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Ab irato - Elsbeth

Ab irato - Elsbeth Brandw10
Jeu 29 Sep - 9:26

Elsbeth Adalheidis van Aerssen

Xandrie / Dirigeant

26 ans / 11 Themiatis 1874
Zoanthrope / Femme
Opale
Désintéressée / Elle
Princesse en cavale
Irelia de League of Legends

Description

Elle tient de sa mère. Si ses origines xandriennes sont à peine voilées, dessinées à travers les traits de son visage et sa taille légèrement plus petite que celle d'une opaline moyenne, Elsbeth est pourtant le portrait craché de sa génitrice et semble même en être fière. Véritable modèle de femme forte au caractère bien trempé, Katharina van Aerssen était son héroïne et elle l'est toujours, même si son décès remonte à une dizaine d'années. Dix ans que la princesse est livrée à elle-même, bien au courant de son statut de bâtarde, mais aussi de fille unique du Roi Dynaste, dont il n'a jamais démenti l'existence. Elle ne le considère pas comme un père, à peine plus qu'un vulgaire inconnu, et pourtant c'est là aussi l'une des personnes qui ont le plus influencé son existence. Malgré elle, dira-t-on. Elsbeth n'a jamais voulu être de sang royal : loin d'être délicate, clairement pas docile ni attentionnée, elle a toujours pris pour exemple les guerriers valeureux et les explorateurs les plus célèbres. Petite, elle voyait grand : elle serait aventurière, ferait de grandes découvertes, montrerait à tous qu'elle n'est pas juste une sang-mêlé. Ses objectifs ont bien changé depuis mais pas sa détermination.

Belle tout de même, car il faut bien l'avouer, Elsbeth n'aime pas qu'on le lui rappelle pour autant. Ses charmes sont toujours camouflés, ses formes aplaties au maximum par les tenues qu'elle porte et qui n'ont rien de sensuel. Passant de tuniques aux armures, elle cherche à donner l'impression d'être une femme à la poigne de fer et ce n'est pas pour rien d'ailleurs si on la surnomme la Dame d'Épée. Un prérequis pour la Révolution en vérité, car elle n'est pas non plus insensible, mais aime à penser qu'on le croit. Comme le mouvement rebelle, elle prétend ployer mais jamais briser et montre le moins de failles possibles pour convaincre de sa légitimité à renverser le pouvoir. Svelte et athlétique, c'est une femme qui prend tout de même soin d'elle et ne trace pas un trait sur sa féminité pour autant ; simplement que celle-ci n'est pas exubérante, comme c'est le cas pour les demoiselles de la cour.

Sa vie lui a fait connaître la misère et la discrimination : à Opale, elle et sa mère ont été traînées dans la boue jusqu'à la mort de cette-dernière et seul son départ de cette ville maudite a pu lui permettre de retrouver confiance en l'espèce humaine. Elle a su trouver en Xandrie son âme-soeur et chérit tous ses habitants et l'espoir qu'ils voient à travers elle ; sans cela, peut-être aurait-elle réellement perdu son humanité. Le Royaume l'a sauvée au moins autant qu'elle s'essaye à le libérer et depuis elle s'échine jour et nuit dans le seul but d'y parvenir. De briser les chaînes de son gouvernement corrompu et de l'esclavagisme moderne imposé par sa cité de naissance.

Ahem. Revenons en à son apparence. Elsbeth ne s'affiche que rarement dans les rues de la Capitale, du moins sans être couverte de la tête aux pieds, à peine reconnaissable. Passée maître dans l'art du déguisement et bénéficiant d'un pouvoir racial pratique pour passer inaperçue, elle a la réputation d'être véritablement insaisissable. Il lui arrive d'ailleurs, après une transformation, d'avoir des tics de félin qui demeurent et elle déteste quand on le lui fait remarquer ou quand on l'observe comme une bête de foire. Après tout, il s'agit d'un autre élément sur lequel on l'a beaucoup dénigrée durant son enfance... mais aussi de quelque chose dont sa mère semblait étrangement fière. « Tu es mon petit chat et je t'aime comme tu es, » cette phrase, ce moment, resteront à jamais gravés dans son esprit et ont été pendant longtemps le souvenir auquel elle se rattachait pour ne pas perdre la foi.

Elle ne met pas de parfum, estimant que son hygiène suffit ; petite, elle a beaucoup trop été confrontée aux odeurs écoeurantes des aristocrates qui camouflent leur puanteur par ce genre d'artifices. Sa démarche est ordinaire et elle ne se donnera jamais en spectacle en se comportant comme une « poulette » pour le bon plaisir de ces messieurs. Dans ses rangs, tous les hommes la respectent comme il se doit et si l'un d'entre eux fait l'erreur de la considérer comme un vulgaire bout de viande ne serait-ce qu'une fois, elle sait comment lui passer l'envie de recommencer. Féministe convaincue, évidemment, elle a rapidement compris qu'il était nécessaire de faire de sa lutte un combat contre l'oppression paternaliste, sans toutefois prôner une déchirure entre les genres. Elle est persuadée qu'il est possible d'avoir une société où les hommes et les femmes sont égaux, sans tomber dans la violence gratuite ou la discrimination. Deux choses qui ont marqué son passé et qu'elle déteste particulièrement.

Habiletés et pouvoirs

Change-peau. Née avec cette particularité, ce qu'elle nomme aujourd'hui sa « carte maîtresse » est longtemps restée une gêne, un handicap aux yeux de Beth. Il faut dire que c'est en partie à cause de cela que son nom a été couvert d'opprobre, que sa mère a dû fuir le pays et qu'elles ont toutes les deux vécu dans la misère durant son enfance. Pas une grande joie non. Mais lorsque la jeune fille a dû être livrée à elle-même, sans plus personne sur qui compter, elle a compris que ce petit atout pouvait s'avérer particulièrement utile. Pour voler d'abord... puis pour passer inaperçue, sorte de gros chat furtif et agile. Un Lynx. C'est ainsi qu'elle apparaît aux yeux des autres mais dans son regard à elle tout change. Évidemment sous cette forme sa perception évolue, mais aussi sa façon de voir les humains : plus que jamais imparfaits, fiers et orgueilleux autant qu'étrangement sensibles et compatissants.

Des fois, se mettre dans sa peau animale l'aide à prendre du recul, à connaître réellement ceux qui l'entourent. C'est son petit rituel pour s'assurer de la légitimité de quelqu'un, parfois de sa loyauté. Elsbeth est tout le temps sur ses gardes, comme un félin, comme le lynx qu'elle est et ce n'est pas sa foi renouvelée en l'espèce humaine qui va l'empêcher de s'y prendre à deux fois avant de faire confiance à un individu. Pas bien imposante sous ses traits de félidé, elle compense par des crocs parfaitement aiguisés et des griffes qu'il vaut mieux ne pas sentir sur sa chair. Sous cette forme, elle a déjà tué et n'hésitera pas à le refaire, même si le sang frais est loin de constituer une douce ambroisie pour ses papilles. Enfin, c'est aussi et surtout une boule de poils sacrément véloce, bien plus légère et vive qu'en étant une vulgaire humaine.

Un aveu qu'elle ne fera jamais à quiconque, c'est qu'elle laisse volontiers les enfants des rues la caresser ou jouer avec elle. Car ces bambins lui rappellent son passé et qu'elle sait à quel point une note de douceur ponctuelle peut potentiellement les aider à tenir bon et ne pas lâche prise, ne pas devenir plus tard des individus odieux comme les adultes qui les entourent. Elle a même été adoptée par un petit gang sur qui elle veille précieusement, qu'elle soit un lynx ou non.

Biographie

« - Une immondice, voilà ce qu'elle est, » tonna le Roi Dynaste en se présentant à la couche de son amante, avant de partir telle une tempête en direction de la porte. Celle-ci claqua, sans qu'il daigne jeter un seul autre regard à sa fille ; jamais un de plus que ce premier coup d’œil furtif et dégouté. Heureusement, sa mère ne la considérait pas de la même façon.

Les murs du palais étaient épais et pourtant il ne fallait pas s'étonner qu'ils possèdent des oreilles. La nouvelle fit rapidement le tour des nobles y résidant. C'était probablement cela qui irritait Huan le plus : qu'il puisse être la risée de tous. Son égo n'était pas prêt pour ce genre de révélations qui, déjà à l'époque, s'avéraient partiellement vraies... La naissance de la petite s'était pourtant faite sans trop de complications et le médecin l'avait déclarée en pleine forme. Non, c'était son allure qui laissait comprendre qu'elle n'était pas comme tous les nourrissons humains, qu'elle avait cette petite chose en plus. C'était une Zoanthrope : ses oreilles duveteuses pointaient telles celles d'un chat et son nez s'étirait en un court museau ; à la place de mains, elle avait des pattes. Les signes précurseurs d'une condition qui la suivrait toute sa vie.

« - D'ici quelques jours, cela devrait se résorber. Toutefois, il faut vous attendre à ce qu'elle ne maîtrise pas complètement sa transformation avant sa puberté. »

L'homme rangeait ses outils sans se soucier de ce dont pouvait en penser la mère. La jeune femme, elle, ne l'écoutait que d'un oreille et n'avait d'yeux que pour son chérubin, lové dans ses bras, qu'elle caressait du bout du doigt. Ses iris émeraude la drapaient d'une douceur qui laissa le médecin pantois quelques secondes, lorsqu'il dévia son regard pour dévisager son interlocutrice. Il était bien trop habitué à ce que ce genre de naissances soit un évènement tragique pour les deux parents et que l'enfant ait l'air, dès lors, condamné à mourir noyé ou le crâne brisé quelques jours plus tard. Il aurait su dire à cet instant que Katarina donnerait tout pour sa petite fille.

Alors il quitta la pièce, un léger sourire aux lèvres.

-

Elle dévalait les escaliers, passant dans les couloirs étroits, fuyant l'ombre chasseresse comme si sa vie en dépendait. Mais ce n'était pas sa vie mais bien celle de sa fille, entre ses bras, encore dans ses langes. Il fallait partir d'ici, du pays entier même, car la Guilde des Assassins était partout. N'avait-elle donc jamais été démantelée ? Officiellement, mais pour le Roi Dynaste, pour ses ministres, elle était toujours là. Des assassins royaux face à la menace d'un enfant unique, d'un roi qui n'aura donné son amour qu'une fois. Comment avait-elle pu croire que cet homme était bon ?

À peine habillée, sans affaires, sans argent, Katharina émergea dans la cour du château, dans un chemin sinuant entre les hautes haies. Il faisait nuit, Xandrie somnolait mais ses habitants étaient loin de dormir à poings fermés. Elle savait où trouver un allié, quelqu'un qui l'aiderait à sortir de cette mauvaise passe. Qui trouverait un moyen de la faire disparaître... Le Commissaire. L'homme veillait toujours à des heures tardives dans son bureau et la diplomate et lui avaient échangé plus d'une fois. C'était un individu malin qui était probablement déjà au courant de la naissance du poupon royal ; il avait scrupuleusement gardé un œil sur la grossesse de l'ambassadrice opaline. Et voilà longtemps qu'il l'avait mise en garde sur la véritable nature de son amant.

Comme elle pouvait s'y attendre, il était à leur lieu de rendez-vous habituel : une maison inhabitée servant jadis de lieu de base d'opération au Guet pour la traque de trafiquants locaux. Voilà plus d'une décennie que le quartier avait été purgé et que les criminels l'avaient fui, mais l'habitation était malgré tout restée déserte.

Il l'attendait dans ce qui semblait être la cuisine, posément accoudé à la table, une lampe à huile jetant de temps à autres des reflets lumineux sur les vitres salles donnant sur l'extérieur ; son signal.

« - Ils ont commencé à agir ?

- Oui. Ils sont à nos trousses. Vos craintes étaient bel et bien fondées...

- Je n'ai jamais autant détesté avoir raison. Venez, » aboya-t-il, se relevant pour ouvrir une malle à proximité et y dénicher une couverture épaisse qu'il enroba prestement autour du corps de sa protégée avant de glisser son bras autour d'elle pour l'emmener dans une autre pièce. Son œil détailla au passage le petit visage au museau de félin dont rien ne semblait pouvoir perturber le profond sommeil.

Suivant un parcours que Katharina n'aurait jamais pu recomposer, le duo s'enfonça davantage dans les ténèbres de la ville, empruntant d'autres chemins secrets jusqu'à arriver sur les quais. L'Argenté filait à toutes vitesses dans cette période de l'année : avec la fonte des neiges, les eaux glacées gonflaient le courant et faisaient déborder le lac Xandrie. Le fleuve était impraticable... personne ne penserait qu'ils auraient emprunté ce moyen pour s'échapper.

« - Vous êtes sûr de votre coup ?

- À mille pourcents, » répondit le Commissaire en descendant les marches étroites, serrant contre lui la diplomate. En contrebas, une embarcation plutôt solide attendait avec à son bord un homme à la musculature bien développée. « Voici Tang, il vous amènera jusqu'à Oman. À partir de là, vous chercherez la Saline, une péniche transportant des marchandises en direction d'Opale. Faites bon voyage Madame van Aerssen et prenez soin de la petite. »

Sans plus d’ambages, elle s'engouffra dans l'unique cabine du petit vaisseau. Alors que celui-ci se détachait de la rive, elle pouvait voir la lueur brillant dans les yeux du vieil homme. Une lueur d'espoir pour les générations futures.

-

Huit ans. Elle courait dans les rues d'Opale comme un vrai chat de gouttière. Sa tenue avait été rapiécée une dizaine de fois et elle ne semblait pas s'inquiéter de devoir la trouer une fois de plus. Son apparence ? Le moins que l'on puisse dire, c'est que ce n'était pas sa priorité. Mais elle n'était pas sale pour autant, sauf lorsqu'elle revenait à la maison couverte de boue. La maison, c'était ce petit logement minuscule dans lequel sa mère et elle vivaient, à l'abri du pouvoir, à l'abri des regards. Même les vagabonds les considéraient parfois comme des souillons et personne ne faisait attention à elles. Elsbeth, elle, continuait à s'émerveiller de sa vie d'enfant des rues, se bagarrant et s'inventant des batailles épiques, des guerres. Elle effrayait la plupart des garçons et certains l'appelaient la « Sorcière » ou la « Bête » à cause de sa nature de Zoan. Ces mots doux à son égard ne lui faisaient rien, elle s'était habituée, et elle pouvait toujours se défendre.

Elle n'avait pas d'amis. Déjà car c'était une fille et que la plupart des filles doivent être coquettes et ne jamais se montrer brutales en toutes circonstances. Les plus riches avaient la chance d'habiter dans des manoirs, dans des palais, et les plus pauvres devaient attendre la floraison pour trouver une utilité. Il y avait évidemment des justes milieux, mais malheureusement pour elle, Beth était plus proche d'une vendeuse d'allumettes que d'une future fille des forges ou bien des champs... Elle n'était évidemment pas en âge de peser ces considérations, mais elle savait que les garçons étaient dégoûtants et bêtes, qu'elle n'avait pas envie de les toucher et encore moins de les embrasser. Berk. Au lieu de cela, elle les rétamait en public et se faisait passer pour le cancre du coin. Et malgré les protestations des pères indignés de voir leurs fils ridiculisés de la sorte, elle faisait la fierté de sa mère.

« - Combien en as-tu vaincu cette fois ?

- Trois ! » siffla la petite, montrant volontiers sa dentition imparfaite et pointant du doigt la blessure sur son arcade sourcilière. Affichant une moue de surprise, Katharina chercha dans une boîte de quoi nettoyer sa plaie, puis vint apposer un coton imbibé d'alcool, la faisant ainsi frissonner.

Elsbeth attendait toujours que sa mère soit revenue du travail pour revenir à la maison. Elle ne voulait pas la déranger pendant qu'elle traitait avec ses clients et s'ennuyait ferme si elle restait seule, cloitrée dans leur petit appartement. Car il ne s'agissait pas réellement d'une maison non, mais plutôt d'une petite pièce équipée située dans le sous-sol d'un vieil immeuble. Le confort était à des années lumières de ce que sa mère avait soi-disant connu dans sa jeunesse. Elle aussi, un jour, avait vécu dans des châteaux et côtoyé des gens importants, des puissants. Et pourtant elle se plaisait davantage désormais, avec sa fille et dans une misère palpable, qu'à feindre le bonheur dans un monde de requins. La seule ombre au tableau était son nouveau métier.

La petite ne comprenait pas pourquoi sa mère, son modèle, ne pouvait pas trouver mieux ; elle qui était si forte, si intelligente, si maligne. Dans ses histoires, elle faisait sans le vouloir étalage de ses connaissances. Peut-être avait-elle besoin de se rassurer, de montrer à au moins une personne pouvant la croire, pouvant se soucier, qu'elle n'était pas juste un corps aux formes voluptueuses.

« - Maman, j'aimerais que l'on parte un jour. Que l'on aille visiter le monde et que l'on fasse comme les explorateurs dans tes histoires !

- On ira. C'est promis. Mais d'abord il faut que tu te laves. Tu empestes comme un cochon. »

De l'index, Katharina tapota le nez de la bambine avant d'aller lui préparer un bain. Le logement était peut-être rudimentaire, mais ce n'était pas une raison pour être crasseuse. Avec le temps, Beth s'était mise à remarquer que tout le monde ne respectait pas les principes élémentaires d'hygiène comme sa mère et elle. Même parmi les bourgeois du quartier, la plupart cachaient leur saleté derrière des doses extravagantes de parfum hors de prix. Et à la fin de la journée, la petite avait pris l'habitude de sentir ses draps fraichement lavés entre ses doigts, leur odeur mêlée à celle du savon sur sa peau.

-

Avec les années, Elsbeth comprit. Les zones d'ombres devenaient de moins en moins opaques dans les histoires que lui contait sa mère. Les idées se reliaient entre elles et elle comprenait à présent que leur situation n'était pas liée à une faillite ou à un coup du sort, non. Pendant toutes ces années, sa mère avait enduré tant de sévices simplement pour l'élever seule, pour qu'elles puisses rester cachées. Plus cela allait et plus l'adolescente se montrait délétère, capricieuse et parfois rebelle avec sa propre mère ; celle-ci ne mettait jamais sa douceur de côté et ne levait jamais le ton, mais ses mots pouvaient faire l'effet de balles de fusil. Car elle savait où taper pour faire mal. Car c'était la femme de sa vie, la seule personne avec qui elle ressentait une connexion aussi puissante.

En grandissant, le lynx avait fini par s'enticher d'amis des tréfonds qui, comme elle, n'avaient pas le choix de traîner dans la rue. Sa rivalité avec les garçons s'était peu à peu calmée en même temps que la curiosité l'amenait à vouloir les connaître. Elle avait fini par former un petit groupe d'enfants perdus, de filles et fils de prostituées et d'orphelins. Et elle en faisait partie, comprenant à présent que sa mère vendait ses charmes pour mettre du pain sur la table. Si radieuse restait-elle en présence de sa fille, sa beauté s'était pourtant fanée en même temps que sa joie de vivre. Elle l'avait observée attendre ses clients, elle avait vu son visage décimé par la tristesse. Elle savait.

Tout le monde n'avait pas la chance d'avoir une mère aussi dévouée que Katharina et si d'autres enfants pouvaient compatir avec la situation dans laquelle se trouvait Beth, la plupart étaient envieux. Eux étaient battus par leurs parents sinon pire. Finalement, la barrière des mœurs entre un adulte et un enfant pouvait malheureusement s'avérer très fine, des fois.

« - Je vais changer ça. Je vais trouver un moyen de faire cesser ces horreurs, un jour. »

Il faisait de plus en plus de sens que sa mère l'avait sauvée d'un mal inconnu durant sa prime enfance et elle voulait lui rendre la pareille. Elle ne pouvait supporter de voir son masque de tendresse, de douceur, lorsqu'au fond d'elle il n'en restait, en vérité, rien. Et la colère grondait dans la poitrine de la fillette, persuadée d'être le dindon de la farce. Plus cela allait et plus elle se montrait dure avec celle qui était autrefois son modèle de vertu. Bientôt, elle aurait aussi des raisons de maudire son comportement.

Katharina tomba malade. Une maladie probablement due à son activité et qui la cloua au lit pendant des jours, puis des semaines. Elsbeth comprit que c'était à son tour de donner du sien, si elle souhaitait que sa mère aille mieux. Sous sa forme animale, elle commença à dérober de quoi manger sur les étals, lorsqu'elle ne pouvait soutirer des pièces aux passants. Ce qui ne suffisait malheureusement pas. Elle s'en voulait alors, persuadée que c'était de sa faute, persuadée que tous les sacrifices étaient bons pour se racheter. Quitte à donner de son corps elle aussi, comme sa mère avant elle, comme c'était vraisemblablement la tradition pour ceux de leur « espèce » et le seul moyen de sauver sa famille. Ou ce qu'il en restait.

Tandis qu'elle avait ces pensées lugubres, au chevet de sa mère, elle sentit celle-ci remuer et une main faiblarde se poser sur son bras :

« - Non !

- Mère...

- Tu ne le feras pas, Beth ! Promets-moi que tu ne le feras pas... Je ne veux pas que tu le fasses... »

Dans un triste état, la peau sur les os et le teint jaunâtre, transpirant à grosses gouttes, Katharina alternait entre inconscience et délires. Mais son sixième sens l'avait réveillée, comme si elle lisait dans les pensées de sa fille, comme si elle devinait ses intentions. Peut-être était-ce une coïncidence, mais elle était suffisamment réveillée pour demander à l'adolescente de l'aider à se redresser, de sorte à ce qu'elle puisse admirer l'intégralité de la pièce. Il faisait sombre et la nuit commençait à tomber, pourtant elle semblait connaître par cœur l'emplacement de cette chose qui se trouvait dans la pénombre et qu'elle détaillait de ses yeux fiévreux.

« - Apporte-le moi.

- Quoi donc ?

- Le carnet... derrière la coiffeuse. »

S"exécutant, Beth, qui commençait à suspecter que sa mère lui ait caché encore bien des choses, déplaça le meuble pour découvrir ce qu'il pouvait bien dissimuler. Dans un trou du mur, derrière, se trouvaient des effets personnels entretenus avec grand soin et datant d'une autre époque, d'une autre culture, parmi lesquels un livre et un document parcheminé. Vraisemblablement l'acte de naissance de l'adolescente, même si les noms ne coïncidaient pas. Se promettant de s'y intéresser plus tard, elle revint en direction du lit avec le carnet déniché, son cœur sombrant dans sa poitrine alors qu'elle ouvrait la première page.

« - Qu'est-ce que c'est ?

- Ton histoire... Notre histoire. Tu es bien plus précieuse que tu ne peux l'imaginer. »

Elle eut une pensée fugace pour le nom figurant sur la feuille. Celui-ci ne lui disait rien, pourtant elle avait fini par apprendre à reconnaître les personnalités importantes d'Opale. Les autres affaires de sa mère ne semblaient pas originaires de la ville, ce qui devait donc être le nom de son père pouvait aussi être celui d'un personnage important d'une autre cité... Prenant son courage à deux mains, elle cessa de tergiverser et commença sa lecture, sous l’œil attentif de Katharina. Par chance, celle-ci s'était occupée de sa propre éducation et lui avait appris à lire et écrire dès son plus jeune âge. Au début, elle n'hésitait pas à compléter le récit avec des anecdotes et des explications, puis sa voix se transforma en une murmure et Beth, absorbée par le récit de sa naissance, crut simplement qu'elle s'était endormie. Arrivée à la dernière page, le soleil commençait à se lever et son crâne semblait sur le point d'éclater. Les larmes avaient laissé des traces sur ses joues.

C'est alors qu'elle remarqua que Katharina n'était pas juste paisiblement tombée de sommeil. Les yeux fermés, les mains croisées sur sa poitrine, elle avait rendu son dernier soupir.

-

Une fois n'est pas coutume, les années passèrent. La mort de Katharina resta longtemps un sujet sensible pour Elsbeth qui mit du temps à comprendre son entière signification. Aujourd'hui, elle a fini par accepter son sacrifice, preuve d'à quel point sa mère était dévouée, à quel point elle l'aimait. C'est une de ses forces, une de ses raisons de continuer. Un des motifs qui la poussèrent à partir rapidement de cette ville morbide pour revenir dans le giron de sa terre natale. Au diable les assassins à sa recherche, elle avait fini de se dissimuler, fini de fuir. Ses rêves d'exploration et de découvertes avaient été remplacés par un autre, plus réel, plus proche : celui de faire du sacrifice de sa mère un nouveau souffle pour elle comme pour sa patrie. Tout semblait évident, c'était comme si elle s'y était toujours préparée.

Elle resta ainsi une année de plus à Opale, le temps de faire le deuil de Katharina et de préparer son voyage. Puis, balluchon sur l'épaule, elle fit ses adieux à la Cité aux Mille Lumières et s'enfonça dans les terres sauvages. Plusieurs mois s'écoulèrent avant qu'elle n'atteigne les portes de Xandrie. Elle n'eut toutefois aucun mal à s'y installer ni à y développer une activité, intégrant la Guilde des Chasseurs dans le but de passer inaperçue. Ici, les Zoans pullulaient, au même titre que nombres de races qu'elle n'avait encore jamais vues. Les Banshees la fascinaient autant que les Golems l'inspiraient ; elle ne put se retenir de tomber amoureuse de cette ville piégée dans un mouvement constant, sorte de grande fourmilière ou chacun se cherche une place. Mais son objectif n'était pas de faire du surplace pour autant.

Lentement, discrètement, elle commença à s'entourer de personnes qui, comme elle, avaient des comptes à régler avec le gouvernement. Plus d'une fois elle fût témoin direct ou indirect de crimes commis par des nobles se pensant protégés par le Roi Dynaste. Plus d'une fois, elle constata les injustices, bien plus grandes qu'à Opale. Et un jour elle décida d'agir. Ce fût le jour où, pour la première fois depuis longtemps, le roi de Xandrie se sentit menacé. Car sur la Grande Place se trouvait un homme, menotté et nu, des lettres peintes sur le torse et le dos. Celles-ci exprimaient le mot « ASSASSIN » ; la veille au soir, une organisation se proclamant être la « Révolution » venait de sauver la vie d'un homme, un imprimeur dont les tracts faisaient de l'ombre au gouvernement. À côté du criminel fait prisonnier se trouvait une jeune femme aux traits sévères, revêtant une armure et pointant une épée vers le ciel. Sous les yeux ébahis de la foule, elle dénonçait les tentatives de répression de plus en plus violentes du gouvernement, ainsi que les mensonges du Roi.

« - Il y a vingt-deux ans, un enfant est né, fruit de l'union du Roi Dynaste et de l'ambassadrice d'Opale, Katharina van Aerssen. Car il s'agissait d'une fille et car celle-ci était une Zoanthrope, Huan Qin Long ordonna qu'on la tue. Il a depuis prétendu que cette fille était morte-née et que sa mère avait péri lors de l'accouchement, mais c'est un mensonge. Cette fille est vivante et elle est revenue ramener la vérité dans ce pays. Je suis Elsbeth van Aerssen, aussi connue sous le nom de Qian Binghao, princesse de Xandrie ! Et tant que je serai là, je veillerai à ce que tous les mensonges soient démentis, que tous les assassinats échouent et que le Roi admette ses torts. Je veillerai à ce que la corruption cesse et que ceux qui l'affichent publiquement, comme la cible de cet assassin, puissent vivre au grand jour. Je veillerai à ce que le pouvoir revienne entre les mains du peuple et que Xandrie puisse prétendre à un véritable gouvernement. Au nom de la Révolution, je veillerai ! »

Pour beaucoup, c'est donc ce jour là que la Révolution naquit. Nombreux furent ceux qui refusèrent de croire au récit d'Elsbeth, mais tel n'était pas son objectif. Car au fur et à mesure, le mouvement prit de l'ampleur et avec lui ses actions, paralysant plus d'une fois le gouvernement, mettant à jour ses plans et déjouant ses machinations. Depuis, le petit groupe d'insurgés est devenu une véritable armée dispersée dans tout le pays, infiltrée dans toutes les strates de la population et commandée par un ingénieux général du nom de Caleb, ainsi que par celle que l'on surnomme à présent la « Dame d'Épée ».

À travers le mouvement, à travers ses membres et à travers ses actions, la volonté de Katharina continue ainsi à vivre et pour Beth le rêve se fait chaque jour plus proche, apportant un nouvel espoir pour Xandrie.
Un « tiens » vaut mieux que deux « tu l'auras »

Pas mal non ? C'est français. Sinon, c'est évidemment et toujours Nours derrière le compte, hihi.



Dernière édition par Elsbeth van Aerssen le Sam 15 Oct - 19:13, édité 16 fois
Jeu 29 Sep - 19:11
La princeeeeeeeeeeeeesse Ab irato - Elsbeth 1f60d
Très hâte de voir la suite, qu'on puisse faire la révolution prolétarienne Ab irato - Elsbeth 1f525 Ab irato - Elsbeth 1f525 Ab irato - Elsbeth 1f525 Ab irato - Elsbeth 1f525
Jeu 29 Sep - 19:36
Mais oui là, quelle torture. Et puis je ne risque pas d'avancer pour Caleb si toi tu ne fais pas la suite !
Plus vite ! *fouet* Ab irato - Elsbeth 1f499
Mer 5 Oct - 23:20
adalheidis est un si beau nom, il ressemble à un de mes préférés
hâte de voir ta révolutionnaire et de son ambition les revers  Ab irato - Elsbeth 2764
Ven 14 Oct - 16:21
Bonjour Elsbeth bienvenue, si tu as des questions ou besoin d'un délai supplémentaire avant que je n'archive ta fiche pour toujours, n'hésite surtout pas à mp Nimrod ou bien @Nours sur le discord.
Dim 16 Oct - 12:39

Sous-titre

Titre

Bienvenue !

Ben hein, va la faire ta révolution hein, qu'est-ce que tu veux que j'en dise moi quoi, Xandrie c'est pas ma came, et puis je suis sûr que tu sauras pas te retenir de vouloir tout casser, d'abord tu provoquais des séismes, ensuite tu trafiquais le Temps, maintenant tu te transformes en une sorte de gros chat ? Y a un pattern là ça devient de plus en plus terrifiant...

L'anecdote des gosses qui caressent un lynx errant dans la rue m'a choqué... Tu vois pas les maladies que ça peut transporter ces bestioles là ? Je suis sûr qu'elle a la rage ou la peste, c'est pour ça qu'elle veut faire la révolution... Parce que franchement à Xandrie... Bah c'est pas si mal... Y a pas lieu de se révolter... Même quand on se fait ostraciser parce qu'on peut se transformer en une sorte de gros chat...

Validoshée ! N'oublie pas d'aller recenser ton vava.

Rang : Dirigeant
Pouvoir / Arme :  Changepeau (lynx)
Affinité : 4 PA
Astra : +200 Astra

La suite logique

Avant d'aller RP, assure toi de bien recenser ton avatar pour que personne ne te le prenne. Si tu ne sais pas avec qui commencer, tu peux toujours faire une recherche de partenaires ou répondre à celles en cours. Accessoirement, tu peux aussi poster ta fiche pour récapituler tes liens, ta chronologie, tes possessions...