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[FB] Dans un nid de négociations ❖ pv Lillie

[FB] Dans un nid de négociations ❖ pv Lillie Brandw10
Jeu 25 Juil - 16:47
« Je vais devoir m'absenter, Jessamy. Le Roi m'attend pour une audience. »

Sillons pensifs se dessinent sur le front marmoréen, tandis que la tête cernée de plumes se penche sur le côté.

« Bah, comme souvent, non ?
Cybèle se gratte l'arrière de la nuque devant son apprentie, la harponne de son œillade à la fois sage et puissante. Les ridules à la commissure de ses lèvres se creusent.
—  C'est ennuyeux pour mon rendez-vous d'aujourd'hui. Mais je ne peux pas l'annuler. Donc, je voudrais te le confier.
— Si ce n'est que ça ! Et puis, ça te fait encore une bonne raison de me garder enfermée, pas vrai ?, ricane Jessamy.
La poitrine de Cybèle se creuse dans un soupir.
— Merci, Jessamy. Prends bien note de ce qu'il va se dire, pour que nous puissions en parler aux sœurs.
— Comme si c'était fait. »

La silhouette décharnée du visage des Messagers fend le ciel en lance affûtée. Son reflet finit par disparaître du regard songeur, presque mélancolique, de la mutante. Même si sa dernière tentative d'assassinat avait été déjouée, Cybèle refusait toujours de la laisser reprendre le travail. Chaque jour, elle devait contempler le ballet, délicat et vorace, des Messagères aux ailes diaphane, sans jamais espérer les rejoindre, ni même les délester pour travailler à leurs côtés. Abandonnant sa rêverie à la fenêtre, elle rebrousse chemin vers le bureau de Cybèle.

❖❖❖


Sa phalange noircie parcourt les syllabes élégamment couchées sur le papier. Une distraction pour ne pas s'endormir, bercée par le filet suspendu au mur et rempli de gros coussins dans lequel elle s'est assise. Sur le bureau surélevé en face d'elle, trônent les notes de Cybèle, à la vue de toutes. Les Banshees n'ont guère le culte du secret, s'effarouchent à l'idée de dissimuler quelque vérité à une sœur. L'hégémonie de Cybèle est une illusion, une feinte pour se plier aux coutumes des grandes cités. Jamais sa voix ne portera plus haut qu'une autre. Ainsi, aucune lettre écrite à l'encre d'une plume ne perturbe sa suivante.

Aucune… sauf une.
Un petit « L. » griffonné en face de l'heure du rendez-vous. Jessamy a beau se retourner la tête, plisser les yeux, comparer avec d'autres notes de sa mentor, elle n'arrive pas à y voir plus clair. Enfin. Si cette personne a fait mystère de son identité, il n'y a plus qu'à attendre pour la découvrir.

Sa griffe tapotant le bois verni, elle reporte son attention sur la porte du bureau de Cybèle.
Bientôt, leur hôte devrait se montrer.
Mar 6 Aoû - 13:51

Jamais Lillie ne s'était rendue elle-même au siège de la Guilde des Messagers. Par souci de discrétion, elle y envoyait le plus souvent des lieutenants de confiance, ou déléguait les tâches les plus simples à ses gamins des rues, Flaco en tête. Mais l'heure était trop grave, le temps trop orageux et les enjeux trop grands pour risquer cette fois-ci d'envoyer un émissaire. Aussi la Générale avait-elle assuré sa présence. Elle avait évidemment pris soin de ne communiquer que le sobriquet qui lui tenait compagnie depuis longtemps déjà, et, fidèle à ses inquiétudes, elle s'y présenta sous les traits fins d'une enfant de huit ans. Ses longues mèches violacées dansaient comme des éclairs sur sa tête hirsute, et ses petits yeux verts scrutaient le bâtiment avec une attention qu'on ne retrouve que rarement chez les enfants.

Bien qu'elle faisait plus rarement parler d'elle que ses consœurs, la Guilde des Messagers tenait à Xandrie un rôle de premier ordre. Les informations que pouvaient glaner les espions, entre autres, n'avaient que peu de valeurs si elles ne pouvaient voyager. Et comme les ragots, les idéologies ont elles aussi besoin de voler. Immobiles, elles ne sont qu'un tourment pour celui ou celle qui les nourrit. La Révolution savait écrire, oui, mais savait elle communiquer ? Pour l'heure, le mouvement ne parlait qu'aux opprimés, aux assoiffés, aux affamés, à ceux que le régime avait presque poussé dans les bras du changement. Mais pour hisser haut le drapeau rouge de la colère, il fallait maintenant s'adresser à tous, convaincre et plus effrayer. Lillie avait longtemps joué de cette aura maléfique dont ils jouissaient, elles et son mouvement. C'était un plus pour recruter, garder à distance ses adversaires et faire peser sur le Roi une menace qui, si elle n'était pas tangible, avait pour elle sa constance. Mais il était temps pour la Révolution d'abandonner son costume de grand méchant yeark, et de le troquer pour ses plus beaux atours. La Révolution était Juste, la Juste avait besoin de la Révolution.

La bouille rondelette de la jeune Générale tranchait avec le sérieux de la pièce dans laquelle elle venait de pénétrer. Tout était trop sérieux pour accueillir une si belle enfant. Elle s'avança pourtant de quelques pas, toussota pour annoncer sa présence.

- Bonjour, commença-t-elle de sa petite voix melliflue. Je crois que ma venue a été annoncée.. ? Elle leva la main gauche et fit un 'L' avec son index et son pouce.

L'émeraude de ses yeux fixa la si étrange silhouette qui lui faisait face. Xandrie renfermait décidément bien des mystères.

- Dois-je me présenter ? J'ai peur de ne pas pouvoir le faire convenablement. J'ai - pour un temps encore - une identité à protéger. Mais j'entends bien, avec votre concours, libérer les âmes enfermées, et permettre aux noms de se dévoiler pour de bon.
Lun 23 Sep - 15:12
Ses yeux se plissent devant l'apparition, peinant à contenir la surprise qui s'y est ancrée à l'instant même où elle a pénétré dans le bureau.

Une enfant.
Elle semble à peine avoir parachevé sa première décade. Des traits doux, encore trop peu marqués par le passage des années, et pourtant ancrés dans un sérieux inhabituel. Même les mômes qui ont trop vécu n'ont pas ce regard, se dit-elle. Ils n'ont pas non plus cette prestance qui se dégage de leur petit corps.
Et ils n'ont pas, non plus, le privilège d'une entrevue privée avec la cheffe des Messagers.

« L. » aussi semble surprise par la monstresse qui l'attend, tranquillement nichée entre des coussins.

Les mains griffues de Jessamy se joignent sous son menton. Ses plumes se dressent légèrement sur son crâne tandis qu'elle ne perd aucune syllabe prononcée par la bouche puérile. Ses prunelles rougeoyantes la détaillent derrière les cils blancs. Oh non. Ce n'est pas une enfant comme les autres —elle ne serait pas étonnée que cette plastique ne soit que façade. Elle lui sourit légèrement, dévoilant quelque peu l'émail acéré. Rictus du croquemitaine, caché dans un placard ou sous le lit — jamais à vue, pour mieux distiller la peur sous les draps. À Xandrie, rares sont ceux qui n'usent pas d'un pseudonyme pour mieux ramper entre les pierres — La Blanche ne fera pas exception. Elle connaît en particulier deux catégories de personnes qui se cachent derrière un sobriquet : les malfrats de toute facture et… les révolutionnaires. Celle-ci doit appartenir aux seconds, la liberté au creux des mots, la délivrance pour seul ancrage.

Elle pensera à remercier Cybèle lorsqu'elle rentrera. Par deux fois : l'une pour avoir rompu cette prétendue neutralité qui ne profite qu'aux nantis, et l'autre pour lui avoir permis de rencontrer la fine fleur des Révolutionnaires. La vieille banshee n'aurait pas perdu son temps avec un gamin des rues. « L. » doit être tout proche de l'état-major.

Sa voix grince dans la pièce, grésille, entre l'insecte et la sorcière.

« Merci d'être venue. Cela ne me dérange pas de continuer à vous appeler L. Notre maison attache beaucoup d'importance à la confidentialité. Je vous en prie, asseyez-vous. », glisse-t-elle.

Son nom finira bien par tomber — tout comme les têtes couronnées. Jessamy dénoue ses doigts et s'enfonce un peu plus dans son dossier molletonné.

« Je m'appelle Jessamy. Vous vous attendiez sans doute à voir Cybèle, mais elle est en déplacement et m'a délégué ce rendez-vous. Sachez que son poste est une façade : ici, nous sommes toutes à égalité, et vous pouvez donc nous parler librement. Vous voulez boire quelque chose ? », fait-elle.

Les paumes à plat sur les genoux, la mutante ausculte l'expression de L. Lever un peu le voile sur le fonctionnement d'un essaim la détendra peut-être quelque peu : ici, elle saura qu'elle trouvera une oreille attentive, parmi celles qui refusent la hiérarchie. Encore faut-il lui prouver qu'elle ne veut pas d'une autre tyrannie.
Sam 26 Oct - 10:57

- Enchantée, Jessamy. Le regard de Lillie se veut souriant. Il y a quelque chose de stupéfiant à voir une gamine parler avec l'aplomb d'une chef d'État à une mutante. Mais Xandrie n'est qu'une superposition de moments stupéfiants. Nos organisations ont un grand point commun, dans ce cas ! Dit-elle pour confirmer son appartenance aux bien trop célèbres révolutionnaires. Elle secoua simplement la tête pour lui signifier qu'elle ne boirait rien. Habitude avait été prise depuis quelques années déjà de ne jamais boire aucun verre qu'elle n'avait pas rempli elle-même. Elle savait que sa couverture n'était pas infaillible, et elle ne doutait pas de la perfidie du Roi. Deviner qui il pouvait bien avoir dans sa poche était son travail du moment.

À dire vrai, Lillie n'avait pas spécifiquement demandé à rencontrer Cybèle. Elle savait le fonctionnement des Messagers pour le moins particulier, et elle ne doutait pas que ses paroles seraient rapportées mot pour mot aux oreilles de tous les membres de la Guilde. Voilà pourquoi elle devait les choisir avec encore plus de précaution qu'à son habitude. Elle se redressa un rien, passa une main dans ses cheveux et regarda le dossier déposé sur le bureau. L'écritoire sentait le cuir neuf. Elle avait toujours rêvé de pouvoir écrire sur ces tapis presque solide, dans lesquels les plumes s'enfonçaient un peu pour mieux écrire. Un bonheur qu'elle ne pouvait qu'imaginer, quand elle griffonnait ses notes sur un mur ou une planche de bois vermoulu.

- Je ne doute pas que le message vous soit déjà parvenu, mais il me semblait préférable de vous le délivrer en personne. L'Histoire avance, doucement, mais sûrement. Bientôt, elle prendra un virage radical. Plus rien ne peut l'empêcher désormais. Il peut cependant encore être un rien accéléré, soutenu. Par le concours du peuple de Xandrie est des organisation qui le fédèrent. Elle marqua une pause, comme pour jauger des réactions de Jessamy. Elle n'avait pas le talent d'Elsbeth pour les discours, mais elle avait pour elle le sang-froid et une profonde conviction. Elles sont déjà plusieurs à nous avoir confirmé leurs intentions de nous aider. Les mineurs, notamment, ont déjà la main sur une mine de Myste autrefois opalienne. Ils rêvent d'une Xandrie libre, autonome, s'épanouissant loin du joug des nations voisines. Mais Xandrie est grande, et je ne peux seule parler assez fort pour toucher toute sa population.

Le concours des Messagers était indispensable pour fédérer la population et organiser son passage à l'acte. Seule, la Révolution faisait encore trop peur à une frange de la population pour espérer un soulèvement global. Toute l'exécution du plan de Lillie dépendait de la capacité de la Révolution à s'effacer au profit du peuple au bon moment. Elle ne devait être que le petit coup au bord du précipice. La gravité s'occuperait du reste.

- Nous avons besoin de tracts, de pamphlets, de tout ce que nous pourrions distribuer pour parler au plus grand nombre. Quand à ce que nous pouvons vous offrir en retour... Vous avez déjà ma vie entre vos mains. Je ne suis pas armée, et je n'ai aucun moyen de m'enfuir d'ici sans votre permission. Vous avez le loisir de me faire arrêter sur le champ et de me faire conduire au Roi. Elle pensait chaque mot de ce qu'elle disait. Elle les pensait d'autant plus qu'elle savait que la possibilité existait que les Messagers soient encore fidèles au Roi. Une possibilité renforcée par le malaise qu'elle ressentait face à une mutante pour le moins impressionnante. Le reste des garanties, c'est le peuple qui vous les offrira, une fois que lui aura été offert la possibilité de décider lui-même qui le gouvernera. Qui sait, peut-être sera-t-il bien inspiré de s'organiser à la manière des Messagers. Pour garantir l'égalité... Et sa liberté.