu'une tendance à toujours se retourner pour vérifier qu'il n'était pas suivi. Il cru une nouvelle fois apercevoir le Liéchi du coin de l'oeil mais son coeur palpitait à l'image du cadavre qu'Olaf était déjà en train de retourner. Le Patrouilleur s'accroupit à côté de la bête, l'ausculta. Oui, c'en était bien un. Plus petit que ce qu'il avait déjà rencontré. Comme ... un enfant. Un juvénile ...

- Un Fledermaus ... j'en ai déjà affronté un. Il avait ravagé une expédition complète dans la Brume ... bon sang. Ces bestioles sont des chasseurs incroyables. Endurants, ils ne renoncent jamais. Se cacher ne sert à rien : ils nous repèrent grâce aux battements de notre coeur, par le son. La seule chose qu'ils craignent c'est la lumière. Et merde ... Chancelier, dites à vos hommes de se procurer des ...
commença-t-il avant de s'arrêter bouche bée pour contempler les deux wagons qu'ils avaient dépassé.

Un juvénile tué par balle, hein ? Alors là, ce devait être la mère ... le père et la fratrie ? Bon sang, mais ces créatures étaient des solitaires : comment c'était possible ? Pas le temps ! Ryker activa d'un geste son cristal et sentit tout son être le picoter lorsque la lumière commençait à garnir ses membres. Il goûta cet air empli d'ozone comme à chaque fois qu'il entamait la transformation et dégaina son imposante épée effilée, qui saillait dans son dos. Son métal particulier étincela en reflet de la lumière qui coulait littéralement sur lui.

- Maël ! Ils viennent sur vous ! La lumière ! Utilisez la lumière ! hurla-t-il alors qu'il entendait déjà le cri de panique de Sergeï qui activait sa mitrailleuse pour allumer les créatures qui rampaient au-dessus d'eux.

Un autre cri faillit faire faire demi-tour au Patrouilleur lorsqu'Olaf leur faussa compagnie en hurlant à la vue des monstres. Putain, mais c'était quoi cette bande d'amateurs ? Ryker expira lorsque Maël étincela à son tour. Deux formes surplombaient le Chancelier. Elles rampaient vers lui, se glissaient sur le métal et préparaient leur assaut. La première, plus petite, se ramassa sur elle-même, ses crocs cliquetèrent en silence tandis qu'une bave luisante écumait sur ses lèvres étirées. Elle étendit ses épaisses oreilles pour se préparer à l'assaut et d'un bond surhumain, elle se rua sur le Chancelier.

Dans un éclair de lumière, une forme humanoïde s'interposa et tira un cri de douleur à la créature lorsque le métal perfora son abdomen. A moitié transformé en lumière, Ryker avait laissé une partie de son corps exposée pour manier son épée. Il attrapa la bête à la gorge et enfonça son arme pour achever de lui sectionner le corps. Il fit tourner le fil de son arme et l'éventra avant de la laisser tomber à terre. Des traces de griffes maculaient son armure mais il paraissait miraculeusement indemne.

- Chancelier, restez en retrait ... murmura-t-il tandis que l'autre Fledermaus adulte qui accompagnait le juvénile écarquillait les yeux et ouvrait la bouche pour laisser échapper une horrible plainte dont l'écho résonna loin.

La bête sauta sur Ryker tandis que celui-ci s'écartait du chancelier. Le Patrouilleur fit varier l'intensité de la lumière qui le nimbait jusqu'à devenir un réel phare dans la nuit. Il sentit ses membres s'alourdir, son épée devenir de moins en moins maniable malgré sa légèreté. Il ne pensait pas avoir à se servir aussi tôt de ses cristaux et déjà leur prix s'annonçait lourd. Il serra les dents en encaissant une morsure violente du monstre sur son épée, qu'il peina à maintenir à distance. Le Patrouilleur fut envoyé rouler à terre alors qu'il avait tenté de lui percer le cuir. La bête continuait ses assauts sur lui avec une vigueur renouvelée tandis qu'il perdait peu à peu en luminosité. Combattre un adulte n'était pas la même paire de manches.

- Maël, j'ai besoin de plus de lumière ! hurla-t-il, tel un parangon de lumière.

Ryker cessa alors d'émettre la moindre lumière pour se concentrer sur le combat et compta sur la capacité d'action du grigori pour que les deux changements brusques de lumière puissent suffisamment perturber la créature pour la blesser ou la faire fuir. Il ne pourrait pas tenir face à un tel prédateur : la seule chance était de lui faire suffisamment mal pour le repousser et le dissuader de les suivre ... or il venait de tuer sa progéniture.

- Maël ! hurla-t-il à nouveau, tandis qu'un cri perçant émanait de plus loin dans la caverne.

Un cri humain dans un premier temps, puis un cri guttural, monstrueux. Quelque chose d'autre qui faisait vibrer d'écho les parois du tunnel. Merde, ils allaient rapidement se faire déborder. Il fallait partir. Vite ! Où étaient les autres ? Que foutait Artémis ? Il avait une expertise sur ce genre de créature. Ils avaient besoin de lui. Il fallait se tirer, d'urgence. Putain, mais des Fledermaus. Quatre putain de Fledermaus. Dans quel enfer avaient-ils mis les pieds ?

HRP:
Mar 26 Nov - 23:08

À l’intérieur.
Happée par un abîme de fer et de sanglots, Jessamy s’y ferait presque prisonnière. La gorge serrée, elle laisse s’échapper de ses yeux des larmes glacées par le froid. Sa main s’agrippe à une barre, phalange après phalange, révélant ses griffes aux fantômes. Son apparence ne les rebute pas ; au contraire, leurs appels se font plus clairs dans son crâne, leur détresse plus poignante, prête à exploser dans sa cage thoracique. Elle survivrait au plus profond des désespoirs ; peut-être est-ce pour cela qu’ils l’ont hélée la première.

La mutante avance entre les ombres assises sur des sièges, ratatinées de peur et de suppliques. S’essuie le nez et les prunelles d’un revers de manche, en se spectre diaphane dans l’allée poussiéreuse. Certaines légendes disent que les Banshees sont toujours au plus près de la mort, au point de la voir venir ; que leurs pleurs grinçants résonnent même en des lieux désertés par toute vie depuis bien longtemps. Le mythe se fait seconde peau, alors que Jessamy finit par s’asseoir en face de celle qui l’a suppliée. Son regard brillant s’attarde un peu sur elle, avant de dévier sur la petite fille. Deux lueurs dans l’abysse, vers lesquelles elle plonge inlassablement. Un nouveau sanglot lui agite les épaules.

« Je suis désolée. »

Elle secoue la tête, fourrant son visage dans ses paumes, mettant à nu son impuissance devant le calvaire. Prétendre que tout ira mieux serait mentir. Leur dire qu’elle ne peut rien faire pour eux serait une blessure de plus. Ne reste que piètres excuses hachées de larmes.

Quelque chose bouge, là-haut.
La fillette en face d’elle l’a senti aussi ; son minois figé par le temps se tourne vers le plafond. Jessamy l’imite, avant que son regard ne trébuche sur Artémis, puis sur Lue. Elle se lève d’un bond, le visage strié de sillons rosâtres. Râpeuse, sa voix s’élève :

« Derrière vous ! »

Ses plumes se hérissent à la vue de ce qui s’introduit à leur suite. Chair à vif, faite volatile. Les fantômes dans son champ de vision disparaissent, affadis par l’apparition tangible, et avec eux la tristesse qui lui mangeait le cœur. Reprenant son souffle, elle brandit sa canne.

« Je vais essayer de l’éblouir ! »

Un claquement, et les crépitements d’une sphère lumineuse déchirent la semi-obscurité. Ce n’est qu’un pari, une idée : ceux qui peuvent aussi bien se mouvoir dans les ténèbres craignent les astres. Les cris et les lueurs qui lui parviennent à travers la paroi laissent penser que la créature n’est pas seule.

Un cri, soudain, lui tord le ventre.

« Ça sent mauvais. », lâche-t-elle en dardant du regard la direction du bruit.

Un autre, profond, caverneux, lui secoue les os.

« Très mauvais. »

Sa main libre enserrant un cristal bleuté et cerclé d’argent, elle lance un appel guttural à leur adversaire, son timbre sifflant entre ses crocs :

«̴̳̀ ̴͓͑Ì̶̼l̷̺͛ş̶͝ ̷͓̍n̸͙͐’̴͙͐ē̶̼ń̵͇ ̴͚́v̷̡͗ą̶͘l̶̺̎e̴͉̅ṉ̵͋t̸̡̆ ̵̪̏p̵͔̊a̴̦̓s̴̰͗ ̶̜͒l̸̙͝a̵̘̕ ̶̗̀p̶̬͘è̸̝i̶̯̾n̶̫̑è̷͈.̴̲́ ̶̘͠Q̶͍͝ǘ̸̡è̴̡ ̶̠͛l̵̟̋ȁ̸̙ ̵̠̓p̶̲̈́e̷̱̚ả̴̻u̸͔̽ ̴̧̐ṡ̶̜ụ̶̿r̷̩̾ ̵̛̼l̸̲̍ė̷̪s̸͍̐ ̷̰́o̸̺̓s̶̩͠.̸̫̿ ̵̣̔C̵̱̅h̸̺̎e̷̢̓r̴͉̃c̶̼̒h̴͎̾o̴̥͋n̵̻̓s̷͚͝ ̷̣͑a̷͉͐i̵͎͂l̵̦̈l̷̞̍e̸̞̓ŭ̴̺r̵̮͂s̴̯̀.̶͙͝ ̸̞̈́»̴̃

Les mots — les sons, plutôt — semblent avoir été entendus. La sortie trouvée, enclenchée, Jessamy pose pied à terre.

« Retraite ! »

L’appel de Panoptès lui paraît plus pressant, plus nerveux que ce qu’il a pu laisser paraître jusqu’alors. Elle se tourne alors vers ses camarades, prête à détaler.

« Faisons comme il dit., fait-elle. Si ces trucs s’approchent de trop près, on pourra toujours essayer de les repousser. »

Résumé:
Mer 27 Nov - 2:15

Mille et une façons de mourir

Par un auteur disparu~


Lue eut à peine de tendre la main vers celle de l'homme qu'elle fut emportée, le souffle coupé, dans un bond fantastique. Ils frôlèrent la créature et le monde ralenti à nouveau quand ses pieds touchèrent le sol, aux côtés des autres. Elle voulut tendre les bras pour retenir celui qui venait de lui sauver la vie, mais le tournis l'empêcha de bouger et elle dut faire un énorme effort pour ne pas vomir. La déflagration du Blieg fut suivie d'un grondement sourd qui masqua la question qui lui était posée, une barrière se déploya autour d'eux. Elle en avait déjà vu des semblables lors de ses expéditions, mais c'est l'individu qui l'avait déclenchée qui attira réellement son regard, si pâle au milieu du torrent de flammes qui s'écrasait contre le dôme. Se secouant, la rousse prit une grande inspiration, elle devait se ressaisir. Il n'y avait plus qu'une option désormais : avancer, et vite, car déjà, les ennuis revenaient à la charge.

- Lue, Tartare du Magistère, répondit-elle à voix basse, comme une bleue impressionnée. Tu ne devrais pas t'excuser, tu m'as sûrement sauvé la vie... Merci. Je te suis redevable, bredouilla-t-elle par la suite, à la limite de l'embarras.

Une silhouette fantomatique apparut devant eux, un... Enfant ? Oui, un petit garçon à priori. La jeune femme pâlit, profondément mal à l'aise en le voyant jouer tranquillement, comme s'il tenait leur vie entre ses mains. Qui donc avait eu un tel effet sur la brume ? Elle scruta le groupe sans parvenir à le déterminer. Un guerrier aux cheveux opalescent leur apprit qu'il fallait fuir. Était-ce pour lui que l'enfant de brume était apparu ? Une drôle de bête se manifesta, clairement alliée, et fit rempart de son corps tandis que son maître leur intimait de courir en leur assurant que son invocation retiendrait les dangereux Blieg. La Strigoi ne se fit pas prier et emboîta le pas à ceux qui se trouvaient en tête, encore perturbée par l'apparition.

Ils progressèrent un moment dans un silence nerveux, jusqu'à ce que l'homme aux cheveux blancs - qu'il lui semblait avoir entendu appelé Artémis - leur demande de s'arrêter. Cette accalmie aurait pu ouvrir la voie à des discussions dans un autre contexte, mais tous semblaient secoués et le moindre crépitement, grattement, craquement mettait les nerfs de la rousse à rude épreuve. Des wagons sortirent de l'obscurité brumeuse à mesure qu'ils avançaient prudemment. Lue ne le sentait pas, vraiment pas. Ce qu'elle sentait, en revanche, était une odeur de sang persistante, comme si ces wagons étaient emplis de cadavres frais. Gardant pour elle cette sensation désagréable qui attisait son appétit, elle opina à la proposition d'Artémis et longea la paroi, toujours en queue de convoi.

Une étrange femme, non, une Banshee, remarqua-t-elle, se jeta presque soudain contre la vitre poussiéreuse d'un des wagon pour lorgner l'intérieur, comme obsédée par son contenu. Lue se rapprocha d'eux, happée par le doux fumet qui venait du même endroit, et suivi l'homme-loup et sa comparse à l'intérieur. Elle crut à nouveau rêver devant l'illusion d'une mère et de sa fille, assises là, en larmes, terrifiées par quelque chose que la Strigoi ne pouvait voir, un songe du passé. Elle s'en détourna vite, mal à l'aise devant le chagrin de l'être au physique si particulier, pour chercher la source de l'odeur, mais ne perçut rien qui justifiait la fragrance qui la mettait tant en appétit. Était-ce au-dehors ?

Quelque chose tomba lourdement sur le toit, une fraction de seconde plus tard elle dévoilait sa gueule pleine de crocs juste au-dessus de Lue qui se trouvait encore dans l'entrée et la jeune femme se jeta à l'intérieur pour esquiver l'assaut de l'aberration, juste à temps pour éviter la mâchoire qui claqua dans le vide. La chose n'en resta pas là, furieuse, elle voulut entrer en forçant le passage. La jeune femme fut brièvement aveuglée par l'intervention de la Banshee, la créature elle, sembla en être affaiblie. C'était maintenant ou jamais. Lue raffermit sa prise sur ses dagues et se jeta sur la bête, la première fendit à peine la peau, la deuxième l'entama un peu plus profondément, mais pas assez. La rousse y avait pourtant mis toute ses forces. Quelle poisse !

Un cri horrifié lui vrilla les tympans, puis un autre, comme un grondement orageux, quelque chose qui dégageait une terrible puissance. Lue se précipita vers la porte qui se trouvait derrière eux puisque la créature bloquait toujours l'autre passage. Le mécanisme céda d'un coup.

- Par là !

Ils se retrouvèrent entre les wagons, avec les autres malchanceux. Au même moment, l'ordre du Chancelier claqua, plein d'urgence, Lue repéra le clignotement dans la pénombre et comprit. De toute façon, le passage était déjà bouché, ça ne pouvait pas être pire... Elle réalisa en pensant cela que mettre la chance au défi dans cet environnement relevait du suicide et caressa le médaillon, chaud contre sa peau. Elle devait garder cette ultime arme en réserve le plus longtemps possible. Fort heureusement, ses alliés avaient l'air bien mieux équipés qu'elle. L'étrange homme-taupe avait pris la tête. Il les mena à une division des voies et ils s'enfoncèrent dans celle qu'il indiquait. Le souffle court, la rousse essuya ses lames, pur réflexe, et souffla, angoissée :

- J'ai l'impression qu'on ne fait que s'enfoncer...

Résumé:
Mer 27 Nov - 12:56



Zénobie / Tunnel

Uhr 1901



Son action n’a pas été si économique que ça. Non seulement l’élémentaire a surestimé sa force, mais il l’a également sous-estimé la puissance du souffle. Un souffle d’une dizaine de secondes qui lui souffla bien plus d’énergie qu’il ne le pensait. La faute à la qualité de sa barrière ? Les hexagones n’apparaissaient que lorsque la barrière nécessitait une forte puissance défensive. La maintenir pendant dix secondes consomme donc énormément. C’est malheureux.
Il a le court souffle. Un souffle ? Il ne respire pas comme un humain lambda, ce n'est qu’une impression, mais il se sent fatigué. Une détresse qu’il ne préfère pas laisser paraître. Le groupe commence à peine à entrer dans la partie intéressante. Néanmoins, après l’explosion, le Blieg se divise en deux. Ah ! Non, là, ce n’est plus possible. D’accord avec l’un des membres du groupe, ils prennent tous ensemble leur jambe à leur cou, tandis que celui qui a ordonné la fuite utilise un totem qu’il possède aussi. Le familier leur sert alors de bouclier de vent, leur permettant de faire plusieurs centaines de mètres en courant de toute leur force jusqu’à son extinction.

La bonne nouvelle dans tout ça, c’est que les Bliege se sont désintéressés d’eux pour un temps. La demi-heure qui suit se fait à une bonne allure. Le premier signe de fatigue visible reste les roses blanches de l’élémentaire. Bien qu’en mauvais état à cause du Myste – une teinte bleutée parcoure certaines d’entre elles – quelques-unes tombent, faute de pouvoir les maintenir telles qu’elles en raison de l’effort fourni cette dernière heure.
Le groupe tombe sur des wagons d’un train. Ce qui semble logique, vu qu’ils se trouvent vraisemblablement sur un chemin de fer, mais impossible de le dater.

En s’approchant des wagons, Duscisio est pris d’un sentiment étrange qu’il n’arrive pas à définir. Maussade, non de la tristesse. Comment peut-il être triste ? Et pourquoi ? En regardant ses mains, il arrive à sentir quelque chose qui coule de ses yeux. De l’eau, des larmes. Comment peut-il pleurer ? Il n’en a jamais eu la fonctionnalité, la possibilité ou l’occasion de le faire. Cela ne vient pas de lui. Non, elle vient de la Brume qui est intensément plus dense ici que nulle part ailleurs.
La Brume serait-elle triste ? La Brume appellerait-elle à l’aide par ce partage d’un sentiment qu’il pense exclusivement humain ? Ou les sentiments de créatures se répercutent sur lui comme pour laisser un message ? Avec de bonnes intentions ?
Le dernier membre du groupe semble plus réceptif. Elle va jusqu’à demander qu’ils montent à l’intérieur du train. Pourquoi faire ? Rencontrer d’autres créatures hostiles ? Les Bliegs étaient déjà suffisamment coriaces, il ne manquerait plus qu’à faire une autre rencontre comme celle-ci pour que leur effectif se réduise prématurément. Les quatre autres ont une attitude différente. L’un dans ses pensées, ou bien en pleine crise d’angoisse, Duscisio ne saurait le dire. Le deuxième est sur ses gardes, regarde absolument tout autour de lui pour guetter le moindre danger. Olaf — en tout cas, c'est comme ça qu’il paraît s’appeler — est terrifié et ne le cache même pas, tandis que le dernier reste un simple observateur.

Les quelques gouttes de larmes sortant de ses yeux tombent sur ses doigts. Il veut que cela s’arrête, alors il frotte ses globes oculaires sans que cela change quoi que ce soit. Il y a beau avoir quelque chose d’étrange dans ce train, que Duscisio préfère grandement garder ça comme un signe de la Brume. Comme s’il pleurait à sa place pour une raison quelconque.

— Pourquoi pleures-tu ? Murmure-t-il pour ne pas être entendu. Dis-moi, chère mère, pourquoi tu pleures ?

Accablé de tristesse, ne pouvant cesser ses larmes de couler, il espère de tout cœur qu’elle puisse lui répondre. C’est là qu’il remarque que le groupe s’est séparé en deux groupes de trois. L’un dans le train, l’autre à l’extérieur. Ryker et Duscisio découvrent un cadavre calciné un peu plus loin. Un Fledermaus d’après le patrouilleur.
Chasseur endurant qui ne renonce jamais à une proie en écoutant un simple battement de cœur pour la poursuivre. Quelle chance… Le cœur de Duscisio ne bat pas. La seule bonne nouvelle étant la crainte de la moindre lumière. Celui-ci est de petite taille. Un adversaire de moins, pourrait-on penser. Mais à contrario d’un humain lambda, il serait plus à même de se demander ce qui l’a tué. Un Blieg ? Un humain ? Les traces de pas marqués par endroit laissent supposer un combat assez court. L’un des membres précise une mort par balle. Le plus surprenant serait de ne pas en voir un autre. Pourquoi ? Il est trop petit pour être adulte. Un parent doit être dans le coin jusqu’à ce que l’on entende trois bruits sourds sur les wagons.

Soudainement, c’est un véritable capharnaüm. Ryker ne perd pas une seconde pour agir en se transformant à moitié en lumière. Tout à fait brillant de sa part pour éloigner les créatures. Dans le même temps, Olaf est en état de choc, les oreilles en sang, allant jusqu’à lui hurler dessus, à deux maigres centimètres du visage de l’élémentaire.

— IL FAUT PARTIR ET VITE. ÇA S'EN VIENT VERS NOUS.

Faisons comme s’il était un peu plus loin, bien qu’il pose sa main sur son visage pour s’éloigner des postillons qu’il crache aussi fort qu’une pluie battante. Écœurant… Malgré ça, il a raison. Ils n’ont aucune chance de vaincre ces créatures, la fuite est leur seule option. Pourtant, il y a une petite source d’énergie à proximité. Il peut prendre quelques secondes… Duscisio ne se fait pas prier très longtemps. Il s’approche du corps de la créature juvénile au porte de la mort, que Riker a laissée au sol. Il absorbera tout ce qu’il peut avant de commencer doucement à s’éloigner dès que la retraite est sonnée par le chancelier.

Toujours avec trop peu d’énergie, il ne s’essaierait pas à faire quoi que ce soit de plus pendant que les autres membres du groupe luttent pour leur propre survie. L’important ici, c’est surtout la sienne.



Résumé:

Jeu 28 Nov - 12:28

Voyage au centre de la Brume

Acte I - Event III

Miaou.

La Brume jouait avec lui depuis qu’il avait fui à toute allure en compagnie des autres, abandonnant son invocation derrière lui. À son oreille, le félinimbus miaulait inlassablement, une litanie insidieuse. D’abord, il avait cru que ces plaintes étaient réelles, au point d’envisager de demander à l’homme à ses côtés s’il les entendait aussi. Pourtant, ce dernier semblait absorbé par ses pensées, une ombre voilant son regard. La Brume, avec son épaisseur trompeuse, n’en était pas à ses premières bizarreries, mais l’expérience de Maël en tant que Veilleur l’aida à distinguer réalité et illusion.

Miaou.

Artémis, lui, semblait étrangement épargné par ces tourments. Maël connaissait cet homme de réputation, tout comme il connaissait Jessamy : des chercheurs de vérité, des instruments volontaires de l’Alliance. La méfiance instinctive qu’il réservait aux inconnus s’effaça légèrement lorsqu’il prononça à son tour ces mots formels :

Maël, diplomate de l’Alliance.

Il grava leurs visages dans sa mémoire, sachant que son hypermnésie ne permettait aucun oubli, même des détails qu’il aurait préféré ignorer.

Miaou.

Leur fuite les mena à un lieu étrange. Des ruines, des rails, des wagons rongés par le temps. Une odeur de métal rouillé et de mort flottait dans l’air, amplifiée par l’omniprésence de la Brume, tapie jusqu’à leurs chevilles et voilant l’horizon comme un rideau sinistre. L’instinct de Maël criait de ne pas s’arrêter, de continuer coûte que coûte, mais il se força à suivre le groupe lorsqu’ils décidèrent de faire halte. Il serra les poings pour apaiser son malaise, tandis que les autres s’éparpillaient, cherchant à comprendre leur situation ou simplement un semblant de direction. Il remarqua que Jessamy s’enfonça dans l’un des wagons. Sans se rendre compte de sa propre torpeur, il décida de surveiller la sortie, se promenant d’intervenir au besoin. C’est toutefois une exclamation de Ryker qui brisa le lourd silence.

Maël ! Ils viennent sur vous ! La lumière ! Utilisez la lumière !

Miaou,
murmura-t-il dans un souffle, presque absent, avant que la réalité ne l’électrise d’un coup.

Un fledermaus ! La lumière de Ryker fendit la Brume, arrachant un cri strident à la créature tapie dans les ombres. L’écho d’une autre voix, celle de Sergei, le fit pivoter sur lui-même, révélant un second monstre. Pourquoi étaient-ils plusieurs ? Sans réfléchir davantage, il plongea dans l’énergie de son cristal, devenant lumière. Sergei, concentré, vida une salve de mitraille dans l’ennemi, tandis que Maël rejoignait Ryker, déjà engagé dans une lutte frénétique. Le patrouilleur avait adopté une forme hybride, mi-homme mi-lumière, et Maël l’imita sans hésiter. Épée dégainée, irradiant une lumière aveuglante, il ajusta ses mouvements à ceux de Ryker, leur combat devenant une danse mortelle, précise et instinctive.

Miaou.

L’insupportable félinimbus bourdonnait encore dans son esprit, brouillant ses pensées, mais le combat lui était naturel, presque automatique. Il réagissait aux injonctions de Ryker avec une fluidité guidée par l’expérience, chaque coup porté répondant à une logique innée. La porte d’un wagon s’ouvrit soudain dans un fracas assourdissant, et Aigrette surgit soudain pour projeter les fledermaus hors de leur chemin à l’aide de sa spatiokinésie. Ce répit fut une aubaine, mais Maël savait qu’il ne durerait pas, car un bip strident attira son attention. Son regard se posa sur un dispositif étrange aux pieds de son compagnon : une bombe, son décompte accélérant dangereusement.

Fuir !

Miaou.

L’ordre du Chancelier s’imposa à lui avec une clarté douloureuse. Il n’eut pas le temps de réfléchir davantage. Aigrette détala avec Sergei, Olaf et le Chancelier, déjà en route vers une jonction signalée par Olaf. Les bipements se succédaient de plus en plus vite, une menace imminente pesant sur eux. Le diplomate serra les dents en prenant conscience de l’énergie qu’il avait dépensée. Sa lumière vacilla, puis s’éteignit complètement, le laissant vidé. Et pourtant, malgré l’épuisement, il se força à suivre le groupe qui s’élançait de nouveau. Malgré tout, il se retrouva en queue de peloton, juste derrière Duscisio qui semblait presque plus épuisé que lui. L’explosion dans leur dos résonna comme un coup de tonnerre, projetant une onde de choc qui le fit trébucher. Il vacilla, la main instinctivement portée à son oreille. L’acouphène qui suivit couvrit presque tous les sons environnants, un hurlement aigu qui ne semblait vouloir le quitter.  

Miaou.

Se redressant tant bien que mal, il jeta un coup d’œil derrière lui. La portion du tunnel s’était effondrée sous la déflagration, bloquant une nouvelle fois le chemin de retour. Il ne restait qu’à continuer. Il poussa sur ses jambes meurtries par l’effort et suivi le groupe lorsqu’il emprunta sans hésiter le couloir de droite, non sans jeter un oeil de l’autre côté. Il n’y vit toutefois que les ténèbres. Cette option aurait sans doute été préférable, car à peine s’étaient-ils engagés dans cette bifurcation qu’ils se confrontèrent à la pire des éventualités : un cul-de-sac. Les sourcils de Maël se froncèrent un instant, un doute sur la fidélité d’Olaf s’insinua. Autour d’eux, des voitures aux formes singulières se dressaient. Elles possédaient chacune une vitre à l’avant, suggérant des cabines, et était en relativement bon état si on oubliait qu’elles dormaient dans la Brume et la poussière depuis des millénaires. Il aurait voulu s’approcher pour en apprendre davantage, mais un hurlement d’outre-tombe résonna derrière eux. Le son s’enroula autour de son estomac et il se tourna, figé, alors qu’un bruit désagréable de griffes raclant la pierre se faisait entendre, accompagné du lourd glissement d’un corps massif. Des os saillants, des crocs qui luisaient, et des yeux emplis d’une rage sourde. Une matriarche.

Miaou.

Résumé:
Sam 30 Nov - 10:22

Suivre Jessamy dans ce wagon n’était pas la meilleure des idées, mais Artémis n’avait pas vraiment pris le temps d’y réfléchir. La strigoï prit également la décision de les suivre, au grand désespoir du vagabond qui, encore une fois, ne trouvait pas cela bien pertinent. La Brume devait certainement être derrière cette manœuvre, jamais la mutante aurait pris un tel risque délibérément. A l’intérieur, très rapidement, un profond sentiment de tristesse s’empara d’Artémis. Bien qu’habitué aux manœuvres de sa vieille amie, l’effet n’en était pas amoindri, il ressentit une peine assez lourde. Cela restait encore acceptable, mais la banshee semblait bien plus atteinte que les deux autres.

Le fantôme de la petite semblait effondrée. Mais Loup Blanc s’intéressa à d’autres éléments que ses sens lui rapportèrent. La petite fille leva la tête vers le toit, moment où Artémis leva également la sienne, frappé par un choc sur la taule venant du dessus. La voiture dans laquelle se trouvaient les trois aventuriers tangua violemment. Rapidement, une horrible monstruosité au corps musculeux tenta d’entrer dans le wagon. Un léger rictus s’afficha sur le vagabond, reconnaissant malheureusement l’ennemi qui le faisait face, une fois de plus. Il espérait ne plus jamais retomber sur un Fladermaus, mais la Brume avait souvent tendance à réaliser ses pires cauchemars. Un seul d’entre eux était déjà un désastreux problème, mais l’ouïe fine du canidé lui permit d’en entendre d’autres. Les affronter serait totalement suicidaire.

Alors que Jessamy semblait jusqu’ici complètement désemparée, elle fut la première à réagir en déployant une puissante lumière qui paralysa le monstre. C'était le moment opportun pour s’enfuir. La mutante tenta d’entreprendre le dialogue, mais rien de plus n’en sortit. Ils empruntèrent une porte de sortie à l’arrière et retrouvèrent quelques-uns de leurs compères. Artémis les laissa avancer et resta en retrait avec le Grigori. Ils finirent tous par se retrouver et courir pour fuir le danger. Alors, une détonation se fit entendre, non loin des wagons auprès desquels ils se trouvaient peu de temps auparavant. Cet endroit pourrait rapidement devenir notre tombeau, songea le vagabond, inquiet. Il pesta intérieurement contre ses camarades épuisés. Ce n’était pas vraiment contre eux, mais la crainte de finir enseveli le hantait. En effet, après l’explosion, un éboulement s’en suivit, faisant disparaître la voiture précédemment visitée. Un puissant nuage de fumée caressa le dos du semi-canidé qui courait à toute vitesse, poussant ses acolytes par la même occasion.

Il faudra revoir nos plans pour le retour.

Ils suivirent tous Olaf, la taupe, qui semblait avoir découvert un itinéraire. Hélas, cette piste mena à un cul-de-sac, un chemin bloqué par des voitures, dont l’avant était constitué d’une vitre. Des cabines. Tandis qu’ils commencèrent tous à investiguer les lieux, un hurlement bien trop familier retentit. Le genre de hurlement assez similaire à celui entendu précédemment, mais en beaucoup plus féroce, beaucoup plus retentissant. La mère. Des mensurations énormes, exceptionnelles. Elle avait vécu de nombreuses décennies, peut-être des siècles. Ryker, tout comme Artémis, devaient se dire que cette chose ne ressemblait en rien à ce qu’ils avaient déjà affronté.

C’est la fin, pensa-t-il.

Avant de plonger dans la détresse, un mouvement suspect l’attira. Non pas que le Fladermaus ne l’intéressait pas, mais la situation était tellement désespérée qu’un coup d’œil aux alentours n’y changerait rien. Le Chancelier entra discrètement dans une cabine, sans prévenir personne. Acte de lâcheté ? Peut-être. Cet homme demeurait néanmoins un mystère à part entière. Pour cette seule raison, l’instinct du canis lupus lui intima de le suivre avec la plus grande discrétion. Panoptès avança vers ce qui ressemblait farouchement à des commandes, très certainement le tableau de bord. De son sac, le vieil homme sortit une sorte de cristal qu’il déposa sur un socle, sur ce même tableau de bord.

Quel est cet objet ? Cet homme est décidément plein de secrets.

Sous les yeux stupéfaits du vagabond, la machine reprit vie progressivement. D’abord des lumières qui clignotèrent et illuminèrent, puis le Chancelier qui se mit à pianoter sur le poste de commandes, avant d’abaisser un levier. Il semblait maîtriser son sujet, ses mouvements étaient fluides et ne montraient aucun doute. Un vrombissement. La voiture se mit à trembler de manière continue, elle se remettait en marche. La machine n’avait pas fonctionné depuis belle lurette, elle était recouverte de poussières, mais les phares dégagèrent tout de même une puissante lumière qui aveugla la mère en colère. Ensuite, tout alla très vite, même pour un soldat aguerri comme Artémis. En réalité, ce fut surtout la maîtrise du Chancelier qui le figea. Qui était-il ? D’un ordre clair, il somma aux autres de monter à bord, tandis qu’un simple « Sergeï » suffit pour que ce dernier déchaine l’enfer sur la Matriarche aveuglée. Une arme repliée tira une sorte de grenade qui s’écrasa et s’explosa contre le Fladermaus. Il vacilla, recula contre la paroi, laissant apparaître une issue de secours.

Le moment choisi par Panoptès pour démarrer la voiture et passer à toute vitesse à côté de la Malédiction. La voir de si près était terrifiant. Elle tenta alors de pourchasser ses proies, mais la vitesse du wagon motorisé était trop élevée, à tel qu’ils semèrent leur bourreau au bout de quelques minutes. Artémis souffla de soulagement mais resta tout de même aux aguets. D’expériences, il savait pertinemment qu’un danger pouvait survenir à tout instant, même avec un Chancelier qui semblait maîtriser la situation. Cette fuite semblait sonner la fin de leurs mésaventures dans ce maudit tunnel. Que leur réservait la suite ? Certainement rien de bon.


Résumé:
Sam 30 Nov - 20:50

Maître du Jeu

Tous ensemble, vous êtes parvenus à fuir un grand danger. À présent, les regards interrogateurs fusent en direction du poste de commande de la voiture de train, pilotée par le Chancelier. Mais il n'en tient pas compte. S'il y a des choses qu'il estime que vous devez savoir, il ne semble pas vouloir vous les partager. Braves soldats, Sergei, Aigrette et Olaf ne semblent pas s'en offusquer ; chacun vaque à ses occupations, entretient son matériel comme si ça n'avait été qu'une promenade santé. Vous devinez qu'ils ont probablement d'autres atouts dans leurs manches.

La locomotive file plus lentement à présent. Soudain, une lumière naturelle semble filtrer à travers la poussière des vitres. Ce ne sont plus les phares qui illuminent seuls l'avant du train, mais des rayons chauds provenant d'une source lointaine. Après avoir considérablement ralenti, votre véhicule marque enfin l'arrêt et les portes latérales s'ouvrent pour vous permettre de voir le quai, si l'on peut appeler cela ainsi.

La gare centrale. Du moins, une de ses nombreuses stations, existant sous un enchevêtrement de passerelles et de balustrades, loin sous le très haut plafond, soutenu par d'épais piliers en acier et de grandes fenêtres. Certaines sont encore en l'état, d'autres ont depuis longtemps été brisées ou colmatées par des effondrements, des éboulements. Au moins, la lumière du jour peut vous être d'un grand réconfort.

Ici comme à l'intérieur des tunnels, la Brume règne en maître. Toutefois, outre les débris sur les quais, les restes de pancartes et tableaux arrachés ou partiellement dévissés, rien d'oppressant dans l'air. Le Chancelier est le premier à mettre pied à terre et, comme s'il savait où aller, il vous abandonne aussitôt. Sergei comme Olaf marchent sur ses pas tandis qu'Aigrette vous fait signe de le suivre.

Dédale de courts tunnels, de passerelles et d'escaliers, le chemin emprunté par Panoptès vous amène enfin dans le grand hall : ses dimensions pharaoniques expliquent le grand nombre de vitrines qui jalonnent son pourtour. Jadis des boutiques, la plupart sont inaccessibles. Mais vous pouvez encore voir les détails d'un salon de coiffure, d'une boutique de produits antiques inconnus, d'une épicerie... Car la Gare Centrale était aussi un centre commercial.

Plus encore, vous pouvez les voir apparaître progressivement, comme attirées par des formes de vie, les silhouettes diaphanes dans la Brume. Certaines marchent, habillées de grands manteaux et chapeaux, d'autres de survêtements à capuches, d'autres courent tous azimuts. L'une d'entre elle traverse le groupe, l'un(e) d'entre vous ressent son contact froid et sa détresse. Sa mort aussi, puisqu'elle a disparu il y a bien longtemps, rongée par le Mal à ses trousses.

Panoptès se tient face à un mur, inflexible. Il finit enfin par briser le verre du cadre, face à lui, avec le manche de son fusil, pour accéder à ce qui semble être une carte. Lorsqu'il revient vers vous, il la tient devant lui, sans se soucier des apparitions.

« - Notre plus grande chance d'atteindre le laboratoire doit se trouver ici, » estime-t-il en pointant de l'index une zone proche du « vous êtes ici » écrit en vieil uhrois, pour ceux qui savent le lire. Quelque chose de nommé « Gare routière ».
HRP:
Lun 2 Déc - 16:04

Court répit

Train touristique de Zénobie




L’explosion faillit les jeter à terre mais grâce à leurs efforts, le wagon s’en était sorti in extremis. Les bombes, le sang. La douleur. Le regard du monstre qui pesait sur son dos. Le Patrouilleur avait cru un instant sa dernière heure arrivée lorsque la colossale créature avait surgi des tunnels. Jamais il n’avait vu pareille chose, tout sot qu’il avait été de penser que le Fledermaus qu’il avait affronté était un adulte. Ce qui semblait être la génitrice était si colossale, si imposante … elle était presque contre nature. Il regarda au travers du carreau poussiéreux du wagon et sursauta lorsqu’il aperçut le reflet du Liéchi à la place de son visage. Il jura et serra le poing. Il ne le laisserait jamais en paix. Il s’éclaircit la gorge et se leva, après avoir nettoyé son arme. Il s’appuya sur les montants du train, observa le mécanisme, puis chacun des voyageurs dont été affublé leur petite équipe.

- Bien. Nous avons eu chaud. Et ce n’est que le début …
murmura-t-il, ses yeux se perdant sur les antiques inscriptions du wagon. Maël, vous pourrez peut-être m’éclairer, il me semble que vous connaissez bien cette langue ?

Il montrait quelques mots sur une plaque en métal située au-dessus d’une des portes, à l’instant même où la voiture émergeait du tunnel pour s’ouvrir sur des espaces immenses où des habitations émergeaient. Ryker eut un mouvement de recul mais resta interdit quelques secondes devant la grandeur du spectacle. Des milliers d’habitations, bercée dans la Brume … puis le retour à un tunnel. Un endroit abandonné par les Hommes. Par les mortels. Par les dieux. Il en frissonna. Le Patrouilleur se gratta la barbe. Se remémora quelques instants la tour d’Yfe. Ce moment suspendu où tous s’étaient côtoyés dans le zeppelin avant l’assaut sur l’endroit hanté. Il s’attarda sur Lue, du Magistère. Il avait cessé toute proximité avec elle depuis qu’elle s’était révélée être la parfaite remplaçante de Jeremiah, qui avait failli tous les tuer pour le cristal de Demephor. Quant aux autres … Encore une fois, il faudrait se serrer les coudes.

- Il convient de profiter de ces quelques minutes pour reprendre notre souffle et partager nos ressources. Cela pourra s’avérer utile si on doit continuer. commença-t-il, sous le regard détachés des autres membres du groupe. Ahem. Il serait de bon ton de voir nos ressources, pour éviter de se faire souffler dans une explosion ou prendre entre deux feux par exemple … ou adopter une formation assez efficace pour faire face à toute éventualité ?

Il essuya quelques secondes de silence, chacun pour une raison qui lui était propre.

- J’ai pris avec moi tout ce que j’avais en termes d’armes. Je possède plusieurs cristaux, fruits d’une dizaine d’années dans la Brume. Guérison, audition, lumière, force et vitesse. J’ai déjà … puisé dans mes réserves mais je pense qu’il est important que vous ayez une connaissance de mes ressources. reprit-il, taisant le reste avec dessein.

Mieux valait ne pas tout dévoiler non plus, de façon à pouvoir réserver une surprise aux traîtres s’il y en avait. Le Patrouilleur s’adossa à une rampe en métal. Echangea quelques paroles avec ceux qui le voulaient bien mais assez vite, la locomotive arriva à destination. La porte s’ouvrit sur un nouveau dédale où la Brume ruisselait avec plaisir. Ryker en eut un frisson de mauvais augure, chercha du regard l’émanation malveillante du monstre de la Tour. Il le savait à rôder dans son esprit, à chercher de le faire basculer. Tout comme il sentait ce précipice vertigineux vers lequel sa tumeur silencieuse le poussait. Elle se taisait, mais sa pression était constante. Chaque usage de ses pouvoirs l’en rapprocherait. Et c’était pire qu’avant.

Le Patrouilleur resta coi en découvrant le gigantesque centre commercial. Il regarda autour de lui et se demanda encore une fois ce que cette civilisation avait à leur révéler. Tout semblait si moderne, si … ordonné. C’était ce qui attendait Uhr lorsque la Brume l’aurait dévorée. Il le sentait au fond de lui, tout comme il sentait qu’ils approchaient d’un endroit pire encore. Il inspira pour calmer ses nerfs. Entouré par les fantômes d’une époque oubliée. Serra les dents lorsque l’un d’entre eux le traversa. Il savait la Malice assez tolérante à son égard mais le glace le saisit jusqu’au creux de ses os. Il sentit son cœur s’emballer, la peur de l’émanation devenir sienne puis il se ressaisit. Serra les dents. Ramené parmi eux lorsque le Chancelier fracassa la vitre d’un coup de crosse.

- Si vous aviez … un objet ayant appartenu au Régent ou au Mandebrume, je pourrais tenter de le localiser sur la carte, Chancelier. proposa-t-il, à tout hasard.

Le vieil homme l’observa et lui adressa un non de la tête avant de leur indiquer la marche à suivre. Brume jusqu’aux genoux. Ils n’avaient, de toute façon, pas le choix. Il sentit sa nebula frétiller sous sa peau, quelque chose gonfler dans sa poitrine. Un fragment de Brume se glisser dans ses doigts, onduler sous sa peau. Son pouvoir chercher à percer sa carapace. S’exprimer, se libérer. Il tint bon, pour l’instant. Plus ils approchaient … pire ce serait. Au moins ici, la mort serait instantanée, non ? Il se ferma à cette idée, perçut l’influence pernicieuse de la Malice. Il fallait diriger sa hargne vers autre chose, vers leur but. Canaliser.

- Bien, dans ce cas adoptons une formation adaptée, Chancelier. Face à ce que chacun peut faire … Olaf, vous ouvrirez la voie avec vos sens et votre perception de l’environnement. Artémis, tu le seconderas vu les derniers événements ? Ton expérience sera utile. commença-t-il, en indiquant d’une main la direction qu’avait pointée Panoptès. Sergei et Duscisio, je vous propose de rester proche de l’avant-garde, vous constituerez notre fer de lance et protégerez le cœur du groupe. Nous avons pu nous reposer un peu mais je doute que cela suffise. Vos pouvoirs Duscisio seront cruciaux …

Il se tourna vers le Chancelier. Foutu pour foutu … Il tourna son regard vers Lue, revint vers Panoptès. Il n’était pas nécessaire de le formuler pour qu’il le comprenne.

- Lue et Maël, je vous propose de rester proche du Chancelier et de le protéger dans la mesure du possible. Maël, il en va de même pour vous : vos connaissances nous serons utiles et vous êtes le seul ici à savoir lire le vieil urhois, à part vous Chancelier, je me trompe ? reprit-il, sans trop s’étaler sur sa propre maîtrise lacunaire de cette langue antique. Quant à vous, Aigrette et Jessamy, vous formerez notre arrière-garde : de quoi nous défendre au moindre danger venu de derrière. Ou d’avertir ceux qui sont à l’avant. Il y a plus de chances que les forces du Mandebrume aient réveillé des choses devant que derrière nous … Raison pour laquelle je me contenterais de fermer la marche seul. Avec mon ouïe, je devrais être en mesure d’entendre le moindre danger. Il est plus important d’assurer une percée que de s’assurer de la survie de ceux qui sont en arrière. C’est pourquoi ce sera ma place.

Quelques secondes s’écoulèrent.

- Des objections ? Ma proposition vous convient ? Soit. En avant alors. Chancelier, nous sommes à votre écoute. Si besoin, je couvrirais les déplacements entre les différentes parties de notre groupe. Que chacun veille sur les autres, ne perdez pas de vue votre voisin, qui sait ce que la Brume veut vous réserver.

Que chacun veille sur les autres … mais qui veillerait sur lui alors ? Triste vie que celle d’un Patrouilleur. De toute façon, il y avait peu de chances que quiconque veuille marcher à ses côtés. Sa réputation le précédait.

HRP:
Mer 4 Déc - 13:58

Voyage au centre de la Brume

Acte I - Event III

Il ne fallut qu’une minute à Maël pour accepter la sécurité, toute relative, de la locomotive. Il s’installa sur un siège, posa sa tête contre la vitre tremblotante et sombra rapidement dans un demi-sommeil. Toujours en alerte, son esprit restait sensible au moindre bruit. Ses rêves éveillés furent envahis par des miaulements et des ombres félines, dansant au bord de son subconscient. Lorsqu’il ouvrit les yeux, une forme indistincte se dessina dans la Brume qui envahissait le fond du transporteur. Un chat ? Il cligna des yeux. La silhouette s’évanouit. Mais les miaulements, eux, persistaient, étrangement réels. Ces sons ne ternirent toutefois en rien la bonne humeur retrouvée du grigori.

- Quelle aventure trépidante ! Vous êtes tous incroyables, quelle équipe de feu ! s’enthousiasma-t-il, bondissant sur ses pieds pour s’adresser au groupe.

Les regards interloqués qu’il reçut en réponse ne le perturbèrent pas. Il se dirigea vers l’avant de la cabine, où le Chancelier pilotait, concentré sur les commandes. Fasciné par la technologie, Maël posa une avalanche de questions, mais n’obtint pour toute réponse qu’un “hum” distrait. Déçu, il préféra s’asseoir près de Jessamy. En voyant les traces de larmes sur ses joues, il tenta de l’encourager d’une voix douce et d’un sourire rassurant. Il se tourna ensuite vers Ryker, qu’il remercia chaleureusement pour sa réactivité face aux fledermaus. Ce dernier lui montra une inscription au-dessus de la porte.

- Ah, du vieil uhrois ! lança le grigori avec un éclat dans les yeux. Rien de passionnant, ils indiquent simplement que ce wagon ne doit pas transporter plus de vingt passagers.

Un rai de lumière transperça soudain les vitres noircies, dévoilant une ville titanesque à l’abandon. Les gratte-ciels, perdus dans les nuages, semblaient les écraser par leur immensité. Ces monstres de béton, invisibles depuis l’extérieur, surgissaient maintenant comme une révélation. Maël, bouche bée, contempla ce spectacle grandiose. Quelle chance il avait enfin de franchir les frontières de cette cité maudite qui le hantait depuis des siècles d’errance solitaire dans la Brume… Mais la vision fut rapidement éclipsée par un nouveau tunnel, replongeant le transporteur dans l’obscurité. Un miaulement, cette fois tangible, le ramena à la réalité. Lorsque Ryker proposa de partager les ressources et capacités de chacun, le diplomate se redressa, impatient.

- Pour ma part, je suis un épéiste expérimenté. J’ai passé beaucoup de temps dans la Brume, alors je m’en sors pas mal avec les imprévus. J’ai aussi un cristal de lumière – vous l’avez vu tout à l’heure – et un autre de ténèbres. Oh, et j’ai ce cristal, ajouta-t-il avec un sourire espiègle en tapotant son carnet. Ce que je dessine peut devenir réel. Et ne vous fiez pas à mon apparence, je suis plus vieux que j'en ai l'air, déclara-t-il sous son allure enfantine.

Il détailla rapidement le reste de son équipement : corde, pinces, couteau, gourde, rations, couverture, boussole. Les autres firent de même, bien que certains restèrent volontairement vagues. Il nota leurs réticences sans insister, préférant canaliser son énergie pour mieux comprendre ses compagnons. Seul le Chancelier demeura silencieux, mais cela ne l’inquiéta pas. Il avait confiance en lui depuis longtemps. Lorsque le wagon s’arrêta, Maël bondit dehors, brûlant d’impatience à l’idée de découvrir Zénobie. L’air portait une odeur étrange, un mélange de poussière et de fer rouillé. Les yeux écarquillés, il sauta presque de dalle en dalle, examinant chaque recoin avec une curiosité enfantine. Le groupe déboucha dans un centre commercial, immense et chargé d'histoire. Émerveillé, Maël laissa échapper une exclamation :

- Regardez ça ! Ces arcades, ces verrières… Rien de tel n’existe ailleurs !

Même si les autres se montrèrent plus discrets, leur expression laissait transparaître leur fascination. Féru d’histoire, l'oiseau millénaire entama un monologue sur l’empire d'Yfe et Zénobie, traduisant au passage les enseignes et inscriptions qu’ils croisaient.

- Un ancien coiffeur ! C'est rigolo, il y a un jeu de mot avec cheveux ! lança-t-il avec un rire. Oh, et ici, on stockait les astras de l’époque. Fascinant, non ?

Devant une statue colossale représentant un gobelin penché sur un étrange mécanisme, il s’interrompit un instant. Argath. Le nom brillait encore sur une plaque usée. Cette figure légendaire, connue même des grigoris, semblait les surveiller. Puis il reprit son bavardage, dissipant la tension. Lorsque le Chancelier déroula une carte, Maël s’appliqua à traduire les indications pour le groupe, tout en appuyant Ryker dans son idée d’adopter une formation défensive. Le groupe reprit la route vers la gare routière, cœur de l’ancienne capitale. Le grigori avançait vers la gare routière comme dans un rêve, ses yeux papillonnant d’un détail à l’autre. La Brume dansait, envahissant l’espace de ses volutes bleuâtres, tantôt douces, tantôt agitées. À travers ce voile spectral, il distinguait des silhouettes humaines : hommes, femmes, enfants. Une étrange scène de quotidien figé, comme si la vie continuait ici, en dépit des siècles et des drames. Mais ce calme apparent cachait une tension sourde. Les ombres mouvantes, au loin, semblaient raconter une autre histoire, celle de violences oubliées mais gravées dans ces murs silencieux.

La route les mena finalement hors du centre commercial. Là, l’immensité décharnée de Zénobie se révéla pleinement. Les gratte-ciels, autrefois majestueux, n’étaient plus que des carcasses tordues, ployant sous le poids retord de la Malice. Des racines invisibles avaient soulevé le bitume, crevant les grandes artères de la ville. La végétation, rare et maladive, accentuait la désolation ambiante. Rien ne poussait vraiment ici. Seule la Brume, insidieuse, s’écoulait comme des rivières spectrales entre les ruines. La gare routière était glabre et austère, ressemblant à un gigantesque parking abandonné. Sous un toit métallique rouillé, les restes de bus oubliés se dressaient, couverts de poussière et de crasse. Le Chancelier se dirigea sans hésiter vers l’un d’eux, sortant un cristal d’énergie qu’il manipula avec précision. Intrigué, Maël suivit le mouvement, observant chaque geste avec un intérêt presque enfantin. Lorsque Panoptès fit vrombir le véhicule, un large sourire se dessina sur le visage du grigori.

- Vous vous rendez compte ? C’est une relique vivante de l’ancien empire !

Invités à monter à bord, Maël ne se fit pas prier et s’installa sur l’un des sièges. Ses doigts effleurèrent le tissu usé avec respect, comme s’il touchait une pièce d’histoire. Tandis que Panoptès et Sergei nettoyaient le pare-brise, il se releva, scrutant l’intérieur. Ses pensées tourbillonnaient : ce voyage leur réservait encore bien des mystères et sans doute beaucoup de dangers. Mais pour l’instant, il savourait ce moment.

Résumé:
Hier à 13:38



Zénobie / Gare centrale

Uhr 1901



Dans leur fuite, la rencontre avec la Matriarche Fladermaus annonce presque la fin du voyage. Non seulement, ils arrivent tous devant un cul-de-sac, mais ils ont la chance d’avoir un wagon devant eux qui leur assure un moyen de survie. Tout le monde suit le chancelier sans discuter, surtout quand celui-ci reprend vie avec l’utilisation d’un cristal d’énergie. Comment cela est possible ? Tous les critères donnent raison à ce que ce tas de ferraille ne bouge plus jamais. Cela aurait été pour le mieux si une créature n’était pas à leur poursuite. En se mettant en marche, les phares éblouissent la Matriarche. Au lieu de simplement passer sans faire de dommage, c’est là que l’on oublie très vite que l’homme agit avant de réfléchir. L’amélioré tire sur la créature géante sous l’ordre du Chancelier. Cela ne plaît guère à l’élémentaire, mais relève du fait qu’il s’agit de leur survie et donc de la sienne.

Plutôt que de contester, il garde son mécontentement et suit tout le monde dans leur nouveau moyen de transport. Le chancelier se permet dans l’action de révéler quelques secrets. Un cristal d’énergie, rien d’autre d’après son artefact. Cet homme sait comment marche ce véhicule. La poursuite ne dure pas très longtemps par la vitesse du wagon.
Duscisio a besoin de prendre un moment pour se reposer.
Les bras croisés, le regard naturellement énervé, les jambes en tailleur, il baisse la tête et ferme les yeux. On a plus l’impression qu’il se concentre. Les rayons d’une lumière naturelle semblent raviver l’élémentaire, mais ces derniers ne l’atteignent pas directement. Fort heureusement, il est de meilleure humeur. Enfin, rien de l’indiquer, mais voir la lumière du soleil le calme déjà plus que ce moment de paix provisoire.

Il y a tout de même quelque chose de marquant. Grâce à la Brume, l’endroit parait encore habité. Ce ne sont que des silhouettes, des fantômes du passé. Plus impressionnant encore, la ville. Même en ruine, elle montre une avancée technologique similaire à Epistopoli, peut-être plus avancée même. On pourrait supposer que cela est la raison de son déclin soudain. Duscisio n’oublie pas de garder à l’esprit qu’ils se dirigent tous vers un laboratoire. SI Zénobie est considéré comme le Ground Zéro, il se pourrait bien que, lui-même étant issu de la Brume, soit une création humaine qui a mal tourné ou une découverte rare dont la progression a dégénéré.

Pendant ce temps, Ryker est le premier à penser que tout le monde partage leurs ressources, à commencer par les cristaux qu’il énonce un à un, Duscisio lui est plus réticent. Avant toute réponse, il profite que tous ses cristaux soient cachés sous sa cape pour donner l’ordre à celui qui est de couleur violette de ranger la moitié d’entre eux, en plus d’un artefact. Il ne se lève pas, ne répond pas et dans la mesure où ils savent plus ou moins ce qu’ils ont par la démonstration de l’un de ses cristaux contre le Blieg. Aucun mot n’est nécessaire.
À la place, il ouvrira les yeux pour regarder le dos du chancelier et se lèvera pour l’approcher. Le pas lourd, il ne croisera le regard d’aucun membre du groupe. Si son regard énervé n’a rien à voir avec son humeur réelle, mais plutôt au fait d’utiliser une machine pour avancer, en plus d’un certain mystère entourant cet homme qui leur servirait de tête pensante.

En passant devant tout le monde, les trois cristaux — deux blancs, donc un qui est vivifié et un violet — se montrent naturellement sous l’ouverture de la cape alors que l’élémentaire avance, déterminé. Ils sont attachés directement au corps par quelques ronces qui les maintiennent comme un élément décoratif au niveau de la ceinture, comme n’importe quel outil d’herboristerie qui orne ses hanches. A-t-il vraiment besoin de les décrire ?
Ses deux artefacts sont rangés là-dedans. Il n’y a rien d’autre que ses cristaux et quelques outils d’herboristerie qui sont visibles. Rien d’autre. Arrivé au niveau de l’homme, Duscisio dit simplement :

— Pourquoi avez-vous besoin de moi ?

Même si l’élémentaire est plus irritable, le fait que la question ne trouve que pour réponse un haussement d’épaule et un sourire. Irritable, Duscisio ira jusqu’à pousser l’homme à lui faire face. Un croisement de regard entre un élémentaire qui parait toujours plus en colère et un homme qui ne montre ni ne dit rien que des ordres concis.

— Je n’ai pas confiance en vous…

L’apothicaire n’en rajoute pas et retournera à la place au fond pour profiter du peu de repos qu’il peut prendre.  Toujours sans répondre à la demande de Ryker qui se contentera de l’utilisation de son cristal blanc qui les a protégés de l’explosion à l’entrée du tunnel. Il n’écoutera la formation que d’une oreille également. Il serait proche de l’avant-garde afin de protéger le cœur du groupe. Ce n’est pas totalement stupide. Si on compare Artemis qui a pourtant le même cristal que lui, ce dernier a d’autres atouts. L’élémentaire se contentera de ce pouvoir et de sa nature pour protéger tout le monde dans la mesure du possible. Il ne regardera pas la carte maintenant pour se laisser porter par le groupe. L’un d’entre eux ne faisait que s’extasier face au paysage. Pendant que dans son for intérieur, Duscisio continuait d’appeler la Brume pour qu’elle lui réponde jusqu’à ce qu'ils arrivent à une station dans laquelle des véhicules tout aussi longs que la locomotive, mais sur des roues noires. Encore une fois, l’un d’entre eux est mis en marche à l’aide du cristal d’énergie. Il ne semble pas avoir cette technologie ou ce type de véhicule à Epistopoli… Les gros véhicules sont à l’état de prototypes, si sa mémoire est bonne. Alors savoir comment ces derniers fonctionnent… Pendant que le Grigori continue de s’extasier, Duscisio fait sa remarque :

— D’où vient ce cristal ?… soupire-t-il.

Il n’en dit pas plus, il n’attendra pas non plus de réponse de la part du chancelier ni de comment il l'acquit. Il y a des détails qui ne leur sont pas donnés ou bien Duscisio est bien trop ignorant.
Cette fois, il serait content de savoir où se trouve la carte pour pouvoir l’observer et éventuellement l’utiliser. S’il n’y a que quelques indications sur le lieu où il se trouve. Des détails sur la direction des voix qu’ils empruntent, il devrait être possible de trouver le laboratoire, leur objectif, sur ce morceau de papier. Qui plus est, de savoir combien de temps ils vont devoir rouler pour l’atteindre.

Résumé:

Hier à 22:53

Assise sur une banquette, Jessamy rabat sur elle ses nippes et ses songes. L’arrière de son crâne se pose doucement sur une vitre teintée par la poussière. Son regard suit les va-et-vient de ses camarades ; s’attarde sur Panoptès, mû par la même curiosité que l’éphèbe aux roses. Le chemin et la manière de le parcourir ne semble avoir aucun secret pour le cador de l’Alliance — ou peut-être tient-il tout cela de ses années d’expériences.

Délicatement, ses phalanges extirpent de sa veste un pli à peine froissé par ses mésaventures. Un petit coup de griffe dans la cire libère la plume noire qui y était engluée ; elle sera oubliée à ses pieds. Jessamy déplie la lettre et, à mesure que les mots se dévoilent, écarquille les yeux. Sa poitrine se serre.

Quelqu’un sait.
Comment ?
Qui ?
Peut-elle seulement retourner cette foi infaillible qui transparaît dans ces mots ?

Jessamy retourne la lettre, essayant de percevoir au verso la main qui l’a écrite. L’écriture est élégante, recherchée, appuyée par la gravité de ses révélations. Elle fixe un moment la missive, se noie dans l’encre séchée. Papier replié entre les doigts assassins, se glisse à nouveau au plus près de sa poitrine. Plus léger que la présence chaleureuse qui s’assied à côté d’elle — la seule, à sa connaissance, qui a vu le don du Reclus mis à l’épreuve. Maël a perçu les marques de la détresse qui l’a prise plus tôt, et tente d’en soulager les fantômes ; elle opine du chef, visage fendu par un sourire faible. L’attention la touche, et sa tristesse s’éloigne peu à peu, demeure avec la Matriarche immense et les spectres des wagons endormis.

La lumière étouffée par le verre poussiéreux laisse deviner les contours d’immenses bâtiments, dernières carcasses d’une cité qu’elle devine opulente autrefois.

« Ça a l’air gigantesque… », souffle-t-elle.

Dédale monstrueux et opaque ; cachette idéale pour l’ennemi qu’ils traquent. Méthodique, Ryker leur expose son plan, qu’elle approuve en opinant du chef par saccades. Leur guide doit être protégé. Alors que ses comparses font étalage de leurs dons, elle sait déjà lesquels elle dissimulera. À commencer par ce qui pulse contre sa cage thoracique. Elle poursuit :

« Certains d’entre vous ont pu le voir, j’ai un Nascent de lumière sur ma canne. Un cristal de polyglossie. Et puis, je suis une Banshee. »

Jessamy n’a pu empêcher une certaine fierté de ponctuer ses derniers mots. Une Banshee, avec tout ce que cela implique. Une Banshee missionnée par ses sœurs. Arrêter le Mandebrume n’allait pas seulement la sauver — mais aussi venger toutes celles qui, par sa faute, ont perdu leur foyer. Elle se devait d’achever cette tâche, qu’importe le poids de ses ailes. Après avoir énuméré ses diverses potions et toxines, elle se mure dans le silence. Profite des derniers instants de tranquillité, alors que la locomotive s’approche de son point d’arrivée.

Pied à terre, elle ne peut s’empêcher de sourire lorsque Maël s’émerveille de tout ce qui lui passe sous le regard. Zénobie est une ville morte, transpercée par la nature dévorante, et pourtant ses ruines témoignent d’une grandeur que lui jalouseraient ses descendantes. Sa main se serre un peu plus sur sa canne lorsqu’ils croisent des ombres : similaires à celles qu’ils ont croisées plus tôt, elles ne la heurtent pas néanmoins. Vestiges parmi les vestiges. Elle passe sans jamais les frôler, les laissant marcher dans leur propre monde, leur propre temps. Elle ne sera pas une gêne de plus.

Son attention trébuche sur les carcasses de bus qui gisent autour d’eux, les vitres brisées ou abîmées, les roues crevées ou absentes, la carrosserie défoncée. Rien de tel n’a jamais traversé les rues étroites de Xandrie. Elle hausse un sourcil en voyant Panoptès sortir un cristal et se diriger d’un pas décidé vers un véhicule.

« C’est une locomotive aussi ? On va vraiment monter là-dedans ? », fait-elle, une moue dubitative sur le visage.

Deuxième surprise : sous l’impulsion du chancelier, la chose rugit, prête à s’élancer. Son cœur balance entre les doutes de Duscisio et l’enthousiasme de Maël. Jessamy échange un regard confus avec Artémis, puis finit par suivre l’homme aux ailes noires en pestant contre la hauteur des marches. Assise derrière lui, elle lui lance d’un ton grinçant, tout en regardant Panoptès et Sergei s’affairer :

« C’est quand même bien pratique qu’il sache exactement ce qu’il faut faire ici. Tu as confiance en lui pour nous guider ? »

Résumé: